contraire, chez les transplantés d’organes,
elles se développent le plus souvent à par-
tir des lymphocytes B du receveur. L’EBV
sous sa forme épisomale est détecté dans
plus de 90 % des lymphoproliférations
(8). Le risque de développer ces lympho-
proliférations est directement lié à l’ab-
sence d’une réponse cellulaire T spécifi-
quement dirigée contre l’EBV. En effet,
en présence d’un défaut de l’immunité
cellulaire, la susceptibilité à développer
une lymphoprolifération EBV est extrê-
mement augmentée.
Adénovirus
Il existe environ cinquante sérotypes
d’adénovirus humains, divisés en six
familles sur la base de leurs caractéris-
tiques immunologiques, moléculaires et
fonctionnelles. Les adénovirus sont des
virus contenant un génome à double brin
d’ADN linéaire d’environ 35 Kb. L’adé-
novirus se lie à un récepteur cellulaire
dont l’identité n’est pas connue, et est
intégré après liaison avec une protéine
secondaire récemment identifiée, le
récepteur de la vitronectine. Ce virus est
intégré dans le lisosome, et le corps
viral ainsi libéré migre dans le noyau, où
la transcription de l’adénovirus peut com-
mencer (9). La plus grande partie de la
population adulte (plus de 45 %) présente
des anticorps sériques contre de nom-
breux sérotypes des adénovirus et déve-
loppe une immunité anti-adénovirus qui
perdure toute la vie (10). Ce virus reste
dans l’organisme sous forme latente. Les
infections induites par l’adénovirus sont
rarement graves chez les enfants et les
adultes sains, mais peuvent être sévères
et compromettre le pronostic vital des
individus immunodéprimés (11). Le rôle
de l’adénovirus dans les infections après
greffe est sous-estimé. L’association
entre infections sévères adénovirales et
immunodéficience de type cellulaire sug-
gère que l’adénovirus est normalement
contrôlé par la réponse immunitaire cel-
lulaire (12). Il n’existe pas à l’heure
actuelle de médicament efficace contre
les infections par adénovirus. Bien que la
réponse immunitaire cellulaire contre
l’adénovirus soit peu connue, il est pos-
sible que les transferts adoptifs d’une
réponse cellulaire puissent contrôler l’in-
fection, chez les sujets immunodéprimés
(13). Actuellement, il est acquis que les
sujets normaux séropositifs développent
une réponse mémoire contre ce virus, et
que les protéines de capside viral peuvent
stimuler la prolifération des cellules
mononucléées périphériques (14).
Les cellules natural killer ne jouent
pas un rôle déterminant dans l’élimina-
tion des cellules humaines infectées
par l’adénovirus. La reconnaissance de
l’antigène capsidique peut amener à la
cytolyse rapide des cellules infectées sans
besoin d’assemblage des virions comme
pour d’autres virus humains à ADN.
Les infections adénovirales se dévelop-
pent chez les enfants au cours des
30 premiers jours qui suivent la greffe, et
de manière plus fréquente que chez
l’adulte. La raison de cette différence est
mal comprise.
Cytomégalovirus (CMV)
L’histoire naturelle de l’infection à CMV
a fait l’objet de nombreuses études. Après
une infection primaire, le sujet immuno-
compétent développe une pathologie
modeste ou subclinique, et le virus rentre
dans une phase latente. Bien que le sujet
sain (CMV séropositif) ne présente aucun
signe d’infection active, la fréquence de
précurseurs cytotoxiques spécifiques pour
le CMV reste très élevée, entre 1/5 000 et
1/20 000 des lymphocytes T du sang péri-
phérique. Cette fréquence persiste tout au
long de la vie, suggérant ainsi que la
réponse T, et plus particulièrement CD8+,
joue un rôle actif dans la protection de
l’hôte vis-à-vis d’une réactivation virale.
Contrairement à l’adénovirus, nous dis-
posons aujourd’hui de différents médica-
ments capables de prévenir et de traiter
cette infection, mais ils présentent de nom-
breux effets néfastes sur la reconstitution
hématologique à partir du greffon médul-
laire transplanté (15),comme la résistance
médicamenteuse qui peut se développer.
Développement des immunothérapies
adoptives
La mise en évidence du contrôle de ces
infections virales par des effecteurs cellu-
laires a incité deux équipes pionnières à
développer des stratégies d’amplification
de ces cellules T in vitro pour les utiliser
spécifiquement dans la période prégreffe.
L’équipe de Greenberg (États-Unis) a mis
au point dans les années 1992-1995 (16)
une technologie qui a le mérite d’avoir
apporté la preuve de l’efficacité du trans-
fert adoptif des lymphocytes T spécifiques
contre un virus. La stratégie utilisée consis-
tait à prélever à l’aide d’une biopsie cuta-
née les fibroblastes du donneur et à les
infecter avec une souche de laboratoire du
CMV-AD169. Une coculture était ensuite
réalisée entre les fibroblastes du donneur
et les lymphocytes CD8+ du sang péri-
phérique après élimination des lympho-
cytes CD4+. Après trois semaines de
coculture, les lymphocytes T CD8 ampli-
fiés étaient capables, dans des tests de cyto-
toxicité in vitro, de tuer d’une façon spé-
cifique une cible autologue infectée par le
CMV (17). Des patients greffés avec une
moelle osseuse T déplétée ont reçu quatre
injections hebdomadaires croissantes de
3,3 à 100 x 107CTL spécifique. Ce proto-
cole a démontré que la survie des cellules
CD8 injectées était conditionnée par la pré-
sence des cellules CD4. En effet, tous les
malades inclus dans ce protocole ont mon-
tré une protection contre l’infection CMV
de durée variable selon la rapidité de déve-
loppement d’une réponse CD4. Aucune
toxicité précoce ou tardive n’a été obser-
vée. Le second essai clinique, pionnier
dans ce domaine, est l’essai développé par
Rooney et Brenner (États-Unis) dans les
années 1994-1998 (18). Leur essai avait
pour but de prévenir la survenue des lym-
phoproliférations B-EBV induites. La pro-
cédure était un peu différente de celle rap-
portée plus haut. Les lymphocytes B du
donneur étaient transformés in vitro en pré-
sence d’une souche de laboratoire d’EBV.
Une coculture était ensuite réalisée entre
les lymphocytes B transformés par l’EBV
et les cellules mononucléées du même don-
neur. Les CTL anti-EBV obtenus ont été
injectés au nombre de 2 x 107CTL/m2aux
patients présentant une PCR-EBV positive,
supérieure au seuil de 3 000 copies du
génome viral pour 150 000 cellules mono-
nucléées du sang périphérique qui avait été
fixé au préalable. Aucun des 39 patients
traités n’a développé de lymphomes
d’EBV et, pour tous, une diminution signi-
ficative de la charge virale a été documen-
tée. Pour deux patients traités au moment
Le Courrier de la Transplantation - Volume I - n o3 - oct.-nov.-déc. 2001
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