D Angiogenèse et cancer de la thyroïde DOSSIER THÉMATIQUE

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DOSSIER THÉMATIQUE
Antiangiogéniques
Angiogenèse
et cancer de la thyroïde
Angiogenesis and thyroid cancer
C. Colichi*, D. Billard**, S. Faivre*, É. Raymond*
D
* Service de cancé­rologie, hôpital
Beaujon, Clichy.
** Service d’hémato-oncologie, centre
hospitalier de Versailles.
urant les dernières décennies, l’incidence du
carcinome de la glande thyroïde a augmenté
de manière significative, devenant la tumeur
la plus fréquente du système endocrinien. La classification histopathologique récente du cancer de
la thyroïde de l’Organisation mondiale de la Santé
(OMS) décrit 5 types majeurs : le carcinome différencié (CDT), comprenant les carcinomes papillaires
(CPT) et folliculaires ; le carcinome peu différencié,
défini par l’évolution non différenciée des carcinomes
papillaires et folliculaires ; le carcinome anaplasique
(CAT) ; le carcinome médullaire (CMT).
Le CDT est de loin le type de tumeur le plus fréquent,
représentant 90 % des cas. Les principales approches
thérapeutiques pour ces types histologiques sont
la résection chirurgicale et le traitement par iode
radioactif (131I). Ces approches permettent un taux
de survie à 10 ans de plus de 90 %, une rémission
complète avec récidive locale pour 60 % des patients
et avec métastases à distance dans 30 % des cas. Le
pronostic global du cancer de la thyroïde est excellent, mais la survie globale chute de façon spectaculaire lorsque le traitement standard échoue. Ainsi,
le taux de survie à 5 ans diminue à moins de 50 %
lorsque le traitement par iode radioactif perd son
activité contre le CDT. Chez les patients résistants
à l’iode radioactif, le taux de réponse à la chimiothérapie par doxorubicine en monothérapie ou en
association avec le cisplatine est inférieur à 20 %,
toutes les réponses étant partielles et de brève durée.
Ces résultats n’ont pas été améliorés par l’utilisation
des taxanes.
Les CAT représentent 2 à 5 % des cancers de la
thyroïde et ont une survie globale à 1 an de 15 %.
L’utilisation d’une chimiothérapie par doxorubicine +
cisplatine, associée à la chirurgie et radiothérapie
cervico-médiastinale, permet un contrôle local
chez plus de la moitié des patients et une survie
596 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 10 - décembre 2010
prolongée à long terme chez 20 % des patients ayant
une maladie localisée. Cependant, cette approche
combinée n’améliore pas la survie des patients avec
métastases à distance.
Le CMT, impliquant la transformation maligne des
cellules parafolliculaires C de la thyroïde, représente
5 à 10 % des cancers de la thyroïde. Il est héréditaire
dans un tiers des cas. Le seul traitement efficace est
la chirurgie lorsque la maladie est localisée, mais
seulement un tiers des formes cliniquement décelables guérissent. En cas de métastases à distance,
la chimiothérapie conventionnelle est peu efficace :
il est donc important de développer de nouveaux
traitements (1).
Carcinogenèse du cancer
de la thyroïde
Les plus importantes anomalies génétiques associées
au développement du cancer de la thyroïde impliquent la voie de signalisation RET/PTC-RAS-RAFMAPK. Le proto-oncogène RET (REarranged during
Transfection) code pour un récepteur membranaire
à activité de tyrosine kinase qui joue un rôle fondamental dans la genèse du cancer de la thyroïde.
Dans les CPT, les réarrangements des récepteurs
membranaires à activité tyrosine kinase RET et RTK
(récepteurs tyrosine kinase), ainsi que les mutations ponctuelles de type B-RAF kinase (aussi écrit
BRAF) sont les anomalies les plus fréquentes. BRAF,
une composante importante de la voie des RTK, est
mutée dans environ 44 % des CPT, et sa mutation
a également été fréquemment associée à l’absence
de sensibilité à l’iode radioactif. La mutation RAS
est présente dans 10 % des cas de CPT. Ces anomalies activent la voie des MAPK (Mitogen-Activated
Protein Kinases), qui est considérée comme la clé du
Points forts
»» Le cancer de la thyroïde a généralement un excellent pronostic. Malheureusement, le manque d’options
thérapeutiques est un problème pour les patients qui développent des métastases et sont résistants à la
thérapie à l’iode radioactif.
»» Durant les 20 dernières années, la compréhension de la biologie moléculaire des cancers de la thyroïde a
progressé, ce qui a permis le développement de nouvelles approches thérapeutiques ciblant l’angiogenèse.
»» L’angiogenèse est le mécanisme permettant la formation de néovaisseaux à partir des structures vasculaires
préexistantes. Les tumeurs de la thyroïde sont très vascularisées et surexpriment les facteurs de croissance
endothéliale vasculaire (VEGF). En outre, il a été démontré que l’inhibition du récepteur au VEGF (VEGFR) bloque
la croissance des tumeurs de la thyroïde dans des modèles de xénogreffe, ce qui fournit une justification solide
pour le ciblage de VEGFR dans cette maladie.
»» Des essais récents avec des antiangiogéniques se sont révélés prometteurs pour les patients atteints de
cancer de la thyroïde métastatique.
développement et de la progression des CP ; elles
sont mutuellement exclusives, ce qui laisse penser
qu’une inhibition de cette voie pourrait être efficace.
Les anomalies génétiques mises en évidence dans les
cancers folliculaires comprennent les translocations
de PAX8-PPARγ et les mutations de RAS (HRAS,
NRAS et KRAS), qui sont présentes dans plus de
40 % des cas.
Les cancers peu différenciés ou anaplasiques se
caractérisent par une mutation du gène p53 (70 %
des cas) et par une activation des voies des MAPK
et de la PI3K (phosphatidyl-inositol-3-kinase)/AKT/
mTOR (mammalian Target Of Rapamycin).
Les mutations germinales activatrices de RET sont
responsables de la survenue de plus de 95 % des
formes héréditaires du CMT, et les mutations somatiques de cet oncogène sont retrouvées dans 50 %
des CMT sporadiques.
Ces anomalies sont responsables du développement
et de la progression de ces tumeurs. En accord avec
l’hypothèse de l’addiction oncogénique, leur inhibition est susceptible de provoquer la stabilisation
ou la régression de ces cancers.
Outre des mutations génétiques, l’angiogenèse est
fortement liée au cancer de la thyroïde. Des taux
importants de VEGF (Vascular Endothelial Growth
Factor) et une plus grande densité des microvaisseaux ont été identifiés dans les cancers de la
thyroïde par rapport au tissu thyroïdien normal. En
outre, les taux de VEGF ont été corrélés avec le stade
tumoral, la taille et la dissémination lymphatique
et à distance, un taux élevé ayant un impact négatif
sur la survie. Le VEGF peut être synthétisé et sécrété
par les thyréocytes. Le VEGF-A intervient dans la
croissance tumorale et la diffusion métastatique
hématogène, tandis que les VEGF-C et VEGF-D,
impliqués dans la lymphangiogenèse, sont incriminés dans la diffusion métastatique aux ganglions
cervicaux, durant les CPT.
Inhibiteurs de la signalisation
RET/PTC-RAS-RAF-MEK-ERK
Le sorafénib est la première molécule capable
d’inhiber toutes les kinases RAF. En outre, le sorafénib cible un groupe de RTK tels que les VEGFR-1,
VEGFR-2, VEGFR-3, PDGFR-β (Platelet-Derived
Growth Factor Receptor) et RET. Le large spectre
des cibles du sorafénib lui confère non seulement
des propriétés proapoptotiques, mais aussi des effets
antiangiogéniques, qui sont d’un intérêt particulier
dans les carcinomes thyroïdiens.
Les 2 premiers essais cliniques de phase II publiés
ont montré une activité prometteuse du sorafénib
dans les CDT réfractaires à la thérapie par iode
radioactif (2, 3). Le taux de réponse partielle a
été de 15 à 21 %. Les résultats de ces 2 études ont
suggéré une corrélation significative entre la diminution rapide du taux de thyroglobuline et la réponse
tumorale. La survie sans progression médiane s'est
située entre 15 et 20 mois, probablement du fait de
l’état de progression de la tumeur avant le début de
la thérapie par sorafénib (4).
Le sorafénib a également démontré une activité
dans d’autres types histologiques tels que les CAT,
avec un contrôle de la maladie dans 40 % des cas
(13 % de réponses partielles et 27 % de stabilités
tumorales) [5]. Dans un essai de phase II évaluant
le sorafénib chez les patients atteints de CMT
avancé, respectivement 25 et 16 patients devaient
être inscrits dans les groupes A (héréditaire) et B
(sporadique). Sur les 16 patients du bras B, 1 réponse
partielle a été observée, 14 patients ont eu une
maladie stable et 1 patient n’était pas évaluable.
La médiane de survie sans progression était de
17,9 mois. Le bras A a été clos prématurément en
raison du rythme lent d’inclusion (6). Les effets indésirables les plus fréquents avec le sorafénib ont été
le syndrome main-pied, la diarrhée et l’hypertension
artérielle.
Après les résultats encourageants de ces essais de
phase II, un essai de phase III est actuellement en
cours afin d’évaluer le sorafénib dans les CDT réfractaires à la thérapie par iode radioactif.
Une autre approche de l’inhibition de la voie RAS/
RAF/MAPK est le blocage de la farnésylation des
protéines RAS. Une étude de phase I associant sorafénib et tipifarnib (un inhibiteur de la farnésyl transférase) a montré une stabilité tumorale prolongée
chez 6 des 8 patients atteints de CMT, 3 ayant
présenté des réponses partielles. Une stabilité
prolongée de la maladie a aussi été obtenue chez
un patient atteint d’un CPT (7).
Mots-clés
Angiogenèse
Cancer de la thyroïde
Sorafénib
Motésanib
Axitinib
Vandétanib
Highlights
The inefficiency of traditional
cytotoxic agents in thyroid
cancer when patients become
resistant to radioactive iodine
triggered a sharper understanding of carcinogenesis of
the thyroid. The first results
of new targeted therapies are
very encouraging and several
phase II and III studies are
currently evaluated the role of
these drugs.
Keywords
Angiogenese
Thyroide cancer
Sorafenib
Motesanib
Axitinib
Vandetanib
La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 10 - décembre 2010 | 597
DOSSIER THÉMATIQUE
Antiangiogéniques
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6056.
Angiogenèse et cancer de la thyroïde
L’AZD6244 est un puissant inhibiteur sélectif et non
compétitif de MEK-1 et MEK-2. Il a été étudié dans
un certain nombre de tumeurs solides et a montré
une activité intéressante dans les essais cliniques de
phase I des cancers de la thyroïde (8). Une étude de
phase II multicentrique chez des patients avec CDT
avancé est en cours.
Inhibiteurs des récepteurs
de tyrosine kinase
Le motésanib est un inhibiteur multikinase qui
agit sélectivement sur les récepteurs de VEGF-1,
VEGF-2, VEGF-3, PDGF-β, RET et Kit. Deux études
ont été publiées récemment sur l’évaluation de
l’activité antitumorale du motésanib dans le CDT
et le CMT. La première étude a évalué 93 patients
atteints de CDT avancés traités par motésanib à
125 mg par voie orale. Il a été rapporté 14 % de
réponses partielles confirmées par les RECIST
(Response Evaluation Criteria in Solid Tumors), 10 %
de réponses partielles non confirmées et 67 % de
stabilisations de la maladie, dont 35 % d’une durée
de plus de 6 mois. La durée médiane de réponse a
été de 8 mois et la survie sans progression médiane
de 10 mois (9). Dans la seconde étude, 91 patients
atteints de CMT en progression ont été traités
par motésanib aux mêmes doses que dans l’essai
précédent. Des réponses objectives évaluées selon
les RECIST ont été observés chez 2 % des patients,
81 % ont présenté une stabilisation de la maladie
et la survie sans progression médiane a été de
12 mois (10). Les effets indésirables induits par le
motésanib (­diarrhée et perte de poids) ont produit
des problèmes importants et ont conduit à réduire
les doses chez de nombreux patients.
Le critère principal d’inclusion dans les 2 études
était la progression tumorale démontrée selon les
RECIST dans les 6 mois précédant l’inclusion dans
l’étude. Cela explique le fort taux de stabilisations
tumorales. Comme dans l’étude avec le sorafénib,
la plupart des patients ont présenté une diminution des lésions cibles, mais ils n’ont pas atteint
le niveau de réponse partielle selon les RECIST, ce
qui suggère qu’une méthode différente est nécessaire pour évaluer l’activité antitumorale de ces
nouvelles thérapeutiques ciblées dans les tumeurs
solides.
L’axitinib est un inhibiteur sélectif de tyrosine kinase
des récepteurs du VEGF-1, VEGF-2 et VEGF-3. Une
étude multicentrique de phase II a inclus 60 patients
présentant un cancer thyroïdien métastatique ou
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localement avancé non résécable et traités par
axitinib à la dose de 2 × 5 mg/j per os. Une réponse
partielle a été observée chez 18 patients, soit 30 %
des cas, avec une durée de réponse au moment de
l’analyse allant de 1 à 16 mois. De plus, 23 autres
patients (38 %) ont présenté une stabilisation de la
maladie pour une durée de plus de 16 semaines. Des
réponses ont été enregistrées pour tous les soustypes histologiques. La médiane de SSP a été de
18,1 mois. Les effets secondaires les plus fréquents
ont été la fatigue, la protéinurie, les mucites, les
diarrhées et l’hypertension artérielle. Par ailleurs,
le traitement par axitinib était corrélé à une baisse
des taux sanguins de VEGFR-2 et VEGFR-3 solubles,
alors qu’il y avait peu de variations de KIT, ce qui
démontre un véritable effet pharmacodynamique
sur l’axe VEGF/VEGFR (11).
Le sunitinib est un inhibiteur des VEGFR-1, 2 et 3
ainsi que de RET, KIT, PDGFR-β et FLT-3 (Fms-related
tyrosine kinase 3), mais aussi de FGFR-1 (Fibroblast
Growth Factor Receptor 1) et CSF1R (Colony Stimulating Factor 1 Receptor). Trois études ont été mentionnées à l’ASCO en 2008 et 2009 mais n’ont pas
encore été publiées. Dans ces trois essais, 96 patients
(75 avec CDT et 21 avec CMT) ont été traités au
total avec les deux dosages acceptés de sunitinib
(50 mg/j, 4 semaines sur 6 ou 37,5 mg/j en continu).
Les auteurs ont rapporté des réponses tumorales
objectives de 8 à 25 % avec des taux élevés de
contrôle de la maladie : plus de 80 % (12-14). Dans
l’étude de L. Carr et al., les réponses objectives ont
été corrélées avec une réponse rapide au FDG-PET
(fluoro-déoxyglucose-tomographie par émission
de positons).
Le vandétanib est une autre molécule, administrable
par voie orale, qui inhibe VEGFR-2, VEGFR-3, RET et
EGFR. Deux études de phase II ont été conçues pour
évaluer son activité contre le récepteur membranaire RET – dont le rôle est fondamental dans le
développement du cancer médullaire héréditaire de
la thyroïde. Deux doses ont été testées (300 mg/j
et 100 mg/j). Il a été retrouvé entre 10 et 20 % de
réponses objectives et 30 % de maladies stables.
Les deux dosages de vandétanib ont donc une
activité clinique antitumorale chez ces patients
atteints de CMT héréditaire avancé ou métastatique. La diarrhée, la fatigue et les rashs ont été les
effets indésirables les plus fréquents (15, 16). Une
étude internationale randomisée de phase III (ZETA,
6474IL0058), évaluant le vandétanib à 300 mg/j
versus placebo, chez des patients atteints de CMT
(héréditaire ou sporadique) localement avancé ou
métastatique est actuellement en cours d’analyse.
DOSSIER THÉMATIQUE
Le pazopanib est également un inhibiteur puissant
et sélectif de la tyrosine kinase ciblant les récepteurs de VEGF-1, VEGF-3, PDGF-α, PDGF-β et c-Kit.
Des données récentes ont démontré son activité
antitumorale dans les CTD (17). Le taux de réponses
objectives a été de 19 %, en concordance avec les
résultats d’autres thérapies ciblées. Les principales
toxicités étaient les mucites, les douleurs abdominales et la diarrhée.
L’imatinib est un inhibiteur très sélectif de bcr-abl et
inhibe également c-Kit et PDGFR. Il a été le premier
inhibiteur de tyrosine kinase évalué dans le CMT et
dans d’autres cancers de la thyroïde. Les résultats
rapportés dans 2 études réalisées sur un total de
24 patients atteints de CMT n’ont montré aucune
réduction de la taille de la tumeur, bien que la
maladie se soit stabilisée chez 4 patients (18, 19).
L’imatinib a également été testé dans les CAT
en raison de leur surexpression de c-abl et de
PDGFR. Dans une étude de phase II avec 8 patients
évaluables atteints de CAT, 2 (25 %) ont présenté
une réponse partielle et 4 (50 %) une stabilisation
de la maladie (20).
L’oncoprotéine MET (facteur de transition
é p i t h é l i o - m é s e n c hy m a t e u s e ) , é g a l e m e n t
connue sous le nom de c-MET ou HGFR (Hepatocyte Growth Factor Receptor), dont l’activation
déclenche la croissance tumorale et l’angiogenèse. La surexpression de c-MET a été décrite dans
le cancer de la thyroïde, et des stratégies pour
bloquer cette voie sont devenues d’un intérêt
particulier.
XL-184 (développé par Exelixis™) est un inhibiteur de RET, c-MET et VEGFR-2 qui a démontré une
activité inhibitrice sur les lignées cellulaires et les
xénogreffes de CMT. Dans une étude de phase I qui
incluait 13 patients avec CMT, 3 réponses partielles
ont été observées (21). Les toxicités principales ont
été 1 syndrome main-pied, 1 toxicité hépatique et
des mucites. Une étude randomisée de phase III
évaluant XL-184 dans la CMT est en cours.
13. Cohen EE, Needles BM, Cullen KJ
et al. Phase II study of sunitinib in
refractory thyroid cancer. J Clin
Oncol 2008;26(20S): abstr. 6025.
14. Ravaud A, de la Fouchar-
Conclusion
Les possibilités thérapeutiques sont dramatiquement
restreintes pour le cancer de la thyroïde après échec
de l’irathérapie ou dans le cas où celle-ci n’est pas
adéquate. À l’heure actuelle, aucun médicament
n’a été enregistré pour le traitement du CDT ou
du CMT. Après des études précliniques, le cancer
de la thyroïde est devenu un modèle de carcinogenèse avec des événements oncogénétiques clés
qui surviennent tôt dans le développement de ces
cancers. Le sorafénib est susceptible d’être utilisé
dans l’avenir dans le CDT. Le sunitinib semble également intéressant, bien que son efficacité n’ait pas
encore été démontrée. L’axitinib a une activité
antitumorale importante sur tous les sous-types
de cancers de la thyroïde avancés. Dans le CMT,
les premiers résultats des nouveaux médicaments
sont prometteurs, mais il est trop tôt pour tirer des
conclusions pour le vandétanib et l’XL-184.
La disponibilité et l’efficacité des inhibiteurs de
tyrosine kinase font qu’il est important et utile
d’établir le profil génétique avant le début du traitement chez les patients atteints d’un cancer de
la thyroïde. L’identification des mutations spécifiques ou des anomalies prédominantes pourrait
fournir de précieuses informations dans le choix
d’une thérapie ciblée. Il semble probable qu’une plus
grande compréhension de la puissance relative de
chaque composé et de la durée de la réponse sera
fournie par la poursuite des essais de phase III. La
méthode habituelle pour évaluer l’activité tumorale
(RECIST ou critères de l’OMS) n’est probablement
pas le meilleur moyen de détecter l’effet réel de ces
nouvelles thérapies ciblées sur la masse tumorale. ■
dière C, Courbon F et al. Sunitinib
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advanced malignancies, including
pts with medullary thyroid cancer
(MTC). J Clin Oncol 2008;26(20S):
abstr. 3522.
Agenda
7es rencontres HCC Eastern and Western Experiences
Paris (Maison de la Chimie), 14-15 janvier 2011
Organisateurs : J. Belghiti, M. Makuuchi et G. Torzilli
Renseignements et inscription : www.hcc2011.fr
La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 10 - décembre 2010 | 599
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