VOCABULAIRE
Vocabulaire
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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - n° 2 - avril-mai-juin 2013
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TRANSMISSION*
O
n rattache spontanément trans-
mission au verbe transmettre, où
l’on reconnaît mettre, et ceci
bien que la mission n’ait plus grand-chose
à voir avec la mise. Ce qui montre que la
formation des mots latins – mittere, missus,
missio – reste vivante pour nous après que
nous avons collectivement perdu ce qui fut
notre latin. Transmettre est directement
hérité du latin, au Xe siècle, alors que trans-
mission est un emprunt écrit, assez savant,
quatre ou cinq siècles plus tard. Il apparut
très précisément dans le discours médical,
à propos des “humeurs” dont on pensait
qu’elles se répandaient dans l’organisme. Ce
n’est qu’au XVIII
e
siècle qu’on en fait un mot
technique, mécanique, et qu’on l’applique
en général à toute communication.
Mais l’emploi du concept de “transmission”
reste actif à propos de l’organisme ; si on ne
l’utilise pas à propos du sang, c’est parce
que Harvey impose l’idée de “circulation”
(d’abord en latin). C’est la pathologie qui
le récupère au tout début du XIXe siècle, en
lui donnant une valeur plus générale que
contagion et en l’appuyant sur un adjectif
venu du droit, transmissible.
Au XXe siècle, après les découvertes de la
microbiologie pasteurienne, puis des virus et
de la génétique, l’idée qu’il y a des maux ou
plutôt des vecteurs de maux transmissibles
(ou non) à l’espèce humaine rend compte du
domaine entier de l’épidémiologie. Hors des
communications de signes et du domaine
de l’information, le terme transmission s’est
spécialisé dans la menace liée à certaines
activités, pourtant nécessaires à une autre
“transmission”, celle de la vie, et l’on parle
avec tristesse des maladies “sexuellement
transmissibles”.
* © Le Courrier de la Transplantation 2008;2:57.
Par Alain Rey, directeur de rédaction du Robert, Paris