18 La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. I - n° 5 - décembre 2005
>Actualités
thérapeutiques
d’une mort imminente. Les principaux
traumatismes rapportés (accident de
transport, agression physique, agres-
sion sexuelle) correspondent à cette
définition. En revanche, le premier en
fréquence (la mort soudaine et inat-
tendue d’un proche) et le cinquième
(souffrance humaine majeure) s’appa-
rentent plus à des événements de vie,
particulièrement difficiles, pouvant
provoquer des réactions anxieuses ou
dépressives. Dans ces cas, la notion de
mise en danger de l’intégrité physique
et psychique n’apparaît pas au premier
plan.
En matière de facteurs de risque :
l’âge (jeune) de survenue du trauma-
tisme, les antécédents psychiatriques et
familiaux, le nombre d’événements et le
caractère sexuel constituent les princi-
paux éléments à prendre en compte. En
outre, quel que soit le traumatisme, les
femmes ont plus de risque de dévelop-
per un ESPT sauf dans le cas d’une
agression sexuelle.
Sur le plan symptomatique et fonc-
tionnel, 80 % des patients souffrant
d’ESPT se sentent perturbés par les sou-
venirs du traumatisme, 70 % présentent
des troubles du sommeil, 65 % sont
bouleversés par des rappels de l’épisode
et 60 % ont une perte d’intérêt et de
plaisir. En dehors des symptômes de la
triade diagnostique, ces patients pré-
sentent également plus fréquemment
des plaintes fonctionnelles témoignant
de leur souffrance psychologique :
algies, troubles sexuels, troubles de
l’appétit, fatigue importante, difficultés
de concentration et addictions. Ces
plaintes concernent près de 60 % des
patients vus par les psychiatres et 53 %
des patients vus par les médecins géné-
ralistes.
La prise en charge immédiate du
traumatisme repose principalement sur
le traitement médicamenteux (61 %
des cas) et accessoirement psychothé-
rapique (30 % des cas). Moins de la
moitié des patients suivis par les psy-
chiatres ont fait l’objet d’une prise en
charge du type d’un soutien psycholo-
gique (26 %) ou d’un traitement médi-
camenteux dans les 24 heures qui sui-
vent le traumatisme (44 %), contre
respectivement 33 % et 66 % des
patients observés en médecine géné-
rale.
Un an après le traumatisme, plus de
50 % des patients n’ont pas éprouvé le
besoin de consulter un médecin, qu’il
s’agisse d’un généraliste ou d’un psy-
chiatre. Pour les autres, la prise en
charge des conséquences du trauma-
tisme reste essentiellement pharmaco-
logique. Il y a davantage d’arrêts de
travail en cas d’ESPT, et ils sont d’une
durée plus longue lorsqu’ils sont pro-
noncés par un psychiatre. Plus d’hospi-
talisations ont été également consta-
tées chez les patients souffrant d’ESPT
consultant un psychiatre. Sur un plan
juridique, 24 % des victimes ont porté
plainte. Parmi elles, plus de 85 % n’ont
pas bénéficié de décision de justice !
Les types principaux d’événements
concernés sont les agressions phy-
siques, les accidents de transport, les
agressions à main armée, les agressions
sexuelles. L’existence ou non d’une
réparation juridique n’a pas eu d’in-
fluence sur la sévérité de l’ESPT chez
ceux qui en souffraient encore au
moment de l’enquête.
Sur un plan thérapeutique, 84,4 % des
patients souffrant d’ESPT étaient traités
par antidépresseurs et 54,6 % par
anxiolytiques. Les motifs des prescrip-
tions étaient rarement l’ESPT.
Plus de 80 % des patients souffrant
actuellement d’ESPT et traités par anti-
dépresseurs le sont par inhibiteurs de la
recapture de la sérotonine. Dans 75 %
des cas, le motif de prescription est une
dépression (64 % d’épisodes dépressifs
majeurs et 11 % d’épisodes dépressifs
réactionnels).
Concernant les prises en charge non
médicamenteuses des patients souf-
frant d’ESPT, si la psychothérapie s’im-
pose pour plus d’un tiers (42 %) des
patients – respectivement 85 % et 25 %
pour ceux suivis par les psychiatres et
les médecins généralistes–, il est sur-
prenant de remarquer le recours à la
kinésithérapie dans près de 20 % des
cas. Elle est prescrite à 28 % de
patients souffrant d’ESPT consultant
chez les psychiatres et 17 % de ceux
vus par les médecins généralistes ; ces
taux recouvrent probablement des tech-
niques de relaxation à médiation cor-
porelle.
Conclusion
La faible proportion de données inex-
ploitables (10,7 %) souligne l’apport
significatif de cette enquête dans la
connaissance de la clinique de l’ESPT et
des modalités de sa prise en charge en
France. Les patients suivis par les psy-
chiatres sont plus jeunes et présentent
plus d’antécédents psychiatriques. Ce
constat s’explique par le fait que seuls
les patients les plus gravement atteints
sont adressés au spécialiste.
Motifs de prescription Antidépresseurs (AD) Anxiolytiques (AX) AD + AX
MG Psy MG Psy MG Psy
État dépressif (%) 69,8 75,8 12,2 14,9 77,5 71,3
Traitement anxieux (%) 6,8 4,0 55,4 73,1 6,9 7,0
ESPT (%) 0,5 6,1 0,7 0 1,0 10,5
Autres (%) 22,9 14,2 31,7 11,9 14,7 11,3
Tableau III. Motifs de prescription.