JFR 2010 - Innovations dans l'imagerie de la BPCO Mis à jour le 21/06/2011 par SFR Philippe A Grenier , Paris, France Article issu du quotidien des JFR2010 - Lundi 25 Octobre Pourquoi une séance des JFR sur l'imagerie des BPCO ? Il y a deux raisons à cela.1) La BPCO est devenue la cinquième cause de mortalité dans le monde et par là même un problème majeur de santé publique.2) Des progrès technologiques récents faits en scanographie multicoupes, IRM, et analyse d'images permettent aujourd'hui une meilleure évaluation qualitative et quantitative des modifications structurelles du parenchyme pulmonaire et des voies aériennes qui surviennent au cours de cette maladie. Au cours de cette séance, les experts feront le point sur les performances et les limites de ces méthodes d'analyse et mettront en perspective l'impact que l'on peut attendre d'elles pour une meilleure compréhension physiopathologique de la BPCO, une meilleure stratification des patients pour les essais cliniques, et à terme une meilleure prise en charge des patients. Caractérisée par un syndrome obstructif aux épreuves fonctionnelles respiratoires, la BPCO est la conséquence d'une réponse inflammatoire chronique des voies aériennes à la fumée de cigarette qui, à terme, entraîne une destruction du parenchyme pulmonaire (emphysème) et induit une réduction irréversible du calibre des petites voies aériennes, par remodelage pariétal bronchiolaire. Ces deux phénomènes, bronchiolite obstructive et emphysème, sont tous deux responsables d'un obstacle au flux aérien. Bien que le diagnostic de BPCO soit basé essentiellement sur des critères cliniques et fonctionnels respiratoires, l'usage de la TDM a montré que pour des patients BPCO ayant un même niveau de sévérité d'atteinte fonctionnelle, il existait des différences morphologiques importantes reflétant probablement des mécanismes physiopathologiques et des profils génomiques différents. Certains patients ont un emphysème sévère, tandis que d'autres n'ont pas d'emphysème, ou seulement un emphysème minime, suggérant fortement la présence d'un remodelage pariétal bronchiolaire diffus expliquant le syndrome obstructif fonctionnel. Il est relativement aisé, sur l'analyse visuelle des images TDM, de différencier des patients ayant un emphysème prédominant de ceux ayant une atteinte des voies aériennes prédominante. Il existe toutefois dans la majorité des cas un important chevauchement des signes exprimant la destruction pulmonaire et ceux du remodelage des voies aériennes. Les différents phénotypes d'emphysème sont reconnus en TDM en fonction du type anatomique (centrolobulaire, panlobulaire, paraseptal), et de la distribution lésionnelle. L'étendue de la destruction lésionnelle est mieux quantifiée par analyse d'images. L'analyse quantitative densitométrique de l'emphysème pulmonaire est une technique aujourd'hui parfaitement mature (Fig. 1). Sur la base de ses travaux internationalement reconnus, Pierre-Alain Gevenois rappellera les critères permettant une analyse globale et régionale de l'emphysème, et comment minimiser la variabilité des mesures sur des acquisitions successives afin de rendre interprétable les études du suivi longitudinal de la maladie. Les différents phénotypes de l'atteinte des voies aériennes sont identifiés sur des modifications morphologiques de la trachée et des bronches, sur l'hypoperfusion pulmonaire et le piégeage expiratoire. L'atteinte trachéobronchique inclut une déformation en fourreau de sabre de la trachée intrathoracique, la présence de multiples diverticules trachéobronchiques exprimant la dilatation et la fusion canalaire des glandes muqueuses, un épaississement pariétal bronchique et/ou une dilatation luminale tubulée des bronches segmentaires et sous-segmentaires, et enfin une collapsibilité excessive des lumières bronchiques et/ou trachéale en expiration dynamique (trachéobronchomalacie exprimant le déficit en cartilage). L'inflammation des petites voies aériennes chez ces sujets fumeurs peut s'exprimer par des opacités centrolobulaires de faible densité et/ou des plages en verre dépoli (bronchiolite respiratoire). Plus rares sont les foyers de petites opacités centrolobulaires nodulaires et/ou linéaires branchés (arbre en bourgeons) dus à des impactions et/ou des infections bronchiolaires. À l'inverse, le remodelage pariétal bronchiolaire ne s'exprime que par des signes indirects : plages hypodenses par hypoperfusion sans destruction de l'architecture pulmonaire et qui, du fait du contraste avec les zones normalement ventilées, créent un aspect de perfusion en mosaïque. Le piégeage expiratoire est aussi une expression de l'obstruction luminale bronchiolaire secondaire au remodelage. Mais en présence concomitante d'emphysème pulmonaire, ce signe n'est pas spécifique de remodelage. En effet, en raison de la perte des attaches alvéolaires des bronches induite par la destruction emphysémateuse, les lumières bronchiolaires se collabent de façon exagérée à l'expiration. Une approche quantitative du piégeage induit spécifiquement par le bronchiolaire peut être soustrayant le volume remodelage obtenue en pulmonaire expiratoire du volume inspiratoire, après avoir éliminé les voxels d'emphysème du volume d'intérêt par seuillage densitométrique. Ainsi, ne sont pris dans l'analyse quantitative que des voxels ayant une valeur d'atténuation comprise entre -810 et -950 UH. L'épaississement pariétal bronchique est aussi un excellent marqueur indirect du remodelage pariétal bronchiolaire. Des logiciels d'analyse d'images dédiés à l'analyse quantitative des dimensions bronchiques sont actuellement disponibles. Ces logiciels permettent : 1) une extraction 2D/3D automatique du contour aérique de l'arbre trachéobronchique et de son axe central ; 2) l'obtention interactive d'autant d'images nécessaires des sections bronchiques reconstruites strictement perpendiculaires à l'axe bronchique ; 3) la segmentation automatique des contours interne et externe des sections mesurées et des patients et le degré bronchiques. Les surfaces de section bronchique ainsi segmentées sont automatiquement rapportées à la surface totale de la section bronchique (Fig. 2). Ces valeurs obtenues chez BPCO ont démontré être corrélées avec le degré de sévérité de l'obstruction fonctionnelle de remodelage pariétal des bronchioles mesurées en histologie. Ainsi, cette mesure quantifiée de la surface de section pariétale bronchique peut être utilisée comme une alternative à la mesure du remodelage pariétal bronchiolaire qui n'est pas décelable en scanographie. Ces méthodes d'analyse ne sont pas pour l'instant utilisées en routine clinique. Elles restent réservées à la recherche clinique et translationnelle. Seule une standardisation et une validation à grande échelle des méthodes permettront à terme une utilisation plus large. Une évaluation préalable de la variabilité des mesures sur des acquisitions successives sera nécessaire avant une utilisation dans le suivi longitudinal des patients. D'autres méthodes peuvent venir en complément pour explorer la fonction pulmonaire. Il est possible de mesurer de façon globale et régionale la perfusion pulmonaire par angioscanographie si on a de la chance de disposer d'un scanographe double source. L'usage de la double énergie peut aussi permettre de mesurer la ventilation pulmonaire après inhalation de xénon. Toutefois, ces méthodes sont pour l'instant réservées à la recherche et ont l'inconvénient d'être irradiantes. Aujourd'hui, c'est l'IRM qui est l'option de première intention pour compléter la scanographie dans l'exploration morpho-fonctionnelle des patients BPCO. Hans-Ulrich Kauczor nous fera part de toute son expérience pour décrire toutes les options offertes par cette modalité : mesure globale et régionale de la perfusion pulmonaire, quantification du flux sanguin pulmonaire, évaluation de la ventilation et de la mécanique respiratoire. Légendes des figures Fig. 1 - Analyse quantitative par densitométrie de l'emphysème chez un patient BPCO (seuillage à -960 UH après une acquisition scanographique multicoupes). Les voxels ayant une valeur d'atténuation inférieure à -960 UH sont segmentés et codés en couleur rouge. L'air dans la trachée et les bronches proximales est extrait du volume calculé. Le logiciel calcule le volume d'emphysème et le volume pulmonaire de façon globale et à poumons séparés. Fig. 2 – Analyse quantitative des surfaces de section pariétale bronchique chez un patient BPCO. Reconstructions 3D du contenu aérique et de l'axe central de l'arbre trachéobronchique. Exemples de sections bronchiques perpendiculaires à l'axe central avant et après segmentation des contours interne et externe.