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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 5, septembre-octobre 2006
thématique
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de 500 mg de calcium par jour, la
DMO de ce même site était davan-
tage augmentée ; cependant, aucun
changement n’était apparent lorsque
la teneur en calcium du régime était
inférieure à 500 mg/j. Par ailleurs,
dans les trois cas, les valeurs de
DMO aux sites lombaires L2 et L3
de la colonne n’avaient subi aucun
changement. De même, une sup-
plémentation d’une moyenne de
735 mg/j de vitamine C, associée
à du calcium, a permis d’augmen-
ter la DMO fémorale de femmes
ménopausées (avec ou sans œstro-
génothérapie) après une durée de
12 ans (4).
Vitamine B6 (pyridoxine)
Tel que mentionné précédemment,
le clivage des propeptides C- et
N-terminaux précède les étapes
extracellulaires de maturation du
procollagène (fibrillogenèse) en
donnant naissance au tropocolla-
gène. Les étapes d’association de
ce dernier en microfibrilles, puis
en fibrilles, permettent l’obtention
finale des fibres de collagène. Afin
de maintenir l’intégrité des molé-
cules de tropocollagène entre elles,
des croisements intermoléculaires
covalents sont établis. Cette for-
mation n’est possible que grâce à
une enzyme : la lysyl-oxydase. Son
coenzyme (la vitamine B6, assistée
du cuivre comme cofacteur) permet
l’obtention des croisements molé-
culaires dont les plus connus sont la
pyridinoline (Pyr) et la désoxypy-
ridinoline (Dpd). La vitamine B6
est un dérivé de la pyridine, d’où
sa désignation, “pyridoxine”. Sa
forme active, qui a le rôle de coen-
zyme, est le phosphate de pyridoxal
(PLP) ; il est excrété dans l’urine
sous forme d’acide pyridoxique, qui
s’avère être un bon marqueur de la
prise alimentaire de vitamine B6.
Cette vitamine a été étudiée depuis
plusieurs années, mais peu de tra-
vaux ont été réalisés sur l’espèce
humaine en ce qui concerne son
implication dans le métabolisme
osseux. La plupart des études ont
porté sur des volatiles et des ron-
geurs (tableau). Les études micro-
radiographiques et microscopiques
réalisées sur des animaux déficients
en vitamine B6 ont montré des
lésions osseuses de type ostéoporo-
tique, ainsi que des anomalies histo-
logiques dans les zones hypertrophi-
ques du cartilage. D’autres auteurs
ont ensuite mis en évidence la solu-
bilisation du collagène lorsque les
croisements intermoléculaires sont
réduits, à la suite d’une baisse de
l’activité de la lysyl-oxydase. La
notion de débalancement osseux
(uncoupling), dans le contexte de
la déficience en vitamine B6, a été
suggérée dès 1986, puis confir-
mée en 1994. Chez l’humain, la
première étude publiée a porté sur
des sujets d’une moyenne d’âge
de 83 ans ayant eu des fractures
de la hanche. Chez ces derniers,
le taux plasmatique de PLP était
diminué (< 13 nmol/l ; p < 0,01) et
non corrélé à l’âge (p = 0,6). Selon
les auteurs, la déficience en cette
vitamine semble avoir été un fac-
teur étiologique de fracture chez
les patients étudiés. Les travaux de
Massé et al. sur le poulet déficient
en vitamine B6 ont mis en exergue
une perte de l’intégrité du tissu
conjonctif, associée à une diminu-
tion des croisements intermolécu-
laires, ainsi qu’une augmentation
de la solubilisation du collagène ;
la résistance mécanique de l’os s’en
est trouvée réduite. Par ailleurs, ces
auteurs ont démontré que la défi-
cience en vitamine B6 était accom-
pagnée d’une augmentation du cor-
tisol, associée à une diminution de
la 1,25(OH)2D3 et de l’OC.
L’étude de supplémentation de
Massé et al. (9), très bien contrôlée
et réalisée sur 60 femmes ostéo-
péniques âgées de 35 à 55 ans, a
permis d’illustrer le rôle préventif
des vitamines C et B6 à l’égard de
la perte osseuse. Dans cette étude,
les femmes ont été classées en trois
groupes, selon leur DMO : groupe
normal, ostéopénique contrôle et
ostéopénique expérimental. Ces
groupes ont reçu respectivement un
placebo, un supplément de calcium
seul ou combiné aux vitamines C et
B6, durant 1 an. L’enquête alimen-
taire n’a révélé aucune carence dans
les apports nutritionnels chez les
sujets. Au terme de l’étude, une perte
minérale osseuse de 2 % (p < 0,05)
a été observée chez les femmes du
groupe placebo à un niveau lom-
baire, bien qu’aucun changement
biochimique n’ait été détecté. La
baisse de la densité osseuse a per-
sisté dans le groupe ostéopénique
contrôle sur cinq sites lombaires.
Pour le groupe ostéopénique expé-
rimental, la supplémentation vitami-
nique (C : 500 mg/j ; B6 : 75 mg/j)
combinée au calcium (1 000 mg/j)
a permis d’inhiber la perte osseuse
sur l’ensemble des sites lombaires et
fémoraux. De plus, les données bio-
chimiques ont révélé une réduction
de la parathormone (PTH) (p < 0,05)
et de la 1,25(OH)2D3 (-17 %), indi-
quant une diminution de l’activité
ostéoclastique (diminution de la
résorption osseuse). Les marqueurs
de formation – qui augmentent
dans l’ostéopénie, secondairement
à la résorption – ont été signifi-
cativement réduits dans le groupe
expérimental : PALo (p < 0,001) et
OC (p < 0,01). D’après cette étude
destinée à améliorer la composition
organique de l’os, la supplémenta-
tion vitaminique (C et B6), associée
à la supplémentation calcique, a per-
mis de prévenir la perte osseuse des
sujets ostéopéniques.
Vitamine K
(K1 : phylloquinone,
K2 : ménaquinone)
Deux protéines dépendantes de la
vitamine K sont présentes dans le
tissu squelettique : la bone Gla-
protein (BGP), aussi appelée ostéo-
calcine (OC), et la matrix Gla-pro-
tein (MGP). Leur synthèse par les
ostéoblastes semble être stimulée
par la 1,25(OH)2D3 et par l’acide
rétinoïque (vitamine A active).
L’OC est une protéine de liaison du