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Act. Méd. Int. - Angiologie (14) n° 240, Février 1998
l’interrogatoire et au cours de l’examen
clinique que la recherche étiologique
débute ; les examens complémentaires,
comme la capillaroscopie ou l’écho-
doppler, ne sont que le prolongement
de la clinique.
Raynaud bilatéral
Les principales causes sont le phéno-
mène de Raynaud idiopathique (ou
maladie de Raynaud) et les collagé-
noses, au premier rang desquelles figure
la sclérodermie généralisée.
- L’interrogatoire recherchera en priori-
té des arthralgies diffuses, des myal-
gies, des troubles digestifs et notam-
ment un pyrosis. Une dyspnée d’effort
évoquera une fibrose alvéolaire débu-
tante. Un syndrome de Gougerot-
Sjögren sera suspecté devant une séche-
resse buccale et oculaire.
Il faudra également s’enquérir des trai-
tements suivis et en particulier recher-
cher la prise de bêtabloquants, même en
collyre, pouvant être à l’origine de
l’acrosyndrome ou de la majoration
d’un Raynaud préexistant.
- L’examen clinique apportera une
attention toute particulière à l’aspect
des doigts et de la peau : doigts boudi-
nés, infiltrés, sclérodactylie, cicatrices
de nécrose pulpaire, présence de télan-
giectasies en pleine peau ou mégacapil-
laires visibles à l’œil nu au rebord
unguéal.
A l’issue de cet examen clinique, la
démarche étiologique est déjà bien
avancée et certains examens complé-
mentaires doivent être envisagés en
fonction de la cause recherchée.
Cependant, un examen doit toujours
être pratiqué en cas de phénomène de
Raynaud bilatéral : il s’agit de la capil-
laroscopie au lit unguéal des doigts.
- La capillaroscopie est l’examen com-
plémentaire à réaliser systématique-
ment car elle est rarement normale dans
les formes secondaires. Véritable pro-
longement de l’examen clinique dans le
cadre d’une consultation angiologique,
il s’agit d’un examen simple, non inva-
sif, fiable et peu coûteux.
La capillaroscopie visualise les capil-
laires au lit unguéal et permet de les
quantifier et d’étudier leurs anomalies
morphologiques (dystrophies mineures
et mégacapillaires). On recherche éga-
lement les anomalies des espaces péri-
capillaires (œdème, hémorragies) et de
l’écoulement sanguin (sludge). A partir
de ces différents critères, il est possible
de distinguer un Raynaud idiopathique
d’une microangiopathie organique (1).
De plus, la présence de mégacapillaires
est spécifique d’une sclérodermie
généralisée ou d’un syndrome de Sharp
ou encore d’une dermatomyosite.
L’aspect capillaroscopique peut aussi
être le témoin d’une microangiopathie
organique non spécifique faisant alors
suspecter un lupus systémique, un syn-
drome de Gougerot-Sjögren, une PAN
ou une polyarthrite.
La capillaroscopie permet donc de
poursuivre et d’orienter la recherche
étiologique.
Ainsi, devant une capillaroscopie nor-
male et une clinique évocatrice d’un
Raynaud idiopathique, il n’est pas
nécessaire de pousser plus loin les
investigations. En revanche, une capil-
laroscopie anormale doit faire pratiquer
un bilan biologique minimum (2) com-
prenant : NFS, plaquettes, cryoglobuli-
némie, facteurs antinucléaires. Si une
sclérodermie généralisée est suspectée,
la recherche de localisations viscérales
s’impose : radio pulmonaire et des
mains recherchant respectivement une
fibrose alvéolaire et une calcinose
sous-cutanée. Un syndrome sec sera
éliminé par un test de Shirmer et une
biopsie des glandes salivaires acces-
soires. Le bilan immunologique (3) est
complété avec le dosage des autoanti-
corps anticentromères, anti-Scl 70 et
antinucléolaires.
Raynaud unilatéral
Il témoigne le plus souvent d’une cause
loco-régionale soit vasculaire soit neu-
rologique. La capillaroscopie est dans
ce cas peu contributive, et les examens
complémentaires à privilégier sont
donc l’écho-doppler et l’électromyo-
gramme.
- L’examen clinique recherche l’aboli-
tion d’un pouls, un souffle artériel. Il
doit être complété par les manœuvres
dynamiques à la recherche d’un syndro-
me de la traversée thoraco-brachiale. Le
test d’Allen (5) est une manœuvre
clinique très contributive en cas d’oc-
clusion artérielle.
La recherche d’une compression ner-
veuse est systématique au niveau du
canal carpien, du coude et du défilé
cervico-thoracique.
- L’écho-doppler explore tout l’axe
artériel, depuis la sous-clavière jus-
qu’aux flux pulpaires, à la recherche
d’une lésion artérielle source d’embo-
lies distales (sténose ou anévrysme) ou
d’une obstruction artérielle. Chez un
travailleur manuel utilisant des engins
vibrants (6) ou chez certains sportifs
(karaté, badminton, volley) (7), il faut
éliminer un anévrysme cubital dû aux
traumatismes répétés de la paume de la
main. Il faut également pratiquer un
doppler dynamique avec manœuvres
d’abduction-rétropulsion des bras,
manœuvres d’Adson et de Wright, dont
la positivité est en faveur d’un syndrome
de la traversée throraco-brachiale. En
fonction des résultats de cet écho-dop-
pler, une artériographie sera pratiquée
en prévision d’une intervention chirur-
gicale (résection d’un anévrysme ou
traitement d’une pince costo-claviculai-
re).
- L’EMG est indiqué en cas de paresthé-
sies du membre supérieur, celles-ci
pouvant siéger dans le territoire du
médian, du cubital ou du radial et
témoignant alors d’une compression
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