“ L Sclérose en plaques : vers une nouvelle ère thérapeutique

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ÉDITORIAL
Sclérose en plaques :
vers une nouvelle ère thérapeutique
Multiple sclerosis: towards a new therapeutic era
“
L
a sclérose en plaques (SEP) est une maladie que d’aucuns décriraient comme
terrible. En effet, elle touche le plus souvent de jeunes adultes qui débutent
dans leur vie professionnelle et dans leur vie affective. Le diagnostic vient
alors les faucher et remettre en cause leurs choix de vie. L’impact de cette maladie
sur leur qualité de vie est majeur, comme cela a été montré par de nombreuses études.
On peut donc comprendre que même si le nombre de cas est relativement faible (avec
une prévalence de l’ordre de 1/1 000 en France, la SEP est considérée comme “la plus
fréquente des maladies rares”), il s’agit d’un problème de santé publique.
David-Axel
Laplaud
Inserm UMR1064, Nantes ;
service de neurologie,
CHU de Nantes
Au cours de ces dernières années, des progrès importants ont permis de mieux
comprendre la physiopathologie de la maladie même si, finalement, la ou les causes
de la SEP sont encore obscures. Ainsi, les progrès technologiques appliqués à la
génétique ont montré, par l’étude de populations larges, l’existence d’une cinquantaine
de gènes associés au risque de développer une SEP. Ces gènes appartiennent tous
à des fonctions du système immunitaire et sont la preuve d’une dérégulation
du système immunitaire présidant au déclenchement de la maladie. Les études
anatomopathologiques, les études menées sur le système immunitaire, et en
particulier celles portant sur des sous-populations cellulaires, ainsi que les modèles
animaux ont permis de décrypter les mécanismes physiopathologiques conduisant
à la formation lésionnelle au sein du système nerveux central. Ces connaissances ont
permis, au cours de ces dernières années, le développement de nombreux traitements
qui améliorent la prise en charge des malades.
Il faut se rappeler qu’il y a 15 ans seulement, un seul traitement avait
une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans cette indication,
l’interféron β-1b. Depuis, 3 autres interférons sont venus compléter l’éventail
thérapeutique, ainsi qu’un autre immunomodulateur, l’acétate de glatiramère,
dont l’efficacité est comparable. La mitoxantrone, un agent antinéoplasique,
a ensuite montré son efficacité dans les formes agressives. Plus récemment,
un immunosuppresseur, le natalizumab dont le mécanisme supposé est d’empêcher
la transmigration cellulaire à travers la barrière hématoencéphalique, a fait la preuve
de son efficacité. Des travaux récents ont même montré que sous ce traitement,
plus de 30 % des patients n’avaient aucune évolution de leur maladie, aussi bien
sur des critères cliniques que radiologiques. On parle enfin, et pour la première
fois, de “rémission” de la maladie, ce qui constitue en soi une véritable révolution
thérapeutique. Malheureusement, les risques liés à l’utilisation de cette molécule
rendent nécessaire une évaluation rigoureuse de la balance bénéfice/risque avant
de l’utiliser, et son libellé d’AMM le restreint d’ailleurs aux formes d’emblée
agressives ou à celles qui résistent aux interférons.
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ÉDITORIAL
Une autre problématique de la prise en charge thérapeutique de la SEP concerne
la compliance aux traitements. En effet, avec les interférons et l’acétate de glatiramère,
de nombreux effets indésirables généraux ou locaux sont rapportés par les patients qui,
d’eux-mêmes, vont modifier leur rythme d’injection. Une grande attente des patients (et
des médecins) concerne donc le développement d’un traitement par voie orale bien toléré.
Le fingolimod, premier traitement de fond de ce type, constitue donc une avancée majeure
dans la prise en charge des patients. Comme A. Chardain l’explique dans son article
p. 88, le mécanisme d’action du fingolimod est original, car il empêche la circulation des
lymphocytes. Sous l’effet du médicament, les lymphocytes naïfs et mémoires-centrales
restent “piégés” dans les organes lymphoïdes secondaires, alors que seuls continuent
à circuler les lymphocytes effecteurs-mémoires, ce qui garantit la conservation de la
réponse immunitaire en cas d’infection avec un germe déjà rencontré. La tolérance
du traitement est excellente et peu d’effets indésirables ont été rapportés jusqu’à
présent. En France, ce traitement ne peut être utilisé qu’en deuxième intention, chez
des patients résistant aux interférons ou dans les formes agressives de SEP. Néanmoins,
il ouvre la porte à une nouvelle ère thérapeutique avec l’arrivée prochaine (entre 2013
et 2015) d’autres traitements par voie orale tels que le teriflunomide, le laquinimod ou le
fumarate. Après avoir connu une époque contemplative, le prochain défi des neurologues
sera d’apprendre à manipuler ces nouvelles molécules et de hiérarchiser leurs choix
thérapeutiques.
”
Liens d’intérêts. L ’auteur déclare avoir des liens d’intérêts avec les laboratoires Biogen Idec, Genzyme, Novartis, Serono, Teva.
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