Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume V, n° 3, mai-juin 2001
114
e diagnostic génétique préimplantatoire
(DPI) est une alternative au diagnostic
prénatal, qui permet de détecter une anomalie
génétique avant l'implantation de l'embryon.
En effet, il consiste à réaliser une analyse
génétique sur des embryons humains obtenus
par fécondation in vitro (FIV) et à ne transfé-
rer chez la patiente que des embryons sains
ou porteurs sains. Cela présente l'avantage
majeur de pouvoir proposer à un couple pré-
sentant une forte probabilité de transmettre
une maladie génétique d'une particulière gra-
vité d’éviter l'épreuve d'interruptions médi-
cales de grossesse (IMG) (1).
La procédure
(voir figure ci-contre)
C'est grâce aux progrès effectués ces vingt
dernières années que le DPI a vu le jour. Il est
réalisé sur des embryons obtenus par FIV sur
lesquels, au troisième jour après la féconda-
tion, au stade de huit cellules, une ou deux
cellules sont biopsiées. Des recherches
menées chez la souris et chez l'homme ont
montré qu'un tel prélèvement n'affecte pas les
capacités de développement de l'embryon.
L'analyse par cytogénétique ou par biologie
moléculaire est ensuite réalisée indépendam-
ment sur chaque blastomère et seuls les
embryons non atteints de la maladie peuvent
être transférés dans l'utérus de la patiente.
La législation française
La première grossesse obtenue après DPI fut
décrite en 1990 par l'équipe anglaise de
A. Handyside (2). Ce n’est que dix ans plus
tard que nous avons débuté cette activité en
France. Ce retard est essentiellement lié à des
lourdeurs administratives puisque la loi de
bioéthique (loi n° 94-654) autorisant cette
pratique a été votée dès juillet 1994, mais les
décrets d'application ne sont parus qu'en 1998
et les premiers agréments n'ont été attribués
qu'en juillet 1999. Trois centres français sont
autorisés à pratiquer le DPI : un centre pari-
sien associant l'hôpital Necker-enfants
malades et l'hôpital Béclère à Clamart, notre
centre situé au CHU de Strasbourg (SIHCUS-
CMCO à Schiltigheim) et un centre au
CHU de Montpellier (hôpital Arnaud de
Villeneuve). Dès leur autorisation publiée, les
trois centres français ont décidé de s'associer
pour créer le groupe de travail et d'étude sur
le DPI (GET-DPI), afin d'optimiser la
recherche nécessaire à l'élaboration de nou-
veaux diagnostics, d'évaluer les besoins en
fonction des demandes, d'évaluer les coûts de
la prise en charge des patients et d'optimiser
notre activité.
Afin d'éviter les dérives, la loi française défi-
nit de manière stricte les conditions de la pra-
tique du DPI. Il s'agit de la loi n°94-654 du
29 juillet 1994 relative au don et à l'utilisa-
tion des éléments et produits du corps
humain, à l'assistance médicale à la procréa-
tion et au diagnostic prénatal. Elle n'autorise
le DPI qu'à titre exceptionnel, pour des patho-
logies d'une particulière gravité, reconnues
comme incurables au moment du diagnostic.
De plus, l'anomalie ou les anomalies impli-
quées doivent être caractérisées chez au
moins un des deux parents et seule cette ano-
malie peut être mise en évidence chez les
embryons. Enfin, le DPI ne peut être réalisé
qu'après avoir obtenu un avis favorable d'un
centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal
à qui est laissé la responsabilité d'apprécier la
gravité et l'incurabilité de la pathologie (3).
Les pathologies concernées
La difficulté essentielle de la pratique du DPI
provient du peu de matériel biologique dispo-
nible, des risques de contamination qui en
résultent et de la nécessité de réaliser rapide-
ment le diagnostic de façon à pouvoir transfé-
rer les embryons sains le jour même ou le len-
demain de la biopsie (4). Autant les tech-
niques utilisées présentent peu de difficultés
lorsque l'on dispose d'une quantité de maté-
riel raisonnable, autant le travail sur une cel-
lule unique est ardu. Ces difficultés expli-
quent la lourdeur des mises au point tech-
niques et, par conséquent, le nombre limité de
pathologies concernées.
Le DPI est proposé pour les maladies récessives
liées au chromosome X (myopathie de
Duchenne par exemple) par détermination du
sexe des embryons et transfert des embryons de
sexe féminin, et pour certaines maladies autoso-
miques récessives ou dominantes par caractéri-
sation des mutations impliquées. À Strasbourg,
en plus de la détermination du sexe pour les
maladies récessives liées au chromosome X,
nous sommes en mesure de proposer un DPI
à des couples susceptibles de transmettre la
mucoviscidose, l'amyotrophie spinale, la mala-
die de Huntington, la myotonie dystrophique
de Steinert et l'achondroplasie (site internet :
www-ulpmed.u-strasbg.fr/chimbio/DPI).
Limites du DPI
Les critiques à formuler à l'encontre du DPI
ne le sont pas tant à l’égard des possibles
dérives eugéniques que de la technique elle-
même. En effet, elle est et restera extrême-
Le diagnostic génétique
préimplantatoire
C. Moutou*, A. Pujol*, S. Viville*
Nouvelles approches
*Unité fonctionnelle de diagnostic préimplantatoire, service de biologie de la reproduction,
CHU de Strasbourg, Schiltigheim.
L