La Lettre du Rhumatologue - Supplément au n° 290 - mars 2003
IV
Au niveau des enthèses, l’inflammation se traduit par une
ossification grossière et épaisse des tendons à l’endroit
où ils s’ancrent sur l’os.
UNE ÉVOLUTION LENTE VERS L’ANKYLOSE
L’évolution est habituellement lente et très variable d’un
sujet à l’autre. Elle se fait par poussées inflammatoires sub-
aiguës. Au cours des années, les lésions s’étendent souvent
de la colonne lom-
baire vers le rachis
dorsal et le cou. La
colonne se raidit pro-
gressivement. Des
ponts osseux (syndes-
mophytes) se forment
entre les vertèbres
donnant dans les
formes très évoluées
un aspect caractéris-
tique, en colonne de
bambou, sur les
radiographies. L’an-
kylose de la colonne
vertébrale, si elle
n’est pas suivie et
traitée, peut évoluer
en cyphose dorso-
lombaire (dos rond)
(figure 5). Les articu-
lations du bassin
(sacro-iliaques) finis-
sent par fusionner. La
capacité respiratoire (mesurée par des épreuves fonction-
nelles) peut être réduite par l’ankylose des articulations du
thorax. L’atteinte des membres conduit quelquefois à une
ankylose articulaire en flexion (genoux, hanches), à une des-
truction (hanche, épaule, rarement les doigts).
L’évolution est souvent bénigne. Elle peut se cantonner à
une sacro-iliite, à des douleurs et à une limitation modérée
de la mobilité du rachis prédominant dans la région lom-
baire. La respiration est peu gênée.
Certaines manifestations extra-articulaires (en dehors des
formes avec entérocolopathies chroniques) peuvent com-
pliquer la maladie : l’uvéite antérieure (risque de baisse
d’acuité visuelle) qui nécessite d’être traitée en urgence,
des troubles du rythme cardiaque ou une lésion de la valve
cardiaque aortique, mais ces atteintes sont plus rares.
La prise en charge précoce de la maladie, le traitement des
poussées inflammatoires par les anti-inflammatoires non
stéroïdiens, le recours aux anti-TNFα(nouveaux médica-
ments anti-inflammatoires très puissants) dans certaines
formes de spondylarthropathies sévères, la kinésithérapie
et les traitements orthopédiques ont modifié le visage de la
spondylarthrite ankylosante. Bien que ce terme soit encore
le plus employé, celui de pelvispondylite, qui réfère à une
inflammation du pelvis et des ligaments entourant les ver-
tèbres (spondylos), doit être privilégié : il reflète de
manière plus fidèle l’évolution de cette maladie rhumatis-
male aujourd’hui. !
DOSSIER PATIENTS
Figure 5. Évolution vers la cyphose dorso-
lombaire.
Les différentes formes de spondylarthropathies
La spondylarthrite ankylosante fait partie des spondyl-
arthropathies qui regroupent des affections inflamma-
toires chroniques caractérisées par une atteinte verté-
brale et des symptômes cliniques radiologiques et
biologiques communs survenant sur un terrain géné-
tique prédisposant (antigène HLA B27).
Il peut s’agir :
– d’arthrites réactionnelles à une infection intestinale
(salmonelles, shigelles, etc.) ou uro-génitale (syndrome
de Fiessinger-Leroy Reiter). Ce syndrome débute par
une diarrhée, suivie d’une conjonctivite, d’une inflam-
mation de l’urètre puis d’une arthrite touchant surtout
la colonne vertébrale et les articulations sacro-iliaques.
Des lésions cutanées peuvent apparaître sur la paume
des mains ou la plante des pieds ;
– d’un rhumatisme psoriasique. Il complique 7 à 8 %
des psoriasis. Cette maladie de la peau favorisée par
un terrain génétique particulier est caractérisée par la
formation d’une peau sèche recouverte de squames
qui se reproduisent rapidement et donnent des plaques
plus ou moins larges, rouges et enflammées. Les
lésions sont volontiers situées au niveau des coudes,
des genoux, du pli fessier, du cuir chevelu. Les ongles
prennent un aspect évocateur (ils sont percés de petits
trous comme un dé à coudre) ;
– de maladies intestinales chroniques inflammatoires.
Ces entérocolopathies se caractérisent par une inflam-
mation du tube digestif, évoluant par poussées et
entraînant des ulcérations et une destruction progres-
sive de la muqueuse intestinale. La recto-colite hémor-
ragique atteint la muqueuse du rectum et s’étend vers
le côlon. Elle évolue par poussées au cours desquelles
surviennent des émissions de glaires et de sang dans
les selles. Une diarrhée et des douleurs abdominales
peuvent également s’observer. La maladie de Crohn se
révèle par des douleurs abdominales localisées à la
fosse iliaque droite, de la diarrhée, un amaigrisse-
ment, de la fièvre ou une malabsorption ;
– d’arthrite chronique juvénile ;
– de formes indifférenciées qui sont les plus fréquentes.