D Les hyperparathyroïdies primaires familiales Familialprimaryhyperparathyroidism

Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011
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dossier thématique
Endocrinopathies familiales
Les hyperparathyroïdies
primaires familiales
Familial primary hyperparathyroidism
Catherine Cardot-Bauters*
»
Les hyperparathyroïdies familiales représentent 5 à 10 % de
l’ensemble des hyperparathyroïdies primaires.
»
La reconnaissance d’une forme familiale d’hyperparathyroïdie
primaire modifie la prise en charge thérapeutique du patient.
»
Lenquête génétique doit être orientée par l’anamnèse et les
constatations cliniques.
Mots-clés : Hyperparathyroïdie primaire familiale – NEM1 – NEM2A
HRPT2 – Hypercalcémie familiale hypocalciurique.
Keywords: Familial primary hyperparathyroidism – MEN1 – MEN2A –
HRPT2 – Familial hypocalciuric calcemia.
Points forts
* Service d’endocrino-
logie, hôpital Claude-
Huriez, CHRU de Lille.
D
ans 90 à 95 % des cas, l’hyperparathyroïdie pri-
maire est sporadique, liée à un adénome para-
thyroïdien unique, et le traitement chirurgical
permet d’en assurer la guérison dénitive. À l’inverse,
dans 5 à 10 % des cas, l’hyperparathyroïdie primaire
survient dans le cadre d’un syndrome de prédisposition
génétique (1-3) [tableau I] :
Néoplasie endocrinienne multiple de type 1 (NEM1)
Néoplasie endocrinienne multiple de type 2A
(NEM2A)
Syndrome d’hyperparathyroïdie familiale
(HyperParaThyroidism Jaw Tumor syndrome [HPT-JT])
Hyperparathyroïdie familiale isolée (Familial Isolated
HyperParathyroidism [FIHP])
Hypercalcémie familiale hypocalciurique (Familial
Hypocalciuric Hypercalcemia [FHH])
Tous ces syndromes ont en commun une transmis-
sion autosomique dominante. Une analyse biologique
soigneuse permet en règle générale de reconnaître
l’hypercalcémie familiale hypocalciurique, liée à une
mutation du récepteur sensible au calcium (CASR), bien
que des formes cliniques avec calciurie conservée, voire
élevée, aient été décrites. L’hyperparathyroïdie est rare-
ment vélatrice de la néoplasie endocrinienne multiple
de type2A (NEM2A), et, dans ce cas, elle coïncide le
plus souvent avec une hypercalcitoninémie évocatrice
d’une pathologie des cellules C thyroïdiennes. Devant
une hyperparathyroïdie primaire isolée du sujet jeune,
en cas d’atteinte multiglandulaire ou d’hyperparathy-
roïdie récidivante, il est plus dicile de distinguer les
formes pouvant sintégrer dans le cadre d’une NEM1,
d’un HPT-JT ou de FIHP, en rappelant que ce dernier dia-
gnostic est théoriquement un diagnostic d’élimination.
Néoplasie endocrinienne multiple
de type1
La NEM1 (syndrome de Wermer) est une affection
caractérisée par l’association chez un même patient
d’au moins deux des cinq atteintes majeures suivantes :
hyperparathyroïdie primaire par hyperplasie multiglan-
TableauI. Formes génétiques des hyperparathyroïdies primaires.
Syndrome Gène Atteinte
parathyroïdienne Autres manifestations
NEM1
(OMIM 131 100)
MEN1 (11q13) 90 %
multiglandulaire
Hyperplasie
Adénomes
Tumeur endocrine
duodénopancréatique
Adénome hypophysaire
Atteinte surrénalienne
Tumeur endocrine
thymique
Tumeur endocrine
bronchique
NEM2A
(OMIM 171 400)
RET (10q11.2) 15 à 20 %
Adénome(s)
Hyperplasie
CMT
Phéochromocytome
Notalgia
HPT-JT
(OMIM 145 001)
HRPT2
(1q25-q32)
Adénome(s)
Adénomes atypique(s)
Carcinome(s)
Tumeurs
maxillo-mandibulaires
Lésions rénales
Autres tumeurs
FIHP
(OMIM 145 000)
MEN1, CASR,
HRPT2,
autre ?
Hyperplasie
multiglandulaire
FHH
(OMIM 145 980)
CASR htz
(3q13.3-q21)
Hyperplasie
NS HPT
(OMIM 145980)
CASR hmz
(3q13.3-q21)
Hyperplasie
CMT : cancer médullaire de la thyroïde.
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dossier thématique
Endocrinopathies familiales
dulaire asymétrique (95-100 %), tumeur endocrine duo-
dénopancréatique (30-75 %), adénome hypophysaire
(15-65 %), hyperplasie ou tumeur corticosurrénalienne
(environ 40 %), tumeur endocrine thymique ou bron-
chique (5 à 10 %). Des atteintes mineures extraendocri-
niennes peuvent compléter le tableau clinique : lésions
cutanées diverses (lipomes, angiobromes, lentigines,
nævi, mélanomes, etc.), lésions du système nerveux
central (méningiomes, épendymomes, etc.), rares
tumeurs viscérales (léiomyomes, myosarcomes, etc.).
Les critères diagnostiques de la NEM1 sont résumés
dans le tableau II (2).
La prévalence de la NEM1 est diversement évaluée :
entre 1/40 000 et 1/20 000. La transmission est auto-
somique dominante avec une pénétrance très élevée,
estimée à 45 % à 30 ans, 82 % à 50 ans et 96 % à 70ans.
L’hyperparathyroïdie primaire est au premier plan du
tableau clinique. Elle est souvent inaugurale et parfois
l’unique manifestation de la maladie. Elle peut être clini-
quement asymptomatique ou compliquée de lithiases
rénales ou d’ostéoporose. L’atteinte parathyroïdienne
survient chez 90 à 100 % des sujets présentant une
prédisposition génétique à la NEM1. La pénétrance est
très faible avant l’âge de 15ans et maximale dans la
sixième décennie. Létude du Groupe français d’étude
des tumeurs endocrines portant sur lexpression
clinique de la NEM1 chez les sujets de moins de 20
ans génétiquement prédisposés a mis en évidence
quelques cas précoces survenant avant l’âge de 10
ans. L’âge moyen au diagnostic était de 38 ± 14 ans
initialement ; il est maintenant de 19 ± 5 ans depuis
la généralisation du dépistage familial (5). Le dépis-
tage de ces formes précoces asymptomatiques pose
la question du moment le plus opportun de la prise
en charge thérapeutique. Trois particularités méritent
d’être soulignées : l’atteinte osseuse peut être plurifac-
torielle et relever également d’une autre atteinte de la
NEM1, en particulier hypo physaire ; l’hyperparathyroïdie
aggrave l’hypergastrinémie d’un éventuel gastrinome
associé ; l’hyperparathyroïdie peut s’aggraver lors de
la grossesse et avoir des conséquences délétères sur
les plans maternel (vomissements, lithiases rénales,
pancréatite, hypercalcémie aiguë, etc.), fœtal (retard
de croissance) et néonatal (risque d’hypocalcémie), et
surtout multiplie par 3 à 5 le risque de fausses couches,
particulièrement entre la 10e et la 15e semaine de gros-
sesse et lorsque le niveau calcémique est élevé (6)
Sur le plan histologique, il s’agit le plus souvent d’une
hyperplasie multiglandulaire asymétrique de l’ensemble
des glandes parathyroïdes. Des adénomes parathyroï-
diens sont parfois rencontrés. Quelques cas exception-
nels de carcinomes parathyroïdiens ont été rapportés.
Le traitement chirurgical reste le traitement de réfé-
rence : classiquement, exploration cervicale bilatérale
et parathyroïdectomie subtotale avec thymectomie ne
laissant en place qu’un moignon parathyroïdien dans
le but de rétablir un niveau calcémique normal pour
une durée quon espère la plus longue possible (7)Il
n’y a pas de consensus sur la nécessité de réaliser des
examens de localisation préopératoire mais la scinti-
graphie parathyroïdienne au MIBI-Tc est recommandée
pour détecter une localisation ectopique préalable-
ment à l’intervention chirurgicale. La cryopréservation
de tissu parathyroïdien permet théoriquement une
réimplantation ultérieure en cas d’hypoparathyroïdie
postopératoire sévère et prolongée. En pratique, ce
geste nest pratiquement plus réalisé. Le déterminisme
génétique de la maladie conduit très souvent, mais
dans un délai extrêmement variable, à une récidive de
l’hyperparathyroïdie au l du temps par hyperplasie du
moignon parathyroïdien laissé en place. Dans ce cas,
il n’y a pas de consensus sur l’attitude thérapeutique :
réintervention chirurgicale guidée par l’imagerie préo-
ratoire ou, éventuellement, traitement médical par les
calcimimétiques, très ecaces pour contrôler le niveau
calcémique mais pouvant majorer la calciurie et sans
eet bénéque prouvé sur l’os (8, 9). Une étude rapporte
la normalisation ou la réduction de l’hypercalcémie et
de l’hypercalciurie chez des patients traités par octréo-
tide pour tumeur endocrine duodénopancréatique (10).
Le gène majeur de prédisposition à la NEM1 a écloné
en 1997 (11, 12). Il est situé en 11q13 et comporte
10exons, l’exon 1 et la partie distale de l’exon10 étant
non codants. Cest un gène suppresseur de tumeur,
qui code pour une protéine de 610 acides aminés, la
nine, d’expression ubiquitaire et de localisation
nucléaire ou cytoplasmique selon la phase du cycle
cellulaire. La ménine intervient dans la régulation
Tableau II. Critères diagnostiques de la NEM1 (Conférence de consensus, Gubbio 1999).
Le diagnostic de NEM1 est retenu si au moins deux des critères suivants sont présents :
Hyperparathyroïdie primaire avec hyperplasie pluriglandulaire et/ou adénome
et/ou récidive d’hyperparathyroïdie primaire opérée
Tumeurs endocrines duodénopancréatiques fonctionnelles (gastrinome, insulinome,
glucagonome, autres sécrétions rares) on non fonctionnelles, tumeurs multisécrétantes
avec ou sans signes fonctionnels ou expression hormonale immunohistochimique
Tumeurs de l’antéhypophyse fonctionnelles (GH, PRL, ACTH, etc.) ou non fonctionnelles
ou avec profil multisécrétoire
Tumeurs endocrines de la corticosurrénale avec ou non hyperplasie,
fonctionnelles ou non fonctionnelles
Tumeur endocrine thymique ou bronchique
Un apparenté au premier degré atteint d’au moins une des lésions cardinales (de 1 à 5)
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Les hyperparathyroïdies primaires familiales
négative de la prolifération cellulaire par interaction
avec plusieurs facteurs de gulation de la transcription
(JunD/AP1, Smad 1/3/4, TGFβ, Pem), dans l’organisation
du cytosquelette et de la matrice extracellulaire (GFAP
et vimentine), et dans le contrôle de la réplication et la
réparation de lADN génomique (RpA, FanCD2, nM23).
Une interaction de la ménine avec la chaîne lourde
β2 de la myosine a été mise en évidence sans que les
conséquences fonctionnelles n’en soient actuellement
connues (13). L’altération quantitative ou qualitative
de la ménine joue un rôle fondamental dans le déve-
loppement des tumeurs endocrines rencontrées dans
la NEM1.
Des mutations germinales hétérozygotes du gène
MEN1 sont identiées dans près de 90 % des formes
familiales (4). À ce jour, plus de 500 mutations dié-
rentes ont été décrites. Elles sont réparties sur toute la
région codante du gène, sans véritable hot spot. Dans
70 % des cas, il s’agit de mutations non-sens ou de
délétions/insertions entraînant un décalage du cadre
de lecture avec codon stop prématuré conduisant à
la synthèse d’une protéine tronquée, biologiquement
inactive. Plus rarement, il s’agit de mutations faux-sens
dans la région 5’ ou de mutations des sites d’épissage.
Lorsque la recherche d’une mutation MEN1 est néga-
tive par les techniques habituelles, la recherche de
délétions ou de réarrangements complexes du gène
est indiquée. Dans environ 10 % des cas, il s’agit de
mutations de novo. Jusqu’à présent aucune corrélation
génotype-phénotype n’a pu être mise en évidence, et,
à l’intérieur d’une même famille, on note une grande
variabilité phénotypique.
Lidentication d’une mutation du gène MEN1 chez un
propositus permet de poursuivre l’enquête familiale et
de proposer un diagnostic génotypique prédictif aux
sujets apparentés et, le cas échéant, des examens de
dépistage. Le diagnostic génotypique est systématique-
ment proposé pour tout patient présentant une NEM1
typique selon les critères de Gubbio et est discuté en
cas d’atteinte cardinale isolée (14).
Néoplasie endocrinienne multiple
de type 2A
La NEM2A (syndrome de Sipple) est une affection
de transmission autosomique dominante associant
diversement trois atteintes endocrines majeures : carci-
nome médullaire de la thyroïde, phéochromocytome et
hyperparathyroïdie primaire. À l’inverse, dans la NEM2B
(syndrome de Gorlin), on ne retrouve pas l’atteinte para-
thyroïdienne (4).
L’hyperparathyroïdie primaire est retrouvée chez 20 à
30 % des patients atteints de NEM2A. Elle est le plus
souvent asymptomatique, ou parfois à l’origine d’une
hypercalciurie et de lithiases rénales. L’atteinte para-
thyroïdienne est rarement révélatrice de la maladie.
Il existe pratiquement toujours, antérieurement ou
concomitamment, une atteinte des cellules C thyroï-
diennes, marquée au minimum par l’élévation de la
calcitonine. Histologiquement, il peut s’agir d’adénomes
parathyroïdiens ou d’hyperplasies parathyroïdiennes,
uni- ou multiglandulaires. Le traitement est chirurgi-
cal : exérèse de la ou des glandes parathyroïdiennes
adénomateuses ou hyperplasiques.
Le gène responsable de cette aection est le proto-
oncogène RET, cloné en 1993 et localisé en 10q11.2. Il
code pour un récepteur membranaire à activité tyrosine
kinase dont le ligand est le GDNF (Glial Derived Nerve
Growth Factor), protéine intervenant dans la diéren-
ciation et la migration des cellules du neuroectoderme.
Les NEM2 résultent de mutations activatrices de RET,
essentiellement ponctuelles, aectant 7 des 21 exons du
gène et conduisant à des changements d’acides aminés
soit dans le domaine extracellulaire riche en cystéine
(exons 8, 10 et 11), soit dans le domaine tyrosine kinase
intracytoplasmique (exons 13 à 16). Des corrélations
génotype-phénotype ont été mises en évidence : dans
les NEM2A les mutations aectent principalement les
exons 11 et 10 et dans les NEM2B, les exons 16 puis15.
Lincidence de l’hyperparathyroïdie est plus élevée chez
les patients NEM2A présentant une mutation au codon
634 (exon 11).
La transmission est autosomique dominante. Dans 95 %
des cas, la mutation est héritée de l’un des parents ; dans
5 % des cas, il s’agit d’une mutation de novo.
Lenquête génétique familiale est primordiale et permet
d’identier les sujets présentant la mutation et pour
lesquels une chirurgie prophylactique du carcinome
médullaire de la thyroïde est indiquée.
Hyperparathyroidism Jaw Tumor
Le syndrome d’hyperparathyroïdie familiale, Jaw Tumor
(HyperParaThyroidism Jaw Tumor [HPT-JT]), est un syn-
drome de prédisposition héréditaire aux tumeurs,
de transmission autosomique dominante, à forte
pénétrance (15). Le tableau clinique associe diverse-
ment une hyperparathyroïdie primaire, des tumeurs
osseuses maxillo-mandibulaires, des tumeurs rénales,
des tumeurs utérines, etc.
L’hyperparathyroïdie primaire est présente chez 90 %
des sujets porteurs de la mutation et est en règle
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011
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dossier thématique
Endocrinopathies familiales
générale la première manifestation de la maladie.
Elle survient entre la troisième et la quatrième décen-
nie, parfois avant, dès l’adolescence. Elle est respon-
sable d’une hypercalcémie symptomatique, souvent
sévère. Histologiquement, il s’agit d’une atteinte uni-
ou pluriglandulaire : adénome(s) parathyroïdien(s),
avec souvent des adénomes kystiques, des adénomes
atypiques et un risque accru de carcinomes parathy-
roïdiens (jusqu’à 15 %, selon les séries). La récidive est
fréquente et une transformation néoplasique secon-
daire est possible.
Les tumeurs osseuses (bromes ossiants), de locali-
sation exclusivement maxillaire ou mandibulaire, sont
retrouvées chez 25 à 50 % des patients. Elles peuvent se
velopper dès l’adolescence. Elles sont souvent asymp-
tomatiques et dépistées par les radiographies (pano-
ramique dentaire, tomodensitométrie [TDM]). Elles se
traduisent parfois par une tuméfaction palpable. Elles
évoluent indépendamment de l’hyperparathyroïdie et
se distinguent des tumeurs brunes qui peuvent siéger
en diérents points du squelette et qui guérissent après
traitement de l’hyperparathyroïdie.
Diérentes atteintes rénales sont décrites et retrou-
vées dans 15 % à 40 % des cas : il s’agit le plus souvent
de lésions kystiques (de quelques kystes isolés à une
polykystose bilatérale), plus rarement de tumeurs
solides (hamartomes, tumeurs de Wilms). Elles sont
dépistées par échographie, TDM ou imagerie parso-
nance magnétique (IRM).
Des tumeurs utérines bénignes (adénobromes, léio-
myomes) ou malignes (sarcomes) ont été décrites chez
près de 75 % des femmes atteintes de ce syndrome.
La fréquence accrue d’autres tumeurs (ovaires, côlon,
thyroïde, voies bilaires, etc.) a été évoquée.
Le traitement de l’hyperparathyroïdie est chirurgical.
Certains auteurs proposent d’emblée une parathyroï-
dectomie subtotale en raison de la probabilité d’atteinte
multiglandulaire, d’un taux de récurrence élevé, du
risque de malignité et des dicultés d’une éventuelle
réintervention chirurgicale (16). D’autres auteurs sont
partisans d’une chirurgie limitée à une seule glande
prenant arguments du fait que l’atteinte est le plus
souvent uniglandulaire, que la récurrence est possible
mais non obligatoire et après un intervalle libre parfois
long et que la malignité représente moins de 20 % des
cas, et ils prônent même une chirurgie mini-invasive
guidée par l’imagerie préopératoire. Cette deuxième
attitude permet un traumatisme tissulaire minime et
une réintervention chirurgicale plus facile en cas de
récurrence (17).
La surveillance des patients présentant une muta-
tion HRPT2 repose sur un examen clinique annuel, un
bilan phosphocalcique annuel et un bilan d’imagerie
tous les cinq ans (échographie cervicale, échogra-
phie abdominopelvienne, radiographie panoramique
dentaire).
Les analyses de liaison réalisées à partir de familles
atteintes du syndrome HPT-JT ont permis d’identier
un locus de prédisposition en 1q25-q32. Le gène HRPT2
ou CDC73 a été cloné en 2002 (18). Il s’agit d’un gène
oncosuppresseur, comportant 17 exons et codant pour
une protéine de 531 acides aminés, la parabromine,
dont l’expression est ubiquitaire. La parabromine est
une protéine de localisation essentiellement nucléaire,
qui agit comme modulateur transcriptionnel au niveau
des modications des histones, du remodelage chro-
matinien, des phases dinitiation et d’élongation. Elle
fait partie d’un complexe protéique (PAF1) se liant à
l’ARN polymérase. Son rôle s’inscrit dans la modulation
des voies de signalisation intracellulaire Wnt et Notch,
avec pour eet de contribuer à la régulation de grandes
fonctions cellulaires : prolifération, diérenciation, apop-
tose, survie (19, 20).
La transmission du syndrome est autosomique domi-
nante. La pénétrance est élevée, mais incomplète (10
à 30 % des patients porteurs d’une mutation HRPT2
sont asymptomatiques à l’âge adulte). L’hypothèse
d’une pénétrance réduite chez les femmes a été
évoquée.
Des mutations germinales d’HRPT2 ont été identiées
dans 60 % des familles HPT-JT (15, 21, 22, 23). Une cin-
quantaine de mutations diérentes ont été répertoriées.
Elles sont dispersées sur toute la région codante du
gène, mais se situent surtout dans les exons 1-2 et 7-8.
Il s’agit de mutations inactivatrices : petites délétions de
quelques nucléotides, mutations non-sens ou faux-sens,
mutations des sites d’épissage, petites insertions. Sont
également décrites des délétions de quelques exons
ou de l’ensemble du gène. Les mutations d’HRPT2 ont
pour conséquence une perte d’expression de la para-
bromine, une localisation cellulaire anormale ou une
abolition de son activité antiproliférative.
Aucune corrélation génotype-phénotype n’a jusqu’à
présent été mise en évidence.
Des mutations germinales d’HRPT2 ont également été
retrouvées dans certaines familles étiquetées “hyper-
parathyroïdies familiales isolées” (FIHP), permettant
ainsi de redresser le diagnostic. Dans ces familles, les
caractéristiques histopathologiques et moléculaires
des lésions parathyroïdiennes opérées étaient simi-
laires à celles observées chez des patients atteints
d’HPT-JT.
La prévalence des mutations somatiques d’HRPT2
dans les carcinomes parathyroïdiens sporadiques
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011
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Les hyperparathyroïdies primaires familiales
est diversement évaluée (24). Le problème dans de
nombreuses études, est celui de la distinction entre
adénome parathyroïdien atypique et carcinome
parathyroïdien. En immunohistochimie, l’absence
d’immunoréactivité vis-à-vis de la parafibromine
est un argument complémentaire en faveur de la
malignité.
Hypercalcémie familiale hypocalciurique
L’hypercalcémie familiale hypocalciurique (Familial
Hypocalciuric Hypercalcemia [FHH]) résulte d’une muta-
tion hétérozygote inactivatrice du récepteur sensible
au calcium (25, 26). La transmission est autosomique
dominante avec une pénétrance complète mais une
expressivité variable.
Le prol biologique associe typiquement une hyper-
calcémie, une hypophosphorémie et une hypocalciu-
rie, tandis que l’hormone parathyroïdienne (PTH) est
modérément élevée ou normale mais inappropriée à
l’hypercalcémie. Le rapport de la clairance du calcium
sur la clairance de la créatinine est théoriquement infé-
rieur à 0,01. Cependant, dans certains cas, la calciurie
peut être normale, voire augmentée.
Le diagnostic est souvent fortuit, lors de la découverte
d’une hypercalcémie modérée et, en règle générale,
asymptomatique. Dans la plupart des cas, la calcémie
nexcède pas de plus de 10 % la limite supérieure de
la normale.
La transmission est autosomique dominante et le dia-
gnostic est facilité par la mise en évidence d’autres cas
d’hypercalcémie modérée chez les apparentés.
La mise en évidence d’une mutation du CASR contri-
bue au diagnostic et, à l’inverse, une enquête géné-
tique négative ne permet pas d’exclure le diagnostic,
la mutation pouvant ne pas être mise en évidence par
les techniques usuelles. La responsabilité d’un autre
gène de susceptibilité a également été évoquée dans
certaines familles.
Il s’agit d’une situation bénigne et l’abstention théra-
peutique est de règle.
Les mutations homozygotes inactivatrices du récep-
teur sensible au calcium sont responsables d’hyper-
calcémies néonatales sévères. L’hypercalcémie est
diagnostiquée dans les six premiers mois de vie, elle
est sévère, symptomatique, peut mettre en jeu le
pronostic vital et requiert une parathyroïdectomie
totale en urgence.
Conclusion
Les hyperparathyroïdies primaires génétiquement
terminées ne repsentent que 5 à 10 % de l’ensemble
des hyperparathyroïdies primaires mais imposent une
enquête clinique et génétique précise an d’adapter au
mieux la prise en charge thérapeutique et les modalités
de surveillance. La démarche diagnostique est résumée
dans les encadrés 1 et 2.
En préopératoire
Hyperparathyroïdie primaire isolée du sujet jeune de moins de 40 ans
Atteinte multiglandulaire suspectée par les examens d’imagerie
En postopératoire
Atteinte multiglandulaire prouvée macroscopiquement
Hyperplasie, adénome kystique, carcinome
Hyperparathyroïdie récidivante après chirurgie
Encadré 1. Quand suspecter une hyperparathyroïdie génétique ?
1. Éliminer une hypercalcémie familiale hypercalciurique (FHH)
Antécédents familiaux
Calciurie, rapport de la clairance du calcium sur la clairance de la créatinine < 0,01
2. Reconnaître une NEM2A
Antécédents familiaux
Hyperparathyroïdie rarement révélatrice
Calcitonine
3. Distinguer NEM1 et HPT-JT
Antécédents familiaux
Atteintes associées
Caractéristiques de l’hyperparathyroïdie
NEM1 HRPT2
Hypercalcémie modérée Présentation clinique et biologique plus sévère
Atteinte multiglandulaire Atteinte uniglandulaire
Hyperplasie Adénome atypique, carcinome
Analyse génétique
NEM1/HRPT2
Screening par DHPLC (Denaturing High-Performance Liquid Chromatography),
séquençage, recherche de délétions
4. Optimiser la prise en charge thérapeutique
5. Surveillance postopératoire
Parathyroïdes
Autres organes
Encadré 2. Conduite à tenir en cas de suspicion d’hyperparathyroïdie familiale.
1 / 6 100%

D Les hyperparathyroïdies primaires familiales Familialprimaryhyperparathyroidism

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