Endocrinopathies familiales dossier thématique Les hyperparathyroïdies primaires familiales Familial primary hyperparathyroidism Catherine Cardot-Bauters* D ans 90 à 95 % des cas, l’hyperparathyroïdie primaire est sporadique, liée à un adénome parathyroïdien unique, et le traitement chirurgical permet d’en assurer la guérison définitive. À l’inverse, dans 5 à 10 % des cas, l’hyperparathyroïdie primaire survient dans le cadre d’un syndrome de prédisposition génétique (1-3) [tableau I] : ✓✓ Néoplasie endocrinienne multiple de type 1 (NEM1) ✓✓ Néoplasie endocrinienne multiple de type 2A (NEM2A) ✓✓ Syndrome d’hyperparathyroïdie familiale (HyperParaThyroidism Jaw Tumor syndrome [HPT-JT]) ✓✓ Hyperparathyroïdie familiale isolée (Familial Isolated HyperParathyroidism [FIHP]) ✓✓ Hypercalcémie familiale hypocalciurique (Familial Hypocalciuric Hypercalcemia [FHH]) Tous ces syndromes ont en commun une transmission autosomique dominante. Une analyse biologique soigneuse permet en règle générale de reconnaître l’hypercalcémie familiale hypocalciurique, liée à une mutation du récepteur sensible au calcium (CASR), bien que des formes cliniques avec calciurie conservée, voire élevée, aient été décrites. L’hyperparathyroïdie est rarement révélatrice de la néoplasie endocrinienne multiple de type 2A (NEM2A), et, dans ce cas, elle coïncide le plus souvent avec une hypercalcitoninémie évocatrice d’une pathologie des cellules C thyroïdiennes. Devant une hyperparathyroïdie primaire isolée du sujet jeune, en cas d’atteinte multiglandulaire ou d’hyperparathyroïdie récidivante, il est plus difficile de distinguer les formes pouvant s’intégrer dans le cadre d’une NEM1, d’un HPT-JT ou de FIHP, en rappelant que ce dernier diagnostic est théoriquement un diagnostic d’élimination. Néoplasie endocrinienne multiple de type 1 La NEM1 (syndrome de Wermer) est une affection caractérisée par l’association chez un même patient d’au moins deux des cinq atteintes majeures suivantes : hyperparathyroïdie primaire par hyperplasie multiglan- »»Les hyperparathyroïdies familiales représentent 5 à 10 % de l’ensemble des hyperparathyroïdies primaires. »»La reconnaissance d’une forme familiale d’hyperparathyroïdie primaire modifie la prise en charge thérapeutique du patient. »»L’enquête génétique doit être orientée par l’anamnèse et les constatations cliniques. Mots-clés : Hyperparathyroïdie primaire familiale – NEM1 – NEM2A – HRPT2 – Hypercalcémie familiale hypocalciurique. Keywords: Familial primary hyperparathyroidism – MEN1 – MEN2A – HRPT2 – Familial hypocalciuric calcemia. Tableau I. Formes génétiques des hyperparathyroïdies primaires. Syndrome Gène Atteinte parathyroïdienne Autres manifestations NEM1 (OMIM 131 100) MEN1 (11q13) 90 % multiglandulaire Hyperplasie Adénomes Tumeur endocrine duodénopancréatique Adénome hypophysaire Atteinte surrénalienne Tumeur endocrine thymique Tumeur endocrine bronchique NEM2A (OMIM 171 400) RET (10q11.2) 15 à 20 % Adénome(s) Hyperplasie CMT Phéochromocytome Notalgia HPT-JT (OMIM 145 001) HRPT2 (1q25-q32) Adénome(s) Adénomes atypique(s) Carcinome(s) Tumeurs maxillo-mandibulaires Lésions rénales Autres tumeurs FIHP (OMIM 145 000) MEN1, CASR, HRPT2, autre ? Hyperplasie multiglandulaire FHH (OMIM 145 980) CASR htz (3q13.3-q21) Hyperplasie NS HPT (OMIM 145 980) CASR hmz (3q13.3-q21) Hyperplasie CMT : cancer médullaire de la thyroïde. Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011 57 P o i nt s f o rt s * Service d’endocrino­ logie, hôpital ClaudeHuriez, CHRU de Lille. Endocrinopathies familiales dossier thématique dulaire asymétrique (95-100 %), tumeur endocrine duodénopancréatique (30-75 %), adénome hypophysaire (15-65 %), hyperplasie ou tumeur corticosurrénalienne (environ 40 %), tumeur endocrine thymique ou bronchique (5 à 10 %). Des atteintes mineures extraendocriniennes peuvent compléter le tableau clinique : lésions cutanées diverses (lipomes, angiofibromes, lentigines, nævi, mélanomes, etc.), lésions du système nerveux central (méningiomes, épendymomes, etc.), rares tumeurs viscérales (léiomyomes, myosarcomes, etc.). Les critères diagnostiques de la NEM1 sont résumés dans le tableau II (2). La prévalence de la NEM1 est diversement évaluée : entre 1/40 000 et 1/20 000. La transmission est autosomique dominante avec une pénétrance très élevée, estimée à 45 % à 30 ans, 82 % à 50 ans et 96 % à 70 ans. L’hyperparathyroïdie primaire est au premier plan du tableau clinique. Elle est souvent inaugurale et parfois l’unique manifestation de la maladie. Elle peut être cliniquement asymptomatique ou compliquée de lithiases rénales ou d’ostéoporose. L’atteinte parathyroïdienne survient chez 90 à 100 % des sujets présentant une prédisposition génétique à la NEM1. La pénétrance est très faible avant l’âge de 15 ans et maximale dans la sixième décennie. L’étude du Groupe français d’étude des tumeurs endocrines portant sur l’expression clinique de la NEM1 chez les sujets de moins de 20 ans génétiquement prédisposés a mis en évidence quelques cas précoces survenant avant l’âge de 10 ans. L’âge moyen au diagnostic était de 38 ± 14 ans initialement ; il est maintenant de 19 ± 5 ans depuis la généralisation du dépistage familial (5). Le dépistage de ces formes précoces asymptomatiques pose la question du moment le plus opportun de la prise en charge thérapeutique. Trois particularités méritent d’être soulignées : l’atteinte osseuse peut être plurifac- Tableau II. Critères diagnostiques de la NEM1 (Conférence de consensus, Gubbio 1999). Le diagnostic de NEM1 est retenu si au moins deux des critères suivants sont présents : Hyperparathyroïdie primaire avec hyperplasie pluriglandulaire et/ou adénome et/ou récidive d’hyperparathyroïdie primaire opérée Tumeurs endocrines duodénopancréatiques fonctionnelles (gastrinome, insulinome, glucagonome, autres sécrétions rares) on non fonctionnelles, tumeurs multisécrétantes avec ou sans signes fonctionnels ou expression hormonale immunohistochimique Tumeurs de l’antéhypophyse fonctionnelles (GH, PRL, ACTH, etc.) ou non fonctionnelles ou avec profil multisécrétoire Tumeurs endocrines de la corticosurrénale avec ou non hyperplasie, fonctionnelles ou non fonctionnelles Tumeur endocrine thymique ou bronchique Un apparenté au premier degré atteint d’au moins une des lésions cardinales (de 1 à 5) 58 torielle et relever également d’une autre atteinte de la NEM1, en particulier hypo­physaire ; l’hyperparathyroïdie aggrave l’hypergastrinémie d’un éventuel gastrinome associé ; l’hyperparathyroïdie peut s’aggraver lors de la grossesse et avoir des conséquences délétères sur les plans maternel (vomissements, lithiases rénales, pancréatite, hypercalcémie aiguë, etc.), fœtal (retard de croissance) et néonatal (risque d’hypocalcémie), et surtout multiplie par 3 à 5 le risque de fausses couches, particulièrement entre la 10e et la 15e semaine de grossesse et lorsque le niveau calcémique est élevé (6)… Sur le plan histologique, il s’agit le plus souvent d’une hyperplasie multiglandulaire asymétrique de l’ensemble des glandes parathyroïdes. Des adénomes parathyroïdiens sont parfois rencontrés. Quelques cas exceptionnels de carcinomes parathyroïdiens ont été rapportés. Le traitement chirurgical reste le traitement de référence : classiquement, exploration cervicale bilatérale et parathyroïdectomie subtotale avec thymectomie ne laissant en place qu’un moignon parathyroïdien dans le but de rétablir un niveau calcémique normal pour une durée qu’on espère la plus longue possible (7)… Il n’y a pas de consensus sur la nécessité de réaliser des examens de localisation préopératoire mais la scintigraphie parathyroïdienne au MIBI-Tc est recommandée pour détecter une localisation ectopique préalablement à l’intervention chirurgicale. La cryopréservation de tissu parathyroïdien permet théoriquement une réimplantation ultérieure en cas d’hypoparathyroïdie postopératoire sévère et prolongée. En pratique, ce geste n’est pratiquement plus réalisé. Le déterminisme génétique de la maladie conduit très souvent, mais dans un délai extrêmement variable, à une récidive de l’hyperparathyroïdie au fil du temps par hyperplasie du moignon parathyroïdien laissé en place. Dans ce cas, il n’y a pas de consensus sur l’attitude thérapeutique : réintervention chirurgicale guidée par l’imagerie préopératoire ou, éventuellement, traitement médical par les calcimimétiques, très efficaces pour contrôler le niveau calcémique mais pouvant majorer la calciurie et sans effet bénéfique prouvé sur l’os (8, 9). Une étude rapporte la normalisation ou la réduction de l’hypercalcémie et de l’hypercalciurie chez des patients traités par octréotide pour tumeur endocrine duodénopancréatique (10). Le gène majeur de prédisposition à la NEM1 a été cloné en 1997 (11, 12). Il est situé en 11q13 et comporte 10 exons, l’exon 1 et la partie distale de l’exon 10 étant non codants. C’est un gène suppresseur de tumeur, qui code pour une protéine de 610 acides aminés, la ménine, d’expression ubiquitaire et de localisation nucléaire ou cytoplasmique selon la phase du cycle cellulaire. La ménine intervient dans la régulation Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011 Les hyperparathyroïdies primaires familiales négative de la prolifération cellulaire par interaction avec plusieurs facteurs de régulation de la transcription (JunD/AP1, Smad 1/3/4, TGFβ, Pem), dans l’organisation du cytosquelette et de la matrice extracellulaire (GFAP et vimentine), et dans le contrôle de la réplication et la réparation de l’ADN génomique (RpA, FanCD2, nM23). Une interaction de la ménine avec la chaîne lourde β2 de la myosine a été mise en évidence sans que les conséquences fonctionnelles n’en soient actuellement connues (13). L’altération quantitative ou qualitative de la ménine joue un rôle fondamental dans le développement des tumeurs endocrines rencontrées dans la NEM1. Des mutations germinales hétérozygotes du gène MEN1 sont identifiées dans près de 90 % des formes familiales (4). À ce jour, plus de 500 mutations différentes ont été décrites. Elles sont réparties sur toute la région codante du gène, sans véritable hot spot. Dans 70 % des cas, il s’agit de mutations non-sens ou de délétions/insertions entraînant un décalage du cadre de lecture avec codon stop prématuré conduisant à la synthèse d’une protéine tronquée, biologiquement inactive. Plus rarement, il s’agit de mutations faux-sens dans la région 5’ ou de mutations des sites d’épissage. Lorsque la recherche d’une mutation MEN1 est négative par les techniques habituelles, la recherche de délétions ou de réarrangements complexes du gène est indiquée. Dans environ 10 % des cas, il s’agit de mutations de novo. Jusqu’à présent aucune corrélation génotype-phénotype n’a pu être mise en évidence, et, à l’intérieur d’une même famille, on note une grande variabilité phénotypique. L’identification d’une mutation du gène MEN1 chez un propositus permet de poursuivre l’enquête familiale et de proposer un diagnostic génotypique prédictif aux sujets apparentés et, le cas échéant, des examens de dépistage. Le diagnostic génotypique est systématiquement proposé pour tout patient présentant une NEM1 typique selon les critères de Gubbio et est discuté en cas d’atteinte cardinale isolée (14). L’hyperparathyroïdie primaire est retrouvée chez 20 à 30 % des patients atteints de NEM2A. Elle est le plus souvent asymptomatique, ou parfois à l’origine d’une hypercalciurie et de lithiases rénales. L’atteinte parathyroïdienne est rarement révélatrice de la maladie. Il existe pratiquement toujours, antérieurement ou concomitamment, une atteinte des cellules C thyroïdiennes, marquée au minimum par l’élévation de la calcitonine. Histologiquement, il peut s’agir d’adénomes parathyroïdiens ou d’hyperplasies parathyroïdiennes, uni- ou multiglandulaires. Le traitement est chirurgical : exérèse de la ou des glandes parathyroïdiennes adénomateuses ou hyperplasiques. Le gène responsable de cette affection est le protooncogène RET, cloné en 1993 et localisé en 10q11.2. Il code pour un récepteur membranaire à activité tyrosine kinase dont le ligand est le GDNF (Glial Derived Nerve Growth Factor), protéine intervenant dans la différenciation et la migration des cellules du neuroectoderme. Les NEM2 résultent de mutations activatrices de RET, essentiellement ponctuelles, affectant 7 des 21 exons du gène et conduisant à des changements d’acides aminés soit dans le domaine extracellulaire riche en cystéine (exons 8, 10 et 11), soit dans le domaine tyrosine kinase intracytoplasmique (exons 13 à 16). Des corrélations génotype-phénotype ont été mises en évidence : dans les NEM2A les mutations affectent principalement les exons 11 et 10 et dans les NEM2B, les exons 16 puis 15. L’incidence de l’hyperparathyroïdie est plus élevée chez les patients NEM2A présentant une mutation au codon 634 (exon 11). La transmission est autosomique dominante. Dans 95 % des cas, la mutation est héritée de l’un des parents ; dans 5 % des cas, il s’agit d’une mutation de novo. L’enquête génétique familiale est primordiale et permet d’identifier les sujets présentant la mutation et pour lesquels une chirurgie prophylactique du carcinome médullaire de la thyroïde est indiquée. Néoplasie endocrinienne multiple de type 2A Le syndrome d’hyperparathyroïdie familiale, Jaw Tumor (HyperParaThyroidism Jaw Tumor [HPT-JT]), est un syndrome de prédisposition héréditaire aux tumeurs, de transmission autosomique dominante, à forte pénétrance (15). Le tableau clinique associe diversement une hyperparathyroïdie primaire, des tumeurs osseuses maxillo-mandibulaires, des tumeurs rénales, des tumeurs utérines, etc. L’hyperparathyroïdie primaire est présente chez 90 % des sujets porteurs de la mutation et est en règle La NEM2A (syndrome de Sipple) est une affection de transmission autosomique dominante associant diversement trois atteintes endocrines majeures : carcinome médullaire de la thyroïde, phéochromocytome et hyperparathyroïdie primaire. À l’inverse, dans la NEM2B (syndrome de Gorlin), on ne retrouve pas l’atteinte parathyroïdienne (4). Hyperparathyroidism Jaw Tumor Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011 59 Endocrinopathies familiales dossier thématique générale la première manifestation de la maladie. Elle survient entre la troisième et la quatrième décennie, parfois avant, dès l’adolescence. Elle est responsable d’une hypercalcémie symptomatique, souvent sévère. Histologiquement, il s’agit d’une atteinte uniou pluriglandulaire : adénome(s) parathyroïdien(s), avec souvent des adénomes kystiques, des adénomes atypiques et un risque accru de carcinomes parathyroïdiens (jusqu’à 15 %, selon les séries). La récidive est fréquente et une transformation néoplasique secondaire est possible. Les tumeurs osseuses (fibromes ossifiants), de localisation exclusivement maxillaire ou mandibulaire, sont retrouvées chez 25 à 50 % des patients. Elles peuvent se développer dès l’adolescence. Elles sont souvent asymptomatiques et dépistées par les radiographies (panoramique dentaire, tomodensitométrie [TDM]). Elles se traduisent parfois par une tuméfaction palpable. Elles évoluent indépendamment de l’hyperparathyroïdie­et se distinguent des tumeurs brunes qui peuvent siéger en différents points du squelette et qui guérissent après traitement de l’hyperparathyroïdie. Différentes atteintes rénales sont décrites et retrouvées dans 15 % à 40 % des cas : il s’agit le plus souvent de lésions kystiques (de quelques kystes isolés à une polykystose bilatérale), plus rarement de tumeurs solides (hamartomes, tumeurs de Wilms). Elles sont dépistées par échographie, TDM ou imagerie par résonance magnétique (IRM). Des tumeurs utérines bénignes (adénofibromes, léiomyomes) ou malignes (sarcomes) ont été décrites chez près de 75 % des femmes atteintes de ce syndrome. La fréquence accrue d’autres tumeurs (ovaires, côlon, thyroïde, voies bilaires, etc.) a été évoquée. Le traitement de l’hyperparathyroïdie est chirurgical. Certains auteurs proposent d’emblée une parathyroïdectomie subtotale en raison de la probabilité d’atteinte multiglandulaire, d’un taux de récurrence élevé, du risque de malignité et des difficultés d’une éventuelle réintervention chirurgicale (16). D’autres auteurs sont partisans d’une chirurgie limitée à une seule glande prenant arguments du fait que l’atteinte est le plus souvent uniglandulaire, que la récurrence est possible mais non obligatoire et après un intervalle libre parfois long et que la malignité représente moins de 20 % des cas, et ils prônent même une chirurgie mini-invasive guidée par l’imagerie préopératoire. Cette deuxième attitude permet un traumatisme tissulaire minime et une réintervention chirurgicale plus facile en cas de récurrence (17). La surveillance des patients présentant une mutation HRPT2 repose sur un examen clinique annuel, un 60 bilan phosphocalcique annuel et un bilan d’imagerie tous les cinq ans (échographie cervicale, échographie abdominopelvienne, radiographie panoramique dentaire). Les analyses de liaison réalisées à partir de familles atteintes du syndrome HPT-JT ont permis d’identifier un locus de prédisposition en 1q25-q32. Le gène HRPT2 ou CDC73 a été cloné en 2002 (18). Il s’agit d’un gène oncosuppresseur, comportant 17 exons et codant pour une protéine de 531 acides aminés, la parafibromine, dont l’expression est ubiquitaire. La parafibromine est une protéine de localisation essentiellement nucléaire, qui agit comme modulateur transcriptionnel au niveau des modifications des histones, du remodelage chromatinien, des phases d’initiation et d’élongation. Elle fait partie d’un complexe protéique (PAF1) se liant à l’ARN polymérase. Son rôle s’inscrit dans la modulation des voies de signalisation intracellulaire Wnt et Notch, avec pour effet de contribuer à la régulation de grandes fonctions cellulaires : prolifération, différenciation, apoptose, survie (19, 20). La transmission du syndrome est autosomique dominante. La pénétrance est élevée, mais incomplète (10 à 30 % des patients porteurs d’une mutation HRPT2 sont asymptomatiques à l’âge adulte). L’hypothèse d’une pénétrance réduite chez les femmes a été évoquée. Des mutations germinales d’HRPT2 ont été identifiées dans 60 % des familles HPT-JT (15, 21, 22, 23). Une cinquantaine de mutations différentes ont été répertoriées. Elles sont dispersées sur toute la région codante du gène, mais se situent surtout dans les exons 1-2 et 7-8. Il s’agit de mutations inactivatrices : petites délétions de quelques nucléotides, mutations non-sens ou faux-sens, mutations des sites d’épissage, petites insertions. Sont également décrites des délétions de quelques exons ou de l’ensemble du gène. Les mutations d’HRPT2 ont pour conséquence une perte d’expression de la parafibromine, une localisation cellulaire anormale ou une abolition de son activité antiproliférative. Aucune corrélation génotype-phénotype n’a jusqu’à présent été mise en évidence. Des mutations germinales d’HRPT2 ont également été retrouvées dans certaines familles étiquetées “hyperparathyroïdies familiales isolées” (FIHP), permettant ainsi de redresser le diagnostic. Dans ces familles, les caractéristiques histopathologiques et moléculaires des lésions parathyroïdiennes opérées étaient similaires à celles observées chez des patients atteints d’HPT-JT. La prévalence des mutations somatiques d’HRPT2 dans les carcinomes parathyroïdiens sporadiques Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011 Les hyperparathyroïdies primaires familiales est diversement évaluée (24). Le problème dans de nombreuses études, est celui de la distinction entre adénome parathyroïdien atypique et carcinome parathyroïdien. En immunohistochimie, l’absence d’immunoréactivité vis-à-vis de la parafibromine est un argument complémentaire en faveur de la malignité. Hypercalcémie familiale hypocalciurique L’hypercalcémie familiale hypocalciurique (Familial Hypocalciuric Hypercalcemia [FHH]) résulte d’une mutation hétérozygote inactivatrice du récepteur sensible au calcium (25, 26). La transmission est autosomique dominante avec une pénétrance complète mais une expressivité variable. Le profil biologique associe typiquement une hypercalcémie, une hypophosphorémie et une hypocalciurie, tandis que l’hormone parathyroïdienne (PTH) est modérément élevée ou normale mais inappropriée à l’hypercalcémie. Le rapport de la clairance du calcium sur la clairance de la créatinine est théoriquement inférieur à 0,01. Cependant, dans certains cas, la calciurie peut être normale, voire augmentée. Le diagnostic est souvent fortuit, lors de la découverte d’une hypercalcémie modérée et, en règle générale, asymptomatique. Dans la plupart des cas, la calcémie n’excède pas de plus de 10 % la limite supérieure de la normale. La transmission est autosomique dominante et le diagnostic est facilité par la mise en évidence d’autres cas d’hypercalcémie modérée chez les apparentés. La mise en évidence d’une mutation du CASR contribue au diagnostic et, à l’inverse, une enquête génétique négative ne permet pas d’exclure le diagnostic, la mutation pouvant ne pas être mise en évidence par les techniques usuelles. La responsabilité d’un autre gène de susceptibilité a également été évoquée dans certaines familles. Il s’agit d’une situation bénigne et l’abstention thérapeutique est de règle. Les mutations homozygotes inactivatrices du récepteur sensible au calcium sont responsables d’hypercalcémies néonatales sévères. L’hypercalcémie est diagnostiquée dans les six premiers mois de vie, elle est sévère, symptomatique, peut mettre en jeu le pronostic vital et requiert une parathyroïdectomie totale en urgence. Conclusion Les hyperparathyroïdies primaires génétiquement déterminées ne représentent que 5 à 10 % de l’ensemble des hyperparathyroïdies primaires mais imposent une enquête clinique et génétique précise afin d’adapter au mieux la prise en charge thérapeutique et les modalités de surveillance. La démarche diagnostique est résumée dans les encadrés 1 et 2. ■ En préopératoire •• Hyperparathyroïdie primaire isolée du sujet jeune de moins de 40 ans •• Atteinte multiglandulaire suspectée par les examens d’imagerie En postopératoire •• Atteinte multiglandulaire prouvée macroscopiquement •• Hyperplasie, adénome kystique, carcinome •• Hyperparathyroïdie récidivante après chirurgie Encadré 1. Quand suspecter une hyperparathyroïdie génétique ? 1. Éliminer une hypercalcémie familiale hypercalciurique (FHH) •• Antécédents familiaux •• Calciurie, rapport de la clairance du calcium sur la clairance de la créatinine < 0,01 2. Reconnaître une NEM2A •• Antécédents familiaux •• Hyperparathyroïdie rarement révélatrice •• Calcitonine 3. Distinguer NEM1 et HPT-JT •• Antécédents familiaux •• Atteintes associées •• Caractéristiques de l’hyperparathyroïdie NEM1 HRPT2 Hypercalcémie modérée Présentation clinique et biologique plus sévère Atteinte multiglandulaire Atteinte uniglandulaire Hyperplasie Adénome atypique, carcinome •• Analyse génétique NEM1/HRPT2 Screening par DHPLC (Denaturing High-Performance Liquid Chromatography), séquençage, recherche de délétions 4. Optimiser la prise en charge thérapeutique 5. Surveillance postopératoire •• Parathyroïdes •• Autres organes Encadré 2. Conduite à tenir en cas de suspicion d’hyperparathyroïdie familiale. 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