Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 3 - mars 2011
58
dossier thématique
Endocrinopathies familiales
dulaire asymétrique (95-100 %), tumeur endocrine duo-
dénopancréatique (30-75 %), adénome hypophysaire
(15-65 %), hyperplasie ou tumeur corticosurrénalienne
(environ 40 %), tumeur endocrine thymique ou bron-
chique (5 à 10 %). Des atteintes mineures extraendocri-
niennes peuvent compléter le tableau clinique : lésions
cutanées diverses (lipomes, angiobromes, lentigines,
nævi, mélanomes, etc.), lésions du système nerveux
central (méningiomes, épendymomes, etc.), rares
tumeurs viscérales (léiomyomes, myosarcomes, etc.).
Les critères diagnostiques de la NEM1 sont résumés
dans le tableau II (2).
La prévalence de la NEM1 est diversement évaluée :
entre 1/40 000 et 1/20 000. La transmission est auto-
somique dominante avec une pénétrance très élevée,
estimée à 45 % à 30 ans, 82 % à 50 ans et 96 % à 70ans.
L’hyperparathyroïdie primaire est au premier plan du
tableau clinique. Elle est souvent inaugurale et parfois
l’unique manifestation de la maladie. Elle peut être clini-
quement asymptomatique ou compliquée de lithiases
rénales ou d’ostéoporose. L’atteinte parathyroïdienne
survient chez 90 à 100 % des sujets présentant une
prédisposition génétique à la NEM1. La pénétrance est
très faible avant l’âge de 15ans et maximale dans la
sixième décennie. L’étude du Groupe français d’étude
des tumeurs endocrines portant sur l’expression
clinique de la NEM1 chez les sujets de moins de 20
ans génétiquement prédisposés a mis en évidence
quelques cas précoces survenant avant l’âge de 10
ans. L’âge moyen au diagnostic était de 38 ± 14 ans
initialement ; il est maintenant de 19 ± 5 ans depuis
la généralisation du dépistage familial (5). Le dépis-
tage de ces formes précoces asymptomatiques pose
la question du moment le plus opportun de la prise
en charge thérapeutique. Trois particularités méritent
d’être soulignées : l’atteinte osseuse peut être plurifac-
torielle et relever également d’une autre atteinte de la
NEM1, en particulier hypo physaire ; l’hyperparathyroïdie
aggrave l’hypergastrinémie d’un éventuel gastrinome
associé ; l’hyperparathyroïdie peut s’aggraver lors de
la grossesse et avoir des conséquences délétères sur
les plans maternel (vomissements, lithiases rénales,
pancréatite, hypercalcémie aiguë, etc.), fœtal (retard
de croissance) et néonatal (risque d’hypocalcémie), et
surtout multiplie par 3 à 5 le risque de fausses couches,
particulièrement entre la 10e et la 15e semaine de gros-
sesse et lorsque le niveau calcémique est élevé (6)…
Sur le plan histologique, il s’agit le plus souvent d’une
hyperplasie multiglandulaire asymétrique de l’ensemble
des glandes parathyroïdes. Des adénomes parathyroï-
diens sont parfois rencontrés. Quelques cas exception-
nels de carcinomes parathyroïdiens ont été rapportés.
Le traitement chirurgical reste le traitement de réfé-
rence : classiquement, exploration cervicale bilatérale
et parathyroïdectomie subtotale avec thymectomie ne
laissant en place qu’un moignon parathyroïdien dans
le but de rétablir un niveau calcémique normal pour
une durée qu’on espère la plus longue possible (7)… Il
n’y a pas de consensus sur la nécessité de réaliser des
examens de localisation préopératoire mais la scinti-
graphie parathyroïdienne au MIBI-Tc est recommandée
pour détecter une localisation ectopique préalable-
ment à l’intervention chirurgicale. La cryopréservation
de tissu parathyroïdien permet théoriquement une
réimplantation ultérieure en cas d’hypoparathyroïdie
postopératoire sévère et prolongée. En pratique, ce
geste n’est pratiquement plus réalisé. Le déterminisme
génétique de la maladie conduit très souvent, mais
dans un délai extrêmement variable, à une récidive de
l’hyperparathyroïdie au l du temps par hyperplasie du
moignon parathyroïdien laissé en place. Dans ce cas,
il n’y a pas de consensus sur l’attitude thérapeutique :
réintervention chirurgicale guidée par l’imagerie préo-
pératoire ou, éventuellement, traitement médical par les
calcimimétiques, très ecaces pour contrôler le niveau
calcémique mais pouvant majorer la calciurie et sans
eet bénéque prouvé sur l’os (8, 9). Une étude rapporte
la normalisation ou la réduction de l’hypercalcémie et
de l’hypercalciurie chez des patients traités par octréo-
tide pour tumeur endocrine duodénopancréatique (10).
Le gène majeur de prédisposition à la NEM1 a été cloné
en 1997 (11, 12). Il est situé en 11q13 et comporte
10exons, l’exon 1 et la partie distale de l’exon10 étant
non codants. C’est un gène suppresseur de tumeur,
qui code pour une protéine de 610 acides aminés, la
ménine, d’expression ubiquitaire et de localisation
nucléaire ou cytoplasmique selon la phase du cycle
cellulaire. La ménine intervient dans la régulation
Tableau II. Critères diagnostiques de la NEM1 (Conférence de consensus, Gubbio 1999).
Le diagnostic de NEM1 est retenu si au moins deux des critères suivants sont présents :
Hyperparathyroïdie primaire avec hyperplasie pluriglandulaire et/ou adénome
et/ou récidive d’hyperparathyroïdie primaire opérée
Tumeurs endocrines duodénopancréatiques fonctionnelles (gastrinome, insulinome,
glucagonome, autres sécrétions rares) on non fonctionnelles, tumeurs multisécrétantes
avec ou sans signes fonctionnels ou expression hormonale immunohistochimique
Tumeurs de l’antéhypophyse fonctionnelles (GH, PRL, ACTH, etc.) ou non fonctionnelles
ou avec profil multisécrétoire
Tumeurs endocrines de la corticosurrénale avec ou non hyperplasie,
fonctionnelles ou non fonctionnelles
Tumeur endocrine thymique ou bronchique
Un apparenté au premier degré atteint d’au moins une des lésions cardinales (de 1 à 5)