Les troubles du sommeil représentent une part non négligeable de... pratique quotidienne en pédiatrie générale

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L
a connaissance de quelques élé-
ments du processus neurobiolo-
gique qu’est le sommeil permet
de dépister au plus tôt ses anomalies et
d’orienter l’enfant vers les structures les
plus adaptées de dépistage et de théra-
peutique.
La durée du sommeil, qui est de seize à
dix-sept heures chez le nouveau-né,
passe à quatorze heures à un an, treize
heures à deux ans, onze heures à six
ans, dix heures à dix ans, puis à huit
heures à l’adolescence. Il existe une
grande variabilité interindividuelle.
De trois à six mois, le nourrisson fait
trois siestes. A un an, la sieste de fin
d’après-midi disparaît, puis celle de fin
de matinée vers dix-huit mois, alors que
le sommeil nocturne dure onze à douze
heures. La sieste disparaît complète-
ment entre deux et quatre ans.
Le sommeil se déroule par cycles où se
succèdent trois états : éveil, sommeil
paradoxal (REMsleep : rapid eyes mo-
vement) et sommeil lent (non REM-
sleep), qui contient des phases de som-
meil profond.
L’analyse du sommeil intègre des para-
mètres de régulation biologique ainsi
que des éléments psychosociaux, cultu-
rels, voire médicamenteux. Tous ces
éléments sont à prendre en compte par
les acteurs de l’enfance.
TROUBLES RESPIRATOIRES
DU SOMMEIL
[2-6]
Les troubles respiratoires du sommeil
(TRS) vont du simple ronflement (dont
la prévalence est de 12 à 15 %) au syn-
drome d’apnée obstructive du sommeil
(SAOS), qui concerne 1,5 à 3 % des en-
fants. Entre ces deux extrêmes de TRS,
on citera le syndrome de haute résistan-
ce des voies aériennes. Si l’adulte se
plaint principalement de troubles de la
vigilance diurne, les parents signalent
au premier chef les ronflements noc-
turnes de leur enfant. Ce symptôme est
donc à rechercher lors des visites systé-
matiques (voir l’encadré résumant les
éléments du diagnostic clinique).
LES OUTILS DIAGNOSTIQUES
L’oxymétrie nocturne
Les éléments à interpréter sont la satura-
tion moyenne et le pourcentage de temps
pendant lequel la SaO
2
est inférieure à
90 %, mais, si la sensibilité de l’oxymétrie
est bonne, sa valeur prédictive négative
est médiocre et n’élimine pas un SAOS en
cas d’enregistrement normal.
La polysomnographie (PSG) sur une
nuit
Cet examen est le « gold standard » pour
le diagnostic de SAOS. Il enregistre de
façon simultanée plusieurs paramètres :
la saturation en O
2
, la pression partielle
en CO
2
transcutanée ou endonasale,
l’ECG, l’EEG, les mouvements oculaires
(électro-oculogramme), le flux nasal
Les troubles du sommeil représentent une part non négligeable de la
pratique quotidienne en pédiatrie générale [1]. 25 à 50 % des enfants
et/ou adolescents présenteront ce type de perturbations, qui seront
dans la majorité bénignes et transitoires.
Nous séparerons les troubles respiratoires du sommeil (TRS), qui font
actuellement l’objet de nombreuses publications, des autres pathologies
du sommeil. Leurs conséquences délétères sur le développement neuro-
cognitif et le comportement de l’enfant nécessitent un diagnostic précis
et une prise en charge la plus précoce possible.
L’importance du sommeil se reflète dans le nombre croissant, non seu-
lement d’articles dans la littérature, mais également d’unités spéciali-
sées dans l’analyse du sommeil de l’enfant et de l’adolescent.
Troubles respiratoires du sommeil et autres
pathologies du sommeil chez l’enfant
M. Koskas et l’équipe médicale du centre du sommeil, hôpital d’enfants Armand-Trousseau, Paris
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et/ou buccal, les efforts respiratoires
(mouvements thoraciques et abdomi-
naux), la position de l’enfant. Un enre-
gistrement vidéo peut compléter la
PSG. Cet examen nécessite un matériel
et un personnel adaptés à l’enfant et se
pratique le plus souvent en milieu spé-
cialisé ; il est réalisé sans sédation et
sans privation de sommeil et en dehors
d’un événement infectieux récent. Un
des problèmes rencontrés pour analyser
les résultats de cet examen est l’absence
de normes pédiatriques, les normes uti-
lisées chez l’adulte ne pouvant être re-
prises en raison des différences physio-
logiques.
L’évaluation des résultats se fait sur plu-
sieurs critères, qui permettent de quan-
tifier le degré d’obstruction respiratoire
(normal, simple ronflement, syndrome
de haute résistance et SAOS bénin, mo-
déré ou sévère) :
l’index d’apnées et/ou d’hypopnées
(IAH). Il est exprimé en nombre d’évé-
nements respiratoires par heure de
sommeil efficace (norme < 1), les évé-
nements étant :
– apnée centrale : cessation de tout flux
et mouvements respiratoires durant 10
à 20 secondes, selon l’âge, ou moins si
l’apnée est associée à une désaturation
supérieure à 3 %,
– apnée obstructive : cessation du flux
respiratoire avec persistance des mou-
vements thoraciques et abdominaux,
– apnées mixtes : apnée initialement
centrale, puis obstructive,
– hypopnée : réduction du flux respira-
toire supérieure à 50 %, ou à 30 % avec
désaturation. Elle peut être centrale ou
obstructive selon que les mouvements
thoraciques et abdominaux sont en pha-
se ou en opposition ;
l’index de désaturation en O
2
(norme :
saturation minimale > 92 %) ou d’hy-
poxémie si une gazométrie de sommeil
par TcpO
2
a été enregistrée ;
capnie (norme < 50 à 53 mmHg se-
lon les équipes) ;
effort respiratoire ;
microéveils : accélération du rythme
EEG supérieure à 3 secondes.
A titre d’exemple, le ronflement simple
a un indice d’apnée inférieur à 1, une
saturation minimale supérieure à 92 %
et une PCO
2
inférieure à 53 mmHg,
alors que le SAOS sévère a un indice
d’apnée supérieur à 10, une saturation
minimale inférieure à 75 % et une PCO
2
supérieure à 65 mmHg.
Les événements obstructifs surviennent
plus fréquemment pendant la phase de
sommeil paradoxal (REM), donc en
deuxième partie de la nuit. Jusqu’à la
puberté, le sex-ratio du SAOS est de 1,
puis il devient plus fréquent chez l’ado-
lescent de sexe masculin.
De nombreuses études polysomnogra-
phiques ont été effectuées chez l’enfant
sain, à des âges différents, pour tenter
d’établir des normes pédiatriques.
D’autres études sont attendues pour ho-
mogénéiser ces résultats.
Autres examens
La polysomnographie de sieste a,
comme l’oxymétrie, une valeur prédicti-
ve négative médiocre. La normalité de
ces deux examens doit conduire à une
PSG de nuit.
La polygraphie ambulatoire, sans
EEG, est plus facile à réaliser mais doit
encore être évaluée.
L’actimétrie enregistre, à l’aide d’un
petit appareil placé au poignet, tous les
mouvements, même de faible amplitu-
de. Elle donne une bonne indication sur
TROUBLES RESPIRATOIRES DU SOMMEIL : DIAGNOSTIC CLINIQUE
Interrogatoire
Symptomatologie nocturne :
ronflements et leur fréquence (nombre de
nuits/semaine) ; ronflements audibles à tra-
vers une porte ;
qualité de la respiration : difficultés respi-
ratoires avec éventuellement pauses, voire
apnées, cyanose ;
qualité du sommeil : agité, mouvements
des jambes, éveils fréquents ;
recherche d’une sudation excessive, d’une
énurésie ;
les parents ont-ils l’impression que leur
enfant est en « danger » la nuit ?
Signes diurnes :
(les trois premiers signes sont rares chez l’en-
fant prépubère contrairement à l’adulte)
céphalées ;
asthénie ;
somnolence : enfant s’endormant en clas-
se, réapparition d’une sieste ;
rechercher des problèmes neurocognitifs :
difficultés d’apprentissage, échec scolaire,
troubles du comportement, agressivité et dé-
ficit d’attention/hyperactivité, troubles de
l’humeur, troubles alimentaires, difficultés à
avaler.
Examen clinique
Etat nutritionnel :
retard staturopondéral ;
obésité (mesure de l’IMC).
Sphère ORL :
obstruction nasale, respiration buccale ;
hypertrophie adénoïdienne (faciès adénoï-
dien) et/ou amygdalienne ;
anomalies buccales : macroglossie, palais,
dentition ;
anomalies craniofaciales.
Système cardiovasculaire :
augmentation de la composante pulmo-
naire du B2 ;
HTA systémique.
Système respiratoire :
pectus excavatum ;
hippocratisme digital.
Système neuromusculaire :
paires crâniennes ;
tonus et force musculaires.
L’examen clinique peut être normal.
Facteurs de risque
maladies neuromusculaires ;
malformations craniofaciales : achondro-
plasie, syndrome de Pierre Robin, de Prader-
Willy, de Smith-Magenis… ;
anomalies génétiques : trisomie 21, syn-
drome de l’X fragile ;
anomalies du tissu conjonctif : hypertro-
phie amygdalienne, glossoptose, maladies de
surcharges… ;
certaines BPCO (dysplasie bronchopulmo-
naire, mucoviscidose) ;
drépanocytose ;
obésité ;
ethniques : le ronflement est cinq fois plus
fréquent dans la population noire que chez
les caucasiens ;
tabagisme : passif et/ou actif (chez l’ado-
lescent).
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les horaires de sommeil et les réveils
nocturnes, ainsi que sur l’aptitude du
sujet à apprécier son sommeil. En cas
d’activité anormalement élevée au
cours de la nuit, une pathologie orga-
nique est à suspecter, et donc un bilan
complémentaire à envisager.
Les examens suivants seront discutés
en fonction de la clinique, que le
trouble du sommeil soit respiratoire ou
non : NFS, ferritinémie, gazométrie
sanguine, ECG et échographie car-
diaque, EEG, voire holter EEG, IRM crâ-
nienne et/ou des voies aériennes supé-
rieures (VAS), nasofibroscopie ORL,
voire screening toxicologique.
TROUBLES NEUROCOGNITIFS
SECONDAIRES AUX TROUBLES
RESPIRATOIRES DU SOMMEIL
Ces troubles peuvent survenir à tout
âge, y compris chez le nourrisson. Ils
sont tout d’abord d’ordre mnésique et
attentionnel, puis atteignent les fonc-
tions exécutives à l’âge scolaire. La fré-
quence des TRS augmente la prévalen-
ce des anomalies cognitives, qui sur-
viennent même au stade du simple ron-
flement. Ce symptôme, considéré com-
me banal en pédiatrie, ne doit donc ja-
mais être négligé.
L’hypoxie chronique, secondaire aux
apnées et aux hypopnées, entraîne une
vasoconstriction responsable d’une hy-
pertonie sympathique qui favorise une
HTA systémique et pulmonaire. Cela
conduit à une souffrance dans le cortex
préfrontal, dont dépendent les fonc-
tions cognitives.
L’inflammation au niveau des VAS joue
un rôle princeps dans les mécanismes
obstructifs locaux. La voie des leuco-
triènes est principalement concernée, et
il existerait une interrelation entre le ni-
veau des marqueurs de l’inflammation
et la sévérité du SAOS. La mesure du
NO exhalé permet de confirmer une
augmentation de l’inflammation des
voies aériennes en cas de TRS
[7]
. Sur le
plan systémique, d’autres marqueurs
sont augmentés en cas de SAOS : la CRP
(protéine C-réactive) et le TNF (tumor
necrosis factor). Ces éléments tradui-
sent un stress oxydatif (induit par des
épisodes intermittents d’hypoxie-réoxy-
génation) qui favorise l’hypertrophie
des organes lymphoïdes des VAS.
En plus des anomalies neurocognitives,
ces éléments accroîtraient le risque de
complications cardiovasculaires : HTA,
voire athérome à l’âge adulte (le SAOS
étant un facteur de risque cardiovascu-
laire bien identifié chez l’adulte).
TRAITEMENT CHIRURGICAL
Le traitement de référence, qui vise à le-
ver l’obstruction secondaire à l’hyper-
trophie lymphoïde, est l’adénoamygda-
lectomie (l’adénoïdectomie seule est le
plus souvent insuffisante). L’efficacité
est d’environ 80 %. Même si les parents
sont satisfaits du résultat clinique, la
PSG peut rester perturbée (25 à 45 %
des cas). Le risque de non-normalisa-
tion est plus fréquent en cas de facteur
de risque associé (obésité, SAOS sévère,
anomalie neurologique ou osseuse).
Dans certains cas, un traitement com-
plémentaire d’orthodontie peut être in-
diqué. Pour certains, la recherche d’une
anomalie maxillo-faciale devrait être
systématique en cas de TRS.
En cas d’échec ou de contre-indication
du traitement chirurgical, la ventilation
non invasive nocturne par pression po-
sitive continue est indiquée. Ce traite-
ment étant lourd et contraignant, il né-
cessite d’être mis en route dans des
centres spécialisés pour éviter de mau-
vaises compliances thérapeutiques.
TRAITEMENT MÉDICAL
La physiopathologie des TRS rend
compte de l’intérêt des thérapeutiques
anti-inflammatoires comme les antileu-
cotriènes per os et/ou les corticoïdes
par voie nasale. Ces traitements rédui-
sent la taille des végétations adénoïdes,
mais des études complémentaires sont
nécessaires, en particulier sur les effets
à long terme
[9-10]
. Les corticoïdes par
voie générale ne sont pas indiqués.
Conseils généraux : favoriser la perte de
poids des enfants en surcharge pondé-
rale, éviter le tabagisme passif.
Un traitement antireflux sera prescrit
en cas de RGO associé.
AUTRES TROUBLES
DU SOMMEIL
[11-13]
C’est souvent la plainte des parents qui
fait évoquer le diagnostic de trouble du
sommeil (TDS), mais certains pro-
blèmes de sommeil allégués par les pa-
rents ne relèvent pas d’une pathologie
et il existe d’autres symptômes qui doi-
vent faire rechercher un TDS, asthénie
ou troubles scolaires par exemple. L’ap-
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PSG NOCTURNE ET ADÉNOAMYGDALECTOMIE
La PSG nocturne doit-elle être pratiquée avant toute adénoamygdalectomie ? Cette question
risque de nous être posée de plus en plus fréquemment dans les années à venir :
chez l’enfant sain présentant une hypertrophie clinique adénoïdo-amygdalienne et une
symptomatologie fortement évocatrice de SAOS, la PSG ne semble pas indiquée (actuelle-
ment en tout cas), mais peut-être deviendra-t-elle médico-légale dans l’avenir ;
elle peut éviter une chirurgie inutile chez les enfants peu symptomatiques et convaincre
certains parents réticents devant une indication hautement probable ;
elle est à recommander en cas de risque de complications postopératoires. Un consensus
très récent a eu lieu au Royaume-Uni sur ces facteurs de risques [8] : nourrisson de moins de
deux ans, poids inférieur à 15 kg, retard de croissance pondérale, antécédent de prématurité,
obésité, SAOS sévère, anomalie maxillofaciale, pathologie associée (cardiaque et/ou pulmo-
naire), maladie de surcharge, pathologie neuromusculaire. Dans ces conditions, il est recom-
mandé, dans ce consensus multidisciplinaire, de pratiquer l’intervention ORL dans un centre
pourvu d’une unité de soins intensifs pédiatriques pouvant si nécessaire ventiler l’enfant en
postopératoire ;
dans les cas où une PSG postopératoire serait indiquée devant la persistance des symp-
tômes, elle ne devra être réalisée qu’après un délai de six semaines.
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préciation par les parents du manque de
sommeil de leur enfant est sujette à de
très grandes variations (différences cul-
turelles…), d’où l’importance de l’inter-
rogatoire et d’une oreille attentive, ainsi
que d’un examen clinique avec évalua-
tion du développement psychomoteur.
Ce symptôme n’est souvent annoncé
qu’en fin de consultation, la main sur la
poignée de porte : « Au fait Docteur, il
ne dort pas la nuit… » !
Dans un premier temps, on éliminera
facilement toutes les causes physiolo-
giques : faim ou repas trop abondants,
soif, température de la chambre trop
élevée ou trop basse, fièvre, douleur,
décalage horaire… ainsi que certaines
pathologies comme le RGO, l’intoléran-
ce aux PLV, une OMA. En dehors de ces
étiologies et des troubles respiratoires
du sommeil exposés plus haut, on re-
cherchera d’autres causes développées
ci-dessous.
EN CAS DE TROUBLES DU
SOMMEIL SANS RETENTISSEMENT
SUR LA JOURNÉE
Insomnie du nourrisson : elle est très
banale et se manifeste par des réveils
avec cris et pleurs. Après s’être assuré
cliniquement que l’enfant ne présente
aucune anomalie, on recherchera une
forte inquiétude parentale avec éven-
tuel traumatisme dans leurs antécé-
dents, des conflits au sein du couple ou
un syndrome du lit parental (nourrisson
dormant dans le lit de ses parents). On
expliquera ensuite aux deux parents
que l’enfant doit apprendre à dormir et
à s’endormir seul. L’insomnie calme,
nourrisson éveillé et immobile sans cris
ou autre manifestation, nécessite au
contraire une consultation spécialisée.
Parasomnies : ce sont des phéno-
mènes indésirables associant éléments
moteurs, verbaux et/ou sensoriels. Les
causes en sont multiples et variées :
somnambulisme : déambulation in-
consciente yeux ouverts, durant dix à
trente minutes et survenant une à trois
heures après l’endormissement. L’en-
fant se laisse reconduire au lit sans pro-
blème. Le somnambulisme concerne
surtout le garçon de huit à douze ans.
Le risque de blessure n’est pas négli-
geable. L’enfant se rendort spontané-
ment et ne garde pas de souvenir de
l’épisode. Il existe souvent des antécé-
dents familiaux ;
terreurs nocturnes : comme pour le
somnambulisme, l’enfant est incons-
cient, yeux ouverts, mais il est agité, crie,
semble effrayé, ne reconnaît pas ses
proches, transpire et présente une tachy-
cardie. La durée et l’heure de survenue
sont proches de celles du somnambulis-
me, mais les terreurs nocturnes concer-
nent l’âge de cinq à sept ans ;
énurésie ;
bruxisme : il peut à la longue avoir
des répercussions orthodontiques ;
– cauchemars : ils provoquent un réveil
brutal ; l’enfant pleure, appelle, est ca-
pable de raconter le rêve qui l’a effrayé
à ses parents et reconnaît ceux-ci ; il est
éveillé et bien orienté. Les cauchemars
surviennent dans le dernier tiers de la
nuit. Le réendormissement est souvent
difficile ;
rythmies d’endormissement : mouve-
ments de la tête et/ou du corps parfois
associés à des vocalises.
Les parasomnies ne nécessitent d’explo-
rations (EEG à la recherche d’une épi-
lepsie focale, voire PSG pour éliminer
un SAOS associé) qu’en cas de formes
chroniques ou atypiques ; elles sont
souvent bénignes. Il faudra rassurer les
parents qui pensent que leur enfant pré-
sente un trouble psychologique et leur
conseiller d’éviter les éléments induc-
teurs, comme la privation de sommeil,
les stress, les activités tardives, les mé-
dicaments hypnotiques et les antihista-
miniques.
EN CAS DE TROUBLES DU
SOMMEIL AVEC RETENTISSEMENT
DIURNE
Insomnie de l’enfant ou de l’adoles-
cent : elle peut être chez l’adolescent un
symptôme d’appel dans le cadre d’une
dépression nécessitant une prise en
charge globale. On note des difficultés
d’endormissement et à rester endormi,
avec des éveils en milieu de nuit, un ré-
veil matinal trop précoce et un sommeil
ressenti comme non réparateur.
Syndrome des jambes sans repos
(SJSR) : besoin impérieux de bouger les
jambes, associé à des sensations désa-
gréables (brûlures, engourdisse-
ment…), s’aggravant dans les situations
où il est difficile de bouger (cinéma,
avion) et diminuant quand l’attention
est captivée (conversation, jeux). Ce
syndrome est favorisé par le repos et
soulagé par les mouvements, il est donc
accentué la nuit. Le sujet a un besoin
impérieux de bouger, de taper du pied,
de bouger les jambes ou de se retourner
dans son lit, de se tenir debout ou de se
masser les jambes. Certains patients
sont obligés de déambuler tout ou par-
tie de la nuit pour soulager leur gêne.
Une origine génétique est suspectée. Il
existe des facteurs favorisants, comme
les xanthines, les antidépresseurs, la ca-
rence martiale, le diabète, une neuropa-
thie périphérique ou une insuffisance
rénale. On note des mouvements pério-
diques pendant le sommeil ; ces mouve-
ments, involontaires, peuvent être ob-
servés par l’entourage. Ils sont d’ampli-
tude très variable, souvent limités à une
extension du gros orteil ou à une flexion
du pied, mais parfois concernent aussi
le genou, voire la hanche. Ils sont mis
en évidence par des enregistrements
polysomnographiques. Les enfants qui
souffrent de ce syndrome se plaignent
d’insomnies (plus de 80 % des cas) et
ont des troubles du comportement, voi-
re de concentration et de mémorisation.
Le tableau clinique est proche de celui
du trouble de l’attention/hyperactivité
(TDAH). Dans une étude comparant
des enfants ayant un TDAH à un groupe
témoin, les PSG ont montré une dimi-
nution de la durée du sommeil portant
essentiellement sur les périodes de REM
sleep dans le groupe TDAH ; de plus, les
facteurs d’anxiété vis-à-vis du sommeil
étaient augmentés dans ce groupe
[14]
.
Narcolepsie. Elle débute le plus sou-
vent entre quinze et vingt-cinq ans, mais
peut exister dès quatre ans. Une obésité
est fréquente au début de la maladie. Il
existe une somnolence diurne, avec des
siestes de plusieurs heures et des at-
taques de sommeil. On note des cata-
plexies liées à une baisse du tonus
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musculaire : chute des paupières, vacille-
ment, voire chute brutale sans perte de
contact. La PSG élimine un SAOS ou un
SJSR. Le holter EEG est normal avec di-
minution des latences d’endormisse-
ment. Il existe une transmission géné-
tique qui fait que 98 % des personnes qui
souffrent de narcolepsie ont un groupa-
ge HLA particulier (DQB1 06-02). Dans
la plupart des cas, il y a une baisse de
l’hypocrétin-1 (ht) dans le liquide cépha-
lorachidien. L’ht est un neuropeptide fa-
briqué dans le cerveau et impliqué dans
la régulation du sommeil.
Retard de phase (7 % des adolescents
sont concernés) : endormissement
après 2 heures du matin et réveil après
11 heures du matin. Le retard de phase
est probablement favorisé par des fac-
teurs sociaux, comme la pression scolai-
re ou la diminution de l’influence pa-
rentale, les activités scolaires et extra-
scolaires, la consommation télévisuelle
et informatique. Outre la fatigue et la
baisse des performances attention-
nelles, ce trouble du sommeil peut en-
traîner des syndromes dépressifs avec
risque suicidaire.
CONSEILS À DONNER
AUX PARENTS
Dans tous les cas, il est important qu’un
agenda de sommeil soit rempli :
horaires de sommeil et éventuels événe-
ments intercurrents, qualité du sommeil
et du réveil, forme physique au cours de
la journée, éventuellement médica-
ments pris. Cet agenda doit être tenu
sur au moins deux semaines ; on peut le
compléter par une actimétrie.
A partir d’une étude portant sur 1500
familles et des enfants de la naissance à
dix ans, la National Sleep Foundation
nord-américaine recommande dans une
publication récente d’avoir une bonne
hygiène de sommeil pour favoriser un
sommeil de meilleure qualité
[15]
:
endormissement : l’enfant doit s’en-
dormir seul, la présence des parents in-
duisant des réveils nocturnes ;
mettre les nourrissons au lit lorsqu’ils
sont « assoupis » mais encore éveillés ;
l’enfant doit se coucher avant
21 heures : le coucher tardif favorise
une latence avant l’endormissement et
donc une réduction du temps total de
sommeil ;
établir une routine avant le coucher :
lecture ou autre choix personnel ;
éviter la caféine (coca, thé glacé…) ;
pas de télévision dans la chambre.
CONCLUSIONS
On retiendra la prévalence élevée des
troubles du sommeil, la gravité poten-
tielle de leur retentissement sur les ac-
quisitions et le développement, leurs ré-
percussions non négligeables sur les per-
formances cognitives, le comportement
et le métabolisme (obésité), leurs consé-
quences cardiovasculaires. L’information
des professionnels de santé (pédiatres,
médecins généralistes, médecins sco-
laires), des paramédicaux (sages-
femmes, infirmières, psychologues) et
des personnels de l’éducation sur les
troubles du sommeil est insuffisante et
conduit à des erreurs de prise en charge,
voire à des abus de prescription.
D’où l’importance de former des spécia-
listes du sommeil
[16]
et de délivrer un
enseignement spécifique pour toutes les
professions précitées. Cela permettrait
non seulement un diagnostic précoce
mais une approche préventive, et ce de
façon pluridisciplinaire.
L’édition d’un guide pratique du som-
meil, avec reprise des éléments princi-
paux dans le carnet de santé, est à envi-
sager, ainsi qu’un enseignement sur le
sommeil en milieu scolaire.
« Comment dort votre enfant » est une
question qui devrait systématiquement
être posée en consultation pédiatrique.
Dans les rares cas où la symptomatologie
est inquiétante ou persistante, un avis
spécialisé doit être demandé sans délai.
A l’heure actuelle, l’adénotonsillectomie
est le traitement de choix des SAOS et
la polysomnographie nocturne l’exa-
men les confirmant.
Remerciements aux Drs Sandu-Maingot, Guillo et La
Rocca pour leur aide dans la rédaction de cet article.
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Les troubles du sommeil représentent une part non négligeable de... pratique quotidienne en pédiatrie générale

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