Actualités 22/06/04 16:17 Page 9 Actua l ité Sa nté 9 Paludisme Une éradication encore lointaine Première maladie infe ctieuse dans le monde et la plus meurtrière, le paludisme touche de manière endémique les populations des zones tropicales, mais aussi, occasionnellement, les voyageurs revenant des régions touchées. S elon l’OMS, plus de deux millions de personnes décèdent chaque année du paludisme, appelé parfois malaria, dont plus d’un million, soit la moitié, sont des enfants de moins de 5 ans. Sur les 40 % de la population potentiellement à risque, plus de 400 millions de nouveaux cas se déclarent chaque année. Si plus de 90 % de l’Afrique est infestée, l’Asie et l’Amérique latine n’en sont pas exemptes. Maladie endémique sur ces trois continents, le paludisme est fortement exporté, au point que plus de 8 000 cas ont été dénombrés en France en 2001, causant 20 décès. Plus de 90 % des paludismes importés proviennent d’Afrique, touchant 1 à 2 % des voyageurs. Plus rarement, sont atteints les personnes résidant à proximité des aéroports ou les personnels y travaillant. Cause et diagnostic Le vecteur est un moustique : l’anophèle femelle, qui infecte l’homme en le piquant et le contamine, après avoir piqué une personne déjà infectée, avec le principal responsable du paludisme et le plus mortel : le Plasmodium falciparum, ou, à un degré moindre, avec le Plasmodium vivax, le Plasmodium ovale ou le Plasmodium malariae. L’homme est le seul réservoir de ces parasites, qui migrent alors dans la circulation et se divisent rapidement au sein du foie, au cœur de l’hépatocyte. Les nouveaux parasites, libérés dans le sang, pénètrent alors dans les globules rouges, qu’ils infectent. Aucune contamination interhumaine n’est possible, excepté par voie transplacentaire. Du fait de la multiplicité des signes pouvant révéler la maladie, toute fièvre survenant chez une personne o r i ginaire ou revenant d’une zone infestée peut et doit, sauf preuve du contraire, signifier un paludisme. Après une incubation de 7 jours, le premier accès palustre se manifeste par un syndrome grippal : une fièvre évoluant de manière continue ou, au contraire, par poussées accompagnées d’asthénie, de myalgies, de courbatures, de céphalées. Parallèlement, comme pour la grippe, quelques nausées et vomissements sont possibles, de même que quelques troubles du transit. Un gros foie peut être perçu à l’examen, ainsi qu’une grosse rate, d’apparition souvent plus tardive. Lorsque, après cette primo-invasion, les globules rouges laissent échapper dans le sang les parasites qui se sont multipliés, les frissons deviennent intenses, avec tremblements et sueurs froides. Puis survient une fièvre élevée, supérieure en moyenne à 40 °C, une rémission complète pouvant durer quelques heures avant la réapparition de tous les signes. C’est cette rythmicité qui est alors pathognomonique, selon un rythme tierce ou fièvre tierce sur 48 heures et quarte sur 72 heures. À chaque décharge parasitaire correspond un accès. Lors de l’accès, le prélèvement par goutte épaisse signe le diagnostic. Complications En l’absence de traitement adapté peut survenir l’accès pernicieux entraînant une anoxie cérébrale. De même, une méningite, des convulsions, une anémie, un syndrome hémorragique sont à craindre. Les troubles sont plus graves, voire mor- >> Goutte épaisse et frottis mince ✓ Principe Sur une goutte épaisse, à l’inverse du frottis mince, les parasites sont concentrés au maximum sur la plus petite surface possible. Infos ✓ Technique Le prélèvement se fait au bout du doigt, au vaccinostyle, à partir d’une grosse goutte de sang. Placée sur une lame, celle-ci est défibrinée à l’aide du vaccinostyle pendant une minute, mise à sécher pendant 24 heures, recouverte d’eau distillée pour deshémoglobiniser et colorée par Diff-Quick ou Giemsa. Pour accélérer l’examen, on peut pratiquer une cytocentrifugation après hémolyse : le résultat est alors disponible en 1 heure. ✓ Résultats Les hématies ayant disparu, grâce à l’hémolyse, les parasites apparaissent plus aisément. La goutte épaisse permet aussi le diagnostic de filarioses à microfilaires sanguines. Si la goutte épaisse est l’examen le plus connu pour le diagnostic d’urgence du paludisme, le frottis mince donne de meilleurs résultats, et plus rapidement. Ainsi, il est possible de déterminer le type de Plasmodium : P. falciparum, P. malariae, P. ovale, P. vivax. La parasitémie calculée supérieure à 3 % est considérée comme dangereuse (il s’agit du nombre de parasites pour 100 leucocytes). En cas de doute sur un accès palustre et de frottis négatif, il faut refaire ce dernier et commencer un traitement sans en attendre les résultats. En ce qui concerne le frottis mince, il faut signaler au laboratoire la prise éventuelle d’antimalariques susceptibles d’altérer les formes parasitaires typiques. ... Protection Les moustiquaires imprégnées d’insecticide offrent une bonne protection contre le paludisme. Si elles sont correctement utilisées et associées à un traitement précoce au niveau de la communauté, la transmission du paludisme pourra reculer de 60 % et le taux global de mortalité chez les enfants en bas âge diminuer d’environ un cinquième. Source : Unicef Professions Santé Infirmier Infirmière N° 55 • mai 2004 Actualités 10 22/06/04 16:17 Page 10 Actua l ité Sa nt é Prophylaxie selon la destination Type de pays >> Chloroquinorésistance Type I 0 Chloroquine Type II + Chloroquine, proguanil Type III +++ tels, chez le jeune enfant, la femme enceinte et les personnes immunodéprimées. Les atteintes cardiaques, hépatiques, spléniques sont surtout le fait de réinfestations multiples chez des patients séjournant sans protection dans les zones endémiques. Traitement Infos ... Afrique et paludisme Le coût de prise en charge des hospitalisations des cas graves (en moyenne 30 à 50 % des admissions dans les hôpitaux en Afrique) serait de 12 milliards de dollars par an. La maladie a des répercussions sévères sur le développement des populations. La fièvre empêche l’enfant d’aller à l’école et l’adulte d’aller au travail notamment celui des champs qui est vital pour ces populations. La journée mondiale du paludisme a eu lieu le 25 avril. Prophylaxie Il faut rappeler que cette maladie parasitaire est la plus répandue dans le monde et la seconde parmi les plus m e u rtrières dans les pays en développement. Selon Médecins du monde*, elle est actuellement en pleine recrudescence, et sévit dans plus de 100 pays représentant au total 40 % de la population mondiale. Pour les voyageurs se rendant dans les zones infestées, le meilleur traitement demeure prophylactique. Il n’existe pas de vaccin contre le paludisme, et aucun n’est en vue, selon les chercheurs, avant une quinzaine d’années. D’abord, il s’agit donc de se protéger contre les moustiques : physiquement, grâce au port de vêtements amples, à manches longues à la tombée du jour, à l’utilisation de moustiquaires autour des lits des jeunes enfants notamment. Chimiquement, les répulsifs doivent être largement utilisés sur soi, répandus dans l’atmosphère de la pièce, jusque sur les moustiquaires. La prophylaxie individuelle médicamenteuse est différente selon la personne et son lieu de destination (voir encadré). Selon la personne, il faut toujours tenir compte du passé médical, du présent (grossesse, par exemple), des traitements en cours, de l’état immunitaire. Il peut ainsi être souhaitable de tester la tolérance des médications Professions Santé Infirmier Infirmière N° 55 • mai 2004 Méfloquine ou atovaquone chloroquine ou doxycycline avant le départ pour prévenir tout incident sur place. Habituellement, le traitement sera commencé un peu avant le départ, poursuivi pendant tout le voyage et une à quatre semaines après le retour : une, pour atovaquone + proguanil seulement, mais quatre pour toutes les autres spécialités. Il existe en effet des formes retard de déclenchement du paludisme. Si le voyage comprend des périodes où l’on risque de se trouver loin de tout centre hospitalier, il faut se munir d’un traitement de réserve à prendre en cas de doute. Ce traitement de réserve sera prescrit avant le départ et comprendra soit de la quinine, soit de la méfloquine, soit de l’halofantrine ( l ’ ECG est indispensable pour diagnostiquer les risques de troubles du rythme cardiaque induits). Toujours selon Médecins du monde, les antipaludéens classiques ne sont plus efficaces dans nombre de pays où ils sont néanmoins utilisés comme protocole national. Le nombre de cas est ainsi quatre fois plus élevé que dans les années 70, en raison de l’augmentation de la résistance des parasites du paludisme aux traitements. Et, depuis 2000, on assiste même à des flambées épidémiques au Burundi, dans le sud du Soudan et en Éthiopie. Ce phénomène avait pourtant disparu. Pour soigner les patients atteints, les dérivés d’artémisine semblent offrir de réels avantages par rapport au traitement antipaludique classique, car ils sont plus efficaces contre le parasite et agissent plus rapidement, sans trop d’effets indésirables. Mais leur coût est un frein pour les pays pauvres. JB *www.msf.fr et www.accessmed-msf.org En bref ... L’accident de la route n’est pas une fatalité Savez-vous que le premier décès dans le monde dû à un véhicule motorisé a eu lieu le 17 août 1896, à Londres ? La victime s’appelait Bridget Driscoll, elle avait 44 ans, et a été renversée par une voiture en traversant l’esplanade du Palais. Le véhicule roulait “probablement” à 12 km/h au lieu des 6,4 km/h qu’il n’était pas sensé dépasser. Aujourd’hui, selon l’OMS, chaque jour, il y a 140 000 blessés sur les routes du monde. Près de 3 000 personnes meurent et 15 000 environ resteront handicapées à vie. Si les tendances actuelles se confirment, on assistera, d’ici 2020, à une augmentation de 60 % du nombre des personnes tuées ou handicapées suite à un accident de la route. Paradoxalement, les pays les plus motorisés, qui, compte tenu de leur expérience ancienne, ont engagé des programmes de sécurité routière, enregistrent les taux de mortalité les plus bas (taux annuels inférieurs à 6,0 pour 10 0 000 habitants). Le s hommes ont une probabilité presque trois fois plus grande que les femmes de mourir d’un accident de la route, et plus de 50 % de la mortalité concernent les personnes âgées de 15 à 44 ans. Les piétons, les cyclistes et les motocyclistes courent un risque plus grand par kilomètre parcouru. Compte tenu du manque d’infrastructures adéquates, de mesures éducatives, etc., les habitants les plus vulnérables sont les piétons des pays à faibles revenus ou à revenus intermédiaires. Ces pays ont d’ailleurs une part disproportionnée, par rapport au nombre de véhicules motorisés, dans la charge mondiale croissante de morbidité due aux accidents de la route. Source OMS à propos de la Journée mondiale de la santé du 7 avril 2004.