96 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXVI - n° 3 - mai-juin 2011
Points forts
»
La première cause identifiée d’encéphalite infectieuse est le virus
Herpes simplex
1, tous pays et toutes
périodes confondues. La généralisation du traitement par l’aciclovir dans les années 1980 a permis de
réduire spectaculairement la létalité de l’encéphalite herpétique, mais les séquelles neurologiques restent
fréquentes.
»
Les bactéries sont également des causes d’encéphalite en France, en particulier
Mycobacterium tubercu-
losis
et
Listeria monocytogenes
, et devraient être considérées dans la prise en charge initiale des patients
atteints d’encéphalite.
»
Des encéphalites limbiques à auto-anticorps et les encéphalomyélites aiguës disséminées (
acute disse-
minated encephalomyelitis
[ADEM]) peuvent avoir une présentation évocatrice d’encéphalite virale. Elles
doivent être évoquées dans le diagnostic différentiel des encéphalites.
Mots-clés
Encéphalite
Herpes simplex
Aciclovir
Vaccin
Antibiotique
Highlights
Infectious encephalitis is a
severe disease of the central
nervous system with high
case fatality ratio and long-
term sequels.
Although a high proportion
remains unexplained, the most
frequently identified cause in
all countries is
herpes simplex
virus type 1. Since the early
80’s, the generalisation of
aciclovir dramatically improved
the survival rate of herpes
simplex encephalitis patients.
However, a high proportion of
patients still experience neuro-
psychological sequels.
Bacteria may also cause
encephalitis in France.
Myco-
bacterium tuberculosis and
Listeria monocytogenes in
particular should be conside red
in the early treatment of
encephalitis patients at the
time of admission.
Auto-antibodies encepha-
litis and acute disseminated
encephalomyelitis (ADEM),
although not infectious, can
mimic viral encephalitis and
should be included in the differ-
ential diagnosis of encephalitis
patients.
Keywords
Encephalitis
Herpes simplex
Aciclovir
Vaccine
Antibiotic
virus (HSV), virus zona-varicelle (VZV), Mycobacte-
rium tuberculosis puis Listeria monocytogenes pour
la France versus Streptococcus sp pour l’Angleterre.
Au cours des dernières années, des études portant
sur les encéphalites infectieuses ont été publiées
sur la plupart des continents. Malgré des protocoles
peu comparables, elles mettent en évidence l’exis-
tence d’éléments constants comme la primauté de
HSV parmi les agents infectieux identifiés, mais
elles soulignent également la spécificité spatiale
et temporelle de certaines encéphalites telles que
l’encéphalite à tiques (Tick-Borne Encephalitis [TBE]).
Trois explications sont proposées pour expliquer la
proportion importante d’encéphalites non étiquetées :
➤
encéphalites liées à des agents pathogènes non
connus à ce jour ;
➤
tests diagnostiques disponibles insuffisamment
performants ;
➤encéphalites d’origine non infectieuse.
Cette dernière hypothèse a été récemment renforcée
par la découverte d’auto-anticorps responsables
d’encéphalites (5).
Encéphalites herpétiques
HSV-1 est incontestablement le “leader” chez l’adulte
immunocompétent, à la fois par sa fréquence et par
l’enjeu thérapeutique. Chez les enfants âgés de moins
de 16 ans, VZV précède HSV dans de nombreuses
études.
L’incidence des encéphalites à HSV-1 varie de 1 à
3 cas/million d’habitants/an. HSV-2, responsable de
80 % des encéphalites néonatales, peut également
être responsable d’atteintes du système nerveux
central (SNC) chez l’adulte, notamment de ménin-
gites récurrentes bénignes, dites de Mollaret, mais
rarement d’encéphalites. Des études chez l’animal
ont montré qu’HSV peut cheminer le long du nerf
olfactif et/ou du nerf trijumeau pour gagner le
cerveau, expliquant la localisation caractéristique
des lésions dans les lobes temporaux et frontaux.
La présentation clinique est relativement caractéris-
tique : apparition rapide de troubles du comportement
et de la personnalité, de céphalées, d’une fièvre et, plus
rarement, de convulsions. Le tableau initial peut faire
évoquer une pathologie psychiatrique aiguë, surtout
si la température n’est pas mesurée. Les troubles de
la conscience apparaissent dans une fourchette de
quelques heures à moins d’une semaine après les
premiers symptômes neurologiques. La découverte
à l’IRM de lésions bilatérales, asymétriques, à prédo-
minance temporale, est très évocatrice. Le liquide
céphalo-rachidien (LCR) est le plus souvent lymphocy-
taire, avec une protéinorachie variable, ne permettant
pas d’orienter le diagnostic. La PCR effectuée sur du
LCR permet un diagnostic rapide et fiable (sensibi-
lité et spécificité de 98 % et 94 % respectivement,
évaluées en référence à la biopsie cérébrale) [6].
La PCR peut être négative en tout début d’évolution
ou à cause de problèmes techniques (inhibiteurs de
PCR, mauvaise conservation des prélèvements). Le
diagnostic d’encéphalite herpétique peut être réfuté si
la PCR HSV est négative sur un deuxième prélèvement
de LCR effectué quelques jours plus tard.
La létalité est de 5 à 20 % chez les patients traités,
mais la moitié des survivants garde des séquelles
neurologiques significatives (troubles de la mémoire,
de la personnalité, épilepsie). Les principaux facteurs
pronostiques identifiés sont l’âge du patient, la durée
des symptômes avant le début du traitement et l’état
de vigilance du patient lors de son introduction.
Autres encéphalites virales
On ne peut les citer toutes ici, la plupart étant à la
fois très rares et sans conséquence thérapeutique
(tableau II). La majorité des encéphalites virales
observées en France sont dues à des virus pour
lesquels n’ont pas été documentées de contagiosité
ou de virulence particulière des souches associées
à l’infection du SNC. Quelques situations doivent
cependant être identifiées, en s’appuyant sur les
éléments recueillis lors de l’anamnèse et de l’examen
clinique.
➤
L’encéphalite à VZV peut survenir au décours
d’une varicelle ou d’un zona, mais aussi à distance.
Chez l’enfant, elle se présente fréquemment sous la
forme d’une cérébellite. Chez l’adulte, elle survient
le plus souvent chez des patients immunodéprimés.
Le diagnostic est rendu compliqué par la possible
présence d’ADN viral dans le LCR après un zona en
l’absence d’atteinte du SNC.