Prise en charge difficile
Prise en charge difficile
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La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue - Vol. IX - n° 6 - novembre 2006
En cas d’impossibilité d’obtenir une détermination du phénotype
tumoral MSI, l’indication d’une consultation d’oncogénétique en
vue d’une analyse génétique constitutionnelle des gènes MMR
sera proposée en présence de deux apparentés au premier degré
atteints d’un cancer du spectre large du syndrome HNPCC
avant 60 ans ; elle sera à discuter en unité de concertation pluri-
disciplinaire de cancérologie pour les patients avec un cancer
colorectal diagnostiqué entre 40 et 60 ans.
L’immunohistochimie permet d’étudier l’expression par les
cellules tumorales des protéines de réparation des mésappa-
riements de l’ADN hMLH1, hMSH2 ou hMSH6, qui d’ordinaire
sont exprimées dans le noyau des cellules normales (34, 38). L’im-
munohistochimie à la recherche d’une extinction des protéines
hMLH1, hMSH2 ou hMSH6 au sein du tissu tumoral est complé-
mentaire de la recherche d’un phénotype tumoral instable MSI+
en biologie moléculaire. En effet, le taux de faux positifs de
l’immunohistochimie, c’est-à-dire l’absence d’extinction d’une
de ces trois protéines alors que le phénotype tumoral est un
phénotype instable MSI+ en biologie moléculaire, est d’environ
10 %. Ce phénomène est en partie lié au fait que les mutations
de ces gènes ne modifient pas toujours l’épitope reconnu par
l’anticorps. Par conséquent, le diagnostic de syndrome HNPCC
ne peut être rejeté face à l’absence d’extinction d’une protéine
hMLH1, hMSH2 ou hMSH6 en immunohistochimie. En
revanche, après la détection d’un phénotype tumoral instable
MSI+ en biologie moléculaire dans le cadre d’une stratégie en
deux temps, l’immunohistochimie est utile pour orienter la
recherche d’une mutation constitutionnelle sur un gène MMR
dont la protéine ne sera pas exprimée. La même démarche sera
effectuée si d’emblée une analyse génétique constitutionnelle
des gènes MMR est proposée, afin d’être orienté vers le gène
à analyser.
LA CONSULTATION GÉNÉTIQUE EN PRATIQUE 34
Certaines règles régissent la prise en charge des patients en
oncogénétique. Dans le cadre des lois de bioéthique, le décret
n° 2000-570 du 23 juin 2000 fixe les conditions de prescription
et de réalisation des examens relatifs aux caractéristiques géné-
tiques d’une personne : “Chez une personne asymptomatique
mais présentant des antécédents familiaux, la prescription d’un
examen des caractéristiques génétiques ne peut avoir lieu que
dans le cadre d’une consultation médicale individuelle. Cette
consultation doit être effectuée par un médecin œuvrant au sein
d’une équipe pluridisciplinaire rassemblant des compétences
cliniques et génétiques. Cette équipe doit se doter d’un protocole
type de prise en charge et être déclarée au ministre chargé de la
Santé selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé
de la Santé. Au cours de cette consultation, la personne doit être
informée des caractéristiques de la maladie recherchée, des moyens
de la détecter, des possibilités de prévention et de traitement. Les
examens ne peuvent être prescrits chez un mineur que si ce dernier
ou sa famille peuvent personnellement bénéficier de mesures
préventives ou curatives immédiates.” Ainsi, la prise en charge d’un
patient suspect d’être atteint d’un syndrome de prédisposition
familiale au cancer se fera au sein d’une équipe pluridisciplinaire
(généticien, oncologue, hépatogastro-entérologue, chirurgien,
psychologue, etc.). Généralement, le motif de consultation en
oncogénétique est la suspicion par le clinicien ayant pris en
charge le patient (le cas index) d’une forme familiale de cancer.
Rarement, il s’agit d’une démarche individuelle de la part d’un
patient. Les deux principaux objectifs de la consultation d’on-
cogénétique sont, d’une part, d’établir un diagnostic et, d’autre
part, d’informer les consultants (cas index et/ou apparentés).
L’information concerne les éléments suivants : la nature du risque
génétique de cancer, son mode de transmission, les modalités
de la prise en charge une fois le diagnostic établi et les moyens
d’intervention pour réduire le risque. Lors de la consultation
initiale d’oncogénétique, les éléments suivants seront recueillis
auprès du cas index afin de déterminer le risque familial : les
données diagnostiques (le ou les comptes-rendus endoscopiques,
opératoires, anatomo-pathologiques), la constitution d’un arbre
généalogique et, si possible, la proposition d’un prélèvement
sanguin à la recherche d’une mutation délétère du gène impliqué
dans le syndrome de prédisposition familiale au cancer suspecté.
Le patient devra être informé des objectifs de ce prélèvement et
des implications du test, qu’il soit porteur ou non d’une mutation
délétère. De même, il devra être averti de l’éventualité d’un test
négatif et de sa signification. La deuxième étape, faisant suite à
une période de réflexion et à la proposition d’un entretien avec
un psychologue, sera la réalisation du prélèvement sanguin,
une fois obtenu un consentement écrit. La troisième étape de
la prise en charge en oncogénétique reposera, d’une part, sur
une démarche diagnostique basée sur l’interprétation des tests
de biologie moléculaire, à la recherche d’une mutation délétère
du gène associé au syndrome de prédisposition familiale au
cancer suspecté, et, d’autre part, sur l’annonce au patient du
résultat des tests, laquelle ne se fera qu’en consultation d’onco-
génétique et après s’être assuré que le patient souhaite que ce
résultat lui soit communiqué. En cas de test positif, ce résultat
devra être contrôlé sur un deuxième prélèvement sanguin indé-
pendant du premier. La durée approximative de l’ensemble de
cette démarche effectuée chez le cas index est de six à douze
mois. En cas de mutation délétère diagnostiquée chez le cas
index, il sera proposé un test diagnostique chez les apparentés
qui le souhaitent. La réalisation de ce test basé sur la recherche
chez les apparentés de la mutation délétère identifiée chez le cas
index est simple à réaliser, et le résultat pourra être obtenu en
quelques semaines. Un test négatif chez le cas index n’exclut pas
la poursuite de l’enquête génétique et nécessite parfois celle de
l’analyse moléculaire, en s’orientant, par exemple, vers d’autres
gènes. De plus, un test négatif ne dispense pas de proposer des
mesures de dépistage adaptées au risque suspecté, de même
que dans l’attente du résultat du test. Il appartient seulement
au cas index de contacter ses apparentés et de les informer de
la possibilité d’un test diagnostique génétique prédictif et des
mesures de dépistage à mettre en œuvre au sein de la famille.
L’article L1131-1 de la loi n° 2004-800 du 6 août 2004 précise
que, “en cas de diagnostic d’une anomalie génétique grave posé