Le Courrier de colo-proctologie (II) - n° 3 - septembre 2001
un traitement plus mutilant est nécessaire
ou non. La présence d’un cancer invasif
peu différencié ou indifférencié sur la
biopsie préopératoire est une indication
pour de nombreux auteurs à une ER.
L’ INTERVENTION
Techniques
d’exérèse chirurgicale
Une préparation colique et une antibio-
prophylaxie sont recommandées pour ce
type de chirurgie. Les ETA se font sous
anesthésie générale ou loco-régionale. Le
malade est installé en fonction de la loca-
lisation de la tumeur : position de la taille
pour les lésions postérieures ou latérales,
en procubitus ventral pour les lésions
antérieures.
La section muqueuse est réalisée à au
moins 1 cm des berges de la lésion.
L’exérèse emporte toute la paroi rectale
et si possible la graisse périrectale. Pour
les lésions antérieures du rectum sous-
douglassien, l’exérèse est plus limitée, de
façon à éviter les fistules recto-vaginales
chez la femme ou recto-urétrales chez
l’homme. Le risque pour les lésions anté-
rieures du rectum sus-douglassien est une
perforation rectale en péritoine libre.
ETA classique
La technique du parachute est indiquée
pour les tumeurs situées à moins de 10 cm
de la ligne pectinée. Après dilatation anale,
l’exposition de la tumeur se fait habituel-
lement avec deux valves vaginales étroites.
Des fils sont placés sur le pourtour de la
tumeur, au moins à un centimètre des
berges. La traction de ces fils donne un
aspect de parachute, d’où l’appellation de
la technique. Cette manœuvre permet une
bonne exposition de la zone à sectionner
et garantit une marge de sécurité de 1 cm
entre les berges de la tumeur et la zone de
section. Les berges peuvent être refermées
par des points séparés de fil résorbable. De
principe, ou en cas de traction excessive,
la plaie peut être laissée ouverte, la cica-
trisation se faisant par réépithalisation.
L’alternative à cette technique est la tech-
nique du lambeau tracteur, lambeau débuté
au-dessus de la ligne pectinée et qui per-
met l’exérèse de la lésion en l’abaissant
progressivement hors de l’anus.
Microchirurgie endoscopique (ME)
Cette technique, peu développée en France,
est particulièrement adaptée pour les
tumeurs du moyen et du haut rectum (2). Le
matériel utilisé comprend un rectoscope,
muni d’un système d’insufflation permet-
tant de distendre le rectum, et par lequel
peuvent être introduits plusieurs instru-
ments chirurgicaux. L’exérèse est réalisée
selon les mêmes principes qu’une ETA clas-
sique : section à 1 cm des berges de la
tumeur et exérèse de la totalité de la paroi
rectale. Les berges sont rapprochées par un
surjet de fil résorbable.
Résultats de l’ETA
pour les polypes malins
du rectum
Complications postopératoires
La mortalité postopératoire après ETA est
quasiment nulle (2, 7, 8). La morbidité
après ETA est faible et globalement infé-
rieure à 5 % (8,9). Elle est d’environ 20 %
après ME (9, 10). Aucune séquelle sur la
fonction intestinale n’a été décrite après
ETA.
Analyse histologique
L’objectif de l’étude histologique est
double : confirmer le caractère complet de
l’exérèse et déterminer les caractéristiques
de la tumeur augmentant le risque d’EG.
En cas de carcinome in situ, le risque
d’EG est nul, et l’ETA, si l’exérèse est
complète, reste le traitement de choix. Si
le cancer est invasif, le risque d’EG aug-
mente proportionnellement au degré d’in-
filtration pariétale :T1 (envahissement de
la sous-muqueuse) 3 à 17 % d’EG, T2
(envahissement de la musculeuse) 15 à
30 %, T3 (envahissement de la sous-
séreuse) 50 à 65 % (1, 3, 5, 11, 12).
D’autres facteurs histologiques augmen-
tent la fréquence des métastases gan-
glionnaires : le caractère peu différenciée,
voire indifférencié, de la tumeur, (1, 8, 11,
13), la présence d’un envahissement vas-
culaire ou lymphatique (1, 8, 11, 13),la
présence d’un contingent colloïde
muqueux (13). Ce dernier critère est
actuellement débattu : plusieurs études
ont montré qu’il n’influençait ni le risque
d’EG (1), ni celui de récidive locale (8,
9). Le risque d’EG pour une tumeur T1
bien différenciée sans envahissement
vasculaire ou lymphatique est évalué par
Blumberg et al. (1) à 7 %. Ce risque est
nul dans l’étude de Brodsky et al. pour
les tumeurs T1 sans envahissement lym-
phatique, mais l’effectif des malades est
faible, puisque inférieur à 20 (1). Des
études japonaises ont proposé, comme
autre critère corrélé au risque d’EG, le
degré d’infiltration de la tumeur dans la
sous-muqueuse (SM) : sm1 (1/3 superfi-
ciel de la SM), sm2 (1/3 moyen de la
SM), sm3 (1/3 profond de la SM) : le
risque d’EG est plus faible pour les
tumeurs sm1 et sm2 que pour les tumeurs
sm3 (11).
Sur la pièce d’exérèse après ETA, les cri-
tères habituellement requis sont (a) un car-
cinome invasif ne dépassant pas la SM, (b)
un carcinome bien différencié ; (c) des
marges latérales et profondes saines ; (d)
l’absence d’envahissement vasculaire ou
lymphatique ; (e) selon les auteurs, l’ab-
sence de contingent colloïde muqueux (7,
9, 14, 15). Si l’un de ces critères n’est pas
respecté, une ER ou, si elle n’est pas envi-
sageable, une radiochimiothérapie doit être
proposée au malade (7, 9, 14, 15).
Résultats carcinologiques
Les résultats de l’ETA dans la littérature
sont d’interprétation difficile parce que (a)
les critères de sélection ne sont pas tou-
jours précisés ou varient d’une étude à
l’autre, (b) les populations de malades sont
hétérogènes dans une même série, (c) cer-
taines études incluent des cancers de stade
et de différenciation différents ; (d) la
majorité des études sont rétrospectives ; (e)
dans une même série, les traitements sont
parfois différents, tant par la technique uti-
lisée (ETA, exérèse par voie transsacrée,
destruction par fulguration ou électrocoa-
gulation…) que par leur caractère curatif
ou palliatif ; (f) le suivi des malades est
souvent inférieur à 5 ans.
Après ETA pour un cancer T1 bien diffé-
rencié, le taux de récidive locale varie de
0 à 13 % et la survie à 5 ans de 90 à 100 %
Dossier thématique
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