Qu`arrivera-T-Il Après l`essor du Crédit en Chine

POINTS SAILLANTS
Eric Lascelles
Économiste en chef
RBC Gestion mondiale d’actifs Inc.
Nota : Pour déterminer la croissance du PIB sans les emprunts, on suppose
qu’une augmentation d’un point de pourcentage du ratio crédit/PIB se traduit
par une croissance d’un quart de point de pourcentage du PIB.
Sources : Haver Analytics, RBC GMA
NUMÉRO 23 JUIN 2013
0
2
4
6
8
10
12
14
16
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Croissance annuelle du PIB (%)
Avec emprunts
Sans emprunts
Vue d’ensemble pour les investisseurs
Repères économiques
POINTS SAILLANTS
Eric Lascelles
Économiste en chef
RBC Gestion mondiale d’actifs Inc.
En Chine, le crédit a probablement augmenté trop rapidement au cours des cinq dernières
années.
En plein essor, le financement parallèle devrait ralentir en raison des efforts des autorités pour
réprimer les excès des produits de gestion de patrimoine.
L’endettement des gouvernements locaux continue de croître dans la foulée des projets
d’infrastructure, mais cette progression devrait être freinée par les nouvelles limites imposées au
crédit bancaire.
La surchauffe du marché du logement n’est pas aussi grande qu’il n’y paraît, mais un
refroidissement est néanmoins nécessaire.
La Chine s’est montrée très habile à surmonter les embûches, mais les risques de baisse liés au
crédit auxquels elle sera confrontée au cours de la prochaine année ne sont pas négligeables.
À l’avenir, une expansion moins fulgurante du crédit devrait ralentir la croissance.
QU’ARRIVERA-T-IL APRÈS L’ESSOR DU CRÉDIT EN CHINE ?
L’économie de la Chine a fait preuve d’une résistance
enviable tout au long de la crise financière mondiale,
surpassant le reste du monde (figure 1). Ce résultat a donné
du poids à l’opinion selon laquelle le capitalisme d’État
de la Chine, unique en son genre, est d’une certaine façon
plus robuste que le capitalisme de libre marché qui a cours
en Occident. D’après nous, cette explication est beaucoup
trop simpliste1. Nous croyons que deux autres facteurs
contribuent bien davantage au succès relatif de la Chine.
Premièrement, le fait que le système financier de la Chine
soit encore à l’étape de l’adolescence lui a été profitable.
Quand le système financier mondial s’est enrayé à la fin
de 2008, la Chine a été moins touchée que d’autres pays
parce que son système financier est relativement petit,
moins élaboré et moins intégré sur le plan mondial. De
plus, ses banques avaient déjà été restructurées avec
succès avant que la crise mondiale ne commence.
Deuxièmement, la Chine a lutté contre la crise mondiale en
déclenchant un véritable tsunami de crédit. Il est très difficile
d’évaluer l’effet de ces mesures, mais nous estimons que sans
elles, la progression de l’économie chinoise aurait pu se limiter
à 2 % en 2009, comparativement au taux de 7 % réellement
atteint (figure 2).
Dans ce rapport, nous examinons les répercussions éventuelles
de l’essor du crédit en Chine. Nous ferons une première
évaluation du niveau global du crédit en Chine, puis un
examen plus approfondi du marché du logement de la Chine,
1 Le capitalisme d’État a l’avantage d’offrir de nombreux leviers politiques, mais il
peut devenir difficile à manier quand le pays s’enrichit.
Nota : Écart entre la croissance annuelle du PIB réel de la Chine et celle du PIB
réel des États-Unis. Sources : CNBS, BEA, Haver Analytics, RBC GMA
0
3
6
9
12
15
1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013
Différentiel de croissance du PIB
réel de la Chine et des É.-U.
(en points de pourcentage)
La Chine dépasse
les É.-U. grâce au
crédit
Figure 1 : Croissance spectaculaire du PIB de la Chine
Figure 2 : La croissance de la Chine serait moins rapide
sans les emprunts
2
REPÈRES ÉCONOMIQUES Numéro 23 • Juin 2013
ceux d’autres pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni, qui
sont deux fois plus élevés (figure 4). En outre, il est rassurant de
voir la Chine afficher un financement social total inférieur à celui
enregistré par le Japon pendant son propre envol économique.
L’écart entre ces deux variables pourrait être en partie
attribuable à la petite taille relative du marché boursier chinois,
qui oblige le pays à recourir davantage au financement par
emprunt. Du fait de cette particularité, le résultat relatif de la
Chine est plus faible selon la mesure de la BRI, mais il semble
plus normal une fois l’ensemble des sources de financement
incluses dans le financement social total.
Une question de croissance, et non d’ampleur
Peu importe, les deux mesures du crédit convergent vers
un même point essentiel : la Chine a connu une croissance
Nota : Graphique établi selon les plus récentes données disponibles. Le crédit
privé comprend les prêts accordés aux secteurs non financiers et les titres de
créance émis par les secteurs financiers et non financiers.
Sources : Haver Analytics, RBC GMA
du financement parallèle au pays, et de l’endettement des
gouvernements locaux et du gouvernement central.
Notre conclusion la plus surprenante est que la situation
du crédit est étonnamment nuancée. Il est plus difficile que
nous l’avions prévu d’affirmer que la Chine a accordé trop
de crédit, que le secteur du logement est en surchauffe, que
les produits de gestion de patrimoine sont une mauvaise
idée ou que les gouvernements locaux seront bientôt en
défaut. Chaque aspect présente des problèmes réels,
mais dans une moindre mesure que ce qu’on imagine
couramment. De plus, ce qui est tout à leur honneur, les
autorités chinoises répriment maintenant les excès.
Bien sûr, cette répression a accentué le risque d’un
atterrissage brutal au cours de la prochaine année.
Même si l’atterrissage brutal pourra vraisemblablement
être évité, la préoccupation n’est pas négligeable. D’une
façon ou d’une autre, une croissance future moins
fulgurante du crédit se traduira fort probablement par
une croissance économique plus faible à l’avenir.
Crédit privé en Chine
Nous commençons cette analyse par un aperçu de la situation
globale du crédit dans le secteur privé chinois. La tâche
n’est pas aisée : les données sont difficiles à obtenir, car
elles sont scindées de façon peu pratique et correspondent
imparfaitement à celles des autres pays.
Selon les données de la Banque des règlements internationaux
(BRI)2, le niveau du crédit privé en Chine a maintenant atteint
celui du monde développé – ce qui est un signe inquiétant
puisque les pays pauvres sont généralement beaucoup
moins endettés (figure 3). À 161 % du PIB, cette mesure
de l’endettement est maintenant bien supérieure à celles
des autres pays asiatiques et présente une ressemblance
inquiétante avec les excès de 1997, qui ont contribué à
déclencher la crise financière asiatique3.
Une définition plus large du crédit privé est ce que la Chine
appelle le « financement social total ». Grosso modo, cette
mesure ajoute le financement parallèle (y compris l’émission
d’actions) à la définition précédente du crédit privé4. D’après
cette mesure, le financement social total de la Chine est de
183 % du PIB. Bien que supérieur à celui de la première
définition, ce résultat semble en fait assez faible par rapport à
2 Correspond aux obligations de sociétés en circulation plus les prêts consentis
aux ménages et aux sociétés non financières.
3 Cela dit, on note l’absence d’autres déclencheurs importants en Chine, comme
des emprunts étrangers élevés ou une forte dépendance des banques envers le
financement de gros
4 Pour les pays autres que la Chine, notre calcul s’appuie sur les données de
l’OCDE.
Figure 3 : Le crédit privé de la Chine est élevé par rapport aux
marchés émergents
6
34
58
116
137
156
161
165
171
210
344
0 40 80 120 160 200 240 280
Philippines
Indonésie
Inde
Thaïlande
Malaisie
Allemagne
Chine
Japon
É.-U.
Corée du Sud
R.-U.
Crédit privé en % du PIB nominal
350
58
183
223
246
246
296
335
389
498
0100200300 400 500
Mexique
Chine
Allemagne
Japon (1980)
Chili
Japon
Corée du Sud
É.-U.
R.-U.
Financement privé en % du PIB nominal
Figure 4 : Le financement social total de la Chine ne semble pas
excessif à première vue
Nota : Le financement privé représente les emprunts effectués par le secteur
privé, hors banques, au moyen de prêts et d’émissions d’obligations et d’actions.
Les données pour la Chine correspondent au financement social total pour
mars 2013. Les autres données proviennent de l’OCDE, en date de 2009 pour le
Mexique et de 2011 pour tous les autres pays, à moins d’avis contraire.
Sources : Haver Analytics, Banque populaire de Chine, OCDE, RBC GMA
3
Repères économiques
Nota : Le financement privé représente les emprunts effectués par le secteur
privé, hors banques, au moyen de prêts et d’émissions d’obligations et
d’actions. Les données pour la Chine correspondent au financement social total
pour mars 2013. Les autres données proviennent de l’OCDE, en date de 2009
pour le Mexique et de 2011 pour tous les autres pays, à moins d’indication
contraire. Sources : Haver Analytics, Banque populaire de Chine, OCDE, RBC GMA
Nota : Graphique établi selon les plus récentes données disponibles. Le crédit
privé comprend les prêts accordés aux secteurs non financiers et les titres de
créance émis par les secteurs financiers et non financiers.
Sources : Haver Analytics, RBC GMA
du crédit considérable depuis la crise financière. Le crédit a
enregistré un bond allant de 47 % à 70 % du PIB au cours des
cinq dernières années (figures 5 et 6). Ce rythme effréné est
supérieur à celui de tout autre pays que nous avons examiné.
Cet enthousiasme est inquiétant. Les bulles du crédit ont
souvent moins à voir avec le niveau absolu du crédit qu’avec le
taux d’accroissement du crédit. Selon une règle pratique, une
bulle du crédit est à prévoir quand le ratio crédit/PIB dépasse
40 % du PIB pendant cinq ans. La Chine a accompli cet exploit
discutable d’après les deux mesures du crédit.
Le crédit a mauvaise presse
Précisons qu’un levier modeste – quand la croissance du crédit
est à peine supérieure à la croissance économique – est normal.
Lorsque les pays s’enrichissent, ils peuvent généralement
soutenir un élargissement des marchés financiers et octroyer
davantage de crédit. Cette causalité peut aussi aller dans
le sens inverse : la hausse du crédit – dans des proportions
raisonnables – est l’un des moyens qu’utilisent les pays pour
s’enrichir (figure 7).
De plus, le crédit ne doit pas être envisagé seulement dans le
contexte du fardeau qu’il représente pour les emprunteurs. Les
emprunteurs cherchent activement du crédit. Et pour chaque
emprunteur, il y a un épargnant diligent. Le marché du crédit est
un remarquable mécanisme d’appariement des épargnants et
des emprunteurs, qui offre un environnement plus productif aux
fonds excédentaires.
Contrepoids propres à la Chine
Il y a aussi certains facteurs importants qui réduisent le risque
de crédit en Chine.
Premièrement, on note peu de signes de tensions évidentes
sur les marchés du crédit chinois. Les prêts bancaires non
rentables ont beaucoup diminué pendant la période même
où la croissance du crédit s’est accélérée (figure 8). De
façon générale, les ratios d’adéquation des fonds propres
des banques s’améliorent (même s’ils restent faibles
d’après les normes mondiales). Il est vrai que récemment,
quelques emprunteurs ont manqué à leurs engagements
liés à des obligations de sociétés ou des produits de gestion
de patrimoine, que quelques banques ont soi-disant été
incapables de rembourser leurs prêts et que les taux des prêts
interbancaires ont augmenté. Cependant, nous ne prévoyons
pas de véritable déluge.
Deuxièmement, en raison de moyens de contrôle efficaces sur
les mouvements de capitaux, la majeure partie des emprunts de
la Chine sont libellés dans sa propre monnaie et sont financés
au pays. Par conséquent, la Chine est moins exposée que bien
d’autres marchés émergents au risque que l’agitation du marc
-17
0
0
4
7
9
15
20
37
39
47
-25 0 25 50
É.-U.
Allemagne
Philippines
Japon
Inde
Indonésie
Malaisie
Thaïlande
Corée du Sud
R.-U.
Chine
Variation sur 5 ans du crédit privé en % du PIB nominal
(en points de pourcentage)
Figure 5 : Le crédit privé de la Chine s’accroît à un rythme inégalé
-69
-25
-6
1
1
20
44
70
-80 -40 0 40 80
Japon
R.-U.
Allemagne
É.-U.
Chili
Mexique
Corée du Sud
Chine
Variation sur 5 ans du financement privé en % du PIB nominal
(en points de pourcentage)
Figure 6 : Le financement social total de la Chine augmente de
façon alarmante
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
0 200 400 600 800
PIB réel par habitant
(2005, en $ US)
Ratio dette/PIB (%)
Figure 7 : Les pays peuvent s’endetter davantage à mesure qu’ils
s’enrichissent
Nota : Graphique à nuage de points des données longitudinales de 32 pays.
Sources : Haver Analytics, RBC GMA
4
REPÈRES ÉCONOMIQUES Numéro 23 • Juin 2013
Nota : La « Demande A » correspond à une augmentation nécessaire du nombre
de logements en milieu urbain de 5,6 % (en tenant compte d’une augmentation
de la population urbaine de 3 %, d’un déclin de la taille des ménages de 0,6 %
et d’un taux de démolition de 2 %). La « Demande B » est calculée en tenant
compte d’une croissance identique de 5,6 %, mais en supposant que le ratio
nouveaux ménages/nouveaux logements est de 1 pour 1 (plus que le taux actuel).
La « Demande C » étend l’hypothèse précédente en supposant que l’écart actuel
entre les ménages et les logements sera comblé d’ici 20 ans. Le nombre de
logements achevés est calculé sur la base de 100 m
2
par logement.
Sources : Haver Analytics, RBC GMA
Nota : Graphique fondé sur la dernière année pour laquelle des données
existent. Sources : Haver Analytics, FMI, RBC GMA
Sources : Commission chinoise de réglementation des banques,
Haver Analytics, RBC GMA
mondial incite les étrangers à cesser leurs prêts, faisant bondir
le coût de la dette libellée en devises.
Troisièmement, la Chine est un épargnant net, et non un
emprunteur. Grâce à des années d’excédent du compte courant,
le pays affiche une position extérieure globale positive de
1 800 milliards de dollars US. En dépit de ses emprunts
excessifs, la Chine s’est montrée encore plus obsédée par
l’épargne (figure 9), ce qui assure un minimum de protection.
Quatrièmement, les banques chinoises et les sociétés d’État
sont extrêmement malléables. Si le crédit venait à subir un
gel soudain, le gouvernement pourrait en atténuer l’impact
en ordonnant aux institutions financières de poursuivre les
prêts, de rééchelonner la dette et d’acheter plus d’obligations
gouvernementales.
Prudence à l’égard du crédit
Au final, chose étonnante, il n’est pas certain que la dette privée
de la Chine soit trop élevée, mais sa croissance a manifestement
été trop rapide. Même si plusieurs facteurs atténuaient le coup
porté par un ralentissement du crédit, les risques de recul
sont anormalement élevés et le fait est que le crédit ne peut
continuer d’augmenter au rythme actuel en Chine.
Afin de mieux comprendre ces risques, nous examinons
maintenant plusieurs des principales composantes du marché
chinois du crédit.
Surchauffe du logement
Le marché chinois du logement a connu un prodigieux essor,
contribuant considérablement à la croissance du crédit
par le truchement du financement des constructeurs et
des hypothèques. Un examen sommaire laisse croire qu’il
y a matière à s’inquiéter. Nous estimons la construction
de logements en zone urbaine à environ 20 millions de
nouvelles unités par année, ce qui dépasse de loin la demande
démographique, qui est de l’ordre de 9 à 16 millions d’unités
(figure 10). La construction5 a augmenté de façon considérable
par rapport au PIB. Les prix des maisons sont de nouveau en
hausse (figure 11) et s’élèvent déjà à 22 fois le revenu annuel
des ménages dans la ville où les excès sont les pires, comme le
montre la figure 12. Les histoires de spéculation effrénée sont
nombreuses. Cependant, il faut faire une nuance importante
pour chacun de ces excès.
Justification de la construction
Par exemple, même si le nombre de maisons neuves est, de
fait, probablement supérieur à des niveaux durables, nous ne
pouvons l’affirmer catégoriquement. La privatisation massive
des maisons a commencé il y a seulement 15 ans. Avant cela,
5 Comprend tant la construction résidentielle que non résidentielle.
60
21
-9
-11
-12
-28
-30
-36
-38
-40
-52
-60 -40 -20 0 20 40 60
Japon
Chine
Corée du Sud
Inde
Zone euro
É.-U.
Brésil
R.-U.
Indonésie
Mexique
Turquie
Position extérieure globale nette en % du PIB
Épargnant
net
Emprunteur
net
Figure 9 : Globalement, l’économie chinoise affiche une épargne
(et non une dette) nette
3
6
9
12
15
18
21
20002002 20042006 20082010 2012
Logements achevés (en millions)
Les mises en chantier ont
presque doublé en 5 ans
et semblent excéder la
demande
Offre
(20,3)
Demande C
(16,4)
Demande B
(12,2)
Demande A
(9,1)
Figure 10 : Mises en chantier en milieu urbain de la Chine
0
2
4
6
8
10
12
14
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Ratio des prêts non productifs (%)
Figure 8 : Les prêts non productifs ont fortement baissé en Chine
5
Repères économiques
Nota : Indice fondé sur la moyenne des variations du prix des logements dans les
immeubles résidentiels nouvellement construits de 70 villes chinoises.
Sources : CNBS, Haver Analytics, RBC GMA
le parc immobilier a essentiellement stagné pendant une
génération, la construction résidentielle accusant un net retard
sur la demande marginale jusqu’à il y a environ sept ans. Il y
a donc un important retard à rattraper. De plus, étant donné
l’enrichissement du pays, il est normal que les ménages chinois
améliorent la qualité de leurs maisons. Ainsi, alors que le taux
de démolition annuel des maisons dans le monde développé est
de seulement 0,3 %, il pourrait bien être supérieur au taux de
2 % que nous avons estimé pour la Chine.
En outre, la demande reste artificiellement limitée. Des
restrictions sont imposées aux citoyens chinois quant à l’endroit
où ils peuvent choisir de vivre ou de détenir une propriété.
Les citoyens ruraux peuvent travailler dans les villes en tant
que travailleurs migrants, mais ils ne peuvent s’y établir, car
ils n’ont pas le droit de posséder une maison et n’ont pas
accès à l’éducation publique, aux soins de santé et aux autres
services sociaux locaux. Par conséquent, environ 125 millions
de travailleurs migrants vivent dans des dortoirs d’entreprises.
C’est peut-être la raison pour laquelle il y a 86 millions de
ménages urbains de plus que de logements urbains. Des
réformes à venir dans le secteur immobilier pourraient ouvrir
la porte à un accroissement de la demande de logements.
Notre scénario le plus optimiste, présenté à la figure 10,
prévoit une correction graduelle de ce déséquilibre au cours
des 20 prochaines années, mais il est possible que l’écart se
résorbe plus rapidement, ou que le processus d’urbanisation
s’accélère, rendant notre hypothèse d’un taux de croissance de
la population urbaine de 3 % trop prudente6.
Indépendamment de la demande, le niveau auquel le nombre
de logements achevés peut fléchir est également limité. Le
plus récent plan quinquennal de la Chine prévoit 36 millions de
nouveaux logements abordables entre 2011 et 2015. Près de
10 millions de logements abordables devront donc être
construits chaque année d’ici la fin de la période pour que la
cible soit atteinte. Cette activité stimulerait considérablement le
secteur de la construction.
Enfin, nous trouvons une certaine consolation dans plusieurs
autres observations. Tout d’abord, les données officielles sur
les logements inoccupés demeurent assez faibles en termes
absolus, ce qui enlève un peu de poids à l’argument selon
lequel la spéculation effrénée gonfle considérablement la
demande (figure 13). En fait, moins de 10 % des ménages qui se
situent dans les quatre derniers quintiles de l’échelle du revenu
possèdent plus d’une maison, et c’est le cas de seulement la
moitié des ménages dans le premier quintile.
6 La Chine s’est récemment fixé un objectif de 250 millions de nouveaux citoyens
urbains pour les 12 prochaines années, soit environ 125 millions de nouveaux
ménages. Dans ce cas, la croissance des ménages urbains serait de 3,4 % par an,
un peu au-dessus de notre hypothèse de 3 %.
-2
-1
0
1
2
3
4
5
6
7
janv. 2011 oct. 2011 juill. 2012 avr. 2013
Indice du prix moyen des logements
dans 70 villes (var. d'une année sur
l'autre en %)
Figure 11 : Les prix des logements montent de nouveau en Chine
Nota : Graphique établi à l’aide des données de 2011. Sources : Rapport sur la
stabilité financière dans le monde (FMI, avril 2012), RBC GMA
Figure 12 : Le ratio prix des logements/revenu en Chine figure
en tête de liste
45666677
910 10
13 13
16
22
0
4
8
12
16
20
24
Singapour
Wellington
Toronto
Los Angeles
New York
Chongqing
Londres
Guangzhou
Sydney
Tokyo
Tianjin
Hong Kong
Shenzhen
Shanghai
Beijing
Ratio prix des logements/revenu
annuel
Nota : Les stocks de logements et le nombre d’unités vacantes sont calculés sur
la base de 100 m
2
par logement. Sources : Haver Analytics, RBC GMA
Figure 13 : Les logements vacants augmentent rapidement en
Chine, mais pas de manière excessive
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
1,0
1,1
1,2
1,3
1,4
2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012
% de logements vacants en milieu urbain
1 / 15 100%