DOSSIER Session gynécologie médicale CNIT Paris-La Défense, 12-14 décembre 2013 N. Proust*, C. Morinière**, S. Lemerle**, P. May-Panloup** Abréviations COOP : contraception orale œstroprogestative FCU : frottis cervico-utérin BPES : syndrome blépharophimosis-ptosisépicanthus Les risques thromboemboliques des progestatifs de 3e et 4e générations D’après la présentation de J. Conard * CH du Mans et CHU d’Angers. ** CHU d’Angers. La contraception œstroprogestative est associée à un risque veineux augmenté (thrombose veineuse des membres ou cérébrale et embolie pulmonaire) quelle que soit la voie d’administration. Ce risque est plus élevé durant la première année d’utilisation, mais persiste ensuite, d’autant que d’autres facteurs de risque peuvent être associés : âge, thrombophilie, obésité, immobilisation. Le risque est plus faible pour des doses d’éthinylestradiol ≤ 30 μg. Le risque veineux des pilules de 3e génération (3G) [encadré] est multiplié par 2 par rapport à celles de 2e génération (2G) [remarque : le risque veineux des 2G versus absence de contraception orale œstroprogestative (COP) est multiplié par 3]. Le risque artériel (infarctus du myocarde, infarctus cérébral) des COP est beaucoup plus faible que le risque veineux : 0,67 infarctus du myocarde, 0,87 AVC et 6,96 accidents thromboemboliques pour 100 000 femmes/année dans l’étude de la Food and Drug Administration (FDA) de 2011. Il est augmenté en cas de facteur de risque associé : tabac, âge supérieur à 35 ans, migraines avec aura. Le risque est identique pour les 2G et les 3G et il est accru pour les 1G. Lorsque le progestatif est administré seul, par voie orale, par implant ou par stérilet, la contraception n’augmente ni le risque veineux, ni le risque artériel. Seule la voie injectable avec l’acétate de médroxyprogestérone semble augmenter le risque veineux. Le choix d’une contraception doit suivre les recommandations et conseils de prescription publiés par la Haute Autorité de santé (HAS) en 2012. Toute prescription de pilule (initiale ou de renouvellement) doit faire l’objet d’une recherche des facteurs de risque veineux ou artériel. La recherche de thrombophilie héréditaire est recommandée en cas d’antécédent familial au 1er degré avant l’âge de 60 ans. Elle comprend : temps de Quick, TCA, dosage de l’antithrombine et des protéines C et S, et 6 | La Lettre du Gynécologue • n° 389 - mars-avril 2014 recherche des mutations du facteur V Leiden et du facteur II 202010A. En cas d’antécédent personnel, on investiguera un syndrome des antiphospholipides en recherchant un anticoagulant circulant, des anticorps anticardiolipine et anti-β2-GP1. Encadré. Pour rappel : • 3e génération (3G) : désogestrel, gestodène, norgestimate. • 4e génération (4G): drospirénone. • Autres générations : acétate de cyprotérone, acétate de nomégestrol, diénogest. Les contraceptions de longue durée d’action : avantages et inconvénients D’après la présentation de O. Graesslin Les contraceptions de longue durée d’action comprennent les dispositifs intra-utérins (DIU) au cuivre et au lévonorgestrel et l’implant sous-cutané. Dans la littérature, l’anneau vaginal œstroprogestatif et le macroprogestatif injectable acétate de médroxyprogestérone ne sont pas inclus dans cette catégorie. Ils sont peu utilisés (20 % de DIU en 2010, et seulement 2,6 % des femmes de moins de 30 ans portent un implant). Ils ont une excellente efficacité contraceptive, avec un risque d’échec de 0,9 % à 3 ans pour cette catégorie contre 9,4 % pour les contraceptifs oraux (1). Les DIU sont la méthode contraceptive de première intention pour l’HAS. Leur utilisation est en augmentation actuellement. Leurs avantages sont : ➤ une bonne efficacité : indice de Pearl de 0,8 pour 100 femmes/année ; ➤ leur durée d’utilisation : 5 ans ; ➤ une pose possible en post-abortum. Leurs inconvénients sont : ➤ la douleur lors de la pose (pour 80 % des utilisatrices), mais peu d’influence sur le taux de satisfaction. Différents antidouleurs existent (AINS, anesthésie cervicale, misoprostol, monoxyde d’azote, DOSSIER etc.) mais aucune méthode n’est efficace, selon la conclusion d’une revue de la Cochrane de 2009 ; ➤ le risque infectieux : principalement dans les 21 jours suivant la pose. Il convient donc d’éliminer toute infection en cours au moment de la pose. Une recherche de Chlamydia trachomatis peut être réalisée, surtout chez les patientes jeunes et à risque d’infections sexuellement transmissibles (partenaires multiples, antécédents d’infection sexuellement transmissible, bas niveau socio-économique), d’autant plus si elles sont nulligestes. Le portage d’Actinomyces israelii sur DIU est assez fréquent (jusqu’à 50 % sur frottis cervico-utérin [FCU] à 5 ans), mais n’est pas synonyme d’infection ! L’actinomycose pelvienne est une complication sévère mais rare (environ 120 cas/an en France). La découverte d’actinomyces sur le FCU ne doit donc pas faire retirer le stérilet d’emblée en l’absence de symptomatologie (2) ; ➤ le risque d’échec de pose ; ➤ le risque de perforation : environ 1/1 000. Il convient donc de revoir les patientes à distance pour s’assurer de la présence intra-utérine du DIU et de sa bonne position. Les DIU au cuivre n’ont pas d’impact sur le plan cardiovasculaire. Ils sont indiqués en cas d’antécédent thromboembolique veineux ou artériel récent. L’inconvénient des DIU au cuivre est une augmentation de la durée et du volume des règles, inconstante mais parfois responsable d’anémie. Le DIU au lévonorgestrel présente comme avantages d’être le traitement le plus efficace des ménorragies fonctionnelles, et de pouvoir être utilisé en cas de fibrome, sauf si la cavité est déformée par un fibrome sous-muqueux, à cause du risque d’expulsion plus important. Il peut être une alternative à la chirurgie radicale. Il est également efficace dans le traitement des dysménorrhées fonctionnelles ou liées à l’endométriose, et dans celui de l’hyperplasie simple de l’endomètre, mais pas en cas d’atypie. Cependant, en cas de très haut risque chirurgical, son utilisation pourrait être une alternative, sous couvert d’un bilan initial exhaustif et d’une surveillance étroite. Enfin, il peut être utilisé chez les adolescentes, en particulier en cas de dysménorrhée dans un contexte d’endométriose, ou en cas de troubles de l’hémostase. Une version courte, adaptée aux petites cavités utérines, va être prochainement commercialisée. Le DIU au lévonorgestrel n’a pas d’effet métabolique notable, ni sur le plan veineux, ni sur le plan artériel. Il peut donc être utilisé en cas d’antécédent personnel thromboembolique, de facteurs de risque cardiovasculaire multiples ou de diabète. La prise de poids est limitée dans les études, avec une petite augmentation de la masse grasse par rapport à la masse maigre. Les manifestations cutanées les plus fréquentes sont la séborrhée et l’acné (1 à 3 % des motifs de retrait). Une chute de cheveux est parfois rapportée. L’implant contraceptif sous-cutané a une durée d’action de 3 ans (2 ans chez les obèses) ; il montre une très bonne efficacité, avec une réduction des dysménorrhées. Il n’a pas d’effet métabolique, ni sur le plan cardiovasculaire, ni sur le plan veineux. Le site d’insertion est, actuellement, non plus la gouttière bicipitale, mais la peau en regard de la face antérieure du biceps ; soit 1 cm plus haut que précédemment. Ses inconvénients sont surtout des complications liées à la pose : protrusion du site d’insertion, insertion profonde (muscle ou fascia), lésion du nerf cutané radial, risque de saignements fréquents (7 %), de saignements prolongés (18 %, et 30 % des motifs de retrait). Le profil des 3 premiers mois prédirait le profil ultérieur, mais 50 % des femmes avec un profil défavorable constatent une amélioration. La prise de poids pourrait concerner jusqu’à 10 % des patientes, en étant parfois rapide et importante. En ce qui concerne l’acné, la situation est souvent stable. Une diminution de la libido (5 %) a été décrite, avec une tendance à l’amélioration au cours du traitement. Insuffisance ovarienne prématurée : quelles explorations en 2013 ? D’après la présentation de S. Christin-Maitre L’insuffisance ovarienne prématurée (IOP) se définit par une triade : aménorrhée primaire ou secondaire d’une durée supérieure à 4 mois, déficience en hormones sexuelles stéroïdes, et élévation des gonadotrophines avec un taux de FSH supérieur à 40 UI/l sur 2 dosages, à au moins 1 mois d’intervalle chez une femme de moins de 40 ans. Sa cause reste inconnue dans 85 à 90 % des cas. Parmi les causes identifiées, on observe celles qui sont de nature environnementale : chimiothérapie (alkylants), radiothérapie, chirurgie pelvienne (ovariectomie bilatérale, endométriose), Distilbène®, teinture pour cheveux (non prouvé formellement) ; des causes chromosomiques et génétiques : les anomalies de structure ou de nombre du chromosome X ou les translocations impliquant le chromosome X sont les plus nombreuses (syndrome de Turner), la La Lettre du Gynécologue • n° 389 - mars-avril 2014 | 7 DOSSIER Session gynécologie médicale prémutation du gène FMR1 (syndrome de l’X fragile), la mutation du gène FOXL2 (BPES), etc. Plus de 40 gènes impliqués sont ainsi identifiés à ce jour, mais le plus souvent pour de rares cas. L’interrogatoire doit rechercher : un antécédent de chirurgie pelvienne, de radiothérapie ou de chimiothérapie, des antécédents familiaux d’IOP, de retard mental, de syndrome spécifique : surdité dans le syndrome de Perrault, atteinte des paupières d’un syndrome BPE, ambiguïté sexuelle (mutation gène SF1), antécédents personnels ou familiaux de maladies auto-immunes : maladie de Basedow, thyroïdite d’Hashimoto, diabète de type 1, une petite taille orientant vers un syndrome de Turner. Les examens complémentaires rechercheront : ➤ une maladie auto-immune : glycémie à jeun, TSH, anticorps anti-TPO et antisurrénaliens, dosage du cortisol plasmatique à 8 heures, AMH ; ➤ une pré-mutation du gène FMR1, des mutations spécifiques en fonction des arguments cliniques par un caryotype, à discuter avec un centre de référence. IOP et désir d’enfant Prise en charge de l’IOP en dehors de la fertilité D’après la présentation de H. Fernandez D’après la présentation de N. Chabbert-Buffet Du fait de l’hypo-œstrogénie, l’insuffisance ovarienne prématurée (IOP) implique un sur-risque d’ostéoporose (risque de fractures), de morbidité cardiovasculaire, de démence et de maladie de Parkinson. Une thérapeutique hormonale substitutive est donc nécessaire : œstradiol + progestérone micronisée en schéma continu ou discontinu (si désir de grossesse). Les contraceptifs oraux sont possibles chez les femmes jeunes. On observe quelques cas particuliers chez l’adolescente : un traitement estrogénique seul peut être débuté jusqu’au développement pubertaire complet, remplacé ensuite par un œstroprogestatif. En cas d’endométriose, un traitement œstroprogestatif en continu sera débuté. Chez les femmes à risque de cancer du sein, une hormonothérapie est possible. Une prise en charge non hormonale avec des mesures hygiénodiététiques peut être prescrite : apport calcique de 1 000 mg/j, vitamine D en cas de carence ; pour le traitement des bouffées de chaleur, prescription de β-alanine ou d’un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS), de gabapentine, ou de clonidine (hors AMM) ; pour le traitement de la sécheresse vaginale : œstrogènes locaux ou gels lubrifiants. 8 | La Lettre du Gynécologue • n° 389 - mars-avril 2014 D’après la présentation de J. Bellaïsch-Allart La fertilité spontanée en cas d’IOP secondaire est de l’ordre de 5 %. Le seul traitement ayant fait preuve d’efficacité à ce jour est le don d’ovocyte. Le don d’embryon est possible, mais est réservé aux cas d’infertilité masculine associée. La greffe d’ovaire peut être pratiquée si une autoconservation ovarienne a été faite avant la mise en place d’un traitement stérilisant. L’adoption peut également être proposée. Enfin, pour ce qui est de la prévention, dans les familles où plusieurs cas sont connus, il convient de conseiller d’avoir des enfants tôt ou de proposer une autoconservation ovocytaire. Pour les autres, il n’existe pas de mesure de prévention, car nous ne disposons à ce jour d’aucun marqueur prédictif fiable de l’IOP. Diagnostic et traitement de l’adénomyose L’adénomyose se définit comme une pathologie utérine bénigne correspondant à la présence d’îlots de tissu endométrial dans l’épaisseur du myomètre. Elle touche surtout les femmes entre 35 et 50 ans et sa prévalence serait d’environ 20 %. Son diagnostic formel est anatomopathologique. Elle est asymptomatique dans 1/3 des cas. Sinon, elle est responsable de saignements, de douleurs et d’infertilité. Les hémorragies génitales sont des ménorragies (50-60 %) d’installation progressive, plus ou moins associées à des métrorragies (20 %). Les douleurs pelviennes sont chroniques, volontiers cycliques à recrudescence menstruelle ; une dyspareunie peut y être associée (3 %), surtout en cas d’endométriose pelvienne profonde associée. L’infertilité, enfin, est rarement au premier plan du fait de l’âge de survenue et des antécédents de multiparité. L’examen clinique, peu contributif, est normal dans 2/3 des cas. Il peut retrouver un utérus plus volumineux, dur, fibreux, à contours réguliers, parfois sensible en période menstruelle. L’imagerie permet d’évoquer fortement le diagnostic, mais aussi d’évaluer son extension et de rechercher des lésions associées (fibrome ou endométriose). L’échographie endovaginale est l’examen de première intention, avec une bonne sensibilité et une bonne spécificité. Les critères sont un utérus volumineux non expliqué par la présence d’un léiomyome, DOSSIER l’aspect strié du myomètre, une asymétrie dans l’épaisseur des parois myométriales antérieure et postérieure, et l’hétérogénéité du myomètre. Au stade avancé, on retrouve des lacunes anéchogènes ou des kystes intra-myométriaux de taille variable. L’IRM a une sensibilité équivalente à l’échographie dans le diagnostic de l’adénomyose. Cet examen est à utiliser en seconde intention, en cas de doute diagnostique à l’échographie ou pour faire le bilan de lésions associées. Les signes sont l’épaississement de la zone de jonction > 12 mm et des spots hyperintenses intra-myométriaux en T2 ou en T1 (50 % des cas). De nouvelles séquences sont cours d’évaluation. En plus des éléments habituels observés à l’échographie, l’échographie 3D montre des images hyperéchogènes interrompant ou infiltrant la zone de jonction normalement hypoéchogène, une épaisseur maximale de la zone de jonction ≥ 8 mm et une épaisseur différentielle ≥ 4 mm, une perte de l’aspect triangulaire du fond utérin en coupe coronale ou des contours flous en coupe sagittale, et une vascularisation en peigne au doppler couleur. Le traitement de l’adénomyose peut être médicamenteux. Les progestatifs (nomégestrol, promégestone, lynestrénol, noréthistérone) sont indiqués du fait de leur effet anti-œstrogénique entraînant une atrophie de l’endomètre. Cependant, leur effet est limité dans le temps avec une réapparition des symptômes dans les 6 mois (30 à 50 % des cas). Le schéma sera séquentiel ou continu, selon le souhait d’aménorrhée de la patiente. Les contraceptifs œstroprogestatifs ne sont pas indiqués. Le danazol, dérivé de la 19-nortestostérone, peut être utilisé pendant 6 à 9 mois à la posologie de 400 mg/jour par voie orale ou 200 mg/jour par voie vaginale. Cependant, aucune étude clinique n’a prouvé son efficacité par voie orale, et il a une action androgénique importante. Par voie vaginale, le recul ne dépasse pas 6 mois. Les agonistes de la GnRH ont démontré leur efficacité, mais leur tolérance est mauvaise à court terme (syndrome climatérique) et à long terme (ostéoporose et risque cardiovasculaire). Ainsi, leur usage est limité à 6 mois ou peut être utilisé en préopératoire ou avant la pose d’un DIU en cas de cavité agrandie (2 mois de traitement). Une addback therapy pourrait être utilisée pour obtenir une meilleure tolérance en cas de traitement prolongé. Ce type de schéma n’a pas fait l’objet d’études spécifiques dans le traitement de l’adénomyose. L’utilisation du stérilet au lévonorgestrel a été étudiée dans cette indication avec une bonne efficacité, qui diminuerait toutefois après 3 ans. Une réévaluation et un remplacement si besoin pourrait être envisagé à 3 ans. De même, l’utilisation d’agonistes de la GnRH avant la pose en cas de gros utérus diminue le risque d’expulsion et augmente l’efficacité du traitement. Les autres traitements regroupent les antalgiques et les antiprostaglandines (naproxène, acide méfaménique). Les antiaromatases tels que le létrozole auraient une efficacité comparable à celle des agonistes de la GnRH avec moins d’effets indésirables. Des études complémentaires sont nécessaires. Le traitement de l’adénomyose peut être chirurgical conservateur. Le traitement de la cavité utérine par hystéroscopie ne s’adresse qu’aux patientes qui ne désirent plus d’enfant. Il peut s’agir de l’endométrectomie à l’anse ou de techniques de thermocoagulation (eau chaude, ballon ou courant bipolaire). Les techniques par ballon ou par courant bipolaire ne sont pas utilisables en cas de grande cavité utérine. En cas d’endométrectomie à l’anse, il convient de compléter par un passage de la rollerball sur toutes les faces traitées pour un meilleur résultat. Aussi, il est possible d’insérer un DIU au lévonorgestrel après la résection. Le traitement du muscle utérin peut correspondre à une métrectomie de réduction par laparotomie ; l’adénomyomectomie, qui peut se réaliser par cœlioscopie ou par laparotomie, est difficile du fait de l’absence de plan de clivage bien identifié. Les autres traitements conservateurs sont les ultrasons focalisés de haute fréquence ou l’ablation par radiofréquence. Le traitement des artères utérines avec embolisation de ces dernières entraîne une suppression rapide des métrorragies et des dysménorrhées. Le traitement radical correspond à l’hystérectomie et est à réserver aux cas d’échec des traitements conservateurs chez les femmes ne désirant plus de grossesse. L’hystérectomie peut être subtotale ou totale en cas d’endométriose de la cloison ou d’adénomyome cervical. Au final, seules les patientes symptomatiques doivent être traitées. Le traitement proposé devra tenir compte de la symptomatologie et du désir de grossesse. Adénomyose et infertilité D’après la présentation de P. Merviel L’adénomyose intervient dans l’infertilité par modification du péristaltisme utérin, du liquide péritonéal, de la vascularisation locale et des processus inflammatoires. Le tout a un effet péjoratif dans le transport La Lettre du Gynécologue • n° 389 - mars-avril 2014 | 9 DOSSIER Session gynécologie médicale spermatique et l’implantation. Il pourrait aussi exister une perturbation de la fonction ovarienne avec une augmentation du nombre d’ovocytes immatures. Ses effets délétères sur la FIV semblent être atténués par la prescription de protocoles longs ou ultra-longs avec les agonistes de la GnRH (3 à 6 mois). Exploration et prise en charge des hyperprolactinémies D’après la présentation de P. Touraine La fréquence de l’hyperprolactinémie se situe entre 30 et 90 cas/100 000 femmes, avec un pic autour de l’âge de 30 ans. Les manifestations cliniques sont liées à son action sur l’axe gonadotrope et, plus rarement, au volume tumoral de l’adénome. Chez la femme en période d’activité génitale, en cas d’hyperprolactinémie, on retrouve : une aménorrhée secondaire (parfois des spanioménorrhées, voire des cycles réguliers), une infertilité, une galactorrhée (80 % des cas). Chez l’homme, du fait de la fréquence des macroadénomes, c’est le syndrome tumoral qui est souvent au premier plan avec une perturbation du champ visuel ou un panhypopituitarisme. L’hyperprolactinémie est aussi responsable d’une impuissance, d’une diminution de la libido et d’une infertilité. La galactorrhée ou la gynécomastie sont exceptionnelles. Dans les 2 sexes, lorsqu’elle est ancienne, elle est responsable d’une déminéralisation osseuse. Le diagnostic repose sur le dosage de la prolactine basale. Il n’y a pas de nécessité absolue que cet examen soit réalisé à jeun ou après une période de repos prolongé. Si l’élévation est modérée (< 50 ng/ ml), il faut répéter le dosage, puis rechercher la présence d’une big-big prolactine. De même, il faut rechercher dans ce cas, une grossesse, une hypothyroïdie ou une insuffisance rénale. En cas de macroprolactinome, les taux sont supérieurs à 200 ng/ml. En cas d’hyperprolactinémie confirmée, il convient de réaliser une IRM centrée sur l’hypophyse avec injection de gadolinium. Les prolactinomes de taille supérieure à 2 mm sont diagnostiqués. Lorsqu’aucune cause n’est identifiée, on parle d’hyperprolactinémie idiopathique ou non tumorale. La découverte d’une hyperprolactinémie confirmée, même modérée, dans un contexte d’infertilité, doit conduire à la mise en place d’un traitement. Le traitement médical fait appel aux agonistes dopaminergiques (bromocriptine, cabergoline, quinagolide). Une prolactinémie normale et des cycles 10 | La Lettre du Gynécologue • n° 389 - mars-avril 2014 ovulatoires sont obtenus dans plus de 80 % des cas. Dans 5 à 10 % des cas, on observe une résistance à la bromocriptine obligeant à recourir à un autre agoniste dopaminergique, dont le succès sera ici variable. En cas d’échec, une chirurgie avec réduction du volume tumoral peut être tentée. Dans ces cas difficiles, l’objectif est le retour de cycles normaux et non pas la normalisation de la prolactine. Le suivi radiologique sous traitement doit comprendre une IRM à 3 et 12 mois, puis tous les ans pendant 5 ans, puis tous les 5 ans lorsque le volume du macroadénome est stable. Pour les microprolactinomes, la surveillance est peu utile et peut comprendre une IRM à 1 an, puis une tous les 3 ans. Une ostéodensitométrie est systématique dans le suivi. En cas de normalisation de la prolactine et/ou de stabilisation du volume de l’adénome, le traitement doit être revu afin d’utiliser la posologie minimale efficace avec diminution par paliers de 6 à 12 mois. Il n’y a pas d’argument pour penser qu’un tel traitement ait des inconvénients à long terme ; cependant, la tendance actuelle va vers l’interruption du traitement de temps en temps (tous les 2 ans) pour juger de son utilité. À noter que la prolactine peut ne remonter que tardivement, ce qui implique un suivi prolongé pouvant aller jusqu’à plusieurs années. En cas de macroprolactinome, l’introduction du traitement à doses progressives est susceptible d’améliorer l’adhésion au traitement en limitant les effets secondaires. Les hyperprolactinémies médicamenteuses sont rarement symptomatiques. Ainsi, en cas de symptômes chez des patientes traitées par des médicaments qui augmentent la prolactine, il convient de réaliser une IRM à la recherche d’une lésion tumorale. La première ligne de traitement consiste à arrêter le traitement en cause ; cependant, s’il s’agit d’un neuroleptique, son arrêt ne peut se faire qu’après avis du psychiatre. Le traitement médical est ici moins efficace, et l’objectif est, non pas la normalisation de la prolactine, mais la récupération de cycles spontanés. En cas d’échec, et avec persistance d’une aménorrhée par carence ostrogénique avec risque d’ostéoporose, il convient d’avoir recours à un traitement œstroprogestatif substitutif ou contraceptif. En cas de microprolactinome, la chirurgie peut se discuter en première intention (85 % de guérisons) contrairement au macroprolactinome pour lequel les résultats sont décevants (60 % d’hyperprolactinémies persistantes en postopératoire). En cas de microprolactinome, il n’y a pas d’intérêt à poursuivre un traitement après la ménopause, sauf en cas de galactorrhée persistante. DOSSIER Hyperprolactinémie, contraception et grossesse D’après la présentation de C. Cortet-Rudelli Les œstrogènes ont un rôle stimulant sur la production de prolactine, mais aussi sur la prolifération et la survie des cellules lactotropes. Les contraceptions œstroprogestatives n’augmenteraient pas la fréquence des adénomes à prolactine (PRL). À noter qu’il est recommandé, en cas de troubles du cycle, de doser la prolactine avant la mise en place d’une contraception œstroprogestative afin de ne pas méconnaître un adénome à prolactine. Il n’y a aucune contre-indication à l’utilisation de progestatifs chez les femmes porteuses d’un PRL, ni à l’utilisation d’œstroprogestatifs si l’adénome est bien contrôlé sous traitement. Ce dernier doit être poursuivi tout au long de la prise du contraceptif et une surveillance biologique et radiologique doit être effectuée : dosage du PRL avant et 3 mois après mise en route du traitement antidopaminergique, IRM dans l’année qui suit le début du traitement en cas de microadénome et à 3 mois en cas de macroadénome. En cas d’intolérance et/ou de résistance au traitement antidopaminergique, il convient de privilégier un autre mode de contraception. Les grossesses n’augmenteraient pas l’apparition d’adénomes à prolactine. La normalisation de la prolactinémie permet, le plus souvent, la correction de l’axe gonadotrope en cas de microadénome ou d’hyperprolactinémie idiopathique. En cas de macroadénome, il est parfois nécessaire d’ajouter des traitements inducteurs de l’ovulation. Parmi les traitements médicaux, le choix se porte sur la bromocriptine pour les femmes qui ont un souhait de grossesse, en raison du plus long recul d’utilisation avec des données rassurantes. En effet, on n’observe pas d’augmentation de la fréquence des fausses couches, grossesses extra-utérines, gémellaires, molaires, d’accouchements prématurés ni de malformations fœtales. Les données concernant la cabergoline sont rassurantes, mais encore limitées dans le temps. Quelle que soit la molécule, le traitement doit être interrompu en début de grossesse. Pour les femmes traitées par cabergoline, un changement pour la bromocriptine doit être envisagé en cas de désir de grossesse. Au cours de la grossesse, en cas de microadénome ou d’hyperprolactinémie idiopathique, il n’y a aucune complication à attendre dans l’immense majorité des cas. Un contrôle thyroïdien systématique pourra être réalisé. Par ailleurs, la surveillance est clinique : en cas de céphalées ou de troubles visuels, une IRM sera réalisée. Si la taille de l’adénome augmente, il faut reprendre le traitement par bromocriptine. En cas de macroprolactinome, il existe un risque d’augmentation du volume de l’adénome après interruption du traitement antidopaminergique. Ainsi, l’arrêt du traitement n’est possible en début de grossesse que sous certaines conditions : chirurgie antérieure, adénome de taille inférieure à 12 mm de grand axe initial, adénome à développement uniquement infrasellaire et/ou traitement prolongé par cabergoline ayant permis une diminution significative du volume tumoral, la lésion étant alors à distance suffisante des voies optiques. Dans tous les autres cas, il faut discuter soit un geste chirurgical préconceptionnel, soit un maintien du traitement pendant la grossesse. En cas d’arrêt du traitement, le suivi comporte : un bilan de l’axe thyréotrope et corticotrope avec adaptation éventuelle des traitements substitutifs de déficits hypophysaires, une surveillance clinique mensuelle et une information sur la nécessité de consulter en urgence en cas de céphalées ou de troubles visuels, un examen ophtalmologique tous les 3 mois. Une IRM ne sera pratiquée que dans les cas symptomatiques. En cas d’augmentation de taille, un traitement par bromocriptine est utilisé, voire une chirurgie à partir du 2e trimestre, ou encore un déclenchement, si la grossesse est avancée. L’allaitement n’est possible que chez les femmes qui n’ont pas eu besoin d’un traitement pendant la grossesse. Après la grossesse, le traitement ne doit pas être repris systématiquement. Un dosage de prolactine ainsi qu’une IRM doivent être réalisés en post-partum, ou 1 semaine après la fin de l’allaitement. En l’absence d’hyperprolactinémie, une surveillance biologique sera poursuivie. Sinon, un traitement médical sera repris. N. Proust déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Prolactine et risque de cancer du sein D’après la présentation de V. Goffin Le rôle de la prolactine dans le cancer du sein reste difficile à appréhender à ce jour. La prolactine pourrait être un facteur de risque indépendant de cancer du sein. Elle stimulerait la prolifération cellulaire et favoriserait chimio- et la radiorésistance par stimulation des mécanismes de détoxification cellulaire. D’autre part, elle pourrait avoir une action favorable en maintenant les cellules tumorales dans un état plutôt différencié, ce qui limiterait leur capacité d’invasion. ■ Références bibliographiques 1. Winner B, Peipert JF, Zhao Q et al. Effectiveness of long-acting reversible contraception. N Engl J Med 2012;366(21):1998-2007. 2. Serfaty D. Conduite à tenir chez les utilisatrices de dispositifs intra-utérins (DIU) ayant des frottis cervicaux de dépistage positifs pour actinomyces. Mises à jour en Gynécologie médicale. 31es Journées nationales du CNGOF. Paris, 2007. La Lettre du Gynécologue • n° 389 - mars-avril 2014 | 11