E Risque de nouvelle infection et de maladie génitale à HPV

8 | La Lettre du Gynécologue 362 - mai 2011
DOSSIER Épidémiologie de l'infection par HPV
Risque de nouvelle infection
et de maladie génitale à HPV
chez les femmes de plus
de 26 ans
Risk of HPV new infection and genital disease among
women over 26 years of age
F. Guyon*
E
n France, l’âge médian du premier rapport
sexuel est de 17,2 ans pour les garçons et de
17,6 ans pour les filles. Parmi les filles de 16 à
20 ans, respectivement 35 % et 79 % déclarent avoir
déjà eu des rapports sexuels (1). C’est pourquoi le
calendrier vaccinal 2010 (2) recommande la vacci-
nation contre les infections à papillomavirus humain
(HPV) "pour toutes les jeunes filles âgées de 14 ans,
afin de les immuniser avant qu’elles soient exposées
au risque d’infection". La vaccination peut également
être proposée "aux jeunes filles et jeunes femmes de
15 à 23 ans qui n’auraient pas eu de rapports sexuels
ou, au plus tard, dans l’année suivant le début de
leur vie sexuelle".
Pourtant, le risque de contamination par HPV ne s’ar-
rête probablement pas après les premiers rapports
sexuels, d’autant plus que, depuis quelques années,
les jeunes femmes déclarent davantage de parte-
naires sexuels au cours de leur vie (4,4 en moyenne
en 2006 contre 1,8 en moyenne en 1970) [1].
Nous présentons ici les données recueillies dans la
littérature sur le risque de contamination par les
HPV et le risque de lésions, y compris cancéreuses,
dues aux HPV chez les femmes en fonction de l’âge,
afin de déterminer l’intérêt de mesures de dépistage
ou de mesures prophylactiques spécifiques pour
les femmes plus âgées, notamment celles de 26
ans et plus.
Risque, prévalence et incidence
de l’infection par les HPV en
fonction de l’âge
Le risque chez toutes les femmes sexuellement
actives de développer au cours de la vie une infec-
tion due à un HPV est de 80 % (3).
Le risque d’infection et/ou de réinfection par un HPV
reste permanent tout au long de la vie. Toutefois, le
risque d’acquérir une nouvelle infection par un HPV
diminue avec l’âge (4).
La prévalence globale de l’infection – tout type
d’HPV confondu – chez les femmes de moins de
25 ans est supérieure à 20 % ; elle varie entre 5 et
15 % chez les 25-44 ans (5-7).
Chaque année, 5 à 15 % des femmes de plus de
25 ans sexuellement actives développent une
nouvelle infection par un HPV oncogène, et environ
1 à 2 % de ces infections sont dues à un HPV-16 ou
à un HPV-18 (5).
Le principal facteur de risque de l’infection par HPV
est le nombre de partenaires sexuels (3).
Risque de néoplasie intra-
épithéliale cervicale et de
cancer en fonction de l’âge
L’infection par les HPV est le plus souvent bénigne
et, dans 90 % des cas, disparaît spontanément en
* Département de chirurgie, Institut
Bergonié, Centre régional de lutte
contre le cancer de Bordeaux et du
Sud-Ouest, 229, cours de l’Argonne,
33076 Bordeaux Cedex.
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10 | La Lettre du Gynécologue 362 - mai 2011
Points forts
»
80 % des femmes sexuellement actives ont un risque de contracter une infection par HPV pouvant évoluer,
dans certains cas rares, vers un cancer du col de l’utérus.
»Le risque d’infection et/ou de réinfection par HPV reste permanent tout au long de la vie, mais le risque
de nouvelle infection par HPV diminue avec l’âge.
»
Le risque de développer une néoplasie intraépithéliale cervicale ou un cancer du col de l’utérus augmente
avec l’âge et est maximal vers 30 ans ; l’âge au moment de l’infection proprement dite est néanmoins indé-
terminé.
»
Les nouvelles infections chez les femmes plus âgées ne progressent pas davantage vers des lésions
précancéreuses ou cancéreuses, ce qui permet de penser que ces femmes n’ont pas plus que les autres besoin
d’être suivies ou vaccinées.
Keywords
Age
Epidemiology
Genital disease
Female
Infection
Human papillomavirus
Mots-clés
Âge
Épidémiologie
Maladie génitale
Femme
Infection
Papillomavirus
humain
1 à 2 ans. Mais elle peut aussi persister et devenir
responsable du développement d’une lésion. Une
infection découverte à 35 ans aura davantage de
risque de persister qu’une infection découverte chez
une jeune fille (4).
Le pic de survenue des lésions de haut grade du
col est observé après 30 ans, mais le moment de
l’infection reste indéterminée.
Un dépistage irrégulier, le tabagisme, les contra-
ceptifs, des facteurs génétiques, la multiparité et
une première grossesse à un âge jeune sont des
cofacteurs augmentant potentiellement le risque
de développement d’un cancer cervical, en plus d’une
infection à HPV (3).
Le risque de développer au moins une lésion de type
CIN3 après infection est de 14 % chez les 20-32 ans
et de 21 % chez les 40-50 ans (5). Rodriguez et al.
ont cependant montré que les nouvelles infections
par HPV chez les patientes plus âgées ont peu de
risque d’évoluer vers des lésions CIN2+ (8).
Risque de verrue génitale
en fonction de l’âge
En France, les taux d’incidence de verrues génitales
les plus élevés ont été observés dans la classe d’âge
des 20-24 ans, suivie de celles des 25-29 ans et des
30-34 ans, avec 95 % de patientes âgées de 15 à
49 ans. Le taux d’incidence chez les femmes âgées
de 25 à 44 ans est compris entre 100 et 360 pour
100 000 (9).
Conclusion
Toutes les femmes sexuellement actives sont expo-
sées au risque de contracter une nouvelle infection
à HPV, qui peut évoluer dans certains cas vers un
cancer du col de l’utérus. Le risque de nouvelle infec-
tion par HPV diminue cependant avec l’âge, alors
que la survenue d’un cancer est observée essentiel-
lement chez les femmes les plus âgées. Les facteurs
de risque de voir évoluer une infection vers une lésion
précancéreuse ou un cancer sont un dépistage irré-
gulier, le tabagisme, les contraceptifs, des facteurs
génétiques, la multiparité et une première grossesse
à un âge jeune.
Références bibliographiques
1. Bajos N, Bozon M, Beltzer N et al. Changes in sexual behaviours: from secular trends to public health
policies. AIDS 2010;24:1219-20.
2. Haut Conseil de la santé publique (HCSP). Le calendrier des vaccinations et les recommandations vaccinales
2010 selon l’avis du Haut conseil de la santé publique. Bull Epidemiol Hebd 2010;14-15:127-8. Accessible sur
: www.invs.sante.fr/beh/2010/14_15/beh_14_15.pdf.
3. Munoz N, Jacquard AC. Quelles données épidémiologiques sont nécessaires pour la mise en place de la
vaccination contre le papillomavirus humain ? Presse Med 2008;37:1377-90.
4. Castle PE, Schiffman M, Herrero R et al. A prospective study of age trends in cervical human papillomavirus
acquisition and persistence in Guanacaste, Costa Rica. J Infect Dis 2005;191:1808-16.
5. Castellsague X, Schneider A, Kaufmann AM, Bosch FX. HPV vaccination against cervical cancer in women
above 25 years of age: key considerations and current perspectives. Gynecol Oncol 2009;115(Suppl.1):S15-S23.
6. Smith JS, Melendy A, Rana RK, Pimenta JM. Age-specific prevalence of infection with human papillomavirus
in females: a global review. J Adolesc Health 2008;43(Suppl.1):S5-S25.
7. Skinner SR, Garland SM, Stanley MA, Pitts M, Quinn MA. Human papillomavirus vaccination for the preven-
tion of cervical neoplasia: is it appropriate to vaccinate women older than 26? Med J Aust 2008;188:238-42.
8. Rodríguez AC, Schiffman M, Herrero R et al. Longitudinal study of human papillomavirus persistence
and cervical intraepithelial neoplasia grade 2/3: critical role of duration of infection. J Natl Cancer Inst
2010;102:315-24.
9. Monsonego J, Breugelmans JG, Bouee S, Lafuma A, Benard S, Remy V. Incidence, prise en charge et coût
des condylomes acuminés anogénitaux chez les femmes consultant leur gynécologue en France. Gynecol
Obstet Fertil 2007;35:107-13.
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