É D I T O R I A L Quel frottis en 2003 ? l C. Bergeron* L e cancer du col fait partie des cancers qui peuvent être dépistés à un stade précancéreux et reste une priorité de santé publique en raison d’une incidence annuelle de 3 270 cancers invasifs du col de l’utérus et de 1630 décès. On peut espérer que ce dépistage sera mis en place de manière organisée, après le dépistage du cancer du sein et celui du côlon. COMMENT RENDRE LE FROTTIS PLUS EFFICACE EN 2003 Le dépistage se fait par l’examen cytologique d’un frottis prélevé une fois par an ou tous les 2 ans. Ce prélèvement est un acte volontaire qui est effectué la plupart du temps par des gynécologues médicaux. On évalue à 60 % la couverture de la population à dépister. Ces données sont approximatives car obtenues à partir des registres régionaux ou des départements pilote où le dépistage est organisé. L’objectif d’une campagne de dépistage serait donc d’augmenter cette couverture et d’atteindre des populations dites défavorisées ou à haut risque. La mise à jour des recommandations pour la pratique clinique – “Conduite à tenir devant une patiente ayant un frottis cervicoutérin anormal” –, sous l’égide de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES) (1), recommande d’utiliser le système de Bethesda 2001 pour la formulation des comptes rendus cytologiques (2). Le système de Bethesda 2001 permet de juger la qualité du prélèvement, qui doit être mentionnée de manière claire dans la conclusion. Si le frottis doit être refait, la raison qui empêche l’interprétation du prélèvement doit être explicitée. Si le frottis est interprétable, la conclusion doit mentionner s’il existe des cellules anormales ou si ce frottis est considéré comme normal. Les modifications bénignes (de type réactionnel ou associées à une inflammation spécifique ou non) sont considérées comme un frottis normal. Parmi les frottis anormaux, le diagnostic de lésions malpighiennes intraépithéliales de bas grade et de haut grade reste toujours d’actualité. Les atypies des cellules malpighiennes sont subdivisées en deux entités ; celle qui représente toujours la zone grise de la cytologie et que l’on dénomme “atypies des cellules malpighiennes de signification indéterminée (ASCUS)” et celle où l’on évoque une lésion malpighienne intraépithéliale de haut grade sans pouvoir l’affirmer de manière définitive (ASC-H). Ces deux entités nécessitent une prise en charge différente (1-3). En ce qui concerne les anomalies glandulaires, l’origine endocervicale ou endométriale doit être spécifiée. Le diagnostic “adénocarcinome in situ” est proposé quand les critères cytologiques sont présents (2). FROTTIS CONVENTIONNEL DE PAPANICOLAOU OU FROTTIS EN MILIEU LIQUIDE ? Les recommandations de l’ANAES ont souligné les avantages (1) du frottis en milieu liquide pour la qualité du prélèvement et la possibilité de faire une recherche de l’ADN du papillomavirus (HPV) avec le matériel résiduel. Les données disponibles en 2002 ne sont pas suffisantes pour privilégier le frottis en milieu liquide en termes de sensibilité et de spécificité. La difficulté de tirer une conclusion à partir de la littérature publiée tient surtout à la faiblesse de la méthodologie dans beaucoup d’études disponibles. Les populations choisies sont hétérogènes. Beaucoup d’études ne font que comparer les taux respectifs de détection des anomalies par les deux techniques cytologiques, sans inclure le “gold standard” histologique. Il existe en général une augmentation du taux de détection des lésions malpighiennes intraépithéliales de bas grade et à un taux moindre celles de haut grade avec le frottis en milieu liquide. Mais la confirmation histologique est le plus souvent absente. Ces anomalies détectées peuvent correspondre aussi bien à une véritable lésion qu’à un faux positif et conduire à un traitement excessif, des dépenses inutiles et une anxiété pour la patiente (1, 3, 4). Seuls les frottis anormaux suivis d’une biopsie sont pris en compte pour le calcul de la sensibilité. Le seuil de positivité de la cytologie est variable d’une étude à l’autre et peu de biopsies ont été faites après un frottis considéré comme normal, pour des raisons éthiques évidentes. La spécificité est donc rarement évaluée. Le surcoût introduit par le frottis en milieu liquide ne sera compensé, à long terme, que par une baisse d’incidence de ce cancer à un stade invasif. D’autres études restent encore à faire avec une méthodologie adéquate pour conclure sur le rapport coût-efficacité du frottis en milieu liquide, par rapport au frottis conventionnel. On peut tout de même prédire que le frottis en milieu liquide constituera un avantage certain pour automatiser la lecture et si le test HPV est associé au frottis en dépistage primaire. n R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S * Laboratoire Pasteur-Cerba, 95066 Cergy-Pontoise Cedex 9. 1. Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé. Recommandations pour la pratique clinique. Conduite à tenir diagnostique devant un frottis anormal du col de l’utérus. 2002 (site : www.anaes.fr). 2. Solomon D, Davey D, Kurman R et al. The 2001 Bethesda system. Terminology for reporting results of cervical cytology. Jama 2002 ; 287 : 2114-9. 3. Wright TC Jr, Cox JT, Massad LS et al. for the 2001 ASCCP-sponsored consensus conference. 2001 consensus guidelines for the management of women with cervical cytological abnormalities. Jama 2002 ; 287 : 2120-9. 4. Saslow D, Runowicz CD, Solomon D et al. American cancer society guidelines for the early detection of cervical neoplasia and cancer. Cancer J Clin 2002 ; 52 : 342-62. La Lettre du Gynécologue - n° 286 - novembre 2003 3