U Une cause rare d’hypoglycémie endocrinologie

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Une cause rare d’hypoglycémie
Anne Grand, Denis Feron, Christian Richard*
U
*Service de médecine
interne à orientation
­diabéto-endocrinologie,
CHI Eure-Seine,
site de Vernon.
n patient de 22 ans est hospitalisé pour des
hypoglycémies profondes. Il n’est pas diabétique. Ses antécédents sont une mutation du
facteur V Leiden hétérozygote, une torsion testiculaire droite, un tabagisme à 4 paquets.années, et un
alcoolisme occasionnel. Il ne consomme pas d’autres
toxiques, ne prend aucun traitement.
Il consulte aux urgences à 2 reprises pour 3 malaises
(dont 1 avec perte de connaissance), associés à une
confusion et à une agressivité. Les premières explorations retrouvent des hypoglycémies sévères, survenant
à jeun, avec une amélioration de l’état de conscience
après resucrage.
À l’examen clinique, la palpation abdominale retrouve
une masse au niveau de l’épigastre et du flanc gauche,
indolore.
Le bilan biologique montre une glycémie veineuse à
1,23 mmol/l soit 0,22 g/l. L’insulinémie dosée de manière
concomitante est à 1 pmol/l (N = 13-161) et le peptide C
à 0,08 µg/l (N = 0,8-4,2).
Le scanner thoraco-abdominopelvien met en évidence
un volumineux processus tumoral comprenant une
partie mésentérique antéromédiane (figure 1), et une
partie rétropéritonéale gauche (figure 2) – avec une
extension au corps vertébral L3 –, ainsi qu’un important
effet de masse au niveau du rein gauche et des éléments
vasculaires rétropéritonéaux.
Un dosage d’Insulin Growth Factor-2 (IGF2) a été
demandé en complément ; il est à 962 ng/ml
(N = 436-1 058) alors que le taux d’IGF1 est inférieur
à 25 ng/ml (N = 116-358). La big-IGF2 (précurseur
de l’IGF2) et l’Insulin Growth Factor Binding Protein-2
(IGFBP-2) n’ont pas été dosées.
Ce patient présente donc une tumeur sécrétant de
l’IGF2, révélée par des hypoglycémies sévères avec
signes de neuroglucopénie. Il est transféré en centre
spécialisé.
Une biopsie sous TDM a permis de poser le diagnostic
de tumeur fibreuse solitaire.
Un traitement par glucosé 10 % i.v., corticothérapie et
Nexavar® (agent antinéoplasique, inhibiteur de protéine
kinase) a été commencé. La chirurgie est récusée dans
l’immédiat du fait de l’importante extension tumorale.
L’hypoglycémie induite par sécrétion tumorale d’IGF2
est un syndrome paranéoplasique rare.
Les hypoglycémies sont sévères, itératives avec des
symptômes de neuroglucopénie. Elles surviennent
à jeun.
Les tumeurs responsables sont d’origine mésenchy­mateuses ou épithéliales, bénignes ou malignes,
et volumineuses : mésothéliome, hémangiopéricytome, tumeur fibreuse solitaire, léiomyosarcome, fibro–
sarcome (1, 2). Leur incidence et leur prévalence ne
sont pas connues.
L’hypoglycémie est liée à l’expression par la tumeur
d’IGF2 ou de la big-IGF2. Cette hormone va se lier au
récepteur de l’insuline et de l’IGF de type 1, induisant
une diminution de la production hépatique de glucose et de la lipolyse ainsi qu’une augmentation de la
consommation de glucose par les tissus périphériques
et la tumeur (3).
■
Références
1. De Groot JWB, Rikhof B, Van Doorn J et al. Non-islet cell
tumour-induced hypoglycaemia: a review of the literature including two new cases. Endocrine-Related Cancer
2007;14:979-93.
162
2. Lawson E, Zhang X, Crocker J et al. Hypoglycemia from IGF2
overexpression associated with activation of fetal promoters
and loss of impriting in a metastatic hemangiopericytoma.
J Clin Endocrinol Metab 2009;94(7):2226-31.
3. Bertherat J. Hypoglycémies de l’adulte. EMC, EndocrinologieNutrition 2006;10-364-E-10.
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVI - nos 5-6 - mai-juin 2012
Légende
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Figures 1 et 2. Scanner abdominal (coupe sagittale).
2
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XVI - nos 5-6 - mai-juin 2012
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