De cette absence totale d'autonomie des premiers jours va succéder un basculement, lent
mais certain, vers une autonomie progressive du corps, du geste et de la parole. Le point
culminant de ce mouvement de bascule se joue durant l'adolescence. A cette période le
corps de l'enfant est traversé par une série de secousses, dont une et non des moindres est
la découverte de la sexualité contemporaine de la transformation du corps adolescentaire.
Cette poussée pulsionnelle accompagnée d'une modification de l'architecture du corps se
met en scène au travers d'une véritable crise identitaire et relationnelle. Ce moment
s'accompagne d'une confrontation au monde, ce que l'on nomme habituellement la crise
d'adolescence, ou l'enjeu véritable est l'appropriation du corps. La façon de s'habiller, de
prendre soin de soi, de se coiffer ... ne sont jamais que des signes d'un même discours qui
affirme ceci est mon corps et c'est moi qui décide. Cette appropriation et cette affirmation qui
sont les leitmotivs du discours adolescentaire sont vitales et signent la santé mentale du
jeune et de sa famille.
Autour de cette période vont se construire une série de comportements et de valeurs qui
vont colorer la personnalité du jeune et vont ponctuer la vie familiale. Il s'agit principalement
de l'intimité et de la pudeur. Le jeune adolescent va faire une série d'expérience autour de
ces thèmes et va développer un discours sur son corps, sa sexualité, son rapport à l'autre, la
beauté, le désir, sa puissance ...
Il développera aussi un discours sur l'amour, le couple et la sexualité.
Ce petit détour pour réfléchir la sexualité et sa rencontre avec le cancer.
Le moment cancéreux, l'annonce, le traitement et le pronostic sont régulièrement vécus
comme une période de « désappropriation ».
Une fois malade, le corps n'appartient plus au patient mais à l'autre, accompagné d'une
perte décisionnelle.
L'autre n'est que celui qui pose le geste médical, qui soigne, qui traite, qui évalue, qui met en
place un traitement, qui choisit, qui décide, qui coupe, qui remplace...
Le geste médical pose régulièrement la question de la pudeur et de l'intimité.
Ce corps malade, blessé, mutilé est-il encore le mien?
Cette simple question évoque toute la dramatique de la rencontre du cancer et son
implication dans la sexualité. Tant du domaine du désir que du plaisir.
Il est important de s'arrêter sur l'implication que le geste médical peut avoir sur le corps du
patient. La responsabilité médicale ne doit pas faire oublier les autres nécessités de la vie.
Tout se passe comme si une fois le diagnostic posé, le corps de la femme ou de l'homme
cesse d'atteindre à une certaine distance pour ne plus être qu'un corps malade qui sera
rendu à son propriétaire dans le meilleur des cas réparé, dans le pire des cas mutilé ou ne