Master en management des ressources humaines, Cours « Théories des organisations»
II l’approche stratégique
1- Le concept de stratégie
Du point de vue étymologique, le mot stratégie vient du grec strategos qui signifiait chef
d’armée. Plus généralement, stratos signifie armée et agein signifie conduire. Donc l’origine
est militaire. Au total, la stratégie signifie l’ensemble des actions coordonnées, de manœuvres,
de tactiques en vue d’une victoire. La stratégie concerne donc la mobilisation et la
programmation d’une armée avant le combat.
Cette définition comporte généralement deux éléments :
- un élément de dissuasion qui consiste à déterminer la meilleure façon de vaincre
ou de provoquer le retrait de l’adversaire sans combattre ;
- un élément de tactique qui signifie les manœuvres à exécuter lors du combat.
Cependant, dans le domaine des sciences sociales le rapprochement avec le domaine militaire
n’est pas juste. En réalité, le champ de la concurrence ne peut pas être comparé à un champ de
bataille où les entreprises se livreraient à un combat pour gagner des parts de marché. En
effet, chaque entreprise en concurrence développera un argumentaire qui sera un produit, un
prix et une image pour provoquer des achats par des clients moyennant une contrainte de
rentabilité minimum. De plus, la concurrence est limitée ; les entreprises recherchent
généralement l’entente, la coopération avec fournisseurs, clients, sous traitants, d’autres
entreprises concurrentes. Elles cherchent aussi l’évitement notamment par la segmentation,
les barrières à l’entrée, la différenciation, l’image,…
D’autre part, les entreprises mènent la guerre psychologique par des menaces pour éviter une
confrontation directe avec les concurrents. La liberté de l’entreprise est tout à fait relative,
l’entreprise est aussi encadrée par un certain nombre de lois, de règles établies par la société,
de plus le stratège est loin d’être un héros car :
- le chef d’entreprise est rarement le seul à prendre des décisions, il est entouré
d’une équipe ;
- il lui arrive de se tromper ;
- ses choix sont généralement contraints.
Le concept de stratégie est apparemment simple, il fait référence à la façon dont les
entreprises affectent leurs ressources dans le but de renforcer leur position sur le marché,
d’améliorer la rentabilité de leurs activités et d’assurer leur pérennité.
Du point de vue épistémologique, plusieurs définitions ont été formulées par les auteurs, mais
aucune d’entre elles ne fait vraiment l’unanimité. Certaines définitions intègrent la notion de
choix des fins et des moyens, c’est le cas de la proposition de CHANDLER qui précise que la
stratégie est « la détermination des buts et objectifs à long terme d’une entreprise et le choix
des actions et de l’allocation des ressources nécessaires pour les atteindre ». D’autres
propositions tendent à réduire la stratégie aux seuls moyens : « la stratégie est le mode
fondamental de déploiement actuel et prévu des ressources et le mode d’interaction avec
l’environnement indiquant comment une organisation atteindra ses objectifs. » (HOFFER
et SCHENDEL).
M. PORTER restreint encore le sens en parlant de stratégie concurrentielle définie comme
« la recherche d’une position concurrentielle favorable dans une industrie…le chemin de
cet avantage concurrentiel. ».
L’émergence de la stratégie comme mode de pensée stratégique est récente, elle est apparue
aux Etats unis dans les années 50 pour répondre principalement aux besoins d’imaginer et
d’organiser le développement des grandes entreprises et notamment les entreprises
multinationales. A partir de cette époque, la stratégie a commencé à se libérer de plus en plus
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de la gestion à proprement dite. Pour les entreprises, la stratégie apparaît comme une nécessité
pour mieux se projeter dans l’avenir, pour mieux connaître leur environnement concurrentiel
et pour pouvoir aussi être capables de sélectionner les actions susceptibles de leur maintenir
en vie ou de leur permettre un développement plus général.
2- la démarche en stratégie
Dans le cadre de sa politique générale, l’entreprise doit être en mesure de savoir :
- où elle va (se fixer des objectifs) ;
- définir et analyser au préalable le contexte stratégique approprié.
La démarche stratégique de l’entreprise consiste à élaborer un modèle de formulation
stratégique qui combine les trois éléments suivants : entreprise, environnement et objectifs.
D’après le schéma, on constate qu’il existe plusieurs options stratégiques qui découlent
d’abord de la définition d’objectif et qui nécessitent un bon diagnostic.
a- La définition des objectifs
Les objectifs influencent la stratégie de l’entreprise. Selon l’objectif poursuivi, les
prescriptions stratégiques ne sont pas les mêmes. A titre d’exemple, une entreprise qui a pour
objectif d’améliorer ses parts de marché devra faire un effort commercial qui passera
nécessairement par un investissement ou décidera d’acheter les parts de marché en acquérant
d’autres entreprises. Cette entreprise n’aura pas la même stratégie que celle qui envisage
d’améliorer ses profits à court terme : la première stratégie d’amélioration des parts de marché
se traduira par une augmentation des immobilisations ; alors que la deuxième peut
parfaitement aller de pair avec une contraction des investissements (exemple : les
constructeurs d’automobiles Renault et volswagen). Autrement dit, la question de la formation
des objectifs est très importante dans la mesure où elle renvoie aux jeux de pouvoirs entre les
acteurs qui influencent la vie de l’entreprise. Ces différents acteurs internes à l’entreprise
constituent les éléments de base d’une organisation (MINTZBERG) et qui se résument ainsi :
Entreprise : ses
forces et ses
faiblesses
Environnement :
ses opportunités
et ses menaces
Options stratégiques
Objectifs
Démarche
stratégique
simplifiée
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le sommet stratégique, le centre opérationnel, la ligne hiérarchique, la technostructure et le
support logistique.
Les sources d’influence peuvent être également externes. Il s’agit des actionnaires, des clients,
des fournisseurs, des concurrents, le public et l’Etat. Cependant, ce jeu de pouvoir entre les
acteurs essaye de plus en plus à se focaliser entre les managers, l’Etat et les actionnaires par
l’intermédiaire du marché financier au sein de ce que l’on appelle aujourd’hui la gouvernance
d’entreprise.
Les mécanismes qui permettent le développement de l’entreprise au sein de cette nouvelle
gouvernance d’entreprise se sont les marchés financiers qui sont présents de plus en plus dans
les décisions des entreprises en leur imposant des règles de rentabilité. Ainsi, la domination
des marchés financiers a aussi ses dangers :
- le prima du court terme sur le long terme
- le prima de la logique financière sur la logique industrielle toujours envisagée sur
le long terme
Exemple : le groupe Danone annonce le 22 novembre 2000 qu’il veut acquérir le groupe
Quaker OATS, juste après cette annonce son cours boursier diminue de 10,5% ; comme il
voulait opérer par échange de titres cela l’aurait conduit à payer trop cher l’entreprise qu’il
voulait acheter.
b- le diagnostic stratégique
Pour affronter la concurrence, l’entreprise doit mener un diagnostic stratégique qui consiste à
analyser des facteurs externes c’est-à-dire son environnement concurrentiel immédiat, mais
aussi les changements en matière de consommation, technologiques et les nouvelles
contraintes institutionnelles. L’analyse interne est aussi une phase indispensable dans laquelle
l’entreprise est forcée de savoir quelles sont ses forces et ses faiblesses en fonction de ses
moyens technologiques et financiers.
En résumé, élaborer une stratégie est une tâche très complexe et pourtant une question vitale
pour l’entreprise surtout en période de crise. Or, les entreprises travaillent souvent dans
l’urgence et n’ont pas le temps de prendre le recul nécessaire, ceci explique la grande
sensibilité des directions d’entreprise aux nouvelles approches managériales. Les cabinets de
conseil en stratégie profite du désarroi des entreprises pour proposer des solutions miracles.
Trois attitudes se présentent pour gérer les effets de mode :
- suivre les modes pour profiter éventuellement de leurs bienfaits
- refuser les modes, mais on peut courir le risque de passer à côté des évolutions
importantes.
- La troisième est la plus raisonnable. Il s’agit de savoir faire le tri, car toutes les
modes ne se valent pas et toute mode est parfois le symptôme d’un malaise.
3- La planification à long terme et le modèle LCAG
La période 45-65 est caractérisée par le développement de prescriptions stratégiques
principales : a- la planification à long terme
Cette méthode est apparue après la seconde guerre mondiale. Ce sont des années où
l’économie est en croissance, le moteur de développement étant la restructuration. La
planification est née dans un contexte optimiste pour organiser la croissance et la production
et répondre ainsi à la demande sans gaspiller des ressources.
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Dans la planification on trouve déjà l’idée d’établir un lien systématique entre la stratégie (les
méthodes et les moyens pour construire l’avenir) et la nécessité d’instruments de
programmation et de contrôle. Le principe fondamental sur lequel repose la planification à
long terme est de faire plus et mieux ce qu’on sait déjà faire. Autrement dit on doit faire des
prévisions à long terme, on doit aussi budgétiser et assurer un contrôle de gestion pour vérifier
que les prévisions ont été bien menées.
La planification à long terme apparaît comme un système intégré qui va des prévisions
jusqu’aux budgets annuels, lesquels alimentent les systèmes de contrôle de gestion et assurent
le bouclage de tout le système.
D’autres caractéristiques peuvent être retenues : l’horizon est souvent de 3 à 5 ans pour le cas
des entreprises et il peut être plus long pour le cas des organismes. Ensuite l’environnement se
limite au marché sur lequel l’entreprise est présente et les prévisions se reposent généralement
sur des extrapolations du passé, ces prévisions comprennent les tendances estimées des
grandes variables économiques de l’entreprise notamment la demande, le prix, les
comportements concurrentiels….Enfin, l’accent est mis sur les contraintes financières, on
programme des séquences d’actions pour assurer la croissance de l’entreprise et la budgétiser
sur les premières années du plan. Cependant, cette méthode est de portée très limitée. Elle se
caractérise par une certaine lourdeur et un certain formalisme excessif.
b- Le modèle LCAG
Ce modèle correspond à la deuxième grande période de développement de la pensée
stratégique (55-65) et à la première tentative d’articuler planification et stratégie. Ce modèle a
été élaboré par les quatre professeurs de l’école de Harvard (Learned, Christensen, Andrews
et Guth en 1965). Il constitue donc le point de départ conceptuel de la démarche stratégique
moderne.
Ce modèle va reposer sur deux distinctions principales :
- l’entreprise en relation avec son environnement
- la formulation d’une stratégie et sa mise en œuvre
La première distinction permet de dégager les opportunités et les menaces de l’environnement
d’une part et d’autre part, les forces et les faiblesses de l’entreprise. L’objectif de cette
première distinction est de préciser les domaines d’activité et de compétences distinctives de
l’entreprise.
La deuxième distinction permet d’évaluer et de déterminer les stratégies possibles, de
formuler les stratégies à retenir et de conduire l’entreprise à prendre en compte les valeurs et
les buts des ses dirigeants.
Le modèle LCAG est conçu pour des environnements stables, son processus commence par la
formulation de l’objectif général de l’entreprise et se termine par la mise en œuvre de la
stratégie choisie comme le montre le schéma suivant :
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Les limites du modèle :
- ce modèle repose sur un seul objectif général, celui de maximisation du profit alors
qu’il existe plusieurs objectifs
- ce modèle suppose une information parfaite et une rationalité complète, alors que
l’environnement de l’entreprise n’est pas toujours stable (rationalité limitée et
information imparfaite)
- la séparation de la formulation et de la mise en œuvre de la stratégie n’est pas
toujours réaliste
- il n’existe pas une meilleure stratégie mais plusieurs stratégies acceptables
C’est pour tenter de concilier les avantages formels de planification à long terme et les
nouveaux concepts du modèle LCAG que I .ANSOFF propose la méthode de planification
stratégique.
4- la planification stratégique
Universitaire et dirigeant d’entreprise qui fabriquait des avions et de matériels militaires, I
.ANSOFF était en contact direct avec l’administration américaine qui développe le système de
PPBS pour contrôler les différents corps d’armée. Son ouvrage va avoir un impact
Objectif général
Diagnostic interne : forces et faiblesses
Diagnostic externe : opportunités et menaces
Identification des
stratégies alternatives
Prise de décision de la
stratégie
Mise en œuvre de la
stratégie choisie
Valeurs des
dirigeants
Le modèle LCAG
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