A B S T R A C T S Résumés de la littérature Thromboses de stents actifs La thrombose de stent coronaire nu est une complication rare survenant classiquement lors des 30 premiers jours post-procédure. Pour les stents actifs, l’endothélisation est retardée et la survenue de la thrombose peut être plus tardive. Cette étude prospective allemande et italienne a concerné 2 229 patients consécutifs ayant eu une angioplastie coronaire réussie avec mise en place de stents au sirolimus (1 062 patients2 272 stents) ou au paclitaxel (1 167 patients-2 223 stents) entre avril 2002 et janvier 2004. L’association aspirine + clopidogrel ou ticlopidine a été maintenue au moins 3 mois en cas de stents au sirolimus et au moins 6 mois en cas de stents au paclitaxel. La thrombose de stent a été définie comme subaiguë lors des 30 premiers jours et comme tardive au-delà. Son diagnostic positif reposait sur la documentation angiographique d’une occlusion totale ou partielle du stent lors des 30 premiers jours postprocédure (un événement clinique ischémique aigu devant être associé au-delà de ce délai), sur une mort subite cardiaque ou un infarctus du myocarde post-procédural non expliqué par une autre lésion coronaire. Pour un suivi de 9 mois, 29 patients (1,3 %) ont présenté une thrombose de stent (0,8 % pour les stents au sirolimus et 1,7 % pour ceux au paclitaxel ; p = 0,09). Quatorze patients ont eu une thrombose subaiguë (0,6 %) et 15 une thrombose tardive (0,7 %) – survenue en moyenne 57 jours après la procédure. Treize patients sont décédés (45 %). Les facteurs indépendants prédictifs de thrombose de stent sont : l’arrêt prématuré du traitement antiagrégant, l’insuffisance rénale, les lésions de bifurcation, le diabète, une basse fraction d’éjection ventri- culaire gauche. Pour les thromboses de stents subaiguës, la longueur du stent intervient également. Conclusion. L’incidence des thromboses de stents actifs à 9 mois est estimée ici à 1,3 %. Il faut noter que le diagnostic de thrombose de stent n’a pas été obligatoirement confirmé par angiographie, sa définition intégrant aussi des événements cliniques, en référence à des publications préalables. Par rapport aux stents nus, elle est dans la moitié des cas différée au-delà du premier mois post-procédure. Ses conséquences sont graves, avec une mortalité de 45 %. Parmi les facteurs prédictifs, ressort en premier l’arrêt prématuré des antiagrégants plaquettaires : une thrombose est survenue chez 29 % des patients ayant interrompu prématurément l’association aspirine + clopidogrel ou ticlopidine (dans un cas, il s’agissait de l’arrêt du seul clopidogrel ; ailleurs, des deux médicaments). Il faut donc insister auprès des patients et des médecins qui les ont en charge sur les impératifs de ces traitements après la pose de stents actifs. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Incidence, predictors, and outcome of thrombosis after successful implantation of drug-eluting stents. Iakovou I, Schmidt T, Bonizzoni E et al. ● JAMA 2005;293: 2126-30. Prise en charge invasive des syndromes coronaires aigus avec élévation de troponine ? (étude ICTUS) Une stratégie invasive précoce (coronarographie ± revascularisation) est actuellement recommandée pour les syndromes coronaires aigus (SCA) avec élévation de la troponine. L’étude ICTUS a randomisé 1 200 patients présentant un SCA sans sus-décalage de ST avec élévation de la troponine, et soit une preuve d’ischémie sur l’électrocardiogramme, soit une coronaropathie connue, entre une prise en charge invasive (coronarographie ± revascularisation lors des 24 à 48 heures suivant la randomisation) et une prise en charge invasive adaptée selon la présence d’un angor réfractaire en dépit d’un traitement médical optimal, d’une instabilité hémodynamique ou rythmique, d’une ischémie persistante sous traite8 ment médical lors d’un test d’effort réalisé pendant l’hospitalisation. Le critère de jugement incluait les décès, les infarctus du myocarde (IDM), les réhospitalisations pour angor dans l’année suivant la randomisation. Le taux cumulé des événements recherchés à un an a été estimé à 22,7 % pour le groupe assigné à la stratégie invasive précoce et à 21,2 % pour celui assigné à la stratégie invasive adaptée (p = 0,33). La mortalité à un an est identique pour les deux groupes : 2,5 %. Les IDM ont été plus fréquents pour le groupe assigné à la stratégie invasive précoce (15 % contre 10 % ; p = 0,005), mais les réhospitalisations pour angor sont moins souvent observées pour ce groupe (7,4 % contre 10,9 % ; p = 0,04). .../... La Lettre du Cardiologue - n° 391 - janvier 2006 A .../... B S T R A C T S Conclusion. L’étude ICTUS remet en cause une attitude invasive systématique préconisant une coronarographie ± revascularisation d’emblée en cas de possibilité anatomique en présence d’un SCA avec facteurs de risque (élévation de troponine ± signes électriques – hormis sus-décalage de ST). Sous traitement médical optimal actuel, on ne constate pas de différence significative pour l’ensemble des complications cardiaques répertoriées entre les deux groupes (stratégie invasive d’emblée ou stratégie invasive adaptée à l’évolution hospitalière), y compris lors de l’étude de sous-groupes en fonction de l’âge, de la présence d’un diabète, du niveau de la troponine, des anomalies électrocardiographiques du segment ST associées ou non. L’augmentation du nombre des IDM pour le groupe assigné à une stratégie invasive précoce est due en grande partie à de petits IDM post-procédure détectés par les dosages enzymatiques. Enfin, correspondant à la pathologie à haut risque sélectionnée, nombre de patients assignés à la stratégie invasive adaptée ont eu en définitive une indication de coronarographie ± revascularisation : une coronarographie a été réalisée lors de l’hospitalisation initiale pour 53 % des 596 patients de ce groupe, et à un an 54 % des patients ont été revascularisés (contre 79 % des patients du groupe stratégie invasive précoce). C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Early invasive versus selectively invasive management for acute coronary syndromes. De Winter RJ,Windhausen F, Cornel JH et al. for the Invasive versus Conservative Treatment in Unstable coronary Syndromes (ICTUS) Investigators ● N Engl J Med 2005;353:1095-104. Infarctus du myocarde : dysfonction ventriculaire gauche, insuffisance cardiaque et mort subite Le risque de mort subite cardiaque est accru pour les patients venant de constituer un infarctus du myocarde (IDM) et dont la fonction ventriculaire gauche est réduite. Cette publication issue de l’étude VALIANT a évalué l’incidence et le délai de survenue d’une mort subite ou d’un arrêt cardiaque ressuscité après un IDM compliqué de dysfonction ventriculaire gauche systolique et/ou d’insuffisance cardiaque (tous les patients avaient une fraction d’éjection ventriculaire gauche [FEVG] ≤ 40 %). Le suivi moyen a été de 24,7 mois. Parmi 14 609 patients, 1 067 (7 %) ont présenté un de ces événements en moyenne 180 jours après la constitution de l’IDM : il s’agissait de 903 morts subites et de 164 arrêts récupérés. Par comparaison aux autres patients indemnes de ces complications, ils étaient plus âgés, leur FEVG était plus basse, et ils avaient été moins souvent traités par reperfusion et par bêtabloquants. Le risque était majeur lors des 30 premiers jours post-IDM (1,4 % par mois, avec une décroissance jusqu’à 0,14 % par mois après deux ans) : 19 % des complications recherchées sont survenues lors des 30 premiers jours post-IDM, et 83 % des morts subites lors des 30 jours qui ont suivi la sortie de l’hôpital. Les patients dont la FEVG était inférieure ou égale à 30 % forment un groupe à haut risque lors de la période la plus précoce (2,3 % par mois d’événements pour le premier mois). Chaque diminution absolue de 5 % de FEVG est associée à une augmentation ajustée du risque de mort subite ou d’arrêt cardiaque ressuscité de 21 % lors des 30 premiers jours post-IDM. 10 Conclusion. Les patients ayant constitué un IDM compliqué de dysfonction ventriculaire gauche et/ou d’insuffisance cardiaque ont un risque important de mort subite ou d’arrêt cardiaque ressuscité ; ces complications surviennent particulièrement lors des 30 premiers jours de suivi, et elles concernent en premier lieu les sujets dont la FEVG est la plus médiocre (FEVG ≤ 30 %). Des stratégies préventives doivent être envisagées pour limiter ces complications, fatales sauf en cas d’arrêts récupérés. Dans ce contexte, les résultats de l’étude DINAMIT (N Engl J Med 2004;351:2481-8) ne constatant pas de réduction de mortalité globale lors de l’implantation prophylactique de défibrillateurs implantables 6 à 40 jours après un IDM avec FEVG inférieure ou égale à 35 % sont décevants : s’il existait une diminution significative des décès rythmiques, le bénéfice du groupe défibrillateur était annulé par une augmentation des décès d’autres causes. Les auteurs de VALIANT insistent sur l’intérêt de reconsidérer des perspectives thérapeutiques pour ces patients menacés, d’autant que 74 % des patients ressuscités lors des 30 premiers jours sont toujours en vie un an après. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Sudden death in patients with myocardial infarction and left ventricular dysfunction, heart failure, or both. Solomon SD, Zelenkofske S, McMurray JJV et al. for the VALsartan In Acute myocardial INfarction Trial (VALIANT) Investigators ● N Engl J Med 2005;352:2581-8. La Lettre du Cardiologue - n° 391 - janvier 2006 A B S T R A C T S Patients pluritronculaires : devenir à 5 ans après angioplasties coronaires avec stents ou pontages aorto-coronaires (étude ARTS) De plus en plus souvent, des patients pluritronculaires devant être revascularisés sont confiés aux coronarographistes pour angioplasties multiples, plutôt qu’aux chirurgiens. L’étude randomisée ARTS a évalué les 2 pratiques en regroupant 1 205 patients pluritronculaires (répartition bi- et tritronculaire 2/3 et 1/3) accessibles à une revascularisation coronaire par angioplastie avec stenting ou par pontage aorto-coronaire. Après randomisation, 600 patients ont eu des angioplasties coronaires avec pose de stents dans 89 % des cas (en moyenne 2,6 lésions traitées par patient), et 605 ont été pontés (93 % des patients ont eu au moins un pontage artériel et 2,6 pontages ont été réalisés en moyenne par patient). Le critère de jugement principal incluait à un et 5 ans les complications cardiaques et vasculaires cérébrales majeures. Les résultats à 5 ans font l’objet de cette publication. À 5 ans, il y a eu 48 décès pour le groupe angioplasties + stents et 46 décès pour le groupe pontages aorto-coronaires, soit respectivement 8 % et 7,6 % (p = 0,83). Pour les 208 patients diabétiques de l’étude, les taux de mortalité sont respectivement de 13,4 % et 8,3 % (p = 0,27). L’incidence des décès, accidents vasculaires cérébraux ou infarctus du myocarde est identique pour les deux groupes (respectivement, 18,2 % et 14,9 % ; p = 0,14). En revanche, le recours à de nouvelles revascularisations est plus fréquent pour le groupe angioplasties avec stents : 30,3 % contre 8,8 % (p < 0,001). Cela est responsable d’une survie indemne des événements analysés à 5 ans moindre pour le groupe angioplasties + stents : 58,3 % contre 78,2 % (p < 0,0001). Conclusion. À 5 ans, à lésions pluritronculaires coronaires comparables, l’angioplastie avec stenting et le pontage aorto-coronaire autorisent des résultats identiques en termes de survie. Ces constatations sont également observées en présence d’un diabète. Si le taux des complications cardiaques et vasculaires cérébrales est significativement plus important en cas d’angioplasties + stents, cela est dû à une incidence plus marquée des nouvelles revascularisations pour ce groupe de patients par rapport au groupe chirurgical. La survenue d’infarctus du myocarde ou d’accidents vasculaires cérébraux est en effet identique pour les deux groupes. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Five-year outcomes after coronary stenting versus bypass surgery for the treatment of multivessel disease. The final Analysis of the arterial Revascularization Therapies Study (ARTS) randomized Trial. Serruys PW, Ong ATL, van Herwerden LA et al. ● J Am Coll Cardiol 2005;46:575-81. Étude COPE : péricardite aiguë et colchicine Le but de cette étude prospective et randomisée à laquelle ont participé deux centres italiens est de vérifier la sécurité et l’efficacité de l’adjonction de colchicine au traitement conventionnel par aspirine pour traiter un premier épisode de péricardite aiguë (idiopathique, virale, post-péricardotomie, ou dans le cadre de connectivites). Cent vingt patients ont été inclus de janvier 2002 à août 2004. Soixante patients ont reçu de l’aspirine 800 mg per os toutes les 6 à 8 heures pendant 7 à 10 jours, puis avec une décroissance des posologies sur 3 à 4 semaines (groupe conventionnel), et soixante autres ont reçu un traitement identique auquel a été ajouté de la colchicine 1 à 2 mg le premier jour, puis une dose d’entretien de 0,5 à 1 mg/j pendant 3 mois (groupe colchicine). Une corticothérapie (19 patients, dont 9 dans le groupe colchicine) n’était proposée qu’en cas de contre-indication ou d’intolérance à l’aspirine. Le critère de jugement était représenté par la récidive de péricardite (suivi de 24 mois en moyenne). Pour un suivi de 2 873 patient-mois, la colchicine a significativement réduit le taux de récidive de péricardite (à 18 mois, 10,7 % contre 32,3 % pour le groupe conventionnel ; p = 0,004). Par ailleurs, elle autorise un amendement plus rapide des symptômes (persistance des symptômes à 72 heures : 11,7 % contre 36,7 % ; p = 0,003). On ne note pas d’effets indésirables La Lettre du Cardiologue - n° 391 - janvier 2006 sérieux sous colchicine ; 5 patients (8,3%) ont stoppé le traitement en raison de diarrhées. Aucun cas de tamponnade ou d’évolution vers la constriction n’a été observé lors de l’étude. En analyse multivariée, le recours à la corticothérapie représente un facteur de risque indépendant de récidive (odds-ratio : 4,30). Conclusion. L’étude COPE constate les bienfaits de l’adjonction de colchicine au traitement conventionnel par aspirine pour traiter une péricardite aiguë dès le premier épisode : amendement plus rapide des symptômes et réduction significative du taux des récidives. La prescription sur 3 mois a bien été tolérée pour l’ensemble des sujets. À l’opposé, l’utilisation d’une corticothérapie augmente le risque de récidives. L’association aspirine + colchicine paraît par conséquent représenter le traitement de choix pour un premier épisode de péricardite aiguë. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil Colchicine in addition to conventional therapy for acute pericarditis. Results of the COlchicine for acute PEricarditis (COPE) Trial. Imazio M, Bobbio M, Cecchi E et al. ● Circulation 2005;112: 2012-6. 11