la seconde guerre mondiale une guerre d`anéantissement

publicité
M. Parchemin – Lycée Antoine de Saint-Exupéry – Classes de première générale – Année 2013-2014
LA SECONDE GUERRE MONDIALE
UNE GUERRE D’ANÉANTISSEMENT
NOTIONS : Guerre mondiale, guerre totale, espace vital, Sphère de coprospérité de la Grande Asie orientale,
Blitzkrieg, bombardements stratégiques, ghetto, génocide, Shoah par balles, Einsatzgruppen, Crime contre l’humanité,
ONU
→ Quelles sont les spécificités de la Seconde Guerre mondiale ?
I – La Seconde Guerre mondiale constitue l’aboutissement des évolutions menées depuis la fin du XIX e
siècle
A – Ce conflit est un conflit de dimension mondiale
. Une guerre causée par l’expansionnisme des États de l’Axe, d’abord limité au théâtre européen et chinois
. La mondialisation du conflit : une victoire permise par les efforts de guerre américains et soviétique
B – Il s’agit d’un conflit fortement mécanisé qui nécessite mobilisation totale des économies
. Des moyens militaires toujours plus modernes
. Une guerre totale
C – Un conflit mené au service d’objectifs idéologiques
. Pour les puissances de l’Axe : l’expansionnisme
. Pour les alliés (occidentaux) : le respect des libertés économiques et des principes démocratiques
II – La Seconde Guerre mondiale fait véritablement figure de guerre d’anéantissement
A – Des destructions extrêmes
. Les bombardements stratégiques
. L’entrée dans l’ère nucléaire
B – L’extermination des Juifs et des Tziganes
. Les prémisses du génocide : exclusion et persécution
. L’organisation du génocide : ghettoïsation et extermination par des moyens industriels
C – La nécessité de façonner un nouvel ordre mondial
. Une organisation efficace pour réussir là où la SDN avait échouée
. Les limites d’une organisation universelle tenue par quelques puissances seulement
Introduction : Alors que la Première Guerre mondiale avait montré toute l’horreur d’une guerre totale
menée avec des moyens industriels et que la SDN avait été fondée pour assurer une règlement
pacifique des conflits, le monde s’embrase à nouveau entre 1939 et 1945. Cette période voit mourir
plus de cinquante millions de personnes dont plus de la moitié sont des civils. Cette guerre est donc
bien le paroxysme de la violence au XX e siècle : elle ne peut d’ailleurs se comprendre qu’en raison
de l’importance des idéologies à cette époque. Elle voit en effet s’affronter l’Axe qui rassemble
l’Allemagne nazie, l’Italie fasciste et le Japon militariste et les alliés qui défendent la démocratie
libérale. L’URSS malgré son idéologie totalitaire rejoint le camp anti-fasciste au moment de l’invasion
allemande. Compte tenu de la dimension idéologique de ce conflit, la Deuxième Guerre mondiale
apparaît comme une guerre d’anéantissement : nulle négociation ou armistice n’est possible, il acquit
pour les deux camps que le conflit ne peut s’achever que par la destruction totale et définitive du
système politique adverse.
Quelles sont les spécificités de la Seconde Guerre mondiale ?
1
I – La Seconde Guerre mondiale constitue l’aboutissement des évolutions
menées depuis la fin du XIXe siècle
A – Ce conflit est un conflit de dimension mondiale
Une guerre causée par l’expansionnisme des États de l’Axe, d’abord limité au théâtre européen et chinois
La Seconde Guerre mondiale est avant tout causée par l’expansionnisme des États de l’Axe :
– en 1937, la Japon envahit la Chine (après avoir colonisé la Corée en 1905 et occupé la
Mandchourie en 1931)
– en 1939, l’Allemagne nazie envahit la Pologne (ultime provocation après le réarmement de la
Rhénanie en 1936, l’annexion de l’Autriche en 1938, l’annexion des Sudètes puis du reste de
la Tchécoslovaquie en 1938 et 1939)
Dans une première phase la guerre se limite à l’Europe (et à la Chine pour les Japonais) :
–
La campagne de Pologne
La Pologne est vaincue en quatre semaines. En vertu du pacte germano-soviétique, l’URSS envahit
la partie orientale du pays, les pays baltes sont annexés à l’URSS.
–
« La drôle de guerre »
Britanniques et Français organisent la défense face à l’Allemagne sur la ligne Maginot. Pendant sept
mois, il n’y a pratiquement aucun combat et les troupes campent sur leurs positions.
Pour s’assurer les approvisionnements de fer de Kiruna (Suède), l’Allemagne envahit le Danemark et
la Norvège. Les franco-britanniques tentent un débarquement à Narvik (Norvège).
–
La campagne de France
Le 10 mai 1940, l’Allemagne décide de lancer ses troupes vers l’Ouest. Les Allemands choisissent
de contourner la ligne Maginot. Les Pays-Bas sont conquis en six jours, la Belgique en deux
semaines, la France en six semaines. 400 000 soldats français et britanniques se retrouvent bloqués
dans Dunkerque = évacuation vers la Grande-Bretagne. Le 22 juin 1940, l’armistice est signé à
Rethondes (dans le même wagon qu’en 1918).
–
La bataille d’Angleterre
Dès la France vaincue, l’Allemagne se tourne vers la Grande-Bretagne. Londres et le sud du pays
sont massivement bombardés. Le pays résiste grâce à la RAF (utilisation du radars), Hitler
abandonne son projet d’invasion. Londres devient la capitale de la résistance au nazisme en
accueillant les gouvernements en exil des pays vaincus (gouvernements belge, néerlandais,
tchécoslovaque, polonais mais également la France libre en la personne de Charles de Gaulle).
–
Guerre dans les Balkans
Mussolini échoue dans sa propre guerre-éclair dans les Balkans : aidés par les Britanniques, les
Grecs repoussent les Italiens en Albanie. Mussolini demande l’aide d’Hitler, la Grèce est alors
soumise. En Afrique, Hitler est également forcé de venir en aide aux Italiens qui parviennent pas à
vaincre la Britanniques en Égypte. Il envoie l’Afrikakorps dirigé par le général Erwin Rommel.
La mondialisation du conflit : une victoire permise par les efforts de guerre américains et soviétique
En juin 1941, Hitler lance l’opération Barbarossa : l’invasion de l’URSS. Hitler considère les vastes
plaines de l’Est comme un territoire à coloniser, qui doit être exploité au bénéfice de l’Allemagne
(théorie de l’espace vital). Les Allemands avancent rapidement à travers le territoire soviétique. Les
Russes pratiquent la politiques de la terre brûlée...
Les États-Unis sont de plus en plus préoccupés par l’expansionnisme japonais en Asie. Le peuple
2
américain reste toutefois hostile à l’implication du pays dans le conflit en Europe. La loi prêt-bail de
mars 1941 permet au président des États-Unis de « vendre, céder, échanger, louer, ou doter par
d'autres moyens » tout gouvernement en moyens militaires. Les principaux bénéficiaires sont le
Royaume-Uni et l’URSS (la France libre dans une moindre mesure).
Le 7 décembre 1941, le Japon attaque les États-Unis à Pearl Harbor. Le lendemain le Japon attaque
les Philippines (possession US), Hong-Kong (GB), la Malaisie (GB) et la Thaïlande. L’Indochine
française avait déjà été conquise en 1940. La Guerre du Pacifique commence.
L’année 1942 marque le tournant de la guerre sur tous les fronts :
–
à Midway (juin 1942), les Japonais perdent quatre des dix porte-avions qu’ils possédaient : les
Américains gagent désormais du terrain dans le Pacifique.
–
en Afrique du Nord, le général britannique Montgomery arrête les troupes du général Rommel
(Afrika korps et troupes italiennes) à El-Alamein en Egypte et commence la reconquête de la Libye ;
au même moment les Alliés débarquent en Afrique du Nord (novembre 1942)
–
les Allemands sont arrêtés en URSS : en janvier 1943, le maréchal allemand Paulus se rend à
Stalingrad : les soviétiques entament alors une lente reconquête.
L’année 1943 est marquée par la reconquête de l’Italie par les Alliés et l’année 1944 par la libération
de la France. La victoire de 1945 met en valeur les États-Unis comme première puissance mondiale
mais l’effort de guerre fut également portée par l’URSS (notamment en ce qui concerne le coût
humain).
La guerre de 1939-1945 est donc véritablement mondiale par la mobilisation de troupes et des
ressources sur tous les continents mais aussi par le fait que les combats se déroulent sur des fronts
très dispersés dans le monde. Elle met en valeur la puissance des États-Unis qui peuvent non
seulement combattre sur un théâtre d’opération à l’échelle planétaire mais fournissent également des
moyens militaires et du ravitaillement à leurs alliés.
B – Il s’agit d’un conflit fortement mécanisé qui nécessite mobilisation totale des économies
Des moyens militaires toujours plus modernes
Les victoires rapides d’Hitler sont permises par un renouvellement des tactiques militaires. Dès le
début du conflit, l’Allemagne exploite pleinement sa supériorité en véhicules blindés et moyens
aériens à travers une tactique militaire nouvelle et décisive : la blitzkrieg (guerre-éclair). Alors qu’à la
fin de la Première Guerre mondiale, les chars d’assaut servaient comme appui et protection de
l’infanterie, ils sont désormais utilisés dans des vastes unités blindées qui permettent de rompre la
résistance adverse.
La bataille d’Angleterre montre la possibilité de mener un combat uniquement avec des moyens
aériens. L’utilisation des « forteresses volantes » pour bombarder l’Allemagne et le Japon souligne la
domination des États-Unis dans cette nouvelle arme stratégique.
Dans le Pacifique, la guerre se gagne sur le maniement des groupes aéronavals qui associent
navires classiques, porte-avions et aviation.
À la fin du conflit, les Allemands tentent de reprendre l’avantage en développant des armes
novatrices telles que les fusées V1 et V2, des avions à réaction et des hélicoptères. Construits trop
tard et en trop faible nombre pour avoir une véritable incidence sur l’issue du conflit, ces inventions
constitueront cependant les armes des prochains conflits. Les Américains ne sont pas en reste
puisqu’ils misent beaucoup sur le projet Manhattan qui fera d’eux le premier pays à posséder l’arme
nucléaire.
3
Ce conflit est donc une guerre fondée sur la mobilité où l’usage des matériels modernes (chars,
avions, navires) permet de l’emporter mais aussi le conflit qui fait finalement entrer l’humanité dans
l’ère nucléaire.
Une guerre totale
Tout comme la Première Guerre mondiale, ce conflit est une guerre totale qui demande l’implication
de toute l’économie et de toute la société pour la victoire. L’exemple des déplacements d’usines en
URSS pour échapper à l’avancée allemande ou la reconversion des industries américaines est à ce
titre exemplaire.
Plus que jamais, ce conflit est une bataille de matériel : avant même leur entrée en guerre, les ÉtatsUnis font figure d’« arsenal des démocraties ». Grâce à la loi prêt-bail ils fournissent massivement
leurs alliées en armes et en ravitaillement. 171 grands navires de guerre sont par exemple transférés
à la Grande-Bretagne (dont 23 porte-avions). Dès leur entrée en guerre, le Victory Program vise à
transformer l’économie américaine en économie de guerre tout entière tournée vers la victoire.
L’URSS est très dépendante de cette aide qui lui parvient par la péninsule de Kola ou par le sud à
travers l’Iran : 29 grands navires et 361 petits (patrouilleurs, dragueurs de mines, etc.), 14 795
avions, 7 056 tanks, 51 503 jeeps, 375 883 camions, 11 155 wagons de chemin de fer, 1 981
locomotives, 4,5 milliards de tonnes de nourriture, des millions de tonnes de carburants, cotons,
bottes, etc.
Pour faire parvenir de telles quantités de matériel à leurs alliés les Liberty Ships (navires de
transports construits à la chaine) traversent l’Atlantique en convois pour échapper à la chasse sousmarine allemande. Détruire les ressources de l’adversaire est en effet une condition de la victoire
dans une guerre totale. Pour vaincre les Allemands, les Américains choisissent ainsi de bombarder
en priorité les villes industrielles pour gêner la production d’armes.
C – Un conflit mené au service d’objectifs idéologiques
Pour les puissances de l’Axe : l’expansionnisme
Les puissances de l’Axe organisent rapidement l’exploitation économique des territoires conquis.
→ Doc. 1, 2 et 3 page 97
Après ses victoires en Europe, Hitler organise l’occupation du continent au service de l’Allemagne.
Matières premières, richesses et même œuvres d’art prennent la direction de l’Allemagne dans
pillage à l’échelle européenne. Les différents territoires n’ont cependant pas le même statut en
fonction de la conception raciste d’Hitler (les peuples germaniques sont associés, les latins sont
exploités et les slaves colonisés dans le cadre de sa théorie sur l’espace vital).
Les pays conquis sont directement administrés par l’Allemagne ou éventuellement à travers une
gouvernement local collaborateur (France de Vichy dirigée par Pétain, Norvège dirigée par Quisling).
En France la collaboration a même organisé un service du travail obligatoire (STO). En effet, pour
maintenir son effort de guerre, l’Allemagne a besoin d’une main d’œuvre pour remplacer les hommes
mobilisés dans l’armée. Plus de 600 000 Français sont réquisitionnés pour travail en Allemagne.
De la même manière Mussolini espérait conquérir un « nouvel empire romain » autour de la
Méditerranée : après l’annexion de l’Ethiopie (1936) et de l’Albanie (1939), les troupes italiens
échouent en Grèce en en Libye, malgré l’aide militaire allemande.
En Asie, le Japon a commencé ses conquêtes dès 1937 en Chine. Faible en ressources naturelles,
4
le Japon a pour objectif de se tailler une immense empire colonial exploité au service du Japon. En
raison de conceptions racistes, les populations coréennes et chinoises souffrent énormément de
l’occupation japonaise. Le Japon organise l’Asie-Pacifique dans le cadre de la sphère de
coprospérité de la Grande Asie orientale (Empire du Japon, Thaïlande (vaincue), Mandchoukuo
(État fantoche soutenu par le Japon), Gouvernement de Nankin (collaborateurs chinois), Mengjinag
(Mongolie intérieure indépendante soutenue par le Japon), Birmanie (collaborateurs), Philippines
(collaborateurs) puis Cambodge et Vietnam français en 1945 et même des indépendantistes
indiens).
À leur apogée, les forces de l’Axe contrôlent militairement et économiquement toute l’Europe (sauf
les îles britanniques et les pays neutres (Espagne, Portugal, Suisse, Suède), une partie de l’Afrique
du Nord ainsi que l’Asie-Pacifique et l’Asie du Sud-Est.
Pour les alliés (occidentaux) : le respect des libertés économiques et des principes démocratiques
Bien qu’elles souhaitaient à tout prix éviter la guerre (la France et le Royaume-Uni laissant faire
l’expansionnisme allemand lors de la Conférence de Munich, les États-Unis restant isolationnistes),
les démocraties libérales entendent désormais lutter contre les totalitarismes nazi et fascisme ainsi
que contre le militarisme japonais. Les Alliés présentent donc leur combat comme celui des
démocraties contre des dictatures barbares. Bien que ne respectant pas les principes de la
démocratie libérale, l’URSS se retrouve dans ce discours puisque son idéologie communiste est
opposée aux discours expansionnistes voire racistes des régimes nazi ou fasciste. L’URSS signe
notamment la Déclaration des Nations Unies (1942) qui indique comme objectif de défendre « la
liberté, l’indépendance et la liberté religieuse » ainsi que « les droits humains et la justice » !
Menacés dans leurs intérêts stratégiques, les alliés entendent également placer la liberté de
circulation sur les mers comme but de leur combat. Le libéralisme économique reste en effet au
cœur de l’idéologie libérale des Occidentaux.
Ces deux aspects du libéralisme figurent dans la Charte de l’Atlantique (1941) qui servira de base
pour la rédaction de la Charte des Nations Unies à l’issue de la guerre.
II – La Seconde Guerre mondiale fait véritablement figure de guerre
d’anéantissement
A – Des destructions extrêmes
Les bombardements stratégiques
Dès le début de la guerre, des bombardements massifs sont effectués dans le cadre de la Blitzkrieg
(25 000 morts à Varsovie, 40 000 morts à Rotterdam) mais aussi des mitraillages sur les colonnes de
civils qui fuient l’avancée allemande lors de l’important exode de 1940 (10 millions de personnes sur
les routes, environ 100 000 tués).
Durant la bataille d’Angleterre, Hitler tente de briser le moral des Britanniques en bombardant
Londres (15 000 morts, 3,5 millions de personnes évacuées). L’Allemagne est le premier pays à
utiliser des missiles balistiques (V1 et V2) mais ils sont peu fiables et surtout trop coûteux.
Ces sont les Américains qui par leur supériorité technologique portent ces bombardements à leur
plus haut niveau : en détruisant totalement les villes allemandes et japonaises, ils cherchent à briser
les ressources matérielles et morales de l’adversaire afin d’éviter des combats terrestres trop
coûteux (à l’inverse Stalingrad avait été une bataille d’anéantissement terrestre particulièrement
meurtrière). Parmi les bombardements américains les plus meurtriers : Dresde (plusieurs dizaines de
milliers de morts du 13 au 15 février 1945) ou Tokyo (100 000 morts le 9 mars 1945) toutes deux
5
détruites par des bombes incendiaires.
L’entrée dans l’ère nucléaire
Le calcul des pertes japonaises (par continuation des bombardements classiques) et américaines
(pour la conquête du Japon) conduisent les Américains à utiliser l’arme atomique développée depuis
1942 au Nouveau-Mexique dans le cadre du projet Manhattan.
Les 6 et 9 août 1945, les bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki font entre 150 et
250 000 morts.
B – L’extermination des Juifs et des Tziganes
Les prémisses du génocide : exclusion et persécution
Les nazis font de l’antisémitisme la base de leur État : dans la conceptions hitlérienne, le Reich est
composé de purs Aryens qui doivent prouver qu’il n’y a pas de Juifs dans leur généalogie (car situés
à la base de la hiérarchie des races dans la pensée de Adolf Hitler). Dans Mein Kampf, les Juifs sont
cités 300 fois sous des noms tels que « parasite », « peste », « tuberculose raciale ».
Il est cependant difficile de supprimer toute une population sans préparation : avant même l’arrivée
au pouvoir des nazis, leur propagande fait des Juifs les responsables de la défaite de 1918 (théorie
du coup de couteau dans le dos) et entretien la haine (doc. 1 page 102). Leur extermination est
d’abord préparée par leur mise à l’écart de la société allemande.
Les premières mesures antisémites du Troisième Reich concernent l’exclusion des Juifs de certains
métiers (fonctionnariat, enseignement, professions libérales, métiers de la communication…).
En 1935, les lois de Nuremberg opèrent une « séparation biologique pour la protection du sang
allemand et de l’honneur allemand » :
–
Tous les Juifs perdent la nationalité allemande.
–
Les mariages et relations sexuelles entre Juifs et Aryens sont interdits.
Un décret d’application indique qui est considéré comme Juif ou non :
–
est considéré comme Juive une personne qui a au moins 3 grands-parents juifs
–
est considérée comme « métissée de Juif » une personne qui a un ou deux grands-parents
juifs (la personne est alors déclarée juive si elle appartient à la communauté juive, si elle épouse un
juif, si l’un de ses parents est juif)
Le système raciste allemand mélange éléments raciaux et religieux... Certains cas peuvent être
extrêmement complexes au point qu’en 1936, le Bulletin d'information de l'Association du Reich des
Chrétiens non-aryens publie des explications de cas :
« - Question : un homme a deux grands-parents juifs, une grand-mère aryenne et un grand-père demi-aryen : ce
dernier est né juif et n'est devenu chrétien qu'ultérieurement. Cette personne à 62% juive est-elle Mischling ou
juive ?
- Réponse : cet homme est juif selon les lois de Nuremberg, en raison du grand-père de confession juive ; ce
grand-père est présumé juif intégral et cette présomption ne peut être contestée. De sorte que ce juif à 62% a
trois grands-parents juifs. En revanche, si le grand-père demi-aryen avait été chrétien par la naissance, il n'aurait
pas été juif intégral et ne serait donc pas entré en ligne de compte dans ce calcul ; son petit fils aurait été
Mischling au premier degré. »
Beaucoup de Juifs fuient l’Allemagne (+ de 500 000) jusqu’en octobre 1941 (date à laquelle le Reich
ferme ses frontières). Pays d’accueil : France, Pays-Bas, E-U, Belgique, Palestine... L’émigration
pose toutefois des problèmes car les États n’augmentent pas leurs capacités d’accueil et refusent
6
peu à peu d’accueillir les Juifs.
Ex. en mai 1939, 900 Juifs quittent Hambourg pour Cuba dans le but de rejoindre les États-Unis sur
le paquebot Saint-Louis, ils ont rejetés et doivent revenir en Europe où ils sont ensuite déportés.
Ex. certains Juifs quittent l’Europe pour Shanghai.
La Nuit de Cristal du 9 au 10 novembre 1938 est un véritable pogrom. SA, SS et Gestapo
détruisent 7000 commerces et 200 synagogues. De 20 000 à 30 000 Juifs sont arrêtés. Le but est
d’accélérer la politique d’expulsion des Juifs. Le Reich doit devenir une terre « purifiée des Juifs ».
L’organisation du génocide : ghettoïsation et extermination par des moyens industriels
Après la conquête de la Pologne, des ghettos sont créés dans les grandes villes. Les Juifs
d’Allemagne et des régions de Pologne à germaniser sont rassemblés dans des quartiers fermés et
surveillés. (doc. 2 page 102)
Lors de la guerre à l’Est (Pologne, Tchécoslovaquie et surtout URSS), les Einsatzgruppen
(« groupe d’intervention » = police politique militarisée) suivent les troupes pour sécuriser le terrain
conquis, saisir les armes et les documents, arrêter les opposants politiques. Ils sont aussi chargés
d’éliminer certains membres de l’élite locale, les communistes, les handicapés et surtout les Juifs.
(doc. 3 page 102)
Avant même que ne soit décidé la solution finale, les Einsatzgruppen réalisent le génocide des Juifs
par balles ou à l’aide de camions à gaz. Le plus grand massacre s’est déroulé les 29 et 30
septembre 1941 dans la banlieue de Kiev (ville de 900 000 habitants dont 120 000 Juifs) : 33 771
Juifs sont mitraillés devant le ravin de Babi Yar. 60 000 autres personnes (prisonniers de guerre,
communistes, Tziganes, otages civils) furent tués par la suite dans ce même lieu.
L’extermination des Juifs et des Tziganes commence par ce qu’on appelle aujourd’hui la Shoah par
balles : le massacre sur place par des unités mobiles qui suivent l’avancée de l’armée allemande.
Cette seule phase a concernée 1,4 millions de victimes.
Le 20 janvier 1942 a lieu la conférence de Wannsee dans la banlieue de Berlin ; c’est la mise en
place de la « solution finale à la question juive ». Selon les historiens, l’extermination des Juifs a été
décidée avant cette conférence. Cette dernière met au point les modalités techniques de
l’extermination (recensement, arrestation, transferts, exécutions…) : on décide de la mise au point
d’un système de mise à mort industriel.
Cette conférence est présidée par Reinhard Heydrich, protecteur de la Bohême-Moravie, il est
l’organisateur de la solution finale. Il est assassiné par des résistants tchèques parachutés depuis
Londres le 27 mai 1942 (meurt des suites de ses blessures le 4 juin 1942).
La solution finale est déjà organisée et son assassinat n’empêchera pas la mise en place de la
politique d’extermination qu’il a conçu :
–
Les Juifs sont arrêtés chez eux lors de rafles et pour éviter la panique, les Allemands
entretiennent l’illusion d’une réinstallation en leur demandant de faire leurs bagages.
–
Ils sont transportés par des trains de marchandises. Les conditions sont épouvantables : alors
que chaque wagon est prévu pour 40 personnes maximum, chacun en contient en réalité entre 100
et 200. Le voyage dure entre 2 et 12 jours presque sans eau et sans nourriture. A leur arrivée dans
les camps, beaucoup sont déjà morts.
–
Les juifs arrivent dans deux types de camps :
- Le camp de concentration où on tue par le travail. Le premier est construit à Dachau en
1933 pour enfermer les opposants politiques puis les « asociaux » et enfin les Juifs raflés lors de la
Nuit de Cristal. On compte environ 12 camps de concentration (Buchenwald, Bergen-Belsen…)
- Le camp d’extermination organisée pour l’assassinat rapide de 700 à 1400 déportés par
7
chambre à gaz. Le premier à fonctionner est celui de Chelmno dès décembre 1941. On compte 6
camps de ce type répartis en Pologne. Le plus grand est celui d’Auschwitz.
Etude de cas sur Auschwitz : = 3 camps (doc. 4 page 101)
Auschwitz I = camp de concentration dès février 1940 pour les prisonniers de guerre polonais
puis soviétiques (une ancienne caserne de l’armée polonaise).
Auschwitz II = camp d’extermination depuis 1942 ; arrivés au camp, les Juifs sont triés par les
médecins (les inaptes sont les enfants de moins de 16 ans, les femmes qui ont la charge d’enfants,
les vieillards). Les SS cherchent à les rassurer en leur disant que ce camp est seulement un camp de
transit (toujours pour éviter les mouvements de panique). Ils sont pris en charge par les
Sonderkommandos (commandos spéciaux) composés de déportés juifs qui travaillent aux
chambres à gaz-crématoires. Ils conduisent les arrivants dans la salle de déshabillage (sont
récupérés les vêtements, les objets de valeur ainsi que les cheveux des femmes). Ceux-ci sont
ensuite conduits dans la chambre à gaz (déguisée en douche). Les membres du Sonderkommando
sont chargés de vider les chambres à gaz : les corps sont ensevelis dans des fosses puis avec
l’arrivée massive de déportés, les fours crématoires sont construits.
Auschwitz III = camp de travail qui accueille de nombreuses industries comme celle d’IG
Farben (usine chimique).
Les alliés de l’Allemagne ou les gouvernements comme celui de Vichy, participent à l’entreprise
d’exclusion et d’extermination des Juifs, conjointement à l’Allemagne, et parfois en faisant du zèle.
Dès 1942, la police française participe à la déportation des Juifs étrangers puis français (75 000 Juifs
ont été déportés de France, 2566 ont survécu soit 3 %). Les Oustachis croates organisent leur
propre camps de concentration pour les Juifs, les Tziganes et les Serbes. Les Roumains participent
à la politique d’extermination.
Dès 1942, les nations alliées et neutres reçoivent des informations concernant l’extermination des
Juifs. En août 1942, le département d’État américain reçoit un télégramme du représentant du
Congrès juif à Genève confirmant les plans nazis d’extermination des populations juives d’Europe.
L’attitude reste la passivité. Pour les Alliés, la priorité est de gagner la guerre ; c’est le seul moyen
pour aider ces populations.
L’attitude des pays neutres est différente d’une nation à l’autre. La Suède devient une terre d’asile
pour les Juifs danois et norvégiens. La Suisse ferme ses frontières en août 1942 car elle craint un
afflux massif de réfugiés sur son territoire.
Bilan de la Shoah : doc. 2 page 101
– morts de privation dans les ghettos : 800 000 morts
– Shoah par balles : 1 400 000 morts
– camps de concentration et d’extermination : 3 millions (dont 1 million à Auschwitz)
Soit un total de 5 100 000 victimes (dont 2,7 millions dans les chambres à gaz)
→ 6 millions de victimes sont annoncées lors du procès de Nuremberg où le génocide est
qualifié de Crime contre l’humanité.
Par qu’un génocide vise la destruction d’un peuple, il faut également noter comme conséquence
l’anéantissement de la culture yiddish (90 % des Juifs d’Europe de l’Est ont été exterminés).
C – La nécessité de façonner un nouvel ordre mondial
Face au traumatisme d’un second conflit mondial et face à la prise de consciences des destructions
que l’homme peut désormais infliger à ses semblables, il y a la volonté chez les vainqueurs de
réussir ce qui avait échoué en 1919 : un nouvel ordre mondial garanti par une organisation
internationale.
8
Une organisation efficace pour réussir là où la SDN avait échouée
Alors que la Seconde Guerre mondiale n’est pas encore terminée dans le Pacifique, les Alliés
organisent déjà l’après-guerre. Le 26 juin 1945, est créée l’Organisation des nations unies lors de la
Conférence de San Francisco. Elle siège à New York et rassemblé 51 pays.
L’ONU est une organisation voulue par Roosevelt et qui rassemble avant tous les vainqueurs de la
Seconde Guerre mondiale. Le Japon et les deux Allemagne sont cependant intégrés à l’organisation
en 1956 et 1973.
→ Doc. 5 et 6 page 109 : questions 7, 8 et 9
Montrez que l'ONU reprend les mêmes objectifs que la SDN mais également de nouveaux.
La charte de l'ONU montre la poursuite et le dépassement des objectifs de la SDN :
– diplomatique :
Recherche de paix mondiale par des arbitrages, respect du droit international
Rôle de la Cour Internationale de Justice qui juge les différends territoriaux entre États
– social-économique :
Le développement économique et le progrès social de l'humanité est un objectif nouveau
Importance des nombreuses institutions internationales nouvelles pour favoriser le progrès
économique et social (telles que le FMI, l’UNESCO, l’OMS, etc.)
– politique :
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948
Tous les pays sont représentés à l’Assemblée générale avec chacun une voix
Rôle de la Cour Pénale Internationale (depuis 1998) chargée juger les crimes contre les
droits de l'homme
Aujourd’hui encore l’ONU contribue à la pacification des situation de crise et aide à la création des
nouveaux États (ex. Timor oriental en 2002, Soudan du Sud en 2011, tentatives en Syrie en 2013)
Pourquoi les décisions (qui les prend ?) et les actions (lesquelles ?) de l'ONU ont-elles plus de poids que
celles de la SDN ?
L’ONU a les moyens de remplir ses objectifs :
– implication forte et constante des États-Unis :
ONU voulue par Roosevelt, créée à San Francisco, siège à New York
– prise de décision rapide par un comité restreint : le Conseil de Sécurité
le Conseil de Sécurité est composé de 5 membres permanents dotés du droit de veto
(les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale : États-Unis, Royaume-Uni, Chine, URSS
et France) plus 6 membres non permanents élus pour 2 ans et sans droit de veto
– capacité d'action : économique avec des embargos (comme la SDN) mais aussi militaire
avec les casques bleus (utilisés à partir de 1956)
embargo = interdiction de faire commerce de certains produits avec un pays, moyen de pression sur le pays
casque bleu = soldat d'un pays membre mais servant sous les ordres de l'ONU, rôle maintien de la paix
Les limites d’une organisation universelle tenue par quelques puissances seulement
L’ONU a ses limites :
– un fonctionnement non démocratique :
Le pouvoir de décision réside dans les membres du Conseil de Sécurité, l’Assemblée
Générale a un rôle faible (recommandations)
Un seul membre du Conseil de Sécurité peut bloquer toute décision grâce au droit de veto
– ce qui lui empêche d'exercer toutes ses compétences :
Rôle mineur de l'ONU lors de la décolonisation alors qu’officiellement la colonialisme était
condamné par l’Assemblée générale.
9
Impossibilité d'action lors de conflit incluant un membre permanent (notamment pendant la
Guerre froide) ou un de ses alliés (Israël soutenu par les États-Unis dans le conflit israéloarabe, la Syrie aujourd’hui soutenue par la Russie...)
L’ONU est-elle au final un succès ?
– L’ONU reprend et dépasse la SDN à travers l'ampleur de ses objectifs et l'importance de
ses moyens
– Ce succès est largement du à l’engagement des États-Unis, cependant nul n’est exclu de
l’organisation (pays communistes actifs à l’ONU durant la Guerre froide).
– Mais l’ONU entretient une inégalité entre les cinq grandes puissances d’une part et tous les
autres pays du monde d’autre part.
– L’ONU semble donc aujourd’hui peu adaptée au monde actuel (les pays émergents
réclament les mêmes droits que les cinq membres permanents).
CONCLUSION
La Seconde Guerre mondiale fait véritablement figure d’apogée de la violence au XX e siècle. Ce
conflit n’est finalement que l’aboutissement des tendances entamées depuis le début de l’époque
contemporaine : une guerre mondiale, fondée sur des moyens industriels, mobilisant la science pour
créer de nouveaux moyens de destruction, pour mettre en œuvre des idéologies qui se fondent pour
certaines sur un nationalisme virulent. Par l’utilisation d’armes nouvelles résolument tournées vers
l’élimination des populations civiles et le génocide, ce conflit fait réellement figure de guerre
d’anéantissement où l’objectif est la destruction totale d’un pays ou d’une population. Malgré cela, le
second XXe siècle commence sur un espoir de paix durable avec la création de l’ONU, même si les
choix suivis par les deux nouvelles superpuissances, anciens alliés et nouveaux adversaires dans un
nouveau conflit de dimension planétaire, inquiètent.
10
Téléchargement