La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXVII - n° 5 - septembre-octobre 2012 | 183
ÉDITORIAL
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des éléments nouveaux de réflexion(5). Dans cette étude, le critère de
jugement principal combinait mortalité hospitalière et événements emboliques
symptomatiques dans les 6semaines suivant la randomisation. Ce critère
dejugement principal a été observé chez 1patient du bras chirurgie valvulaire
précoce(1décès) etchez 9patients du bras traitement conventionnel
(8accidents emboliques et 1décès ; p=0,01 en comparaison de fréquences,
p=0,009 en comparaison de courbes de survie). La mortalité à 6mois n’était pas
différente dans les 2bras(3 versus 5 % ; p=0,59).
On peut sans doute émettre un certain nombre de critiques à l’égard de cette
étude monocentrique dont le recrutement a pris près de 5ans ; lespatients
étaient jeunes, avec probablement peu de comorbidités, et leur effectif
relativement faible ; 77 % des patients randomisés dans le bras traitement
conventionnel ont été opérés pendant la phase aiguë de l’EI ; dansplus de
60 % des cas, l’EI était due à un streptocoque, ce qui n’est pas le reflet de
l’épidémiologie actuelle, dominée par S. aureus ; le bénéfice aétéobservé sur
la seule composante embolique du critère de jugement principal ; le taux de
mortalité hospitalière était étonnamment faible(3 % alors qu’ilest de l’ordre
de 20 % dans les études observationnelles contemporaines). Cedernier point
résulte très probablement des critères de sélection dans l’étude et laisse à penser
que les résultats observés dans la population étudiée ne sont pas extrapolables à
l’ensemble des patients atteints d’EI.
Ces critiques ne doivent toutefois pas occulter les authentiques mérites
de cette étude qui démontre qu’il est possible de conduire un essai randomisé
évaluant un traitement chirurgical dans une maladie à la fois rare et grave
comme l’EI. Surtout, cette étude fait la démonstration que, chez des patients
qui devraient pour la plupart être opérés en raison de la gravité de la
dysfonction valvulaire, l’intervention ultra-précoce permet d’éviter des accidents
emboliques dont la gravité peut être redoutable, sans surmortalité ni surrisque
de rechute ou de désinsertion de prothèse. En effet, l’étude de Kang et al. (5),
comme d’autres précédemment(6), montre que les accidents
emboliques surviennent dans les premiers jours de la
prise en charge. Ainsi donc, à défaut d’apporter une
réponse universelle et définitive, cette étude
apporte des arguments forts en faveur de
la chirurgie ultra-précoce dans l’EI du
cœur gauche à haut risque embolique
(végétation>10mm). Enfin, cette
étude illustre que tout patient
atteint d’EI doit être rapproché
sans délai d’un centre spécialisé
comportant un service de
chirurgie cardiaque et une
équipe multidisciplinaire
rompue à la prise en charge
des EI.
4. Thuny F, Beurtheret S,
Mancini J et al. The timing of
surgery influences mortality
and morbidity in adults
with severe complicated
infective endocarditis: a
propensity analysis. Eur Heart
J 2011;32:2027-33.
5. Kang DH, Kim YJ, Kim SH
et al. Early surgery versus
conventional treatment for
infective endocarditis. N Engl
J Med 2012;366:2466-73.
6. Dickerman SA, Abrutyn E,
Barsic B et al. The relationship
between the initiation of
antimicrobial therapy and the
incidence of stroke in infective
endocarditis: an analysis from
the ICE Prospective Cohort
Study (ICE-PCS). Am Heart
J 2007;154:1086-94.
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