6. Les protections du système nerveux 6.1 Cellules sensorielles – organes sensoriels L’air inspiré subit des turbulences dans la cavité nasale, qui servent à le réchauffer, à l’humidifier, mais aussi à améliorer les contacts avec l’épithélium olfactif. Cette couche de cellules dans le plafond de la cavité nasale est recouverte d’une fine pellicule de mucus dans lequel se dissolvent les molécules volatiles présentes dans l’air. Des neurones spécialisés de l’épithélium olfactif, les récepteurs olfactifs, portent de fins prolongements à l’extrémité de leurs dendrites, appelés cils, qui baignent dans le mucus. Lorsque des molécules odorantes dissoutes dans le mucus entrent en contact avec les cils, les récepteurs olfactifs concernés sont activés : si le stimulus est suffisant, des potentiels d’actions se forment à leur zone gâchette. Ces potentiels d’action sont transmis par le nerf olfactif au cerveau qu’ils informent sur la présence des molécules odorantes perçues. Les cellules qui, comme les récepteurs olfactifs, réagissent à un stimulus externe par un changement de leur potentiel de membrane et, finalement, par la formation de potentiels d’action sont appelées cellules sensorielles. Figure 51 : Position et structure de l’épithélium olfactif Chaque cellule sensorielle est activée par une forme particulière de stimulus, son stimulus adéquat. - Les récepteurs chimiques ou chimiorécepteurs réagissent à des molécules, Les photorécepteurs à la lumière, Les mécanorécepteurs à des déformations mécaniques, Les thermorécepteurs au chaud et au froid. 61 Des cellules sensorielles de même type peuvent constituer des structures complexes avec du tissu non neuronal : les organes sensoriels. L’épithélium olfactif constitue un tel organe. Il contient des cellules de soutien qui entourent les récepteurs olfactifs ainsi que des cellules basales qui, par division cellulaire, forment de nouveaux récepteurs olfactifs, permettant ainsi leur continuel remplacement. Quel que soient le stimulus ou les processus se déroulant dans les cellules sensorielles, le principe de base reste toujours le même : la cellule sensorielle répond à une stimulation par un changement de son potentiel de membrane. Il se forme d’abord un potentiel de récepteur dont l’amplitude est proportionnelle à l’intensité du stimulus. Ce processus – la transformation d’un stimulus en un potentiel de récepteur – caractérise les cellules sensorielles et est appelé transduction. Lorsque l’intensité du stimulus dépasse une certaine valeur, appelée seuil de stimulation, le potentiel de récepteur devient suffisant pour générer des potentiels d’action qui sont conduits au système nerveux central. La fréquence des potentiels d’action code l’intensité du stimulus. Figure 52 : Transduction dans une cellule olfactive. A Potentiel de récepteur et potentiels d’action – B Cascade de signaux dans la membrane des cil. La seule information transmise par les cellules sensorielles au cerveau concerne donc l’intensité du stimulus. Pourtant, les potentiels d’action parvenant au cerveau y induisent des perceptions sensorielles fort diversifiées. Cela résulte du fait que les potentiels d’action atteignent le cerveau par différentes voies et qu’ils y activent différentes régions spécifiques. On distingue deux types de cellules sensorielles : celles qui, comme les récepteurs olfactifs, produisent des potentiels d’action qui parviennent directement au cerveau sont appelées cellules sensorielles primaires. Ce sont en fait des neurones transformés. Les autres sont des cellules épithéliales modifiées ; on les appelle cellules sensorielles secondaires. Dans leur cas, le potentiel de récepteur conduit à la libération de neurotransmetteurs qui agissent sur un neurone. C’est celui-ci qui produit les potentiels d’action. La transduction se déroule différemment selon le type de récepteur sensoriel. Toutefois, des canaux ioniques spécialisés sont toujours impliqués. Ils sont activés soit directement par le stimulus, soit par une chaîne de signaux cellulaires. Une telle chaîne est impliquée dans les récepteurs olfactifs lorsqu’une Figure 53 : Type de cellules sensorielles 62 molécule odorante s’attache à une protéine réceptrice, présente dans la membrane des cils, et spécifique de la molécule en question. Chaque récepteur olfactif ne contient qu’un seul type de protéine réceptrice de l’odeur, qui présente une affinité différente à diverses molécules odorantes. Si une protéine réceptrice de l’odeur s’attache à une molécule odorante, elle active alors une protéine G qui elle-même active une adénylate cyclase. Cette enzyme membranaire catalyse la formation d’AMP cyclique (AMPc) à partir d’ATP. L’AMPc agit comme un second messager. Il permet la transmission à l’intérieur de la cellule sensorielle de signaux provenant de stimuli- les substances odorantes – qui restent à l’extérieur de celle-ci. La présence d’AMPc entraîne l’ouverture de canaux cationiques spécifiques, ce qui génère un courant d’ions sodium, et surtout calcium, vers l’intérieur du cil. Un potentiel de récepteur est produit. L’augmentation d’ions calcium dans les cils conduit à l’ouverture de canaux chlorure. Le courant d’ions chlorure vers l’extérieur de la cellule renforce le potentiel de récepteur et aboutit à la formation de potentiels d’action au niveau de la zone gâchette. Ces potentiels d’action sont ensuite transmis au cerveau. Comme la liaison d’une seule molécule odorante à une protéine réceptrice de l’odeur conduit à la production de nombreuses molécules d’AMPc et comme chacune de ces molécules ouvre plus d’un canal ionique, la chaîne de signaux implique une importante amplification du signal ; c’est pourquoi on parle d’une cascade de signaux. Les récepteurs olfactifs peuvent s’adapter, c’est-à-dire qu’ils peuvent changer leur sensibilité à un stimulus. Lors d’une stimulation continue par une substance odorante, la cellule ne produit des potentiels d’action que durant une seconde environ. Il faut ensuite que l’intensité du stimulus change pour obtenir de nouvelles réponses. 6.2 L’œil – un organe photosensible L’œil humain (figure 54) – comme celui de tous les vertébrés – est un organe photosensible complexe, constitué de photorécepteurs, de cellules nerveuses et de structures transparentes réfractant la lumière : - la cornée, l’humeur aqueuse, la pupille, le cristallin, le corps vitré. Figure 54 : L’œil humain. A Coupe horizontale de l’œil gauche – B Accommodation. A gauche : vue frontale, à droite : coupe sagittale. Ensemble, ces structures forment le système optique de l’œil ou appareil dioptrique, qui projette sur la rétine une image réduite et inversée des objets placés devant l’œil. Le cristallin peut se déformer, ce 63 qui change son pouvoir de réfraction ou convergence. C’est ce qui permet d’obtenir des images nettes d’objets placés à différentes distances de l’œil. Pour la vision lointaine, le cristallin est aplati, pour la vision proche, il est fortement bombé. Cette capacité du cristallin à changer de forme résulte de l’action combinée des muscles ciliaires, de la choroïde et des ligaments suspenseurs du cristallin. L’image d’un objet éloigné est nette pour un œil au repos. Les muscles ciliaires sont relâchés et les ligaments suspenseurs du cristallin sont tendus par la traction de la choroïde : le cristallin est aplati et son pouvoir de réfraction est faible. Si l’image des objets éloignés est nette sur la rétine, celle des objets proches est floue. Si l’on fixe un objet proche de l’œil, les muscles ciliaires, qui encerclent le cristallin, se contractent et diminuent la traction que les ligaments suspenseurs exercent sur le cristallin. Celui-ci se bombe jusqu’à prendre une forme presque sphérique sous l’effet de son élasticité. Le pouvoir de réfraction du cristallin augmente et une image nette de l’objet proche se forme sur la rétine. En revanche, le fond du champ visuel forme une image floue. On appelle accommodation cette capacité de l’œil à former une image nette sur la rétine d’objets très proches ou éloignés. Avec l’âge, l’élasticité du cristallin diminue, ce qui empêche la vision nette d’objets rapprochés ; c’est la presbytie, qui est corrigée par le port de lunettes convergentes. L’ouverture de la pupille peut aussi être modifiée. La pupille se réduit par suite de la contraction des fibres musculaires circulaires de l’iris, alors qu’elle s’élargit par la contraction des fibres radiales. Par ce mécanisme, l’œil s’adapte aux changements de luminosité. L’ouverture de la pupille se réduit aussi lors de l’accommodation à une vision rapprochée, ce qui augmente la profondeur de champ et donc la netteté de l’image. La rétine (figure 28) contient des photorécepteurs et des neurones qui captent l’image qui y est projetée par l’appareil dioptrique et la transmettent au cerveau sous forme de potentiels d’action. La rétine est composée de plusieurs couches cellulaires. Un épithélium pigmenté, en contact avec la choroïde, forme la couche externe. Le pigment (mélanine) absorbe la lumière qui diffuse et empêche la formation de reflets. Les personnes atteintes d’albinisme n’ont pas de mélanine et sont éblouies en forte lumière. La couche suivante, en direction de l’intérieur de l’œil, est formée par les photorécepteurs (figure 56): les Figure 55 : Structure de la rétine chez les vertébrés cônes et les bâtonnets. Les cellules nerveuses viennent ensuite. Les photorécepteurs sont couplés par des synapses aux cellules bipolaires, qui elles-mêmes sont reliées aux cellules ganglionnaires dont les axones forment le nerf optique. Les cellules horizontales établissent des contacts latéraux entre les photorécepteurs et les cellules amacrines entre les cellules bipolaires. Figure 56 : Structure des photorécepteurs chez les vertébrés. A Bâtonnet – B Cône 64 Les photorécepteurs sont absents de l’endroit où le nerf optique quitte l’œil (figure 57) : c’est la tache aveugle. L’endroit où l’acuité visuelle est maximale est appelée la tache jaune. Les cellules nerveuses qui, ailleurs sur la rétine, sont placées devant les photorécepteurs sont ici placées sur leur côté, ce qui permet à la lumière d’atteindre directement les photorécepteurs. La position des cellules nerveuses de la tache jaune conduit à la formation d’une dépression : la fovéa centralis (lat. fovea : trou), abrégée fovéa. Les photorécepteurs Figure 57 : Distribution des cônes et des bâtonnets sur la rétine présentes au niveau de la tache jaune ne sont que des cônes ; plus on s’en éloigne, plus la proportion de bâtonnets augmente. Le rapport entre le nombre de photorécepteurs et le nombre de cellules ganglionnaires varie aussi : alors qu’au niveau de la fovéa chaque photorécepteurs couplé à sa propre cellule ganglionnaire, en périphérie, plusieurs photorécepteurs sont couplés à une même cellule ganglionnaire. Les photorécepteurs sont divisés en deux segments (figure 56). Dans le segment interne se trouvent le noyau, les mitochondries et le réticulum endoplasmique. Ce segment se termine par une structure présynaptique, où se fait le contact avec les neurones bipolaires. Le segment externe est rempli de disques membranaires qui contiennent les pigments photosensibles. Les bâtonnets et les cônes se distinguent par la forme et la structure de leur segment externe. Un bâtonnet possède un segment externe long, cylindrique et contenant de nombreux disques. Le segment externe d’un cône est plus court, conique, contient moins de disques et donc moins de pigments photosensibles. En conséquence, les cônes sont moins sensibles que les bâtonnets. Par contre, si la luminosité est suffisante, ce sont eux qui transmettent l’information concernant les couleurs. Les bâtonnets ont la capacité de former une image encore assez nette en faible lumière, mais seulement dans des nuances de gris. 6.3 La phototransduction Alors que le potentiel de repos des neurones est de -70mV, le potentiel de repos d’un bâtonnet à l’obscurité avoisine -30mV (figure 58a). Cela s’explique par une entrée continue de sodium par des canaux sodium particuliers, placés dans la membrane du segment externe. Ces canaux sont maintenus ouverts en présence de guanosine monophosphate cyclique (GMPc), un messager secondaire. A cette valeur du potentiel de membrane des bâtonnets, les synapses reliant ces derniers avec leurs cellules bipolaires libèrent continuellement le neurotransmetteur glutamate. Or, les canaux sodium présents dans la membrane postsynaptique sont maintenus fermés en présence de glutamate : en conséquence, la cellule bipolaire reste inactive. 65 Figure 58 : Phototransduction dans un bâtonnet. A Courants ioniques et potentiels de membrane à l’obscurité et à la lumière – B Processus moléculaire de la cascade de signaux. 66 La membrane des disques contient de la rhodopsine, un pigment photosensible. Une molécule de rhodopsine est constituée d’opsine, une protéine membranaire, liée à une molécule de rétinal 11-cis (figure 58b). Une exposition à la lumière transforme le rétinal 11-cis en rétinal trans. Ce changement structurel du rétinal constitue la première étape de la phototransduction. La rhodopsine passe dans son état activé et déclenche une cascade de signaux : par l’intermédiaire d’une protéine G, la transducine, l’activation d’une seule molécule de rhodopsine active des centaines de molécules enzymatiques qui transforment plusieurs milliers de molécules de GMPc en guanosine monophosphate (GMP) par seconde. Cela conduit à une diminution rapide de la concentration de GMPc à l’intérieur du segment externe et donc à la fermeture des canaux sodium dépendant du GMPc. Le courant de charges positives s’interrompt et le bâtonnet s’hyperpolarise : son potentiel de membrane atteint -70mV. La libération de glutamate par la structure présynaptique du bâtonnet s’arrête, ce qui conduit à l’ouverture des canaux sodium de la membrane postsynaptique des cellules bipolaires. Le courant entrant d’ions sodium provoque la dépolarisation de la membrane de la cellule bipolaire, qui est activée. Immédiatement après l’absorption d’un photon, la rhodopsine est scindée en opsine et en rétinal trans. La rhodopsine doit être régénérée avant que la cascade de signaux puisse redémarrer en réponse à la lumière. Le rétinal ne peut pas être synthétisé par l’organisme humain et doit provenir de l’alimentation, soit par la vitamine A, soit par les caroténoïdes des végétaux. La rétine humaine contient trois types de cônes. Les mécanismes de la phototransduction s’y déroulent presque comme dans les bâtonnets. Chaque type de cône a ses propres pigments photosensibles : ils contiennent tous du rétinal, mais se distinguent par leur protéine membranaire. C’est ce qui permet aux trois types de cônes d’avoir chacun une sensibilité particulière à une région spécifique du spectre lumineux (figure 59). Ils sont préférentiellement activés soit par la lumière bleue, soit par la lumière verte, soit par la lumière du domaine jaunerouge. C’est pourquoi on parle des cônes bleus, verts et rouges, respectivement. Lorsque la lumière réfléchie par une orange atteint la rétine, chaque type de cônes est plus ou moins activé. Le cerveau intègre ces informations Figure 59 : La vision des couleurs. Spectre d’absorption des photopigments et reconnaît la des cônes bleus (B, absorption maximale à 445 nm), verts (V, 530 nm), rouges couleur orange. (R, 625 nm) ainsi que des bâtonnets (Ba) Ce sont donc les cônes qui permettent la vision des couleurs. La majorité des personnes affectées de daltonisme n’ont que deux types de cônes et confondent donc certaines couleurs. L’œil peut s’adapter à des intensités lumineuses différentes. Les cônes ne sont plus activés si la luminosité passe en dessous d’une certaine valeur. La concentration en pigments photosensibles étant considérablement plus élevée dans les bâtonnets, ceux-ci peuvent être activés par une luminosité jusqu’à mille fois plus faible que celle nécessaire aux cônes. C’est ce qui permet de voir dans une nuit sans lune (vision crépusculaire), bien que de manière floue et restreinte à des nuances de gris. Quand on passe rapidement du plein jour à la pénombre, la pupille se dilate, ce qui permet l’entrée de plus de lumière. Les bâtonnets ont besoin de plusieurs minutes (jusqu’à une demi-heure) pour 67 s’adapter. En effet, presque toutes les molécules de rhodopsine des bâtonnets sont décomposées en forte intensité lumineuse ; leur régénération ne s’achève qu’après environ 30 min. Avec l’augmentation de la concentration en rhodopsine, la sensibilité des bâtonnets à la lumière augmente progressivement : c’est l’adaptation à l’obscurité. Si on passe au contraire de la pénombre au plein jour, l’adaptation à la lumière se fait rapidement par la contraction des pupilles, ce qui limite la quantité de lumière atteignant la rétine. C’est le réflexe pupillaire. On peut toutefois être momentanément aveuglé, car de nombreuses molécules de rhodopsine se transforment simultanément à la lumière. L’éblouissement disparaît après une minute au plus, car les pigments visuels des cônes n’avaient pas été préalablement décomposés, puisqu’on était dans la pénombre, et qu’on n’utilise plus les bâtonnets en pleine lumière. 6.4 Traitement de l’information dans la rétine La rétine ne se limite pas à transmettre l’information, elle la transforme. Des informations reçues sont éliminées, d’autres amplifiées, compressées puis transmises au cerveau. Ce traitement de l’information et une adaptation évolutive qui s’est révélée avantageuse pour les vertébrés, chez qui la perception dans la pénombre est très importante. C’est déjà au niveau de la rétine, avant que les potentiels d’action ne soient transmis au cerveau, qu’un traitement des signaux visuels est effectué, qui fait ressortir les contours d’un objet dans un arrière-plan de même intensité lumineuse. Le traitement de l’information au niveau de la rétine est produit par le réseau de connections reliant les photorécepteurs aux cellules horizontales, et les cellules bipolaires aux cellules amacrines. Une voie directe transmet l’activation des bâtonnets et des cônes aux cellules bipolaires, puis aux cellules ganglionnaires, qui par leur axone la transmettent au cerveau. Simultanément, l’activation des photorécepteurs est aussi transmise aux cellules horizontales, qui inhibent alors les autres cellules visuelles qu’elles contactent, réduisant ou bloquant ainsi leur activation. Ce type de réseau produit une inhibition latérale (figure 60). Concrètement, quand un bâtonnet est exposé à une forte intensité lumineuse, alors que les cônes voisins ne reçoivent qu’une faible lumière, sa forte activation est Figure 60 : Inhibition latérale. A Potentiels d’action produits par des cellules ganglionnaires voisines durant l’activation différentielle de leur cône – B Flux de l’information dans la rétine. 68 transmise à une cellule horizontale qui inhibe les cônes voisins. Ceux-ci, déjà peu activés par la faible lumière, voient leur activation encore réduite par l’inhibition des cellules horizontales. Il en résulte que le stimulus visuel n’active que la cellule ganglionnaire recevant son information par la voie directe. Ce point du champ visuel se détache donc particulièrement bien sur un fond obscur. Certains montages visuels permettent de percevoir consciemment cette augmentation de contraste, par exemple les bandes de MACH, une succession de surfaces grises d’intensité croissante. La bordure d’une surface d’un gris uniforme avec une surface plus claire paraît plus foncée, alors que la bordure de la même surface avec une surface plus foncée paraît plus claire. L’augmentation de contraste fait ressortir les limites d’un objet dans l’espace et en facilite la détection. Une cellule ganglionnaire peut être activée par tout un groupe de photorécepteurs, ce qui conduit à une autre forme de traitement de l’information par la rétine. Ces photorécepteurs forment ensemble un champ récepteur (figure 61). Ce réseau réduit le flux d’informations vers le cerveau et permet un traitement local des signaux avant leur transmission. Figure 61 : Le champ récepteur. A structure – B Modifications du potentiel de membrane des cellules d’un champ récepteur en réponse à l’illumination de la zone centrale – C En réponse à l’illumination de la zone périphérique Comme on l’a vu, les photorécepteurs sont actifs dans l’obscurité et libèrent un neurotransmetteur qui inhibe les cellules bipolaires, ce qui bloque la transmission d’informations vers le cerveau. Dans la rétine, les champs récepteurs sont constitués d’une zone centrale et d’une zone périphérique qui ont des effets opposés. Si l’on illumine la zone centrale d’un champ récepteur, les photorécepteurs qui s’y trouvent s’hyperpolarisent et libèrent alors moins de neurotransmetteurs. L’inhibition des cellules bipolaires concernées diminue et la dépolarisation qui en résulte conduit à l’activation des cellules 69 ganglionnaires qui envoient alors des potentiels d’action au cerveau. Si des photorécepteurs de la zone périphérique sont aussi illuminés, ils réagissent comme les photorécepteurs de la zone centrale : ils s’hyperpolarisent et libèrent moins de neurotransmetteur. Plusieurs photorécepteurs étant en contact avec une cellule horizontale, celle-ci s’hyperpolarise, ce qui aboutit à une inhibition de la cellule bipolaire. Dans cette situation, l’activation de la zone centrale ne conduit pas à une activation de la cellule ganglionnaire. Ce système permet une meilleure reconnaissance des contrastes entre des régions d’intensités lumineuses différentes. En conséquence, l’acuité visuelle, c’est-à-dire la capacité à bien discriminer les contours d’un objet, est améliorée. La taille d’un champ récepteur est fondamentale pour l’acuité visuelle. Comme le champ récepteur des cônes est considérablement plus petit que celui des bâtonnets, l’acuité visuelle est plus grande en pleine lumière, lorsque les cônes sont activés. L’acuité visuelle est maximale au niveau de la fovéa, où à chaque cône correspond une cellule ganglionnaire. Le champ récepteur des cellules ganglionnaires en périphérie de la rétine est plus grand et l’acuité visuelle y est moindre. Si l’acuité visuelle diminue lorsqu’on s’éloigne de la fovéa, la sensibilité visuelle augmente. En effet, les faibles stimuli visuels qui atteignent un champ récepteur sont amplifiés par la convergence de nombreux photorécepteurs sur une cellule ganglionnaire. Cette convergence produit une sommation spatiale de l’activation. La sensibilité visuelle est donc d’autant plus importante que le champ récepteur est grand. Le traitement de l’information par la rétine peut conduire à percevoir des choses qui n’existent pas. C’est ce que démontre la grille d’HERMANN. Les taches grises à l’intersection des bandes blanches disparaissent sitôt que l’on cherche à les fixer. Cette illusion d’optique s’explique par le fait que le traitement de l’information n’est pas le même au centre et à la périphérie de la rétine. 70 Exercice Organes sensoriels – Cellules sensorielles 71 72