Actualités 22/06/04 16:18 Page 11 Actua l ité Sa nté 11 Dermatologie Mieux connaître l’érysipèle L’érysipèle est principalement une infection streptococcique des couches profondes de la peau, derme et hypoderme. La porte d’entrée doit être soigneusement recherchée et soignée. Il s’agit de prévenir une fasciite nécrosante, de sombre pronostique. L’ érysipèle est une maladie infectieuse aiguë caractérisée par une inflammation de la peau. La bactérie en cause provient d’une infection cutanée ou rhinopharyngée appelée “porte d’entrée”, retrouvée dans plus de trois quarts des cas. Il peut s’agir d’une plaie banale non soignée, d’une érosion à peine visible (voire même cicatrisée), d’une fissure, d’une piqûre, non traumatisantes et donc négligées. On peut aussi avoir affaire à un ulcère variqueux, à un intertrigo interdigital. En fait, toute dermatose infectée peut être une cause de déclenchement de l’érysipèle. Pour que cette effraction permette que l’infection se diffuse aux couches profondes du derme, d’autres facteurs favorisants sont nécessaires, telles une insuffisance veineuse ou artérielle et surtout l’existence d’un œdème des membres inférieurs, que cet œdème soit d’origine cardiaque (par insuffisance) ou veinolymphatique. D’autres causes sont parfois retrouvées : en postopératoire, après une chirurgie de la hanche (pose de prothèse), une saphénectomie, un pontage coronarien. Ce sont encore l’existence d’une thrombose veineuse sous-jacente, la prise régulière d’AINS, la présence d’un terrain fragilisé ou débilité par une p a t h o l o gie chronique comme un alcoolisme, un diabète, une obésité. Diagnostic L’infection est due, dans plus de 80 % des cas, à un streptocoque. Son diagnostic repose sur l’association de signes locaux : la présence d’un placard érythémateux, à limites nettes, plus rarement est retrouvé le classique bourrelet périphérique. Ces lésions peuvent siéger en différents endroits du corps, depuis les membres jusqu’au visage (où la lésion est alors bilatérale). Souvent sont associés un ganglion satellite et une lymphangite. À côté des signes locaux, des manifestations générales sont présentes, avec une fièvre qui peut s’accompagner de frissons, dans le cadre d’un syndrome infectieux généralisé. Le diagnostic porté, il convient de rechercher la porte d’entrée et de mettre en route le traitement, sans s’encombrer d’examens complémentaires. Ils ne peuvent, avec la NFS (numérotation formule sanguine), que confirmer la leucocytose à PN (polynucléaires neutrophiles) et l’augmentation de la CRP (protéine Créactive), non spécifiques en ce cas. Traitement La porte d’entrée, une fois retrouvée, se doit d’être soignée en premier, non par l’application inutile, voire toxique, de pommades anti-infectieuses, mais par un traitement adapté. Ainsi, un intertrigo ne sera pas pris en charge comme une plaie cutanée, parée si nécessaire, ou un ulcère. Le traitement par voie générale débute par l’administration immédiate de 3 à 4,5 g par jour d’amoxicilline. Il est à suivre en trois prises journalières et au moins pendant une durée de 15 jours. Si le patient est allergique, on prescrit une pristinamycine ou un macrolide. Il est inutile d’associer un traitement anticoagulant, sauf si l’on craint les conséquences d’un repos ou d’un alitement forcé. Il est contre-indiqué d’associer la pres- cription de corticoïdes, susceptibles de favoriser l’apparition de fasciites nécrosantes. En revanche, il est inutile d’arrêter un traitement cortisonique au long cours. L’ensemble de cette médication est prescrite en ambulatoire. En revanche, si des signes d’aggravation d’emblée ou secondaire apparaissent, il convient alors d’hospitaliser le malade. Prévention des récidives La guérison est habituelle si le traitement est précoce, mais les récidives sont fréquentes, imposant une antibiothérapie préventive. La meilleure prévention d’une rechute est un premier traitement efficace. Mais, si les doses d’antibiotiques sont suffisantes et poursuivies a s s ez longtemps, une récidive est peu probable, surtout si le traitement de la porte d’entrée a été assuré correctement. Il convient également de prendre en charge les facteurs favorisants déjà vus : insuffisance veineuse, lymphatique, cardiaque… Ainsi, la lutte contre la stase veineuse doit être entreprise à l’aide de séances de drainage manuel, éventuellement associées à la prise de préparations veinotoniques, dont l’efficacité n’est pas totalement démontrée. Il faut aussi éradiquer tout foyer, où qu’il soit situé, susceptible d’être un réservoir de streptocoques. Il peut parfois être utile d’envisager une antibiothérapie au long cours sous forme orale ou injectable retard. Des vaccins sont à l’étude, mais ne sont pas encore disponibles. Si le traitement initial est bien conduit, si les facteurs de risque sont contrôlés, la principale complication, à savoir la fasciite nécrosante, peut être évitée. Cette nécrose des plans profonds de la peau nécessite un acte chirurgical d’urgence et peut causer de graves délabrements, voire le décès. JB Infos ... Quand doit-on hospitaliser ? On doit hospitaliser : ✓ si un doute existe sur le diagnostic avec, par exemple, une suspicion de thrombose veineuse superficielle ; ✓ en cas de doute sur une staphylococcie maligne de la face ; ✓ si le terrain du patient est fragile (pathologie débilitante sous- jacente) ; ✓ si les signes généraux sont importants (troubles confusionnels, fièvre importante, décompensation cardiorespiratoire) ; ✓ si le contexte sociofamilial est déficient. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 55 • mai 2004