Années 1970
Le développement commercial du funk accompagne, à partir de la fin des années 1960, celui de la
culture afro-américaine, à l'image de James Brown, qui signe en 1973 la bande originale
du blaxploitation film Black Caesar. Le mouvement funk reste dans un premier temps ignoré du
public blanc, qu'il parvient finalement à toucher, surtout grâce à la disco, dans la seconde moitié des
années 1970. Le grand public est finalement converti, notamment par les groupes The
Commodores avec Lionel Ritchie et Chic, de Nile Rodgers(guitare) et Bernard Edwards (basse), qui
enchaîne les succès à partir de 1977 (Chic Cheer, le Freak, Good Times, pour ne citer que les plus
connus). Des groupes fondés à la fin des années 1960, comme Kool & The Gang, ou encore Earth,
Wind and Fire, jusque là connus des amateurs, connaissent alors un succès public considérable.
Le funk commence alors à se diversifier :
Le mouvement jazz-funk : dans les années 1970, dans le prolongement du mouvement
HardBop, des musiciens de jazz s'inspirent du funk. Et, le jazz-funk s'ouvre aux balbutiements
de la musique électronique, du fait principalement de Miles Davis, d'Eumir Deodato et
de Herbie Hancock, pianiste de jazz de formation classique, qui sort en 1973 l'album Head
Hunters, son plus grand succès commercial. On peut également citer le guitariste Jeff
Beck (ancien membre des Yardbirds), qui sort l'album Blow by Blow en 1975, le
bassiste Stanley Clarke, le groupe Funk Inc., ou encore le pianiste Hubert Eaves. Il faut encore
mentionner, dans un style qui reste plus proche du jazz classique et de la soul, certaines
œuvres de Stevie Wonder, comme du guitariste George Benson, dont le morceau Give me
the Night est devenu un classique du genre. Les femmes ne sont pas non plus en reste, on
notera notamment les performances de Betty Davis et de Gwen McCrae pendant les années
1971 et 1972 ou de Patti Austin. Françoise Hardy elle-même se prêtera à l'exercice le temps
d'un morceau : J'écoute de la musique saoûle (1978). Toujours côté français, on peut
également citer, surtout pour l'utilisation des guitares, Bernard song de Véronique
Sanson et Où sont les femmes de Patrick Juvet, deux titres de la deuxième moitié des années
70.
Le mouvement P-Funk : durant toutes les années 1970 et jusqu'au début des années 1980,
un autre style se déploie, qui prend ses distances avec la réalité. Amorcé par le funk
psychédélique assaisonné au rock de Sly and The Family Stone, il aboutira a la naissance de la
galaxie P-Funk (pour Parliament-Funkadelic et Plush Funk) de George Clinton qui mélangera
toutes les influences du moment à un groove irrésistible. Parliament, Funkadelic, Bootsy
Collins Rubber Band, P-Funk Allstars : ces groupes s'amusent à imaginer qu'ils débarquent
d'un vaisseau spatial pour libérer les humains des forces négatives d'un monde sans funk ! Le
nom des tournées est éloquent: « The P-Funk Intergalactic U.S. Tour » par exemple.
Orchestre à géométrie variable (parfois plus de 40 musiciens sur scène!), expérimentations
sonores, extravagances, délires et drogues à foison.
Le mouvement disco-funk opère la fusion entre les rythmes discos et les cuivres
caractéristiques de la funk des années 1970. On peut notamment citer Michael Jackson et
son album Off The Wall (1979), considéré comme un classique du genre, ainsi que les
productions des frères Jackson sous le nom des Jacksons, avec les
albums Destiny et Triumph. Des groupes comme Kool & The Gang et Earth, Wind and Fire,
issus du jazz-funk, ont opéré leur mue et rejoint cette mouvance pour en devenir des
références éclatantes. Chic, formé à la fin des années 70, devient également une des grandes
icônes du disco-funk.
La naissance du rap : à la fin des années 1970, le recours aux boîtes à rythme, aux
platines vinyl et aux dernières générations de synthétiseurs est concomitant à la disparition
des grands funkbands devenus trop chers à produire en concert. Armés de platines bricolées,
les premiers DJ, comme Grandmaster Flash, jouent les disques de funk de leur enfance en les
triturant via des tables de mixage et inventent les premières techniques de scratching. C'est
la relève : les groupes comme Sugarhill Gang, Trouble Funk, et bien d'autres seront la base
funky de la future révolution hip-hop. Finis les textes cosmiques et autres délires
psychédéliques, la jeune génération reparle du ghetto et de son quotidien. On se trouve à la
charnière entre le funk et le hip-hop, dont le meilleur exemple est le fameux Rapper's
Delight de Sugarhill Gang, construit sur un sample de la légendaire ligne de basse du