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•Étude randomisée comparant
le misoprostol par voie orale
(Cytotec®) et la dinoprostone
par voie intracervicale (Prepidil®)
pour la maturation cervicale
et le déclenchement du travail
O. Dupuis
Bartha JL et al. Oral misoprostol and intracervical dinopros-
tone for cervical ripening and labor induction : a randomized
comparison. Obstet Gynecol 2000 ; 96 : 465-9.
Résumé
Cette étude compare la tolérance, la sécurité et l’efficacité du
misoprostol par voie orale par rapport à la dinoprostone par
voie intracervicale.
Deux cents patientes ont été randomisées afin de recevoir, soit
une dose unique de 200 µg de misoprostol par voie orale, soit
un maximum de 4 doses de 0,5 mg de dinoprostone intracervi-
cale toutes les 6 heures. En l’absence d’entrée en travail dans
les 24 heures, une perfusion d’oxytocine était débutée.
Douze heures après le début de cette perfusion, les patientes
qui n’étaient pas en phase active (col effacé dilaté de 3 cm ou
plus) étaient césarisées pour échec de déclenchement.
Les critères d’exclusion étaient les suivants : présentation non
céphalique, utérus cicatriciel, grossesse multiple, rupture pré-
maturée des membranes, score de Bishop supérieur ou égal à
six. Les indications de maturation cervicale étaient : terme
dépassé, oligoamnios, retard de croissance intra-utérin, hyper-
tension artérielle gravidique et pré-éclampsie, pathologie
maternelle.
Les deux groupes avaient des caractéristiques comparables
(âge, pourcentage de primipares, âge gestationnel à l’inclusion,
score de Bishop à l’inclusion, indication du déclenchement...).
Les taux d’hypertonie utérine, de tachysystole et de syndrome
d’hyperstimulation n’étaient pas significativement différents
dans les deux groupes, et aucun syndrome d’hyperstimulation
n’a motivé de césarienne. La tolérance maternelle des deux
produits est comparable et excellente, enfin, la morbidité néo-
natale (taux d’admission en réanimation, taux d’inhalation
méconiale) est similaire dans les deux groupes.
Les patientes qui ont reçu du misoprostol ont eu moins souvent
besoin d’un relais par oxytocine (52 % versus 68 %, p = 0,03),
elles ont eu un délai plus court entre l’administration du miso-
prostol et l’accouchement par voie basse (12 heures versus
14 heures, p = 0,03), elles ont moins souvent subi une césa-
rienne pour échec de déclenchement (1 % versus 9 %, p = 0,01),
mais elles ont eu plus souvent une césarienne pour anomalie du
rythme cardiaque fœtal (3 % versus 1 %, p > 0,05).
Les auteurs concluent qu’une dose unique de 200 µg de miso-
protol par voie orale est plus efficace que 1 à 4 doses de
0,5 mg de prostaglandine E2 (PGE2) intracervicale.
Commentaire
Le misoprostol est un analogue de la prostaglandine E1, il est
commercialisé pour le traitement de l’ulcère dans plus de
70 pays sous le nom de Cytotec®. Ses propriétés utérotoniques
ont été notées pour la première fois en Amérique du Sud, où il
a été utilisé dans l’IVG médicamenteuse (1). Même s’il n’a pas
d’AMM, ce médicament est utilisé couramment dans les proto-
coles de déclenchement en cas de mort in utero, et de nom-
breuses équipes y ont aujourd’hui recours dans le monde entier
comme alternative aux prostaglandines E2.
Plus de 12 études comportant plus de 900 patientes ont utilisé
le Cytotec®oral dans le déclenchement du travail. L’étude sus-
dite confirme les précédentes : le Cytotec®a une excellente
tolérance maternelle et n’est pas source de morbidité néonatale.
En revanche, les essais rapportent des taux de tachysystoles
allant de 4 à 39 %, des taux d’hypertonie de 1 à 20 % et des
taux de syndrome d’hyperstimulation de 2 à 44 % (2, 3). Cette
étude est rassurante puisque le taux de syndrome d’hyperstimu-
lation n’est que de 6 % et cela, malgré l’utilisation d’une dose
de 200 µg. L’interprétation des taux bruts de syndrome
d’hyperstimulation doit être prudente. En effet, ils ne sont pas
toujours suivis d’un geste invasif (dans cette série, aucun syn-
drome d’hyperstimulation n’a nécessité de césarienne) et,
comme l’a montré J.P. Phelan, ces syndromes ne sont pas cor-
rélés au risque de rupture utérine (4).
Les trois autres séries qui ont comparé le Cytotec®oral et les
PGE2vaginal ou intracervical ont démontré que le Cytotec®était
aussi plus efficace que les PGE2(5-7). On doit rappeler qu’une
maturation cervicale par Cytotec®coûte 10 à 100 fois moins cher
qu’une maturation par PGE2, et que, contrairement aux PGE2, le
misoprostol se conserve à température ambiante et n’entraîne que
très peu d’intolérance quand il est donné par voie orale.
Cette série confirme le fait que l’utilisation du misoprostol
dans le déclenchement du travail est aujourd’hui conforme aux
données de la science et de l’éthique médicale. Les études doi-
vent désormais préciser la voie d’administration et la dose
optimale de Cytotec®; les premiers résultats semblent en
faveur du misoprostol vaginal à des doses comprises entre
25 et 50 µg toutes les 4 à 6 heures (2, 8).
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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REVUE DE PRESSE
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La Lettre du Gynécologue - n° 258 - janvier 2001