de press e R e v u e

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R evue
de presse
Le score MELD est un bon facteur
prédictif de la mortalité
postopératoire, quel que soit
le type d’intervention
L
es outils permettant de prédire la
mortalité postopératoire chez les
patients atteints de cirrhose sont très
imparfaits : une classe ASA (American
Society of Anesthesiologists) IV ou V,
un score de Child supérieur à 6, une
créatininémie élevée ou une comorbidité
cardiopulmonaire sont des facteurs de
surrisque après intervention chirurgicale.
Aucun paramètre quantitatif continu
indépendant n’a cependant été décrit
jusqu’ici comme prédictif de mortalité
postopératoire.
Les auteurs ont analysé les facteurs
prédictifs de mortalité postopératoire en
focalisant particulièrement leur analyse
sur l’intérêt du score MELD, qui est
prédictif de la mortalité spontanée des
cirrhotiques à 3 mois, de la mortalité
après implantation d’un TIPS, et qui
est maintenant utilisé dans la majorité
des pays comme critère d’attribution des
greffons hépatiques.
L’étude a porté rétrospectivement
sur 772 patients atteints de cirrhose
(diagnostic sur des arguments habituels,
pas toujours histologiques), bénéficiant
d’une intervention digestive majeure
(laparotomie avec geste sur un viscère)
[n = 586], orthopédique (n = 107), ou
cardiovasculaire (n = 79), à partir du
fichier de la Mayo Clinic. Ces patients
ont été comparés à 303 patients cirrhotiques subissant une intervention mineure
(appendicectomie, geste sur une hernie,
notamment), et à 562 sujets cirrhotiques
ambulatoires.
Après chirurgie majeure, quelle qu’elle
soit, le risque postopératoire de mortalité était augmenté jusqu’à 3 mois, par
rapport aux groupes témoins. En analyse
multivariée, seuls le score MELD, la
classe ASA et l’âge étaient prédictifs de
mortalité à 1 et 3 mois, ainsi qu’à un an
et au-delà (tableau I). En revanche, le
score de Child, le type d’intervention,
l’étiologie de la maladie hépatique
causale et l’année de chirurgie n’étaient
pas des facteurs indépendants. L’inter-
Tableau I. Analyse multivariée des facteurs prédictifs de mortalité après chirurgie.
Paramètre
Mortalité à 3 mois : HR (IC95)
p
Score MELD > 8
1,11 (1,06-1,16)
< 0,001
Score Child > 7
1,31 (0,79-2,18)
0,30
Âge
1,27 (1,05-1,54)
0,01
ASA IV
2,70 (1,68-4,34)
0,01
Type d’intervention
– cardiovasculaire
1,63 (0,55-4,86)
0,38
– digestive (1980-1990)
1,56 (0,61-3,97)
0,35
– digestive (1994-2004)
1,39 (0,51-3,76)
0,52
– orthopédique
1
Étiologie de la maladie
– alcoolique
1,23 (0,70-2,15)
< 0,001
– cholestatique
0,50 (0,21-1,22)
< 0,001
– virale/autre
1
Urgence
1,54 (0,87-2,72)
0,14
Sexe masculin
1,74 (1,09-2,77)
0,02
Tableau II. Effet du score MELD sur la mortalité postopératoire.
Mortalité (%)
Score MELD
7 jours
1 mois
3 mois
1 an
0-7
1,9
5,7
9,7
19,2
8-11
3,3
10,3
17,7
28,9
12-15
7,7
25,4
32,3
45
16-20
14,6
44
55,8
70,5
21-25
23
53,8
66,7
84,6
> 25
30
90
90
100
vention en urgence était le seul facteur
prédictif de durée d’hospitalisation,
mais n’exerçait pas de rôle prédictif de
mortalité.
En ce qui concerne le score MELD, il
exerçait un effet score-dépendant, avec
une mortalité à un mois allant de 5,7 %
pour des scores inférieurs à 8, jusqu’à
plus de 50 % pour des scores supérieurs
à 20 (tableau II). Comme cela pouvait
être imaginé, le rôle prédictif sur la
mortalité s’exerçait même très à distance
de l’intervention.
Ces données indiquent donc que le score
MELD, comme la classe ASA, permet
de déterminer le risque lié à une intervention majeure, quelle qu’elle soit, et
de déterminer si cette intervention peut
raisonnablement être effectuée avant
ou si elle doit être retardée après une
éventuelle transplantation hépatique. Un
score MELD inférieur à 11 est associé à
208
10 ans
72,6
78,1
87,3
94,1
100
100
un risque acceptable (tableau II) ; entre
11 et 20, le risque est élevé et doit être
comparé au bénéfice attendu. Au-delà, le
risque est majeur, et l’intervention doit
être retardée après la transplantation.
Un geste associé peut être proposé dans
certains cas lorsque celui prévu ne peut
pas être retardé après la transplantation.
Le score MELD prédit particulièrement
bien le risque au-delà de J7, alors que
la classe ASA prédit mieux la mortalité
précoce, avant J7. Le caractère indépendant des scores MELD et ASA suggère
que ces deux paramètres peuvent probablement être associés pour mieux prédire
le risque opératoire.
Y. Calmus, Paris
➤ Teh SH, Nagorney DM, Stevens SR et al. Risk
factors for mortality after surgery in patients with
cirrhosis. Gastroenterology 2007;132:1261-9.
Le Courrier de la Transplantation - Volume VII - n o 4 - octobre-novembre-décembre 2007
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Transplantation hépatique chez
les patients co-infectés VHC-VIH+ :
évaluation favorable dans le groupe
de Barcelone et défavorable
dans le groupe de Pittsburgh…
L
e virus de l’immunodéficience
humaine (VIH) exerce un effet
péjoratif sur l’évolution de la maladie
virale C : évolution plus rapide vers
la cirrhose et le stade terminal de la
maladie que chez les patients VIH négatifs. L’effet du VIH après la transplantation hépatique (TH) est mal connu.
Le groupe de Barcelone a comparé
les cas de 9 patients co-infectés VIHVHC, transplantés entre 2002 et 2005,
(génotype 1 dans 7 cas, charge virale
moyenne 5,3 x 105 UI/ml) à un groupe
de 18 témoins (comportant le patient
transplanté avant et le patient transplanté
après chaque patient VIH+ transplanté :
génotype 1 dans 17 cas, charge virale
moyenne 6,7 x 106 UI/ml, gravité de
la maladie VHC comparable à celle
du groupe VIH en termes de score de
MELD ou de Child). Tous les patients
VHC+ ont reçu une immunosuppression
faite de tacrolimus (dose ajustée pour
obtenir une concentration résiduelle
de 10-15 ng/ml) et de mycophénolate
mofétil (MMF, 1 à 2 g/j en fonction
de la tolérance hématologique), ainsi
que de faibles doses de corticoïdes
interrompues à 6 mois. En cas d’insuffisance rénale préTH, l’introduction du tacrolimus (dose réduite) a été
retardée sous couvert de basiliximab.
Les patients VIH+ ont reçu une prophylaxie comportant triméthoprime-sulfaméthoxazole et un traitement préemptif
du cytomégalovirus (CMV) guidé par
l’antigénémie CMV. Le traitement antirétroviral a été repris entre le 4e et le
28e jour post-TH (médiane : 8 jours),
selon le même schéma que préalablement : 8 patients ont reçu efavirenz
associé à ténofovir-lamivudine (4 cas),
zidovudine-lamivudine (2 cas), ténofovir (1 cas), ou lamivudine-didanosine
(1 cas). Un patient a reçu zidovudine,
lamivudine et abacavir. Une interaction entre le tacrolimus et le traitement
antirétroviral n’a été observée que dans
un cas, au moment de l’introduction de
lopinavir/ritonavir, induisant un grand
surdosage en tacrolimus.
L’incidence du rejet aigu a été de 44 %
et de 22 % dans le groupe VIH+ et le
groupe témoin, respectivement (différence non significative). Il n’a pas été
observé de différences en termes d’infections bactériennes, fongiques ou
virales. Un seul patient de chaque groupe
a présenté une infection à CMV traitée.
La durée d’hospitalisation totale et en
unité de soins intensifs a été similaire.
La survie actuarielle à 3 ans était de
87,5 % et de 93,7 % (un seul décès
précoce par infection avec défaillance
multiviscérale dans chaque groupe),
respectivement (NS). Dans le groupe
VIH+, la charge virale VIH a été détectable dans un seul cas (où l’introduction
du traitement antirétroviral a été retardée
du fait d’une reprise retardée de la fonction du greffon). La numération CD4
est restée stable chez tous les sujets. La
récidive virale C est survenue plus tôt
dans le groupe VIH+ que dans le groupe
témoin (2,3 mois versus 4,3 mois) et sur
un mode le plus souvent cholestatique
(bilirubinémie moyenne : 10,8 versus
1,6 mg/dl, 3 cas d’hépatite cholestatique
dans le groupe VIH+).
Les 8 patients VIH+ (100 %) et 9 témoins
(64,3 %) ont été traités par l’association
interféron pégylé et ribavirine. Un seul
témoin (11,1 %) et un seul patient VIH+
(20 %) ont présenté une réponse virologique prolongée (NS). Les lésions
du greffon ont évolué vers la cirrhose
dans 33 % des cas dans le groupe VIH+
et dans 7,1 % des cas dans le groupe
témoin (NS).
Dans cette petite série, les résultats à
court et moyen termes étaient donc similaires dans les deux groupes. Une forme
cholestatique a cependant été notée dans
3 des 9 cas de récidive VHC chez les coinfectés, et une cirrhose s’est développée
dans un tiers des cas, conformément a ce
qui a été présenté par d’autres groupes.
Cela laisse donc envisager le développement plus fréquent de complications
hépatiques graves chez les co-infectés.
L’hépatotoxicité des antirétroviraux n’a
pas été évaluée dans ce travail.
209
Le groupe de Pittsburgh (de M.E. Vera
et al.) a rapporté les résultats de 27 TH
effectuées chez des patients VIH+. De
façon intéressante, un chiffre minimal
de lymphocytes CD4 n’était pas exigé,
dans la mesure où l’hypersplénisme peut
induire une sous-évaluation du chiffre,
et une virémie positive était permise (à
condition qu’une virémie négative antérieure ait été obtenue ou que l’analyse
de la résistance virale permette d’établir
une combinaison antivirale efficace).
Entre 1997 et 2005, 1 485 patients
VIH négatifs, dont 487 VHC+ ont été
transplantés à Pittsburgh. Trente-trois
TH ont été effectuées chez 31 patients
VIH+, dont 27 étaient VHC+ ; ces
31 cas ont formé le groupe d’étude.
Un groupe témoin (2/1) apparié pour
l’âge, la période de transplantation, la
gravité de la maladie hépatique a été
constitué. Tous les patients ont reçu une
immunosuppression faite de tacrolimus
(concentration résiduelle 5-15 ng/ml)
et de corticoïdes (interrompus après
une médiane de 8 mois). Six patients
ont ultérieurement reçu du sirolimus
et 4 autres du MMF. Onze patients ont
présenté un rejet, traité dans un seul cas
par OKT3. Le rejet n’avait pas d’effet
sur la survie des receveurs (p = 0,25).
Le traitement antirétroviral a été repris
après stabilisation de la fonction hépatique (bilirubinémie < 2 mg/dl), similaire au traitement préTH, en évitant
la névirapine, potentiellement hépatotoxique. Un traitement préemptif du
CMV, fondé sur l’antigénémie, a
été utilisé. Le suivi moyen a été de
26,6 ± 5,1 mois, et 13 des 27 patients
(48 %) étaient vivants.
La survie a été réduite dans le groupe
VIH+, par rapport à celle constatée dans
le groupe témoin : la survie cumulée des
patients à 1, 3 et 5 ans a été de 66,7 %,
55,6 % et 33,3 % versus 75,7 %, 71,6 %
et 71,6 %, respectivement, dans le groupe
VIH négatif, à la limite de la significativité (p = 0,07). La survie des greffons
a été plus faible chez les patients VIH+
(63 %, 51,9 % et 31,1 %, respectivement,
à 1, 3 et 5 ans) que chez les témoins
VIH négatifs (68,2 %, 64,1 % et 64,1 %)
[p = 0,21].
Le Courrier de la Transplantation - Volume VII - n o 4 - octobre-novembre-décembre 2007
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Au cours du suivi, une récidive virale C
a été diagnostiquée histologiquement
chez 18 patients après un délai moyen de
5,6 ± 5,5 mois (1,3-21,3 mois). Huit de
ces patients sont décédés, dont 3 d’une
hépatite cholestatique responsable d’une
défaillance hépatique, malgré le traitement antiviral. Un quatrième patient
porteur d’une hépatite cholestatique a
pu être retransplanté. Les facteurs de
risque de surmortalité étaient l’origine
afro-américaine (p = 0,02), le score
MELD supérieur à 20 préTH (p = 0,05),
un défaut de tolérance au traitement
antirétroviral après la TH (p = 0,01)
et une charge virale C supérieure à
30 000 000 UI/ml (p = 0,001). Le risque
de développement d’une cirrhose fibrose
de stades IV à VI selon Ishak ou celui
de décès lié à la récidive virale C était
plus élevé chez les sujets co-infectés
(RR = 2,6, IC95 : 1,06-6,35 ; p = 0,03) que
chez les sujets mono-infectés VHC+.
Quinze patients ont reçu un traitement
antiviral après une médiane de 6 mois
(1,5-34 mois), de durée optimale dans
seulement 7 cas. Dix patients (66 %) ont
eu une réponse biochimique, associée
à un meilleur pronostic (4 décès et une
retransplantation chez les 5 patients sans
réponse). Six patients (40 %) ont eu une
réponse virologique, et 4 une réponse
virologique prolongée.
Une numération des CD4 ≤ 200/mm3,
la présence d’une virémie VIH+
(> 400 copies/ml), et une intolérance au
traitement antirétroviral avant la TH ne
s’accompagnaient pas d’une réduction de
la survie post-TH (p = 0,6, 0,13 et 0,23,
respectivement). Le traitement antirétroviral a été repris après une médiane
de 30 jours (5-121 jours), comprenant
une antiprotéase chez 18 patients, et
des analogues nucléosidiques ou non
nucléosidiques chez les autres. Le traitement a été interrompu secondairement
dans 6 cas, pour aspergillose (1 cas) ou
dysfonction hépatique grave liée au VHC
et/ou au traitement antirétroviral (5 cas).
L’intolérance au traitement était associée
à un pronostic défavorable (mortalité :
100 %). Une virémie positive ou une
numération CD4 de 200/mm3 ou plus
après la TH n’avaient pas d’effet péjoratif sur la survie (p = 0,41 et p = 0,23,
respectivement). Le patient décédé
d’aspergillose invasive avait une numération CD4 de 333/mm3 et une charge
virale VIH négative.
Ce groupe conclut à l’effet délétère de
la co-infection VIH sur la récidive virale C, avec une fibrogenèse plus rapide, et
une tendance à une survie plus réduite.
Une augmentation de la réplication
virale chez les patients VIH+ et un
effet hépatotoxique des médicaments
antirétroviraux expliquent probablement cette donnée. Il est intéressant de
noter que les paramètres VIH, que ce
soit avant ou après la TH, n’avaient pas
de rôle pronostique dans cette série. En
revanche, la charge virale C, l’évolution cholestatique, l’absence de réponse
biochimique ou virologique avaient un
rôle pronostique déterminant.
YC
➤ Castells L, Escartin A, Bilbao I et al. Liver
transplantation in HIV-HCV coinfected patients: a
case-control study. Transplantation 2007;83:354-8.
➤ De Vera ME, Dvorchik I, Torn K et al. Survival
of liver transplant patients coinfected with HIV and
HCV is adversely impacted by recurrent hepatitis C.
Am J Transplant 2006;6:2983-93.
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