Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume V, n° 2, mars-avril 2001
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Les autres tests utilisés confirment ces don-
nées et permettent aussi d’étudier la ré-
serve insulinique. L’insulinopénie est déce-
lée au cours du test d’hyperglycémie par
voie intraveineuse, ce test permettant seul
de déceler les anomalies précoces de l’in-
sulinosécrétion grâce à des mesures répé-
tées quelques minutes après l’injection (24,
25). La sécrétion d’insuline sous arginine
i.v. est également insuffisante (17).
Chez 7 personnes atteintes de mucovisci-
dose, soit diabétiques, soit présentant une
intolérance aux hydrates de carbone, il a
été montré que la concentration sanguine
de proinsuline était, à jeun comme après
charge orale en glucose, plus élevée que
celle de 9 sujets présentant une mucovisci-
dose avec tolérance glucidique normale
(26). Ces derniers ne différaient pas sur ce
point d’un groupe de 14 sujets témoins.
Cela tend à suggérer que certaines des
enzymes de conversion de la proinsuline en
insuline sont déficientes, ou que le pancréas
compense sa sécrétion insuffisante d’insu-
line par la sécrétion de proinsuline (16).
Hémoglobine glyquée
L’ensemble des études portant sur ce sujet
démontre une élévation de l’hémoglobine
glyquée (Hb A1c), qui reflète l’équilibre
glycémique moyen des deux à trois mois
qui précède le dosage, comparée aux
valeurs normales (21). Curieusement, il
n’y a pas de corrélation entre Hb A1c et
HGPO. Cela pourrait indiquer qu’il existe
des phases d’hyperglycémies transitoires,
peut-être liées à des surinfections pulmo-
naires. C
e paramètre, en tout cas, ne semble
pas être prédictif du diabète, avec une sen-
sibilité diagnostique du diabète de 54 %
pour l’Hb A1c (21). On retrouve les conclu-
sions sur l’absence de valeur prédictive de
l’Hb A1c dans la population générale pour
le diabète insulino- ou non insulino-dépen-
dant. Sur cette base, il a été pro
posé de
dépister le diabète par une HGPO prati-
quée tous les ans, à partir de l’âge de dix
ans puisque des glycémies répétées au
hasard sont aussi un piètre prédicteur du
diabète (9, 27).
Autres hormones pancréatiques
Il existe une atteinte de toutes les fonctions
endocrines du pancréas. La sécrétion de
glucagon, après stimulation par l’arginine
i.v., est insuffisante chez les patients pré-
sentant une intolérance au glucose par rap-
port aux sujets sains. Les taux de GIP
(Gastric Inhibitory Peptide) et PP (poly-
peptide pancréatique) sont abaissés à l’état
basal et stimulés (10, 17). D’autres ont
retrouvés des taux de GIP, GLP1 normaux
et ont confirmé l’absence de réponse du
polypeptide pancréatique (28).
Corrélation
entre l’atteinte endocrine
et déficit pancréatique externe
Certains ont suggéré une corrélation entre
la présence du diabète sucré et le génotype
deltaF508 à l’état homozygote (8).
Cependant, d’autres auteurs n’ont pas
confirmé cette liaison du diabète à un
génotype particulier (29, 30). En revanche,
une corrélation entre insuffisance pancréa-
tique externe et atteinte deltaF508 à l’état
homozygote existe (The cystic fibrosis
genotype-phenotype consortium 1993). La
présence de l’insuffisance pancréatique
externe permet d’expliquer l’apparition du
diabète, sans avoir besoin d’impliquer
l’anomalie du canal chlore directement
dans la pathogénie du diabète, ce d’autant
plus que le canal chlore n’est pas exprimé
dans les cellules insulinosécrétrices (31). À
cet égard, l’étude de Moran est la plus
éclairante et jette quelques lumières sur le
plan physiopathologique ; elle mérite
d’être détaillée (17). Les 10 patients
atteints de mucoviscidose, qui n’ont pas de
déficit pancréatique exocrine et pas de dia-
bète, ont une glycémie et un C peptide à
jeun normal, une réponse du C peptide
normale en quantité mais un peu décalée
dans le temps, à la stimulation par le glu-
cose donné par voie orale, et une réponse
normale de l’insulinosécrétion induite par
le glucose intraveineux ou l’arginine
(cependant, 2 patients sur ces 10 sont into-
lérants au glucose). Les 10 patients ayant
un déficit de la fonction exocrine avec des
glycémies à jeun et un C peptide à jeun
normal ont une réponse du C peptide nor-
male en quantité mais décalée dans le
temps, à la stimulation par le glucose
donné par voie orale (8 sur 10 sont intolé-
rants au glucose), et une réponse insuffi-
sante quantitativement de l’insulinosécré-
tion induite par le glucose intraveineux ou
l’arginine. Le profil endocrinien des
patients atteints d’insuffisance pancréa-
tique exocrine et de diabète est unique, il
ne s’agit pas d’une désensibilisation au
glucose comme dans le diabète de type II ;
l’atteinte associée des cellules alpha, qui
explique avec la persistance de cellules bêta
l’absence de cétose, plaide en faveur d’un
syndrome de “réduction insulaire”. Les
données sont aussi en faveur d’une respon-
sabilité du déficit exocrine dans l’atteint
endocrine (17). Cependant, l’atteinte du
“tout ou rien” de la réponse du C peptide
peut suggérer des différences génétiques et
l’on se souvient que la présence de la muta-
tion deltaF508 est liée à la présence d’une
insuffisance pancréatique externe, tandis
que les patients porteurs d’autres mutations
ont une fonction pancréatique externe
presque normale.
Caractéristiques du diabète
Caractéristiques cliniques
On ne trouve pas dans la littérature de don-
nées cliniques décrivant le diabète à sa
découverte ou encore son évolutivité ;
cependant, quelques caractéristiques se
dégagent.
Les signes de présentation sont souvent la
polyurie, la polydipsie et la perte de poids.
Les facteurs précipitants sont l’apport
hypercalorique, en particulier sous forme
d’une nutrition entérale à débit continu, et
la corticothérapie. Ce diabète s’accom-
pagne exceptionnellement de cétonurie
probablement du fait de la carence en glu-
cagon associée (sauf association déjà décri-
te mais très rare, d’une mucoviscidose avec
un diabète de type I, auto-immun). Il est