Les études effectuées chez des patients présentant une insuffi-
sance hépatique (1) n’ont montré aucune différence significa-
tive des paramètres pharmacocinétiques du MPA et du MPAG,
hormis une augmentation de 50 % de la clairance rénale du
MPAG en cas d’insuffisance hépatique sévère, ce phénomène
pouvant être dû à l’induction d’un processus de glucuronida-
tion rénale compensatrice.
L’effet repas a été étudié chez des patients atteints de polyar-
thrite rhumatoïde et recevant 2 g/j de MMF par Bullingham (1),
qui a montré un allongement du Tmax et une diminution de la
Cmax du MPA sans modification de l’ASC lors de la prise
concomitante d’aliments.
Enfin, les interactions médicamenteuses du MMF ne sont pas
décrites en détail, mais résumées dans le tableau I.
SUIVI THÉRAPEUTIQUE PHARMACOLOGIQUE DU MMF
Pourquoi doser le MPA ?
La première raison est d’ordre pharmacocinétique. En effet, les
concentrations de MPA présentent une importante variabilité
intra- et interindividuelle. Bullingham (1) avait rapporté un
facteur de variation de l’ordre de dix pour les ASC du MPA
chez des patients transplantés rénaux ou cardiaques. De plus,
la concentration de la fraction libre, seule efficace, peut être
fortement influencée par la quantité de MPAG inactif présente
dans le sang, ainsi que par la concentration d’urée, les concen-
trations d’albumine et la présence d’autres médicaments. Enfin,
les interactions pharmacocinétiques, présentées plus haut, peu-
vent provoquer des modifications des concentrations de MPA
susceptibles de justifier leur détermination.
La deuxième raison pouvant justifier le suivi thérapeutique
pharmacologique du MMF réside dans la mise en évidence
d’une relation entre les concentrations plasmatiques du MPA
et la survenue de rejet aigu de greffe et/ou d’effets indésirables
du MMF. L’étude pilote montrant la relation entre l’ASC du
MPA et la prévention du rejet aigu a été menée par Takahashi
et al. en 1995 (5). Elle incluait 32 patients japonais greffés
rénaux et montrait l’existence d’une valeur seuil de l’ASC égale
à 40 µg.h/ml au-dessus de laquelle les patients ne présentaient
pas de signes de rejet. Cette étude pilote a ensuite été reprise
en 1998 par Nicholls (4), sur 41 greffés rénaux de type cauca-
sien. Bien qu’il soit clair d’après la figure 3 que les valeurs
basses de l’ASC étaient associées à une plus grande probabi-
lité de rejet, il n’y avait pas de valeur cible de l’ASC du MPA
pouvant être recommandée comme seuil thérapeutique ; il a
néanmoins été possible de préciser que, chez 7 des 14 patients
ayant présenté un rejet, la valeur de l’ASC du MPA était infé-
rieure à 21 µg.h/ml. En outre, les concentrations résiduelles de
MPA n’avaient qu’une faible valeur prédictive de la survenue
de rejet. Afin de confirmer la relation pharmacocinétique-phar-
macodynamique ainsi observée, un essai randomisé a été ini-
tié par Hale et al. (3) chez 156 patients greffés rénaux traités
par MMF, ciclosporine et corticoïdes. Ces patients ont été répar-
tis au hasard en trois groupes selon la valeur cible de l’ASC du
MPA : basse (16,1 µg.h/ml), moyenne (31,2 µg.h/ml), ou éle-
vée (60,6 µg.h/ml) pour des doses moyennes de MMF respec-
tives de 0,90, 2,30 et 4,10 g/j. L’analyse des données a confirmé
l’existence d’une corrélation hautement significative entre
l’ASC du MPA et la survenue des rejets (figure 4). En effet, les
valeurs hautes de l’ASC sont associées à une très faible pro-
babilité de rejet ; une ASC de 15 µg.h/ml a garanti l’absence
de rejet chez uniquement 50 % des patients. La Cmax du MPA
et la dose de MMF n’ont eu qu’une faible valeur prédictive de
la survenue de rejet aigu ; cependant, il existe une relation signi-
ficative entre la survenue de rejet aigu et la concentration plas-
matique résiduelle (T0), mais la variabilité interindividuelle de
ces T0 était trop importante pour que cette relation soit prise
en compte. Depuis, les travaux de Shaw et al. (6) chez des
greffés rénaux traités par MMF, ciclosporine et corticoïdes
ont montré qu’une zone thérapeutique de l’ASC du MPA de
30-60 µg.h/ml ramenait le risque de rejet aigu à moins de 10 %.
D’autres auteurs ont mis en évidence des relations entre les
concentrations résiduelles de MPA et la survenue de rejet aigu
de greffe rénale ou cardiaque. En effet, Krumme et al. (13)
ont mesuré pendant les deux premiers mois post-greffe, chez
48 greffés rénaux traités par ciclosporine, méthylprednisolone
et MMF (2 g/j), la moyenne des T0 de MPA qui était de
La Lettre du Pharmacologue - Volume 16 - n° 1 - janvier-février 2002
7
DOSSIER
Médicament ou classe thérapeutique Effet sur l’ASC du MPA Mécanisme d’action
Tacrolimus
[13] [193]
Augmentation de l’ASC et de la Cmax du MPA Inhibition de la glucuronidation
Ciclosporine
[748]
Diminution de l’ASC du MPA Inhibition du passage du MPAG du foie vers la bile
Antiacides
[26]
Diminution de l’ASC du MPA Diminution de l’absorption du MPA
Métronidazole
[760]
Diminution de l’ASC du MPA et du MPAG Suppression du cycle entérohépatique par inhibition
des bactéries anaérobies intestinales
Ganciclovir i.v.
[647]
Pas d’effet sur l’ASC du MPA
Fer
[759]
Diminution de la Cmax et de l’ASC du MPA Formation de complexes chélatés diminuant l’absorption
gastro-intestinale du MPA
Anti-inflammatoires non stéroïdiens
[756]
Augmentation de la Cmax du MPA Faible inhibition de la glucuronidation du MPA (sauf pour
l’acide niflumique)
Tableau I. Interactions médicamenteuses du MMF.
…/…