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Bitumes
Messages clés
L’essentiel du bitume est extrait du pétrole brut par affinage, et entre dans la composition de
matériaux routiers. C’est un produit complexe composé essentiellement d’hydrocarbones et de
ses dérivés. Le bitume est différent du goudron, qui lui est issu de la distillation de la houille. En octobre 2011, le CIRC a réactualisé sa monographie sur les bitumes et leurs émissions : il a
classé les bitumes oxydés dans le groupe 2A, probablement cancérogène pour l’homme,
et les bitumes durs et les bitumes de distillation dans le groupe 2B, possiblement cancérogène
pour l’homme.
Le bitume et les fumées de bitume ne sont référencés dans aucun des tableaux de maladies
professionnelles.
Qu'est­ce que le bitume ?
Largement présent dans notre environnement, l’essentiel du bitume est extrait du pétrole brut par raffinage,
et entre dans la composition de matériaux routiers.
Le bitume est une matière très visqueuse noire, lorsqu’elle est chauffée, ou solide à la température ambiante.
C’est un produit complexe composé essentiellement d’hydrocarbones et de ses dérivés et peut contenir
divers additifs. Du fait de sa complexité chimique, les scientifiques caractérisent le produit en mesurant les
concentrations des grandes familles génériques que sont les asphaltènes et les maltènes, ces derniers
caractérisables en sous­familles (résines, huiles). Ses propriétés reconnues d'étanchéité et d'adhésivité
permettent de protéger les sols de pollution par « lixiviation ».
L’expression « fumées de bitume » désigne les émissions constituées de molécules d’hydrocarbures à bas
point d’ébullition (phase gazeuse semi­volatile) et de gouttelettes de bitume (phase aérosol). Ces « fumées de
bitume » contiennent entre autres, des hydrocarbures lourds (fumées bleues), de la vapeur d’eau (fumées
blanches), des composés complexes (soufrés, azotés, oxygénés) notamment des Hydrocarbures
Aromatiques Polycycliques (HAP) comme le benzo(a)pyrène (BaP) présent en faibles quantités.
Le BaP est une substance cancérogène avérée (groupe 1 du CIRC). Dans le bitume, le BaP n’est présent qu’à
un taux extrêmement faible de 0,1 à 2,5 mg/kg.
Le bitume est souvent confondu avec le goudron qui est issu de la distillation de la houille. Le goudron est
classé cancérogène, en raison notamment de la présence de BaP en quantité importante (8 400 mg/kg à 12
500 mg/kg), pouvant entrainer des cancers cutanés, du poumon et de la vessie.
Bitume ou fumées de bitume et risques de
cancers : ce que l’on sait
La présence dans le bitume de traces d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) (en bien plus faible
quantité que le goudron), dont certaines molécules sont classées cancérogènes, a soulevé des inquiétudes
concernant les effets potentiels sur la santé des professionnels exposés au bitume ou aux fumées de bitume
(expositions de l’organisme par voie transcutanée et par voie respiratoire). Ceci fait l’objet de nombreux
travaux de recherche depuis une cinquantaine d’années. En effet, plus de 600 études ont été identifiées en
Europe, aux Etats­Unis, au Canada, au Japon, ou en Australie.
Selon les critères de l’Union Européenne le bitume n’est pas classé « cancérogène ». Cette décision a été prise
en 1992, sur la base des études disponibles. De plus, les HAP présents dans le bitume ne sont pas bio­
disponibles, c’est­à­dire qu’ils ne peuvent migrer en dehors du liant à cause de la très forte viscosité du
bitume. Le bitume n’est ni classé R45 (« peut causer le cancer »), ni R40 (« effets cancérogènes suspectés,
preuves insuffisantes ») par les instances de l’UE.
Les études épidémiologiques réalisées jusqu’à présent n’ont pas retrouvé d’association entre les fumées de
bitume et les cancers cutanés et du poumon. La plus importante menée par le Centre International de
Recherche sur le Cancer (CIRC) en 2003 a porté sur une cohorte de 79822 travailleurs européens, dont 35
000 avaient été exposés pendant 20 à 25 ans à des fumées de bitume. Cette première étude a permis
d’établir dès 2003 que les travailleurs exposés aux fumées de bitume étaient dans le même état de santé que
la population en général (Boffetta P, 2003). Toutefois un taux faible de surmortalité par cancer broncho­
pulmonaire (risque relatif (RR) : 1.09 ; IC 95% ; 0.89­1.34), jugée non­significative par certains pays, a
conduit à approfondir l’étude de chaque cas de cancer du poumon identifié. Le CIRC a complété la seconde
phase de son enquête épidémiologique par une étude de cas, visant à déterminer s'il existe un risque de
développer un cancer pour les travailleurs manipulant des matériaux bitumineux. Cette étude n’a montré
aucun lien de causalité entre l'exposition aux fumées de bitume et le cancer du poumon.
Des études d’exposition complémentaires convergent vers les mêmes résultats et montrent que les taux
auxquels sont exposés les ouvriers sont très largement inférieurs aux valeurs des seuils réglementaires ou
recommandés, que ce soit au niveau français et au niveau européen.
L’ensemble de ces études scientifiques ne permet pas d’établir un lien entre l’exposition à des fumées de
bitume et un cancer.
L’exposition aux fumées de bitume peut être responsable d’effets aigus en lien avec une exposition répétée
aux vapeurs et fumées de bitume : brûlures, irritations oculaires et respiratoires, maux de tête,
étourdissements ou des nausées. Ces symptômes disparaissent dès que l’exposition a cessé.
Il existe une valeur limite d’exposition aux fumées de bitume en milieu professionnel , fixée à 5mg/m3 pour
une durée d’exposition de 8 heures/jour.
Evolutions récentes
En décembre 2010 les producteurs de bitume au travers du CONCAWE viennent d'achever l'inventaire des
impacts sur la santé et l'environnement, demandé par le protocole d'enregistrement REACH. Cet inventaire
permet de conclure que le bitume n’est pas classé parmi les produits présentant un risque pour la santé ou
pour l’environnement.
Le bitume et les fumées de bitume ne sont référencés dans aucun des Tableaux listant les Maladies
Professionnelles annexés au Livre IV du Code de la Sécurité sociale pour les salariés relevant du régime
général.
Cependant, le débat d’une reconnaissance des cancers liés à l’exposition au bitume comme maladies
professionnelles a été relancé dans la presse après la condamnation de la société Eurovia, (voir encadré).
En mai 2010, le tribunal des affaires de sécurité sociale (Tass) de Bourg­en­Bresse a, pour la première fois en
France, fait le lien entre le cancer de la peau d’un de ses ouvriers, spécialisé dans l’épandage du bitume,
décédé en 2008 d’un cancer de la peau, et les fumées toxiques du bitume. Le Tass de Bourg­en­Bresse a
reconnu la faute inexcusable de la société Eurovia (groupe Vinci). Les mesures de protection mises en place
par l’employeur vis­à­vis du risque lié à l’exposition au rayonnement solaire, à l’exposition aux fumées de
bitume étaient faibles et constituaient donc une faute inexcusable. Cette décision ne fait pas jurisprudence
car ce tribunal est une juridiction de premier degré, mais la Société fait appel de cette décision, aucune étude
scientifique n’étant parvenue à ce jour à faire le lien entre bitume et cancer.
La cour d'appel de Lyon a reconnu mardi 13 novembre 2012 la société de travaux publics Eurovia coupable
de "faute inexcusable", confirmant ainsi une première en France. Eurovia est condamné à verser quelque
200000 euros de dommages et intérêts à la famille.
Les conditions de travail et d’exposition des personnes qui sont affectées aux travaux routiers se sont
objectivement améliorées au fil des années. Mais d’autres études sont nécessaires en prenant notamment en
compte des paramètres plus pertinents pour objectiver les expositions et évaluer le risque cancérogène du
bitume.
Du 11 au 18 octobre 2011, le groupe des monographies du CIRC a réuni pour un travail de réactualisation
de sa monographie un groupe d’experts sur les bitumes, les fumées de bitume, et certains hydrocarbures
aromatiques polycycliques hétérocycliques (Monographies du CIRC, 2011).
Les conclusions de ces travaux ont été les suivantes :
Les bitumes oxydés et leurs émissions lors des travaux de toitures sont classés dans le groupe 2A « probablement
carcinogène pour l’homme » .
Les bitumes durs (bitumes modifiés aux polymères) et leurs émissions lors des travaux d’asphalte coulé sont classés
dans le groupe 2B « possiblement carcinogène pour l’homme ».
Les bitumes de distillation directe et leurs émissions lors des revêtements routiers sont classés dans le groupe 2B
« possiblement carcinogène pour l’homme ».
En septembre 2013, l’Anses a publié une expertise collective sur les risques sanitaires liés à l’utilisation
professionnelle des produits bitumeux. A cette occasion, des recommandations ont été formulées afin de
diminuer les expositions des employés aux bitumes et à leurs émissions. Il s’agit de mesures de protection
collectives (système d’aspiration, températures de travail, sélection de produits, substitution, etc), individuelles
(équipements de protection individuelle, renouvellement des vêtements, etc), et relatives à l’organisation du
travail (horaires, rotation des postes, etc) (Anses, 2013).
Auteur : Unité Cancer et Environnement
Nos fiches sur ce thème
Classification des substances cancérogènes du CIRC
Evaluation du CIRC: bitumes et fumées de bitumes
Hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP)
Pour aller plus loin
Etudes et publications scientifiques
Anses, 2013. Evaluation des risques sanitaires liés à l'utilisation professionnelle des bitumes
Boffetta P, 2003: cancer mortality among European asphalt workers [...]
CIRC, 2011. Bitumens and bitumen emissions, and some heterocyclic polycyclic aromatic hydrocarbons
CIRC, 2013. Monographie volume 103. Bitumens and bitumen emissions
Communiqué de presse, 2011: les Monographies du CIRC ­ Expositions professionnelles aux bitumes (...
Informations des publics
INRS, 2015 : Fiche d'aide au repérage ­ Pose de revêtements routiers
La prévention des risques des travaux de revêtement routier
Travaux routiers, exposition au goudron, au bitume : les risques pour la santé ont­ils changé ?
Mise à jour le 3 mars 2017
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