Correspondances en Onco-Hématologie - Vol. VIII - n° 3 - Mai-juin 2013
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Prise en charge des lymphoproliférations du VIH
survenue des LH en inhibant le contrôle des cellules
infectées par l’EBV. Le pronostic de ces patients est en
général plus péjoratif que dans la population générale
car il s’agit souvent d’hommes, avec un stade avancé
et une lymphopénie inférieure à 600/mm3. Les autres
facteurs pronostiques retrouvés sont la réponse aux
antirétroviraux et l’obtention d’une rémission complète
à la fin de la chimiothérapie (13).
Cependant, en dépit de l’agressivité de la maladie chez
le patient infecté par le VIH, le pronostic a été amélioré
ces dernières années, grâce à l’optimisation des com-
binaisons antirétrovirales et antitumorales.
Chimiothérapies
ABVD : le standard
Le schéma ABVD (doxorubicine + bléomycine + vin-
blastine + dacarbazine), avant l’ère des thérapies anti-
rétrovirales, montrait un taux de RC de 43 % et une SG
moyenne de 1,5 an avec un risque d’infections oppor-
tunistes de 29 %. En association avec les tri thérapies et
le G-CSF, l’ABVD apporte une amélioration spectaculaire
du taux de RC (87 %) avec un taux de rechute de 11 %
après 6 à 8 cycles (14). La SSE est de 71 % et la survie
globale de 76 %, le taux de mortalité étant de 10 %
seulement. Une analyse rétrospective a étudié le suivi
à long terme des patients atteints de LH-VIH de stade
avancé et traités par ABVD (15). Des taux importants
d’infections opportunistes et de seconds cancers sont
retrouvés, spécialement dans le groupe de patients
avec un taux de CD4 bas et une charge virale élevée.
Ces données soulignent encore l’importance cruciale
du maintien de la réponse virale et immunologique par
les thérapies antirétrovirales pour améliorer la survie
à long terme des patients atteints de LH associé au
VIH. Récemment, le groupe allemand d’étude des lym-
phomes associés au VIH a présenté les résultats d’une
grande étude prospective qui a testé une stratégie
thérapeutique adaptée au risque et au stade (16). Les
patients de stade favorable ont reçu 2 à 4 cycles d’ABVD
suivis de 30 Gy sur les champs d’irradiation. Les patients
de pronostic défavorable ont reçu 4 cycles de BEACOPP
ou 4 cycles d’ABVD + 30 Gy d’irradiation. Six à 8 cycles
de BEACOPP ont été proposés aux patients avec un LH
de stade avancé. Enfin, chez les sujets pour lesquels le
LNH était associé à une infection avancée par le VIH,
le BEACOPP a été remplacé par l’ABVD. Les taux de RC
sont respectivement de 96 %, 100 % et 86 % pour ces
3 groupes. La survie sans progression à 2 ans est de
91,7 % avec un suivi médian de 26 mois. La SG à 2 ans
est de 90,7 %. Ni le score pronostique international
(IPS), ni le compte de CD4 n’ont de valeur pronostique
et les patients présentent des résultats semblables,
indépendamment du stade de la maladie. De plus, ces
résultats sont comparables à ceux des patients VIH–.
Une deuxième étude, publiée par S. Montoto et al. (17),
a comparé des patients, tant VIH+ que VIH–, traités avec
ABVD pendant l’ère des traitements antirétroviraux
hautement actifs. Malgré le biais (étude rétrospective,
44 % des patients VIH– n’ont pas reçu d’ABVD et n’ont
pas été inclus dans l’étude comparativement à 12 % des
patients VIH+) en faveur de la population non infec-
tée par le VIH, il n’y a aucune différence en termes de
résultat clinique entre les 2 groupes. De même, le taux
de CD4 n’a pas d’influence sur la survie, contrairement
au score IPI.
Autres polychimiothérapies (tableau III)
B. Xicoy et al. ont montré que la chimiothérapie par
ABVD dans les formes agressives de LH permettait
d’obtenir des résultats comparables chez ces patients
à ceux obtenus avec des schémas de type BEACOPP,
Stanford V ou VEBEP en termes de RC. Le traitement par
ABVD doit donc être considéré comme le traitement
de référence (14,18-20).
Conclusion
En dépit de leur relative rareté, les lymphomes associés
au VIH doivent être considérés comme des entités à part
entière. Le traitement des patients atteints d’un lymphome
associé au VIH rejoint progressivement celui des patients
VIH–, avec un pronostic qui s’en rapproche pour certains.
Les facteurs pronostiques sont principalement le score IPI
et le taux de CD4, d’où l’importance capitale de la copres-
cription de traitements antirétroviraux adaptés.
■
TableauIII. Comparaison ABVD versus autres polychimiothérapies utilisées dans le traitement des LH associés au VIH.
Auteurs Protocole Rémission complète (%) Survie à 2 ans (%)
B. Xicoy et al. (14) ABVD 87 76
P. Hartmann et al. (18) BEACOPP 100 83
M. Spina et al. (19) Stanford V 81 76
M. Spina et al. (20) VEBEP 76 80
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Références
L’auteur n’a pas précisé
ses éventuels
liens d’intérêts.
Retrouvez
l’intégralité
des références
bibliographiques
sur
www.edimark.fr
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