SOMMAIRE Président : J.-M. CHEVALLIER (Paris) Modérateur : F. PATTOU (Lille) D. NOCCA (Montpellier) 1. Résultats à long terme de l’anneau gastrique R. CAIAZZO 2. Résultats à long terme de la sleeve-gastrectomy D. NOCCA 3. Résultat à long-terme des by-pass gastriques S. MSIKA 4. Les résultats à long terme de la dérivation bilio-pancréatique P. TOPART 5. Les Résultats à long terme de la chirurgie bariatrique: le mode de prise en charge peut-il modifier les résultats ? S. LEDOUX, M. COUPAYE FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique RESULTATS A LONG TERME DE L’ANNEAUX GASTRIQUE R. Caiazzo (Lille) Service de Chirurgie Générale et Endocrinienne CHRU Lille L’obésité est une pandémie qui touche 300 millions de personnes dans le monde. Les deux tiers de la population mondiale vivent dans un pays où le surpoids est responsable de plus de décès que l’insuffisance pondérale. En France, 6,9 millions de personnes ont un indice de masse corporelle supérieur à 30 kg/m2 (estimation OBEPI 2012 (1)). L’obésité est directement responsable de 44 % des cas de diabète, d’un infarctus sur 5 et de 7 à 41 % des cas de cancers. Un enfant sur trois né aujourd’hui développera un diabète de type 2 et selon une dépêche de l’Agence France Presse de Mai 2012 (2), les projections suggèrent que son espérance de vie sera inférieure à celle de ses parents. La prise en charge de l’obésité sévère et de sa principale comorbidité, le diabète de type 2, doit pouvoir, chez des patients sélectionnés, dépasser la seule prise en charge nutritionnelle même pluridisciplinaire. La chirurgie bariatrique a montré son efficacité en accompagnement de la prise en charge globale du patient. Le nombre croissant d’étude prospective de bonne qualité éclaire aujourd’hui sur les résultats à court et moyen terme. Les données à long terme (supérieur à 10 ans) reste peu nombreuses. Epidémiologie Chirurgicale (3) En 2010, les 26 558 interventions bariatriques réalisées en France se répartissaient équitablement entre l’anneau gastrique (AG), la sleeve gastrectomy (SG) et le gastric bypass (GBP). En 2011, la SG a pris nettement l’avantage représentant 43,9 % des procédures. L’AG suit une tendance à la baisse, lente et progressive mais gardant une population de patients qui ne souhaitent « qu’un coup de pouce » et refusent toute technique plus invasive. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Description de la technique Figure 1 : Illustration d’un AG Le principe de l’AG repose sur la confection d’un premier compartiment gastrique de 15 mL aux dépens du fundus (segment supérieur de l’estomac) limité par un cerclage réalisé à l’aide d’un tube de silicone rempli de sérum physiologique ou de produit de contraste. L’anneau étant connecté à un système de cathéter relié à un réservoir accessible par ponction percutanée, il est possible de faire varier la pression qu’il exerce sur la paroi gastrique et ainsi d’ajuster le niveau de restriction alimentaire du patient. L’apparition d’une satiété précoce aide à diminuer les apports alimentaires tout en limitant la sensation de privation. En cas d’anarchie alimentaire, des nausées, des régurgitations ou des douleurs abdominales apparaissent contraignant le patient à s’adapter aux nouvelles règles du jeu alimentaire : quantités modérées, alimentation variée, mastication prolongée des aliments sans privilégier les aliments mixés ou liquides riches en calories (yaourts, boissons sucrées, pâtisseries). L’intervention ne nécessite qu’une brève hospitalisation et la prise en charge ambulatoire est idéale pour les patients accompagnés, dont le domicile est proche du centre hospitalier et dont l’état général le permet. Plusieurs publications ont décrit la mise en place de l’anneau par une incision unique améliorant le résultat cosmétique et la douleur postopératoire. Toutefois, l’abord ombilical n’est possible que chez les patients les moins obèses, l’opération est plus délicate, l’anneau n’est souvent pas fixé et l’insertion du boitier en para ombilical pourrait augmenter le risque septique sans que cela n’ait été démontré à ce jou FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Perte de poids Son efficacité à moyen et long terme commence à être bien évaluée et de nombreuses études semblent maintenant converger vers un résultat de perte d’excès de poids qui atteint entre 40 et 50% à long terme (10-15 ans) chez les patients toujours porteurs de leur anneau(4). En cas d’échec de l’AG, le GBP ou la SG peuvent être réalisés et permettre une perte de poids complémentaire. Après ablation de l’AG, une reprise partielle du poids perdu est la règle. Dans notre expérience, les patients gardent un bénéfice lié à une meilleure gestion de l’alimentation et à une reprise de l’activité physique. Figure 2 : Perte de poids des patients suivis au CHRU de Lille (n=150, taux de suivi à 10 ans = 83 %). En vert : AG en place (perte d’excès de poids : 50 %), en Bleu : Ablation d’AG puis GBP, en noir : Patients ayant bénéficié d’une ablation d’AG sans 2nde manche chirurgicale (Perte d’excès de poids : 33 %). Cas des patients diabétiques Le diabète et notamment sa forme la plus fréquente, le diabète de type 2 (DT2), constitue un enjeu majeur de santé publique. En France, la prévalence du DT2 a augmenté de 5,7% par an depuis 2000 et 3,6% de la population générale était traitée pour diabète en 2005. Nous traitons ici uniquement des patients diabétiques dont l’IMC est ≥ 35 kg/m2 conformément aux recommandations de l’HAS. Il faut toutefois noter que la Food and Drug Administration (Etats Unis) reconnaît l’utilisation de l’AG chez les patients diabétiques à partir d’un IMC de 30kg/m2. Nous avons rapporté notre expérience chez 23 patients diabétiques sévères (HbA1c = 8,3 ± 1,6 % ; IMC = 45,3 ± 6,4 kg/m2) suivis 5 ans et opérés d’un AG (5). La perte d’excès de FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique poids était de 41 % à 5 ans et était associée à une amélioration de tous les paramètres liés à l’insulinorésistance. Néanmoins, si 13 patients sont parvenus à une amélioration significative de leur HbA1c (<7%), la rémission complète du diabète n’a été possible que chez 4 d’entre eux (pas de traitement, HbA1c < 6,5%). Les facteurs prédictifs d’amélioration de l’équilibre glycémique étaient le sexe féminin et la sévérité du DT2 (glycémie à jeun basse, insulinosécrétion, absence de traitement par insuline, durée du diabète courte). Chez les patients présentant un DT2 moins sévère, Dixon et al ont comparé la pose d’AG à une prise en charge médicale idéale chez des patients d’IMC supérieur à 30 kg/m2 (6). Le taux de rémission du DT2 à 2 ans était de 73 % dans le bras chirurgie vs 13 % dans le bras traitement médical. La perte de poids, supérieure après AG (20,0 ± 9,4 % du poids initial vs 1,4 ± 4,9 % [p<0,01]) apparaissait comme le facteur déterminant l’amélioration de l’équilibre glycémique. L’équipe du New York University group a rapporté des résultats concordants et appuyant l’argument d’une amélioration du DT2 après AG, principalement liée à une diminution de l’insulinorésistance par la perte de poids. Mortalité et morbidité L’AG est reconnu pour son faible taux de complication. La mortalité due à l’AG est asymptotiquement nulle, notamment dans les grandes séries. Si le taux de complication périopératoire n’est que de 1 %, le taux de réintervention pour perte de poids insuffisante ou pour complication à distance (migration intragastrique, glissement de l’anneau ou du boitier) obscurcit l’interprétation des résultats de l’AG à moyen et long termes. Carelli et al relatant leur expérience de 2909 patients opérés en 7 ans n’ont observé qu’un taux global de complication de 12,2 % et un taux de réintervention pour perte de poids insuffisante de 0,3 % (7). Mais le suivi médian n’était que de 2 ans et le taux de suivi à 5 ans était de 30 % conduisant à sous-estimer largement le nombre de réinterventions. Alhamdani et al s’appuyant sur 575 patients opérés en 10 ans ont rapporté 20 % de complications avec un suivi médian de 29 mois (8). Ce taux atteignait 50 % pour Mittermair avec un suivi de 6 ans (9). Ces complications ont été responsables de l’ablation de l’anneau chez 60 % des patients selon Himpens grevant ainsi le bilan à long terme de l’AG (10). FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Figure 3 : « Espérance de vie » d’un AG au CHRU de Lille. Environ 5 % des AG initialement posés sont retirés chaque année. Complications tardives Il s’agit notamment du glissement (slipping conduisant à une dilatation gastrique), de la dilatation oesophagienne, de la migration intra-gastrique (MIG) et des dysfonctionnements du boitier ou de la tubulure. Migration intra-gastrique de l’anneau On parle aussi d’érosion gastrique : le dispositif va migrer progressivement à travers la paroi gastrique. La pathogénie de ce phénomène reste mal connue, notamment du fait de sa relative rareté. Toutefois, une méta-analyse récente retrouvait chez 15 771 opérés, 231 érosions soit un taux de 1,46% de survenue (11). Nous pensons que ce taux est largement sous-estimé car il dépend principalement de la qualité et de la durée du suivi des patients. Dans notre expérience il est de 8,3 % à 10 ans en actuariel. Sa présentation volontiers frustre, se limite à une reprise pondérale ou à une perte de la sensation de restriction. Les autres modes de révélation peuvent associer des douleurs abdominales, une intolérance alimentaire et des vomissements. L’infection du boitier, signe classique reste peu fréquent. Le diagnostic peut être fortuit chez des sujets strictement asymptomatiques bénéficiant d’une fibroscopie gastrique systématique. Ce n’est qu’exceptionnellement que le pronostic vital est engagé, avec des tableaux de péritonite ou d’hémorragie digestive. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Figure 4 : A gauche, taux actuariel de migration intragastrique au CHRU de Lille (n= 600, 8,3 % à 10 ans). A droite, vue endoscopique d’un AG migré. Bascule de l’anneau La bascule de l’anneau ou dilatation de poche gastrique souffre d’une définition peu consensuelle ce qui rend difficile la synthèse de la littérature. Dans notre expérience, l’ablation d’AG pour intolérance alimentaire en rapport avec une bascule de l’AG est évaluée à 5 %. Aucune technique chirurgicale n’a démontré son efficacité absolue pour prévenir cette complication y compris la réalisation d’une valve gastrogastrique antérieure. C’est pourquoi certaines équipes, dont celle de Frering et al à Lyon ont pris le parti de ne plus enfouir l’anneau (12). S’appuyant sur la constatation que la fixation de l’anneau est un facteur de difficulté pour toute reprise ultérieure, l’équipe de Frering a étudié (cohorte historique) 3584 patients ayant bénéficié de la pose d’un anneau d’une même marque (MIDBAND®, MID, Limonest, France) dont 1519 non fixés. Le taux de glissement était de 3 % dans le groupe fixé et de 1 % dans le groupe non fixé (p<0,0001, chi²). Ces constatations vont à l’encontre de l’expérience générale ayant amené les centres experts à imposer la fixation antérieure de l’anneau et de plusieurs études randomisées récentes arrêtées précocement en raison d’un taux de glissement trop élevé dans le bras « non fixé ». Une étude multicentrique (ANOSEAN, 700 patients inclus) prospective est en court. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Figure 5 : Transit oesogastroduodénal montrant une bascule de l’anneau, une dilatation de la poche gastrique et la stagnation du produit de contraste. Références 1. OBEPI. Ob pi-Roche 2012. Enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l’obésité. 2012; Available from: http://www.roche.fr/portal/roche-fr/obepi_2012_. 2. AFP. Les Etats-Unis veulent redoubler d'efforts pour combattre l'obésité. 2012; Available from: http://www.lepoint.fr/societe/les-etats-unis-veulent-redoubler-d-efforts-pourcombattre-l-obesite-08-05-2012-1459380_23.php. 3. Johanet, H, Les données du PMSI, in Congrès annuel de la Société Française et Francophone de Chirurgie de l'Obésité 2012: Montpellier. 4. O'Brien, P E, L MacDonald, M Anderson, L Brennan and W A Brown, Long-term outcomes after bariatric surgery: fifteen-year follow-up of adjustable gastric banding and a systematic review of the bariatric surgical literature. Ann Surg 2013; 257:(1): 87-94. 5. Caiazzo, R, L Arnalsteen, M Pigeyreet al, Long-term metabolic outcome and quality of life after laparoscopic adjustable gastric banding in obese patients with type 2 diabetes mellitus or impaired fasting glucose. Br J Surg 2010; 97:(6): 884-91. 6. Dixon, J B, P E O'Brien, J Playfairet al, Adjustable gastric banding and conventional therapy for type 2 diabetes: a randomized controlled trial. JAMA 2008; 299:(3): 316-23. 7. Carelli, A M, H A Youn, M S Kurian, C J Ren and G A Fielding, Safety of the laparoscopic adjustable gastric band: 7-year data from a U.S. center of excellence. Surg Endosc 2010; 24:(8): 1819-23. 8. Alhamdani, A, M Wilson, T Joneset al, Laparoscopic adjustable gastric banding: a 10- year single-centre experience of 575 cases with weight loss following surgery. Obes Surg 2012; 22:(7): 1029-38. 9. Mittermair, R P, F Aigner and S Obermuller, Results and Complications After Swedish Adjustable Gastric Banding in Older Patients. Obes Surg 2008. 10. Himpens, J, G B Cadiere, M Bazi, M Vouche, B Cadiere and G Dapri, Long-term outcomes of laparoscopic adjustable gastric banding. Arch Surg 2011; 146:(7): 802-7. 11. Egberts, K, W A Brown and P E O'Brien, Systematic review of erosion after laparoscopic adjustable gastric banding. Obes Surg 2011; 21:(8): 1272-9. 12. Frering, V and E Fontaumard, Do you need to stitch gastric band ? Study of 3584 patients, in IFSO. 2007: Cancun, Mexico. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique RESULTATS A LONG TERME DE LA TECHNIQUE DE GASTRECTOMIE LONGITUDINALE SOUS LAPAROSCOPIE (SLEEVE GASTRECTOMY) D. NOCCA CHU Montpellier. Centre Spécialisé Obésité Languedoc Roussillon. La gastrectomie longitudinale fut décrite par Marceau et Hess dans le cadre de la réalisation de la technique d’Inversion Duodénale avec dérivation bilio-pancréatique (Duodenal Switch) non pas pour ajouter une partie restrictive à cette procédure basée sur un phénomène majeur de malabsorption alimentaire, mais bien pour diminuer le risque d’ulcères anastomotiques. Cependant, certaines équipes américaines, pour diminuer les complications post-opératoires précoces chez les patients mégaobèses (>60kg/m²), ont proposé de réaliser ces opérations en deux temps. Le premier temps consistant en la réalisation d’une gastrectomie en manchon, le deuxième (6 à 12 mois plus tard), en un LDS ou un LGBP. Les résultats intéressants de la technique de gastrectomie isolée à court et moyen terme, sont à l'origine de la reconnaissance récente de cette opération comme procédure à part entière (HAS 2008) C'est donc l'opération la plus "jeune" ce qui explique que peu d’études à long terme ont été à ce jour publiées. Elle est cependant la technique la plus pratiquée en France en 2012 (19000 cas données PMSI) en raison d'un rapport bénéfice-risque jugé très intéressant par les équipes pluridisciplinaires et par les patients. La LSG est une procédure restrictive qui agit en réduisant la capacité gastrique d'environ 2/3 et de ce fait le volume du bol alimentaire ingéré. Les meilleurs candidats sont donc les patients essentiellement hyperphages. Cependant, la LSG provoque aussi une action hormonale supplémentaire comparativement à la technique de l’anneau par diminution du taux de ghrelin en phase post-opératoire, ainsi qu'une élévation des taux de PYY et GLP1 à l'origine d'effets spectaculaires sur le traitement du diabète de type 2. Efficacité sur perte pondérale: La technique de LSG a énormément évoluée depuis sa description sous laparotomie lors de la réalisation d'un DS. En effet, le manchon gastrique est devenu beaucoup plus étroit depuis la réalisation de LSG isolé pour diminuer le risque de dilatation de l'estomac à long terme. Une dissection postérieure importante du fundus gastrique est devenue incontournable pour réséquer une partie la plus large possible du fundus. Notre équipe pratique la gastrectomie en manchon depuis 2005. L'analyse des résultats à moyen terme a été publiée en 2008 dans Obesity Surgery. L'analyse à 5 ans de notre série, confirme ceux-ci. Entre 2005 et 2008, 136 patients ont bénéficié d'une LSG. La technique avec conservation partielle de l'antre, c'est à dire une section gastrique à environ 6 cm du pylore sur un tube de Faucher de 36F, a été systématiquement réalisée. Depuis 2011, pour augmenter la précision de la résection gastrique, la calibration est effectuée avec un tube FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique type MIDSLEEVE (MIDBAND) dont le ballonnet est systématiquement gonflé à 50 cc et positionné en butée contre le pylore. L'IMC moyen préopératoire était de 47,52 kg/m² . La PEP était de 67,48 % à 5ans (45 patients). Le score de Reinhold était bon ou excellent dans 73,3% des cas. Ces résultats sont confirmés par l'analyse de la littérature récente sur le sujet (Tableau N° 1) Les PEP à long terme varient de 46 à 68%. L'analyse de ces résultats doit bien évidemment souligner les faibles effectifs étudiés à long terme. De plus, lors de la diffusion de la LSG, la majorité des chirurgiens préféraient proposer cette opération pour des patients mégaobèses, pour lesquels la chirurgie bariatrique présente ces résultats les moins bons. D'autres études sont attendues avec impatience pour valider définitivement ces conclusions. La complexité technique de la gastrectomie en manchon est moindre que celle du LGBP. De ce fait, la morbidité de cette procédure est en général faible même si certaines complications décrites dans la littérature peuvent être graves. La mortalité opératoire est évaluée à 0,1% dans notre expérience de 1200 cas (embolie pulmonaire) Cependant, la réalisation de la gastrectomie en manchon sous laparoscopie nécessite une expertise en chirurgie laparoscopique et en chirurgie bariatrique. La fistule sur la ligne d’agrafage (2%) est la complication post-opératoire majeure qui peut être à l’origine d’une reprise opératoire et d’un allongement important du temps d’hospitalisation. Cette complication doit être dépistée très rapidement sur les signes cliniques classiques (tachycardie, fièvre, douleurs abdominales ou épaule gauche, dyspnée) Une ré-exploration chirurgicale est la règle devant tout doute diagnostic. La sténose gastrique gastrique est rare si les règles de prévention techniques sont respectées (mobilisation du tube de calibrage avant chaque agrafage) La morbidité post-opératoire à long terme, et notamment le taux de réintervention sont très faibles comparativement aux autres techniques bariatriques ce qui est un des avantages majeurs de la LSG notamment en cas de perte de vue de patients. Le reflux gastro- oesophagien est la complication principale (15 à 35%) Le traitement par Inhibiteur de la Pompe à Protons et Sucralfate est le plus souvent efficace sur les symptômes des patients qui semblent s’amender avec le temps. Conclusion. La gastrectomie en manchon semble être d’après les premières données de la littérature, une technique efficace à long terme sur la perte pondérale des patients, quelque soit leur IMC préopératoire. Elle est la technique la plus pratiquée en France à l'heure actuelle. La morbidité de cette intervention notamment à long terme est faible comparativement à la technique de l’anneau, de la gastroplastie verticale calibrée ou des court circuits gastrointestinaux. Même si la technique opératoire est moins complexe que celle du court circuit FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique gastrique, quelques points techniques sont importants à respecter pour éviter certaines complications post-opératoires (fistule, sténose gastrique) et surtout permettre une efficacité maximale en termes de perte pondérale stable dans le temps. Bibliographie : 1. Regan JP, Inabnet WB, Gagner M, Pomp A. Early experience with two-stage laparoscopic Roux-en-Y gastric bypass as an alternative in the super-super obese patient. Obes Surg. 2003 déc;13(6):861-4. 2. Basso N, Capoccia D, Rizzello M, Abbatini F, Mariani P, Maglio C, et al. First-phase insulin secretion, insulin sensitivity, ghrelin, GLP-1, and PYY changes 72 h after sleeve gastrectomy in obese diabetic patients: the gastric hypothesis. Surg Endosc. 2011 nov;25(11):3540-50. 3. Langer FB, Reza Hoda MA, Bohdjalian A, Felberbauer FX, Zacherl J, Wenzl E, et al. Sleeve gastrectomy and gastric banding: effects on plasma ghrelin levels. Obes Surg. 2005 août;15(7):1024-9. 4. Nocca D, Krawczykowsky D, Bomans B, Noël P, Picot MC, Blanc PM, et al. A prospective multicenter study of 163 sleeve gastrectomies: results at 1 and 2 years. Obes Surg. 2008 mai;18(5):560-5. 5. Sarela AI, Dexter SPL, O’Kane M, Menon A, McMahon MJ. Long-term follow-up after laparoscopic sleeve gastrectomy: 8–9-year results. Surgery for Obesity and Related Diseases [Internet]. [cité 2012 oct 21]. 6. Eid GM, Brethauer S, Mattar SG, Titchner RL, Gourash W, Schauer PR. Laparoscopic sleeve gastrectomy for super obese patients: forty-eight percent excess weight loss after 6 to 8 years with 93% follow-up. Ann. Surg. 2012 août;256(2):262-5. 7. Himpens J, Dobbeleir J, Peeters G. Long-term results of laparoscopic sleeve gastrectomy for obesity. Ann. Surg. 2010 août;252(2):319-24. 8. D’Hondt M, Vanneste S, Pottel H, Devriendt D, Van Rooy F, Vansteenkiste F. Laparoscopic sleeve gastrectomy as a single-stage procedure for the treatment of morbid obesity and the resulting quality of life, resolution of comorbidities, food tolerance, and 6-year weight loss. Surg Endosc. 2011 août;25(8):2498-504. 9. Bohdjalian A, Langer FB, Shakeri-Leidenmühler S, Gfrerer L, Ludvik B, Zacherl J, et al. Sleeve gastrectomy as sole and definitive bariatric procedure: 5-year results for weight loss and ghrelin. 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MSIKA (Paris) CHU Louis Mourier (APHP- HUPNVS) - Université Paris-Diderot Nous savons peu de chose quant au suivi à long terme après chirurgie bariatrique et en particulier après gastric by-pass, tant sur la perte de poids que sur la réduction des comorbidités et fortiori l’amélioration de la qualité de vie. Les causes principales de cette faible connaissance sont essentiellement liées au défaut de compliance des patients mais aussi au suivi et à ses possibilités. Cette difficulté de pouvoir suivre les patients à long terme se retrouve même dans les plus grandes séries ; ainsi dans la série de la SOS Study 1 publiée en 2004, on voit déjà que le suivi à 10 ans bien que totalement exhaustif sur la population des gastric by-pass ne porte que sur 34 patients, alors trois ans plus tard dans la même revue 2, le nombre de patients étudiés et ayant eu un gastric by-pass étaient passés à 265 et qu’à 10 ans 58 % avaient été revus , 22 % et à 15 ans et 4 %, soi 10 patients; ceci rend compte de la difficulté de pouvoir suivre des grandes cohortes de patients à long terme ; pour autant dans cette même cohorte, il semble que les auteurs aient pris conscience de la faible proportion de patients porteurs d’un gastric by-pass et suivis à 10 ans, puisque lorsque la série a été publiée à 20 ans 3, le pourcentage de suivi à 10 ans avait augmenté à 68 % mais que le taux de suivi à 20 ans restait seulement de 5 %. Le problème du suivi est aussi considérablement lié au nombre de patients opérés, ainsi dans une grande série américaine4 , sur une série très importante de patient plus de 2000 gastric by-pass réalisés sur une longue période, l’auteur avait centré son travail sur les 242 patients opérés entre 1998 et 1999, soit un peu plus de 10 ans de suivi et il avait noté que seul 33 % des patients avaient été suivis à 2 ans et 7 % à 10 ans, de plus 19 % de ces patients suivis l’avaient été par appel téléphonique. Il est donc bien montré dans la littérature que le suivi à long terme est une donnée bien souvent manquante. Pour autant, nous disposons d’un certain nombre de données qui font références et qui gardent une certaine valeur en rapport avec le nombre de patients dans la cohorte et le recul. Ainsi en ce qui concerne la mortalité, la SOS Study2 a montré que sur une population de patients ayant bénéficié d’une chirurgie bariatrique la mortalité à long terme (à plus de 14 ans) était moins importante que sur la population contrôle (non opérée, soumis à un régime) et ce malgré le nombre de patients soumis au suivi. Ainsi le Hazard ratio ajusté était de 0,71 (0,54 – 0,92 ; p < 0,01) pour le groupe chirurgie. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique En ce qui concerne le risque cardiovasculaire, en particulier le risque d’infarctus du myocarde et d’accident vasculaire cérébral, il a bien été montré 5 de nouveau dans SOS Study que le risque d’évènements cardio-vasculaires fatals était significativement diminué dans le groupe chirurgie par rapport au groupe contrôle avec un Hazard Ratio de 0,9 versus 1,7 respectivement ; il en était de même dans le risque d’évènements cardio-vasculaires pour la totalité (évènements fatals et non fatals) et ce sur un suivi de 18 ans. De même, dans cette cohorte6, il a été démontré que la chirurgie était suivie d’un abaissement de la pression artérielle et d’une amélioration de la diurèse à long terme, en particulier à 10 ans et que cette baisse de la tension artérielle était prolongée chez les patients présentant une hypertension artérielle en particulier après gastric by-pass. En ce qui concerne le diabète de type 2 ; il y avait dans la SOStudy7, une diminution significative du diabète de type 2 sur une période de 15 ans chez les sujets ayant eu un gastric by-pass plutôt qu’une intervention restrictive chez qui cependant l’incidence du diabète était abaissée, mais moins significativement qu’après gastric by-pass. Enfin récemment, dans une étude portant sur la cohorte SOS Study 8, il a été montré que l’incidence à long terme de la stéatose hépatique était diminuée dans le groupe chirurgie et que le taux de rémission à long terme de la stéatose hépatique était plus important dans le groupe chirurgie. En ce qui concerne le poids, comme cela a été montré dans la cohorte Suédoise5 sur un recul de 20 ans, il a été montré que la perte de poids le plus importante était celle constatée au cours de la première année, puis on notait une reprise progressive du poids jusqu’à environ 10 ans puis une certaine stabilisation voire une diminution au delà. Il est donc maintenant assez bien démontré qu’après gastric by-pass, la perte de poids se stabilise, mais certains patients reprennent du poids à long terme. Après un gastric by-pass, la reprise moyenne du poids est observée entre 18 et 24 mois et représente environ 10 % du poids perdu durant la première année. 9,10 Nous avons étudié à l’Hôpital Louis Mourier au sein de notre équipe pluridisciplinaire le suivi à long terme, les déterminants de la reprise de poids et les résultats nutritionnels sur une période de 10 ans. Ainsi nous avons étudiés 91 patients opérés pour obésité morbide d’un gastric by-pass entre fin 2002 et début 2004 ; 61 dossiers ont pu être exploités, 19 % étaient perdus de vue et les données étaient colligées au final sur 50 patients. Ainsi à 10 ans sur les patients suivis, l’IMC moyen était passé de 48,6 à 34,1 Kg/m 2, le diabète de type 2 avait diminué de moitié (de 16 à 8 %) avec aucun patient traité à l’Insuline, l’hypertension artérielle avait pratiquement diminuée de moitié (43 % vs 22 %), le syndrome d’apnée du sommeil était passé de 57 à 12 % et il est apparu dans 24 % des cas un dumping syndrome. Il est à noter cependant que le taux d’Albuminémie restait tout à fait similaire entre le préopératoire et à 10 ans, puisque l’albuminémie moyenne était à 37g/l dans les deux cas. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Parmi les complications tardives, nous avions constaté la survenue de 5 occlusions soit 10 % dont un n’avait pas été opéré, la survenue de 7 lithiases vésiculaires soit 14 % et une hypoglycémie tardive. Une patiente avait fait une hyper parathyroïdie secondaire et on note l’apparition de deux cancers. Nous avons voulu étudier aussi à long terme les déterminants de cette reprise de poids (Présentation du Dr Ledoux) et globalement sur une population un peu plus importante (265 patients ayant eu il y a plus de trois ans un gastric by-pass et suivis régulièrement), nous avions constaté que plus la perte de poids se prolongeait moins la reprise était importante et qu’une perte de poids à un an ne garantissait pas une meilleure perte de poids à long terme. Enfin il était noté que les résultats nutritionnels à long terme étaient tout à fait fonction de la compliance, mais que globalement le retentissement nutritionnel du gastric by-pass était très modéré et en tout cas sans carence protidique.. En conclusion, les éléments connus sont les suivants : le poids remonte un peu sur le long terme d’autant moins que la perte de poids s’est prolongée dans le temps, les comorbidités sont franchement améliorées et le restent, la mortalité à distance est franchement améliorée, les carences nutritionnelles sont rares surtout si les patients sont suivis et compliants. Les résultats à long terme du gastric by-pass sont relativement peu connus car le suivi est insuffisant et mériterait d’être approfondi. La compliance des patients est un point crucial, les possibilités de suivi ne sont pas infinies et il faut faire appel au glissement de tâche et à l’éducation thérapeutique. Enfin il est à noter que la qualité de vie à long terme n’a pratiquement pas été étudiée. Références 1. Sjöström L et al. N Engl J Med .2004; 351: 2683-2693. 2. Sjöström L et al. N Engl J Med. 2007;357:741-752. 3. Sjöström L et al. J Internal Med. 2013, 273; 219–234. 4. Higa K et al. Surg Obes Relat Dis. 2011;7:516-25. 5. Sjöström L et al. JAMA 2012 ; 307: 56-65. 6. Peter Hallersund et al. Plos One 2012; 7(11):e49696 7. Carlson LMS et al. N Engl J Med 2012 ; 367:695-704. 8. Burza MA et al. Plos One 2013 ; 8(3): e60495. 9. Magro DO et al. Obes Surg 2008; 18:648-651. 10. Christou NV et al. Ann Surg 2006; 244:734-40. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique LES RESULTATS A LONG TERME DE LA DERIVATION BILIOPANCREATIQUE P. Topart (Angers) Clinique de l’Anjou 87 rue du château d’Orgemont Angers 49044 Bien que les premières publications remontent à la fin des années 70 (1) pour la version « originale » (opération de Scopinaro)et que la pratique de la version dite « avec Switch duodénal » se soit développée 10 ans plus tard (2)(3), la dérivation biliopancréatique occupe toujours une place anecdotique (2,2% ! elle est même en déclin depuis 2003 où elle représentait 6,1%) dans l’arsenal de la chirurgie bariatrique contemporaine (4). Cette chirurgie est pourtant régulièrement évoquée comme un recours possible qu’il s’agisse de l’obésité massive (IMC >50) ou en reprise après une autre chirurgie bariatrique telle que la sleeve gastrectomie qui en dérivée et pour laquelle le court-circuit intestinal constituerait une suite logique. Plusieurs éléments peuvent expliquer une telle entrave à la diffusion à la dérivation bilio-pancréatique (en dehors d’une pratique presque exclusive chez les concepteurs à Gênes et à Québec) : -une morbidité potentiellement plus élevée du fait d’une opération plus longue avec davantage d’anastomoses -des conséquences liées à la malabsorption : impact nutritionnel et fonctionnel digestif Paradoxalement, comme nous le verrons plus loin, la dérivation bilio-pancréatique a été longtemps et demeure l’une des rares techniques à pouvoir justifier de données très complètes et sur de larges populations bien que, et on lui en a fait le reproche, issues d’un (relativement) petit nombre d’équipes. Technique Brièvement, le court-circuit intestinal représente l’élément majeur de la procédure ; la longueur de l’intestin grêle anastomosée à l’estomac ou au moignon duodénal est de 250 cm mesurée à partir de la jonction iléo-caecale. 2 aspects différencient l’opération initiale de dérivation bilio-pancréatique dite « Scopinaro » et la version « avec Switch duodénal » : au niveau gastrique et au niveau de l’anse commune -le Scopinaro fait appel à une gastrectomie sub-totale avec un volume restant entre 300-400 cc -le Switch duodénal intègre une sleeve gastrectomie le plus souvent confectionnée sur une bougie 50-60 Fr avec préservation du pylore et des tous premiers centimètres du duodénum (censés éviter le dumping syndrome, les ulcères anastomotiques) (volume 100-175 cc) FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique -l’anse commune est de 50 cm dans le Scopinaro et de 100 cm dans le Switch duodénal bien que l’on observe dans la littérature une variation entre 50 et 100 cm (Douglas Hess avait indiqué 10% de la longueur totale du grêle et 40% pour l’anse alimentaire, une mesure difficilement réalisable en coelioscopie). Globalement, la modification Switch duodénal fait de la dérivation bilio-pancréatique une opération plus « restrictive » que le Scopinaro. Morbidité-mortalité Une publication québécoise récente (5) indique un taux global de complications de 14,5 et 17% respectivement après procédure coelioscopique (1/3) ou laparotomie dans cette population de 1000 patients IMC moyen 51 opérés entre 2006 et 2010. La mortalité était de 0,1%. En ce qui nous concerne, avec une activité beaucoup plus modeste, le taux global de complication a été de 13% sur les 100 dernières procédures avec 2 complications (transfusion suite à saignement per-opératoire et fièvre inexpliquée) sur les 70 dernières procédures. Aucun décès n’est à déplorer. Il en va de même pour la technique de Scopinaro avec un taux de complications sévères autour de 7% (6). La base de données américaine BOLD fait par contre état de 1,2% de décès post-opératoire sur 1545 patients IMC >50 (7). Perte pondérale Nous n’avons retenu dans cette évaluation que des séries qui rapportent un suivi d’au moins 5 ans en choisissant pour une même équipe, la publication la plus récente. Avec au moins 5 ans de suivi, la perte d’excès de poids (PEP) publiée varie de 63,5% (8) à 74% (9)(10) (tableau 1). Hess, Marceau ont publié des chiffres de 75 et 70% de PEP à 10 ans après switch duodénal (11)(12). La plupart des séries présentée ici peuvent justifier d’un taux de suivi de 90% ou plus à 5 ans. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique IMC initial Nb patients %PEP IMC résiduel 312/1576 Recul (années) 10 Marinari Obes Surg 20061 (13) NP 79 NP Marinari Obes surg 20041 (6) Marceau Soard 20092 (12) Marceau Obes surg 2007² (9) Crea Obes Surg 20113 (10) Pata Surgery 20133 (14) Hess Obes Surg 2005 (11) Anthone Ann Surg 2003 (15) De Luis J Gastrointest Surg 2011 (8) O’Brien Obes surg 2006* (16) Série perso/Soard 2011 (17) NP 46,4/49,5 51 NP 52 50,9 52,8 NP 659 686 1356 540 874 1150 701 65 6 10 7,3 ≥5 12 10 ≥5 4 68±18 60-70 73±19 71-74 NP 75 66 63,5 NP NP 83% <40 NP 31 (médian) NP NP NP NP 50 1278 116 5 ≥5 73 77 NP 30,5 La littérature souligne dans son ensemble la moindre de perte de poids pour des IMC>50 et à fortiori >60 (18-20), ce qui est une notion bien établie pour toute la chirurgie bariatrique. L’équipe de Québec (19) a montré qu’entre 5 et 10 ans, 54% seulement des patients initialement IMC>50 obtiennent un IMC résiduel <35 (bon/excellent selon les critères de Rheinhold) (21). Ce chiffre atteint néanmoins 89% dans une série espagnole plus limitée (70 patients à 5 ans) de patients super-obèses (20). Impact sur les comorbidités La dérivation bilio-pancréatique améliore de façon unanime et très rapidement les comorbidités de l’obésité sévère et semble supérieure lorsque comparée au bypass gastrique (22). La rémission complète du diabète de type 2 est nettement supérieure à 90% (9)(13) et peut concerner tous les patients à 10 ans (23). Dans le cas d’un traitement du diabète de type 2 par l’insuline, 64% des patients opérés peuvent suspendre ce traitement dès la fin de la première année avec persistance du contrôle à 10 ans (10). Le syndrome des apnées du sommeil connaît une évolution similaire (9)(24). Dans environ 80% des cas la tension artérielle peut être normalisée chez des patients antérieurement traités (13)(24). Dans la majorité des cas, l’impact favorable sur les comorbidités est constaté dans la première année suivant la chirurgie. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Effets secondaires Il existe à l’évidence une nette tendance à davantage de perturbations du transit intestinal après dérivation bilio-pancréatique surtout si on compare cette opération au bypass gastrique (25-27). La fréquence des selles est en moyenne de 3 par jour (9) mais elles peuvent être à tendance liquide dans 30% (marceau) à 77% des cas (25), l’opération ayant pour conséquence 10 fois plus d’occurrence de selles molles/diarrhées qu’avant l’opération dans une étude qui retrouve cette tendance également après bypass gastrique (7 fois plus qu’en pré-opératoire) (25). Au final, ce sont les flatulences, signalées par 70% des patients (9)(25) qui altèrent le plus la qualité de vie, notamment en raison du caractère particulièrement nauséabond. Toutefois, les conséquences les plus préoccupantes se situent au niveau nutritionnel. La composante malabsorptive principale de l’opération explique la survenue rapide de carences profondes en vitamines liposolubles mais aussi plus retardées mais toutes aussi fréquentes en zinc et en cuivre (28). Au cours du temps, on observe une tendance à l’hypo-vitaminose D qui peut atteindre deux tiers des patients (29) en partie seulement responsable de la fréquente hyperparathyroïdie secondaire observée chez pratiquement la moitié des patients 7 ans après l’opération (9). Toutefois, la signification exacte de cette évolution reste débattue et pourrait au moins en partie (hyper parathyroïdie avec calcémie et vitamine D normaux) s’intégrer dans un remodelage osseux secondaire et adaptatif à la perte de poids massive (28)(30). Dans notre expérience, nous avons été amenés à faire des ajustements fréquents de la supplémentation vitaminique initiale pour aboutir à une prescription quotidienne moyenne de 3000 mg de calcium avec 7000 IU (170 µg) de vitamine D (y compris éventuellement sous forme injectable mensuelle), 50,000 IU de vitamine A, 40 mg de zinc et 200 mg de fer. Beaucoup plus préoccupante sont les carences protéiques (de 1.7 à 11%)(9)(13)(14) qui peuvent dans certains cas aboutir à des insuffisances hépatiques sévères . Bien que rare, la réintervention s’impose soit sous forme d’allongement de l’anse commune dans 0.7 à 3.7% des cas, soit sous forme de suppression du court-circuit intestinal et donc de la composante malabsorptive dans 0.2 à 0.6% des cas (9)(11)(31). Il semblerait d’après une étude québecoise, que la version avec switch duodénal soit à l’origine de moins de phénomènes de carences et dénutrition par rapport à l’opération de Scopinaro. De toutes façons, il apparaît évident que le suivi de cette opération requiert une supplémentation vitaminique différente de celle du bypass gastrique (32). FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Conclusion La dérivation bilio-pancréatique, quele que soit sa forme, est une opération puissante. Elle confère une perte de poids intense et durable et la littérature est homogène sur une PEP de 70-75% à 5-10 ans même si des IMC très élevés tempèrent les résultats. Le principal frein au développement de cette chirurgie est l’impact majeur sur le plan nutritionnel même si les patients peuvent être d’abord rebutés par les conséquences sur le transit intestinal. En France, la règlementation restreint l’indication à des IMC≥ 50 pour une chirurgie primaire (en cas d’échec d’une précédente chirurgie, la restriction disparaît). Cette attitude semble licite au vu de la pratique mondiale qui tend effectivement à réserver cette chirurgie à la super-obésité. Du fait de résultats satisfaisants plus difficile à atteindre pour IMC ≥ 50, la dérivation bilio-pancréatique devrait sans doute être discutée d’emblée. La diffusion impressionnante de la sleeve gastrectomie peut laisser envisager un retour de la dérivation bilio-pancréatique dans sa version switch duodénal en 2ème temps en cas de perte de poids insuffisante, reprise pondérale plus ou moins associée à des comorbidités. Références 1. Scopinaro N. 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Gracia JA, Martínez M, Elia M et al. Obesity surgery results depending on technique performed: long-term outcome. Obes Surg. 2009;19:432-8. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique 25. Potoczna N, Harfmann S, Steffen R, Briggs R, Bieri N, Horber FF. Bowel habits after bariatric surgery. Obes Surg. 2008;18:1287-96. 26. Laurenius A, Taha O, Maleckas A, Lönroth H, Olbers T. Laparoscopic biliopancreatic diversion/duodenal switch or laparoscopic Roux-en-Y gastric bypass for super-obesity-weight loss versus side effects. Surg Obes Relat Dis. 2010;6:408-14. 27. Søvik TT, Karlsson J, Aasheim ET et al. Gastrointestinal function and eating behavior after gastric bypass and duodenal switch. Surg Obes Relat Dis. 2012 Jun 28 28. Balsa JA, Botella-Carretero JI, Gómez-Martín JM et al. Copper and zinc serum levels after derivative bariatric surgery: differences between Roux-en-Y Gastric bypass and biliopancreatic diversion. Obes Surg. 2011;21:744-50. 29. 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Am J Clin Nutr. 2009;90:15-22 FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique LES RESULTATS A LONG TERME DE LA CHIRURGIE BARIATIQUE : LE MODE DE PRISE EN CHARGE PEUT-IL MODIFIER LES RESULTATS ? S. Ledoux, M. Coupaye (Colombes) Centre de prise en charge de l'obésité Hôpital Louis Mourier (APHP) 92700 Colombes L'efficacité à long terme de la chirurgie bariatrique sur la perte de poids, le bien-être et la santé, est maintenant bien établie (1, 2), tout au moins pour les techniques les plus anciennes, comme le court-circuit gastrique (CCG) qui est l'une des techniques les plus pratiquées dans le monde (3). Cependant, ce type de chirurgie entraine également un certain nombre d'effets secondaires à long terme, incluant essentiellement des troubles digestifs pour les techniques restrictives, comme les vomissements et le reflux gastroœsophagien et pour les techniques malabsorptives, des blocages alimentaires, des épisodes de dumping syndrome, des hypoglycémies réactionnelles tardives et des carences nutritionnelles (4,5). Ces différents inconvénients peuvent être en partie évités par une alimentation adaptée (mastication, fractionnement, limitation des aliments gras et sucrés,...). Une supplémentation polyvitaminique et une surveillance biologique régulière sont également recommandées après la chirurgie (6). Cette chirurgie a également un impact psychologique qui, même s’ il est généralement positif, peut également être négatif, du fait des modifications corporelles et des contraintes alimentaires, comme en témoigne l'augmentation du taux de suicide rapportée après chirurgie bariatrique (2). L'accès à un encadrement psychologique et à la chirurgie réparatrice doit donc être offert aux patients en postopératoire. D'autre part, un certain nombre de patients restent obèses et/ou gardent des comorbidités en postopératoire, dans une proportion pouvant varier de 10 à 60 % en fonction de la comorbidité et du type de chirurgie (1). Les traitements de ces comorbidités, incluant le diabète, l'hypertension, les dyslipidémies, les douleurs rhumatologiques ou les apnées du sommeil, doivent être adaptés après l'intervention. Enfin, si la plupart des patients perdent du poids dans les 2 années qui suivent l'intervention, à long terme, on observe souvent une reprise de poids dont l'amplitude est variable d'un sujet à l'autre (7). Pour ces raisons, il apparait qu'un suivi spécialisé au long cours est indispensable après la chirurgie pour aider les patients à maintenir dans le temps les bénéfices de la chirurgie et en limiter les inconvénients. Cependant, il n'existe actuellement aucun consensus concernant l'organisation du suivi postopératoire (par quel type de professionnels, en groupe ou individuellement, de visu ou par contact à distance, à quelle fréquence) ainsi que sur les FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique conseils diététiques à donner après la chirurgie, d'ou l'hétérogénéité des études. De plus, très peu d'études ont évalué l'impact du suivi sur les bénéfices et les inconvénients de la chirurgie. L'une des raisons est que le nombre de perdus de vue est très important dans la plupart des cohortes chirurgicales, du fait d'une mauvaise compliance des patients, mais probablement aussi en raison du caractère chronophage de ce suivi pour les équipes soignantes. Les facteurs de compliance au suivi ont été très peu étudiés alors que leur caractérisation pourrait guider le choix d'une chirurgie plus ou moins lourde et permettre d'être plus vigilant sur la surveillance postopératoire chez certains patients. Dans une métaanalyse regroupant 8 études (8), il a été observé qu'une distance importante entre le domicile et le centre de suivi, ainsi qu'un poids préopératoire élevé étaient plus fréquemment associés à une rupture de suivi. D'autres études ont également montré que les troubles de personnalité, le sexe masculin et l'âge jeune étaient des facteurs de mauvaise compliance (7, 8). Les facteurs de maintien de perte de poids dans les cohortes de prise en charge non chirurgicales de l'obésité sont bien établis, incluant l'assiduité au suivi diététique et la pratique d'une activité physique régulière. Cependant, ces facteurs ont été peu étudiés dans les cohortes chirurgicales. La reprise de poids après chirurgie bariatrique survient chez environ 50 % des patients et varie de 10 à 25 % à 10 ans selon les études (9,10), en sachant que le nombre élevé de perdus de vue entraine probablement une sous-estimation des chiffres publiés. Elle peut être due à un problème mécanique (bien que la relation avec la taille de l'estomac résiduel ou la largeur de l'anastomose gastro-jéjunale dans le cas du CCG ne soit pas très claire) ou à des facteurs intrinsèques comme l'IMC initial, ou pourrait s'expliquer par une adaptation hypothétique, de la muqueuse intestinale ou des peptides digestifs relayant la satiété (10). Cependant, elle, résulte plus souvent d'une alimentation inadaptée après chirurgie (en raison de la réapparition de troubles du comportement alimentaire, des désordres gastro-intestinaux ou d'une dépression) voire d'une activité physique trop peu importante (7). Les difficultés sociales influencent également la perte de poids à long terme, ainsi que le suivi puisque 60% des patients en échec de la chirurgie (avec une perte d'excès de poids inférieure à 50 %) sont en rupture de suivi (9). Nous avons personnellement observé que l'assiduité aux consultations et l'existence de grignotages influençaient la reprise de poids à long terme après CCG. Une méta-analyse récente portant sur 5 études randomisées et 10 études de cohorte à montré que les interventions visant à modifier le mode de vie avaient un impact positif sur la perte de poids postopératoire, mais les conclusions étaient limitées par le faible nombre d'études et leur hétérogénéité. L'existence d'un suivi postopératoire pourrait également améliorer l'état psychologique des patients (7). Nous n'avons pas observé de lien entre la compliance au suivi et la persistance de comorbidités. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Peu d'études ont évalué de façon prospective l'incidence des complications nutritionnelles après chirurgie bariatrique et très peu de données prospectives sont disponibles après 2 ans de suivi postopératoire (4, 5). Les suppléments polyvitaminiques du commerce sont la plupart du temps insuffisants pour corriger les carences après chirurgie malabsorptive et des compléments spécifiques doivent être introduits, ajustés en fonction de la surveillance biologique. De plus, il a été précédemment montré que l'adhésion à la supplémentation polyvitaminique est mauvaise à long terme après la chirurgie bariatrique (5). A notre connaissance, aucune étude n'a évalué l'impact du suivi sur les carences nutritionnelles. Nous avons précédemment montré que les patients ayant une mauvaise compliance au traitement polyvitaminique avaient plus de carences nutritionnelles à un an de la chirurgie que les patients compliants. Nous avons réalisé une étude à plus long terme, dont l'objectif était de voir si l'adhésion à une prise en charge nutritionnelle systématisée après CCG influençait la survenue des déficits nutritionnels après chirurgie. Nous avons étudié 144 sujets consécutifs à partir de notre base de données prospective (90% de femmes, IMC initial: 48 ± 15 kg / m², âge: 43 ± 10 ans) qui avaient bénéficié d'un CCG plus de 3 ans auparavant. Nous avons identifié un groupe de 66 sujets compliants, qui sont régulièrement venus aux visites médicales annuelles, et un groupe de 32 sujets non compliants qui ont dû être convoqués car ils n'avaient assisté à aucune visite depuis plus de 2 ans. Les sujets non compliants avaient significativement plus de carences nutritionnelles que les patients compliants (en moyenne 4,2 ± 1,9 vs 2,9 ± 2,0 paramètres carencés par patient, p <0,01) et le nombre de déficits par patient était corrélé avec le délai de la dernière visite (r = 0,285, p <0,01). Nous avons également observé que l'âge jeune, qui est un facteur connu de moins bonne compliance, la présence de grignotages et l'existence d'un IMC résiduel plus élevé, témoignant d'une moindre adhérence aux conseils diététiques, influençaient négativement le statut nutritionnel. Ces résultats ont donc montré qu'un suivi au long cours est nécessaire pour maintenir un état nutritionnel satisfaisant après CCG, notamment pour ajuster la supplémentation en fonction de la surveillance pour les déficits qui ne sont pas corrigés par les multivitamines, comme les carences en vitamine B12, D, fer, ... En conclusion, très peu d'études sont disponibles pour mesurer l'impact du suivi médical sur les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique. Des études sont nécessaires pour préciser l'influence du mode de suivi et de la compliance des patients sur la perte de poids, l'amélioration des comorbidités, les complications nutritionnelles, digestives et psychologiques de la chirurgie, ainsi que la qualité de vie postopératoire. Il serait également intéressant de mieux préciser les facteurs prédictifs de compliance au suivi postopératoire et l'influence de la préparation préopératoire sur le devenir des patients après la chirurgie, afin d'en améliorer le rapport bénéfice-risque à long terme. FCC 6 – Les résultats à long terme de la chirurgie bariatrique Références 1. Buchwald H, Avidor Y, Braunwald E, et al. Bariatric surgery: a systematic review and meta-analysis. JAMA 2004; 292(14):1724-37. 2. Sjostrom L, Narbro K, Sjostrom CD, et al. 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