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La Lettre du Cancérologue - Vol. XVII - n° 1-2 - janvier-février 2008
Cancer de la prostate
Prostate cancer
P. Beuzeboc*
* Département d’oncologie médicale, Institut Curie, Paris.
U
ne revue thématique consacrée au cancer de la pros-
tate a fait l’objet d’un numéro spécial du Bulletin du
cancer (1).
Le point y était fait sur la radiothérapie, les traitements adjuvants,
les facteurs pronostiques, les formes localisées à haut risque, la
chimiothérapie, les aspects moléculaires, les traitements ciblés,
les vaccinations, le traitement des formes métastatiques du sujet
âgé, les tumeurs rares.
Biologie
La mise en évidence cente (2) de gènes de fusion dans une
majorité de cancers de la prostate représente une véritable révo-
lution dans la connaissance biologique de ces tumeurs. Plus
d’une dizaine d’articles publiés dans des revues prestigieuses
témoignent de l’importance de cette découverte (3-11).
Ces gènes de fusion impliquent la région 5’ non codante de
TMPRSS2 (transmembrane protease serine 2) [21q22.3], un
gène régulé par les androgènes, et d’un membre de la famille
du facteur de transcription ETS, qui est soit ERG (21q22.2), soit
ETV1 (7p21.2), soit ETV4 (17q21).
En Amérique du Nord, en effet, 70 % des cancers de la prostate
présentent des gènes de fusion :
TEMPRSS2-ERG dans 50 % à 70 % des cas, dont 50 % à 60 %
avec une létion et 40 % à 50 % sans létion. Il existe environ
15 variants de ce type de gène de fusion ;
TEMPRSS2-ETV1 dans environ 5 % des cas ;
TEMPRSS2-ETV4 dans environ 1 % des cas ;
avec dautres membres de la famille ETS dans les autres cas.
La famille ETS est une des plus importantes familles de régu-
lateurs transcriptionnels. L’activation d’ERG par la fusion avec
TMPRSS2 pourrait conduire à une reprogrammation épigé-
nétique, à une signalisation de WNT, et à une downregulation
des voies de l’apoptose…
Les différentes isoformes des gènes de fusion et leur niveau
d’expression pourraient également affecter la progression
tumorale.
RÉSUMÉ
La description récente de la fusion récurrente du gène
TMPRSS2, régulé par les androgènes, et de ceux de ERG ou
ETV1, facteurs de transcription de la famille ETS, dans une
majorité des cancers de la prostate représente, pour la biologie
et la carcinogenèse de ces tumeurs, un nouveau paradigme,
et devrait avoir, dans les années qui viennent, des implications
dans le diagnostic, le pronostic et le traitement. Les résultats
de l’essai EORTC 22863 conrment que trois ans reste la durée
standard d’hormonothérapie des tumeurs avancées traitées
par radiothérapie. Dans les formes hormonorésistantes, les
données encourageantes d’études de phase II randomisées,
avec des traitements ciblés comme le calcitriol à fortes doses,
le dénosumab (anticorps anti-RANKL), le ZD 4054 (un antago-
niste spécique du récepteur 1 de l’endothéline A), devront
être validées par de larges études de phase III.
Mots-clés : Cancer de la prostate Biologie – Radiothérapie –
Chimiothérapie – Traitements ciblés.
SUMMARY
The recent description of recurrent fusion of the androgen-
regulated TMPRSS2 gene to the ETS transcription factors
ERG or ETV1 in the majority of prostate cancers represents
a new paradigm in the biology and carcinogenesis of these
tumors and should soon have implications in the mole-
cular diagnosis, the prognostic and the treatment. The
results of the EORTC 22863 trial conrm that a 3-year adju-
vant hormonotherapy remains the standard treatment
of locally advanced tumors treated with radiotherapy. In
hormone-refractory prostate cancers, preliminary data
of phase II randomized trials with targeted treatments
such as high-dose calcitriol, denosumab (anti-RANKL
antibody), ZD 4054 (specic endothelin A receptor anta-
gonist) are encouraging and must be validated by large
phase III studies.
Keywords: Prostate cancer – Biology Radiotherapy
Chemotherapy – Targeted treatments.
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S.A. Tomlins et al. (12) viennent de présenter dans Nature quatre
autres différentes classes de réarrangements chromosomiques
créant, dans les cancers de la prostate, des gènes de fusion ETS
autres que les gènes TMPRSS2-ERG.
PCA3 urinaire et diagnostic précoce
De nombreux groupes s’intéressent à la recherche de marqueurs
urinaires. Le laboratoire de W. Isaacs a le premier identifié la
présence d’ARN non codant (DD-3) comme marqueur dans les
urines du cancer de la prostate. Le test actuellement appliqué
utilise un ratio de niveau d’ARNm PCA3/DD-3 sur le taux
d’ARNm de PSA.
L. Marks et al. (13) se sont intéressés à ce marqueur prostate
cancer gene 3 (PCA3) dans les urines pour la détection du cancer
de la prostate chez des patients dont les biopsies étaient néga-
tives, dans une étude portant sur 233 patients présentant un
PSA 2,5 ng/ml et au moins une série de biopsies négatives.
Les urines étaient collectées après toucher rectal (3 “massages”
par lobe), et les niveaux d’ARNm de PCA3 étaient quantifiés
selon une thode d’amplification générant un score PCA3.
Soixante cancers ont été retrouvés sur des biopsies répées
chez 226 patients (27 %).
En utilisant un cut off de 35 pour le score PCA3, la sensibilité
était de 58 % et la spécificide 72 %. Pour un score inférieur
à 5, il y avait uniquement 12 % de cancers alors que, pour un
score supérieur à 100, il y en avait 50 %.
Biomarqueurs diagnostiques sériques émergents :
EPCA-2, isoformes de PSA, autoanticorps
Les deux principales limites de lantine spécifique de la prostate
(PSA) tiennent à son absence de spécificité et à son inaptitude à
distinguer les formes agressives des formes ne menaçant pas le
pronostic vital, ce qui justifie la recherche et le développement
de nouveaux marqueurs diagnostiques. À côté des isoformes du
PSA, du rapport PSA libre sur PSA total, des profils d’autoanti-
corps récemment présentés (14), R. Getzenberg (15) a surtout
mis en exergue le développement d’immuno-essais pour détecter
dans le sérum EPCA-2 une protéine de la matrice nucléaire
associée au cancer de la prostate (trois régions différentes fixant
des anticorps).
Dans une étude portant sur plus de 400 patients, cette EPCA-2
a été retrouvée dans le sérum des patients atteints dun cancer
de la prostate, excepté chez les survivants sans récidive, mais
non en cas d’hypertrophie bénigne de la prostate, en cas dautres
cancers ou de pathologies bénignes, avec une sensibilité de 94 %
et une spécificité de 97 %.
Des taux élevés peuvent aussi être détectés en cas de taux
normaux de PSA et pourraient aider à distinguer les tumeurs
confinées à la prostate des autres tumeurs.
Des études sont en cours concernant les dosages plasmatiques,
la cinétique, la vélocité, le temps de doublement, la relation avec
l’agressivité des cancers de la prostate, notamment une étude
portant sur des tumeurs cotées 8-10 sur l’indice de Gleason et
une étude séparée des tumeurs Gleason 7 progressives et non
progressives.
RADIOTHÉRAPIE DE SAUVETAGE
APRÈS PROSTATECTOMIE
A.J. Stephenson et al. (16) ont rapporté un modèle prédictif par
nomogramme de la probabilité de progression après radiothé-
rapie de sauvetage à partir de lanalyse multivariée de Cox d’une
cohorte multi-institutionnelle de 1 540 patients. La probabilité
de survie sans progression (SSP) était de 32 % (IC95 : 28-35).
Les variables pronostiques significatives retrouvées dans cette
étude étaient : le taux de PSA avant radiothérapie (p < 0,001), le
grade de Gleason avant prostatectomie (p < 0,001), le temps de
doublement (p < 0,001), l’hormonothérapie suppressive avant
ou pendant la radiothérapie (p < 0,001), latteinte ganglionnaire
(p = 0,019).
HORMONOTHÉRAPIE
Durée de l’hormonothérapie adjuvante après
radiothérapie dans les tumeurs localement avancées :
étude EORTC comparant 6 mois à 3 ans
de déprivation hormonale
Lessai EORTC 22863, présenté par M. Bolla (17), comparant une
hormonothérapie de 6 mois à une hormonothérapie de 3 ans
en association à une radiothérapie (70 Gy) dans les tumeurs de
la prostate localement avancées, a montré clairement un avan-
tage en termes de survie globale alors que l’étude était conçue
pour tester seulement une non-infériorité. Neuf cent soixante-
dix patients ont été randomisés. Les dones permettent de
conclure que cette non-infériorité ne peut être confirmée. Avec
un suivi médian de 5,2 ans dans le bras 3 ans, la médiane de
survie globale est en effet de 85,3 % (IC98,2 : 80,5-89,0) versus
80,6 % (IC98,2 : 75,4-84,8).
Il s’agit de la première étude comparative relative à la durée de
l’hormonotrapie qui se révèle positive en termes de survie. Ces
sultats confirment la durée dhormonothérapie de 3 ans comme
le standard thérapeutique. En complément, il est à noter qu’il
ny a pas de différence en termes de pathologie cardiovasculaire
ni, assez paradoxalement, en termes de qualité de vie.
Traitement hormonal par blocage androgénique
complet intermittent versus continu
dans les cancers TxNxM1 ou TxN1-3M0
Lidée du traitement intermittent nest pas nouvelle, les premres
données remontant à 1986 (18). Le critère de jugement prin-
cipal de cette étude allemande de phase III (19) était le temps
jusqu’à progression (TTP), les critères de jugement secondaires
étant la survie globale, la qualité de vie et la tolérance. Le traite-
ment était interrompu dans le bras intermittent quand le PSA
était inférieur à 4 ng/ml, et repris quand il se situait au-delà de
10 ng/ml. Sur les 478 patients soumis à un screening, 335 ont
été randomisés.
Avec un suivi médian de 50,5 mois, le TTP en intention de trai-
tement (ITT) est de 16,6 mois pour le traitement intermittent
versus 11,5 mois pour le traitement continu (p = 0,17). Il ny a pas
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de différence dans les sous-groupes, que ce soit celui des stades D2
ou celui des tumeurs avec un PSA de base détectable ou non. Les
courbes de survie globale paraissent superposables (p = 0,7).
CHIMIOTHÉRAPIE ADJUVANTE
APRÈS PROSTATECTOMIE
A. Kibel et al. (17) ont rapporté les premières données de faisa-
bilité d’une chimiothérapie adjuvante par 6 cycles de docétaxel
hebdomadaire débutée 4 à 12 semaines après prostatectomie
totale chez 77 patients avec une tumeur classée à haut risque.
La tolérance a été acceptable. Notons que, avec un suivi médian
de 29,2 mois, 46 des 76 patients évaluables ont progressé.
CHIMIOTHÉRAPIE DE PREMIÈRE LIGNE
TAX 327 : survie en fonction de la réponse biologique sur
le PSA
D. Berthold et al. (21) ont rapporté les résultats actualisés de
l’étude TAX 327, confirmant que le bénéfice en termes de survie
globale se maintenait avec le temps (gain en médiane de survie
globale de 3 mois).
Le but de létude rapportée par A. Amstrong (22) était de valider
la baisse du PSA comme un surrogate marker de survie, comme
cela avait été publié en 2006 par D.P. Petrylak dans le Journal of
the National Cancer Institute à propos de létude du SWOG 99-
16 comparant l’association docétaxel/phosphate d’estramustine
à la combinaison mitoxantrone/prednisone. Il avait été montré
que le critère principal de survie était la diminution d’au moins
30 % du PSA à 3 mois.
Dans létude TAX 327, il a été retrouvé que la diminution 30 %
du PSA à 3 mois était un critère prédictif de survie, même si la
réduction du PSA ou une diminution de la douleur étaient des
facteurs pronostiques indépendants. Ces données sont impor-
tantes pour déterminer l’intérêt de continuer à administrer un
traitement à un patient qui en bénéficiera et, a contrario, de
l’arrêter précocement chez un autre.
Le temps de doublement avant chimiothérapie est aussi
un bon facteur prédictif de la survie des patients présentant
un cancer hormonorésistant, comme la démontré létude
rétrospective française conduite par S. Oudard
(23)
Étude de phase II randomisée comparant docétaxel
hebdomadaire et prednisolone versus prednisolone seule
Cette étude norvégienne (24), qui a été interrompue après linclu-
sion de 109 patients (quand l’AMM a été donnée au docétaxel), a
l’intérêt de navoir pas permis de croisement dans le bras predni-
solone et d’avoir testé le docétaxel selon un scma hebdomadaire
(5 semaines sur 6). Elle a montré un fice très significatif non
seulement en termes de SSP : 11 mois (IC
95
: 5,8-16,2) versus
4 mois (IC95 : 2,4-5,6), mais aussi en termes de survie globale :
27 mois (IC95 : 19,8-34,1) versus 18 mois (IC95 : 15,2-20,8).
Étude de phase II randomisée comparant docétaxel
(70 mg/m2/21 j) + estramustine (280 mg x 2, 5 j) versus docé-
taxel seul (75 mg/m2/21 j).
Cette étude multicentrique française rapportée par J.C. Eymard
(25) a inclus 92 patients. Les taux de réponse biologique (68 %
versus 30 %) et la médiane de SSP (5,7 mois versus 2,9 mois)
étaient meilleurs dans le bras estramustine.
Méta-analyse des données individuelles des études
randomisées portant sur laddition destramustine à une
chimiothérapie par taxane, épothilone ou vinca-alcaloïde
(605 patients)
Cette méta-analyse a montré un bénéfice significatif en termes
de survie globale (hazard-ratio [HR] : 0,77 ; IC
95
: 0,63-0,93 ;
p = 0,008). Laugmentation du taux de survivants à un an apportée
par l’association d’estramustine a été estie à 9,5 % (26). Le
TTP du PSA était significativement plus long (HR = 0,74 ; IC95 :
0,58-0,94 ; p = 0,01), mais le nombre de complications throm-
boemboliques était aussi plus élevé (12/271 versus 1/275).
Étude ASCENT (27) de phase II randomisée en double
aveugle comparant docétaxel + calcitriol à fortes doses
(DN-101) à docétaxel + placebo
Le docétaxel était délivselon un schéma hebdomadaire de
36 mg/m2 3 semaines sur 4. Il était combiné avec le DN-101 à
la dose de 45 µg ou avec un placebo pris la veille du docétaxel.
Deux cent cinquante patients ont été inclus. Alors que la diffé-
rence en termes de taux de réponse n’étaient pas significative
(63 % avec le DN-101 versus 52 %) [p = 0,07], il a été constaté une
amélioration en termes de survie globale (non atteinte, estimée
à 24,5 mois versus 16,4 mois [HR = 0,67 ; p = 0,04], ce que devra
confirmer l’étude de phase III en cours.
Addition au docétaxel hebdomadaire du diéthylstilbestrol
Laddition au docétaxel de 1 mg/j de diéthylstilbestrol et de 5 mg
la veille de l’administration de docétaxel a permis dobtenir, dans
une étude de phase II (28), un taux de réponse biologique de 69 %
(20 patients/29) [IC95 : 49-85], avec un TTP de 6 mois (3-19 mois).
Six patients ont psenté une complication thromboembolique.
Études de phase III en cours
Des essais cliniques randomisés de phase III sont actuellement
ouverts et prévoient l’inclusion de plus de 4 000 patients. Ils
visent à comparer le schéma actuel de référence représenpar
docétaxel + prednisone à de nouvelles combinaisons, dune part,
ou à de nouvelles approches, comme les thérapies vaccinales,
d’autre part :
l’étude CALGB 90401 (1 020 patients sur 3 ans) évalue lapport
du bévacizumab, anticorps monoclonal anti-VEGF ;
l’étude SWOG 0421, qui randomise l’addition de l’atrasen-
tan, un antagoniste sélectif de lendothéline A, doit inclure
930 patients sur 4 ans ;
l’étude ASCENT-2, qui évalue l’effet du calcitriol, molécule
ciblant le récepteur nucléaire de la vitamine D, en combinaison
avec le docétaxel (900 patients prévus) ;
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enfin, les deux études de thérapies vaccinales, VITAL-1
et VITAL-2, évaluant la préparation vaccinale GVAX
®
(Cell
Genesys, San Francisco), qui utilise des cellules allogéniques
issues de deux lignées tumorales prostatiques transfectées par
le gène du GM-CSF puis irradiées, pour empêcher leur division
cellulaire ultérieure. La première étude, VITAL-1 ou G-0029,
prévoit l’inclusion de 600 patients métastatiques hormonoré-
sistants asymptomatiques et compare le vaccin intradermique
GVAX
®
à la chimiothérapie de référence, dotaxel + pred-
nisone. Lessai est conçu pour mettre en évidence une aug-
mentation d’au moins 33 % de la durée de survie. La deuxième
étude, VITAL-2 ou G-0034, vise à inclure 600 patients métas-
tatiques hormonorésistants mais symptomatiques pour évaluer
l’apport de la vaccination à la chimiothérapie de référence par
une randomisation docétaxel/prednisone ± GVAX
®
. Lobjectif
est là encore la mise en évidence d’une augmentation de la
survie d’au moins 33 %.
CHIMIOTHÉRAPIE DE DEUXIÈME LIGNE
Le satraplatine a montré un avantage signicatif
en termes de survie sans progression en deuxième
ligne de chimiothérapie dans les cancers de la prostate
métastatiques hormonorésistants
Aucun traitement nest actuellement référencé en deuxième
ligne du cancer de la prostate métastatique hormonorésistant.
Létude SPARC (29) a inclus 950 patients préalablement traités
par une ligne de chimiothérapie (docétaxel pour la moitié
d’entre eux), randomisés (2:1) entre une chimiothérapie orale
par satraplatine (80 mg/m2 x 5 j toutes les 5 semaines) ou un
placebo, associés dans les deux bras à une prise biquotidienne
de prednisone. Plus de 70 % des patients étaient âgés de plus de
65 ans, et plus d’un tiers d’entre eux présentaient des douleurs
vères.
Il a été retrouvé en ITT une amélioration de la SSP de 42 %
(HR = 0,58, IC95 : 0,50-0,67), avec une diane passant de
6 semaines à 16 semaines. Le satraplatine augmente aussi le taux
de réponse sur les douleurs (24,2 % versus 13,8 %) [p = 0,005], le
taux de réponse antitumorale (6,5 % versus 0,6 %) [p = 0,001] et
le taux de réponse biologique sur le PSA (25,4 % versus 12,4 %)
[p < 0,001].
Pour disposer des données définitives de survie globale, il est
nécessaire de prolonger le suivi. Le traitement s’est révélé extrê-
menent bien toléré, avec seulement 2,5 % darrêt de traitement
dans le bras satraplatine (0,6 % dans le bras placebo). Le pour-
centage de neutropénies de grade 3/4 a été de 21,1 %.
Chimiothérapie intermittente par docétaxel
T.M. Beer et al. (30) ont pu montrer que 45,5 % des patients inclus
dans l’étude ASCENT et qui reprenaient du docétaxel après un
intervalle libre médian de 18 semaines pouvaient de nouveau
présenter une réponse biologique (baisse du PSA 50 %).
Les données rétrospectives de l’étude RETAX menée en France
vont dans le même sens.
Étude de phase II randomisée comparant l’ixabépilone
ou la mitoxantrone à la prednisone.
Des résultats aussi modestes pour l’un que pour l’autre
Cette étude (31) a inclus 82 patients randomisés entre ixabépilone
(35 mg/m2) ou mitoxantrone (14 mg/m2) toutes les 3 semaines
en association avec de la prednisone (10 mg/j). Les taux de
réponse biologique ont été respectivement de 17 % et 20 %, les
médianes de durée de traitement de 2,2 mois et 2,3 mois et les
médianes de survie globale de 10,4 mois et 9,8 mois.
FORMES NEUROENDOCRINES
Carcinomes à petites cellules
Une revue générale de ces formes, qui représentent, lors de la
présentation initiale, moins de 2 % des carcinomes prostatiques,
a été publiée dans Seminars in Oncology (32). Ces tumeurs sont
très agressives, avec une médiane de survie de 7 mois. Elles se
présentent souvent associées à un adénocarcinome ; elles sont
caractérisées par une hormonorésistance, des lésions osseuses
lytiques, une progression rapide, des métastases viscérales, une
tumeur locale souvent volumineuse, l’absence d’élévation du
PSA (ou un taux peu élevé), et, en revanche, par des taux élevés
d’énolase neurone-spécifique (NSE) ou de chromogranine A,
mais aussi souvent d’antigène carcino-embryonnaire (ACE),
de CA 19,9, de corticotrophine (ACTH), de calcitonine, de
parathormone (PTH)… Pour les rares formes localisées, la place
de la chirurgie nest pas définie, mais un traitement adjuvant
par radiothérapie et chimiothérapie est recommandé. Dans
le cas de tumeurs mixtes, une hormonothérapie est générale-
ment utilisée. Malgré un traitement combinant radiothérapie
et chimiothérapie, le pronostic est très sombre, avec très peu
de survivants à long terme.
Chimiothérapie des formes neuro-endocrines
S. Culine et al. (33) ont rapporles résultats d’une étude de
phase II d’association de cisplatine (75 mg/m2) et de docétaxel
(75 mg/m
2
) tous les 21 jours pour un maximum de 6 cycles.
Une réponse biologique sur les marqueurs neuro-endocrines
(baisse > 50 % de la NSE ou de la chromogranine A) a été observée
chez 13 patients (33 %). La médiane de durée de réponse a éde
4 mois (2-10 mois).Le taux de réponse sur le PSA a été de 48 %.
Le taux de réponse objective sur cibles évaluables (21 patients)
a été de 41 %, et la médiane de survie de 12 mois.
Métastases hépatiques : caractéristiques cliniques
et devenir
À partir de la base de données du centre Val-dAurelle de Mont-
pellier portant sur une durée de dix ans (1995-2005), 28 des
345 patients atteints d’un cancer de la prostate métastatique ont
présenté des métastases hépatiques (34). Tous sauf un étaient
en échappement hormonal. Les taux de chromogranine A et
de NSE étaient élevés dans respectivement 84 % et 44 % des
cas. La diane de survie était de 6 mois, et de 14 mois pour
les patients présentant des métastases hépatiques initiales. Les
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métastases hépatiques se révèlent donc comme un événement
plutôt tardif et sont souvent associées à des caractéristiques
neuro-endocrines.
DE LA BIOLOGIE AUX NOUVELLES APPROCHES
THÉRAPEUTIQUES
RANKL
Le dénosumab (AMG 162), développé par Amgen, est un anti-
corps monoclonal totalement humanisé, présentant une haute
affinité et une haute spécificité anti-RANKL, mimant l’action
de lostéoprotégérine (OPG). Il existe une expression de RANK/
RANKL/OPG au niveau des tumeurs primaires et des métastases
des cancers de la prostate (35). En inhibant l’action de RANKL,
le dénosumab réduit la différenciation, l’activité, et la survie des
ostéoclastes, ralentissant ainsi la résorption osseuse. Son action
est rapide et réversible à l’arrêt du traitement. Injecté par voie
s.c., le traitement recommandé à la dose de 120 mg toutes les
4 semaines a été choisi à partir dune étude randomisée compa-
rant 5 schémas différents d’utilisation au traitement de rence
par le zolédronate (36). La régression dans les urines du turnover
des marqueurs biologiques de résorption osseuse (N-télopep-
tide/créatinine) à 3 mois est comparable à celle obtenue avec le
zolédronate. Des études de phase III sont en cours, portant sur
les cancers hormonorésistants sans métastases osseuses afin de
retarder l’apparition de ces dernières, ainsi que sur les formes
avec métastases osseuses.
Blocage du récepteur A de l’endothéline 1
Lactivation de l’endothéline 1 (ETA) est impliquée dans la
progression tumorale par inhibition de l’apoptose, la promotion
de l’angiogenèse, l’invasion et le pouvoir métastatique (37).
Les sultats d’une étude de phase III évaluant l’atrasentan
dans les formes hormonorésistantes non métastatiques sont
négatifs.
L’astrasentan est un antagoniste sélectif du cepteur A de
l’endothéline. La fixation de l’endothéline sur son récepteur
à la surface de l’ostéoblaste facilite la progression osseuse du
cancer de la prostate.
Les résultats de phase III comparant l’astrasentan à un placebo
chez des patients présentant une tumeur en rechute biologique,
non métastatique, androgéno-indépendante ont été présentés à
l’ASCO 2007 (38). Lobjectif principal était de déterminer si latra-
sentan administré à la dose de 10 mg/j p.o. pouvait améliorer la
durée de survie sans événement clinique ou radiologique. Les
objectifs secondaires étaient de mesurer leffet de l’astrasentan sur
la SSP biologique, le temps de doublement du PSA, les phospha-
tases alcalines osseuses (PAO), la survie. Les toxicités rapportées
étaient en relation avec l’effet vasodilatateur du produit : rhinites,
œdèmes périphériques, céphalées. Aucune différence significa-
tive en termes de durées de SSP sans progression clinique ou
radiologique na été observée entre l’atrasentan et le placebo.
Des modifications significatives du temps de doublement des
PSA et du taux de PAO ont été notées.
En revanche, le ZD 4054, nouvel antagoniste spécifique d’ETA,
améliore la survie globale dans le cadre d’une étude randomisée
comparant deux doses (10 et 15 mg) à un placebo et portant sur
une série de 312 patients présentant un cancer de la prostate
avec métastases osseuses pas ou peu symptomatiques (39).
Les médianes de survie globale étaient respectivement de
23,5 mois, 24,5 mois et 17,3 mois pour les bras 15 mg, 10 mg
et placebo. Ce résultat nécessite d’être confirmé par des études
de phase III.
Ciblage de BCL2
Létude EORTC Trial 30021 (40) ayant randomisé 113 patients
métastatiques hormonorésistants entre docétaxel et docétaxel
plus oblimersen, antisens anti-BCL2, s’est révélée négative.
Ciblage de la survivine
La survivine inhibe lapoptose et est impliquée dans la régulation
mitotique. Son expression augmente de la prostate normale
(36 %) aux carcinomes primaires de bas grade et de haut grade
(71 %) pour atteindre son niveau maximal dans les métastases
ganglionnaires (88 %) [41]. Une nouvelle petite molécule,
l’YM155, ciblant la survivine, s’est montrée capable d’induire
des régressions tumorales dans des modèles de xénogreffes de
tumeurs de la prostate hormonorésistantes (42).
Ciblage d’intégrines
L’importance de l’implication des intégrines dans les métas-
tases osseuses est maintenant un phénomène bien connu (43).
Lintégrine alpha V bêta 3 est un molécule d’adhésion exprimée
par les cellules tumorales et les ostéoclastes. Elle est impliquée
dans l’invasion tumorale et dans la résorption osseuse médiée
par les ostéoclastes. Lexpression et l’activation d’intégrine
alpha V bêta 3 par le stromal derived factor-1 (SDF-1) augmente
l’agressivité des cellules tumorales (44). Un antagoniste non
peptidique (PSK1404) a montré expérimentalement des effets
antitumoraux prometteurs (45).
Ciblage des kinases de la famille Src (SFK)
Les membres de la famille Src sont impliqués dans la différen-
ciation, l’adhésion et la migration des cellules tumorales. Leur
le dans les cancers de la prostate, en particulier lors de la phase
d’hormono-indépendance à des stades avancés, est étayé par
de nombreuses données expérimentales. Quatre inhibiteurs en
sont au stade d’essais cliniques, le plus avanétant le dasatinib,
qui inhibe plusieurs SFK (46).
Les progrès en hormonothérapie
Labiratérone acétate (CB7630) est un inhibiteur de la
17 α-hydroxylase et de la C17,20-lyase.
Deux études de phase I ont été rapportées à l’ASCO 2007 (47,
48). Dans une étude de phase II alie au Memorial Sloan-
Kettering Cancer Center, utilisé p.o. à la dose de 1 000 mg/j seul
ou en combinaison avec 10 mg de prednisone dans des tumeurs
hormonorésistantes en progression après docétaxel, il diminue
les taux riques d’androgènes à des niveaux indétectables et
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