ÉDiTORiAL Prix Nobel de médecine 2008 2008 Nobel Prize in Medicine J.P. Spano* Un prix Nobel accordé à des chercheurs spécialisés sur deux virus responsables de problèmes de santé publique majeurs et mondiaux : le HIV et le HPV L a France, tout d’abord, se doit d’être fière : près de cent vingt-cinq ans après la remarquable découverte du virus de la rage par Pasteur, deux membres éminents de la prestigieuse institution fondée par ce pionnier, berceau de la microbiologie, de l’immunologie et de la biologie moléculaire, sont récompensés par le plus célèbre des prix, le prix Nobel. Les Prs Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier se sont en effet vus décerner le prix Nobel de médecine 2008 : ils avaient découvert, il y a vingt-cinq ans, à partir d’un ganglion lymphatique d’un patient atteint d’une maladie alors encore inconnue, un rétrovirus, ultérieurement baptisé virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Aujourd’hui, le VIH touche 33 millions de personnes de par le monde et reste responsable d’au moins 25 millions de décès. Heureusement, le travail soutenu, permanent et extrêmement dynamique de nombreux chercheurs, médecins brillants et investis, comme nos deux lauréats, a permis de réaliser des progrès considérables non seulement dans la connaissance moléculaire de ce virus, mais surtout dans la prise en charge thérapeutique des malades, contributions majeures qui ont permis d’augmenter de manière très significative la survie des patients depuis le début de l’épidémie. C’est au tout début de l’année 1983 qu’un virus suspect est identifié par ces deux jeunes chercheurs à partir d’une adénopathie prélevée chez un patient ; ils le nomment alors lymphadenopathyassociated virus (LAV). Dès mai 1983, le Pr Luc Montagnier publie ses premiers travaux (dans Science), et souhaite qu’ils soient vérifiés par une autre équipe tout aussi compétente dans le domaine. C’est la raison pour laquelle un échantillon est adressé au laboratoire de Robert Gallo, au National Institute of Health (États-Unis), spécialisé en virologie et reconnu pour sa découverte des deux antirétrovirus contre HTLV1 et HTLV2, responsables d’hémopathies malignes. Après une sérieuse polémique portant sur la responsabilité de la découverte de ce nouveau rétrovirus, les deux équipes se voient finalement récompensées du prix Lasker, pour l’identification du VIH. Il faudra attendre 1994 pour que, à la suite d’une enquête des autorités américaines, la découverte soit définitivement attribuée à l’équipe française. Depuis le début de l’épidémie, le VIH ne cesse de se propager, et il est rapidement devenu responsable d’une véritable pandémie, un problème majeur de santé publique mondial. Les travaux sur le contrôle de la réplication virale ne cessent heureusement de progresser. Vingt-cinq ans après sa mise en évidence, il était temps de récompenser, de la manière la plus prestigieuse qui soit, nos deux éminents chercheurs français, qui, depuis, ne cessent de contribuer, grâce à leurs impressionnants travaux et publications, à des progrès considérables, que ce soit en termes de recherche ou de soins. * Membre du comité de rédaction de La Lettre du Cancérologue ; service de cancérologie, La Pitié-Salpêtrière, Paris. La Lettre du Cancérologue • Vol. XVII - n° 9 - novembre 2008 | 423 ÉDiTORiAL Les Prs Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier partagent par ailleurs ce prix Nobel avec un troisième chercheur, allemand, reconnu pour ses travaux sur le cancer : le Pr Harald zur Hausen. Depuis 1960, ce dernier a multiplié les investigations, en particulier sur les origines du cancer du col utérin, et c’est en 1980 qu’il finit par isoler deux types d’un même virus, appelé alors papillomavirus ou HPV, à partir d’échantillons tissulaires de cancer du col utérin. Grâce à ses travaux, deux vaccins prophylactiques anti-HPV ont pu être récemment mis sur le marché, recommandés chez les jeunes adolescentes avant le début de leur sexualité. Si ce virus est essentiellement responsable aujourd’hui de tumorogénicité au niveau du col utérin, du fait de son tropisme et de son mode de contamination (voie sexuelle), il n’en est pas moins vrai que nous l’avons identifié comme responsable d’autres cancers, comme celui du canal anal et certains cancers des voies aéro-digestives supérieures. Quand on sait que le cancer occupe aujourd’hui, dans de nombreux pays, la place regrettable de première cause de mortalité, on se doit de reconnaître à leur juste valeur les travaux remarquables de ce chercheur allemand sur cet autre fléau du XXI e siècle : le papillomavirus, aux nombreux génotypes qui demeurent, pour un grand nombre d’entre eux, d’authentiques carcinogènes. ■ G rand Prix Éditorial 2008 du SNPM * Lors de la remise des prix, le 17 novembre dernier, notre groupe de presse a été cité et primé. Correspondances en Onco-Hématologie a reçu le Premier prix dans la catégorie “Meilleur dossier” pour “Gériatrie et patients âgés”, coordonné par le Dr Sylvain Choquet et paru dans le numéro 1 de janvier-février-mars 2008. Un grand bravo et merci aux auteurs. * Syndicat national de la presse médicale et des professions de santé 424 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XVII - n° 9 - novembre 2008 1er Prix “Meilleur dossier”