La Lettre du Cancérologue • Vol. XVII - n° 9 - novembre 2008 | 423
ÉDiTORiAL
Prix Nobel de médecine 2008
2008 Nobel Prize in Medicine
J.P. Spano*
* Membre du comité de rédaction de La Lettre
du Cancérologue ; service de cancérologie,
La Pitié-Salpêtrière, Paris.
L
a France, tout d’abord, se doit d’être
fière : près de cent vingt-cinq ans
après la remarquable découverte du
virus de la rage par Pasteur, deux membres
éminents de la prestigieuse institution
fondée par ce pionnier, berceau de la
microbiologie, de l’immunologie et de la
biologie moléculaire, sont récompensés
par le plus célèbre des prix, le prix Nobel.
Les Prs Françoise Barré-Sinoussi et Luc
Montagnier se sont en effet vus décerner le
prix Nobel de médecine 2008 : ils avaient
découvert, il y a vingt-cinq ans, à partir d’un
ganglion lymphatique d’un patient atteint
d’une maladie alors encore inconnue, un
rétrovirus, ultérieurement baptisé virus
de l’immunodéficience humaine (VIH).
Aujourd’hui, le VIH touche 33 millions
de personnes de par le monde et reste
responsable d’au moins 25 millions de
décès. Heureusement, le travail soutenu,
permanent et extrêmement dynamique de
nombreux chercheurs, médecins brillants
et investis, comme nos deux lauréats, a
permis de réaliser des progrès considé-
rables non seulement dans la connais-
sance moléculaire de ce virus, mais surtout
dans la prise en charge thérapeutique des
malades, contributions majeures qui ont
permis d’augmenter de manière très signifi -
cative la survie des patients depuis le début
de l’épidémie.
C’est au tout début de l’année 1983
qu’un virus suspect est identifi é par ces
deux jeunes chercheurs à partir d’une
adénopathie prélevée chez un patient ;
ils le nomment alors lymphadenopathy-
associated virus (LAV). Dès mai 1983, le
Pr Luc Montagnier publie ses premiers
travaux (dans Science), et souhaite qu’ils
soient vérifi és par une autre équipe tout
aussi compétente dans le domaine. C’est
la raison pour laquelle un échantillon est
adressé au laboratoire de Robert Gallo, au
National Institute of Health (États-Unis),
spécialisé en virologie et reconnu pour sa
découverte des deux antirétrovirus contre
HTLV1 et HTLV2, responsables d’hémopa-
thies malignes. Après une sérieuse polé-
mique portant sur la responsabilité de la
découverte de ce nouveau rétrovirus, les
deux équipes se voient fi nalement récom-
pensées du prix Lasker, pour l’identifi cation
du VIH. Il faudra attendre 1994 pour que, à
la suite d’une enquête des autorités améri-
caines, la découverte soit défi nitivement
attribuée à l’équipe française.
Depuis le début de l’épidémie, le VIH
ne cesse de se propager, et il est rapide-
ment devenu responsable d’une véritable
pandémie, un problème majeur de santé
publique mondial. Les travaux sur le
contrôle de la réplication virale ne cessent
heureusement de progresser. Vingt-cinq ans
après sa mise en évidence, il était temps
de récompenser, de la manière la plus
prestigieuse qui soit, nos deux éminents
chercheurs français, qui, depuis, ne cessent
de contribuer, grâce à leurs impression-
nants travaux et publications, à des progrès
considérables, que ce soit en termes de
recherche ou de soins.
Un prix Nobel accordé à des chercheurs spécialisés
sur deux virus responsables de problèmes de santé
publique majeurs et mondiaux : le HIV et le HPV