Médecine
& enfance
D
epuis plusieurs années, quel-
ques rares parents d’enfants
autistes règnent dans le monde
des associations de parents d’enfants
autistes par la terreur, les dénoncia-
tions, les calomnies ad hominem et la
manipulation médiatique. Jusqu’à pré-
sent, nous étions un certain nombre de
professionnels de la pédopsychiatrie à y
voir le signe d’une souffrance telle qu’en
vivent tous les parents dont un enfant
est touché par une maladie, un handi-
cap ou une difficulté majeure qui met
en jeu son présent et son avenir. Entre-
temps, les pratiques et les prises en
charge éducatives, pédagogiques et thé-
rapeutiques ont progressé quelquefois
de manière notable, notamment en ce
qui concerne les neurosciences, mais
aussi les techniques éducatives et les
psychothérapies intensives. Aujour-
d’hui, les équipes de pédopsychiatrie
françaises se forment activement pour
se situer dans cette perspective intégra-
tive, réorganisent leurs dispositifs pour
y accueillir les aspects complémentaires
nécessaires pour la prise en charge de
chaque enfant et engagent des ré-
flexions cliniques, psychopathologiques
et thérapeutiques en tenant compte des
avancées des neurosciences, notam-
ment dans la pratique des bilans dia-
gnostiques, mais aussi dans l’élabora-
tion d’hypothèses intégrant les diffé-
rents aspects complémentaires.
Nous arrivons ainsi à ce que d’aucuns ap-
pellent une « pédopsychiatrie inté-
grative » qui conjugue sous l’égide des pa-
rents, un développement des aides édu-
catives pour tous les enfants qui en ont
besoin, une approche pédagogique à
chaque fois que c’est possible et un sou-
tien thérapeutique quand c’est nécessai-
re. Cette approche plurielle nécessite de
se concerter avec les partenaires autour
de l’enfant de façon à lui apporter au plus
près de ses besoins définis lors du bilan,
du diagnostic et des indications de prises
en charge, les différentes aides néces-
saires. Dans ces perspectives intégratives,
le rôle de l’équipe de pédopsychiatrie est
de proposer les soins dont chaque enfant
a besoin en fonction de son histoire pa-
thologique, de ses symptômes actuels et
d’autres éléments qui sont déterminés
par les ressources existant autour de l’en-
fant et de sa famille. C’est ainsi que cer-
tains enfants présentant des symptômes
très préoccupants tels que les très graves
automutilations, une violence mettant en
péril la vie familiale, la poursuite de leurs
soins et de leur intégration scolaire et fi-
nalement leur développement, peuvent
recevoir des soins spécifiques tels que le
packing ou enveloppements humides, ou
une approche avec la pataugeoire, ou
tout autre média qui peut faciliter l’ins-
tauration du lien avec l’enfant atteint de
TED, et qui constituent autant de moyens
utilisés par les équipes soignantes et sou-
vent éducatives pour rentrer en contact
avec ces enfants. Dans le grand ensemble
de ces approches, le packing est une tech-
nique de soin qui appartient au groupe
des techniques d’enveloppement requises
pour rassembler le corps d’un enfant qui
manque de contenance du fait de sa pa-
thologie. Elle consiste à envelopper dou-
cement un enfant qui garde ses sous vête-
ments, dans des serviettes trempées dans
l’eau à la température du robinet (autour
de dix degrés) jusqu’au cou, puis dans un
drap sec, puis dans un tissu imperméable
qui permettra un réchauffement rapide
et dans deux couvertures chaudes. L’en-
veloppement dure environ une minute et
en quelques minutes (deux à cinq), le
corps de l’enfant se réchauffe soudaine-
ment produisant chez lui une détente
musculaire importante, le surgissement
de sourires et éventuellement de sons (et
de paroles quand il a accès au langage) et
d’échanges par le regard. La séance dure
entre quarante cinq et soixante minutes
et se termine par le « désenveloppement »
de l’enfant, son rhabillage et le partage
d’une collation avec les soignants qui
sont restés avec lui pendant la séance. En
Pourquoi publions-nous la lettre ouverte du Pr Delion ? L’association Léa pour
Samy, association de parents d’enfants autistes, a pris pour cible depuis plusieurs
mois le Pr Delion et son équipe. Cette association leur reproche d’utiliser le pac-
king, technique de soins qu’elle conteste avec violence : dénigrement, présenta-
tion fausse et caricaturale de ce mode thérapeutique qualifié de « méthode scan-
daleuse »… Il s’agit là d’une entreprise de désinformation qui vise aussi à discrédi-
ter la psychiatrie et toute approche prenant en compte le psychisme de la person-
ne soignée. Enfin, il est inconcevable, irrecevable et dangereux que la pertinence
d’une méthode thérapeutique puisse être mesurée à l’aune de l’idéologie d’une
association.
C. Geselson
Proposition pour une défense des soins psychiques :
lettre ouverte aux parents d’enfants, d’adolescents et
d’adultes autistes, à leurs professionnels éducateurs,
pédagogues et soignants
P. Delion, pôle régional des troubles du développement (neuropédiatrie, pédopsychiatrie), service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, CHU, Lille,
et laboratoire neurosciences fonctionnelles et pathologies, CNRS, UMR8160, université de Lille 2
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fonction de la pathologie de l’enfant,
l’équipe peut lui prodiguer plusieurs
séances par semaine quand l’effectif des
soignants le permet. Ces traitements peu-
vent durer plusieurs semaines ou mois en
fonction de l’évolution clinique.
Dans tous les cas, les parents donnent
leur accord à cette prise en charge pour
laquelle ils sont informés loyalement
des effets attendus.
Nous voyons désormais un grand
nombre de professionnels participant à
des équipes d’établissements du médi-
cosocial venir nous demander d’ap-
prendre la technique pour en faire bé-
néficier les enfants et les adolescents
qu’ils accueillent. Quand c’est possible,
la prise en charge par packing commen-
ce en milieu hospitalier et se poursuit
dans l’établissement médicosocial avec
des réunions de supervision communes
aux équipes thérapeutiques et médico-
sociales dans le cadre d’une pratique de
psychiatrie de secteur. La pratique de
cette technique permet de ne pas utili-
ser les médicaments psychotropes de fa-
çon excessive et facilite la restauration
des échanges entre l’enfant et ceux qui
le prennent en charge, et donc avec ses
parents et sa fratrie.
Les reproches qui sont faits aux prati-
ciens du packing au sujet du fait qu’ils
ne demandent pas leur avis aux enfants
ne sont pas recevables puisque dans le
cas de la plupart de ces enfants, leur
avis ne serait pas suffisant du fait de
l’importance de leur retard de langage
voire de leur déficience co-morbide, ce
qui vaut pour tous les soins qui sont in-
diqués pour les enfants en question, et
que ce sont les parents qui doivent don-
ner un accord éclairé pour les soins pro-
posés à leur enfant. Dans certains cas
d’enfants qui parlent, nous leur présen-
tons la technique et demandons aux pa-
rents d’en parler avec eux de leur côté.
Et il n’est pas rare de voir un enfant sans
langage nous prendre par la main lors
des jours qui suivent les premières
séances pour nous conduire dans la sal-
le dans laquelle son enveloppement est
réalisé. Ces reproches montrent à quel
point un malentendu existe puisque
nous ne parlons manifestement pas des
mêmes enfants autistes : les uns ont un
pronostic relativement favorable et peu-
vent bénéficier pleinement des ap-
proches éducatives si les parents le sou-
haitent, tandis que d’autres ont absolu-
ment besoin d’approches thérapeu-
tiques du fait de la gravité de leur ta-
bleau clinique. Les praticiens sont dans
l’obligation de tenir compte de tous les
cas et ne peuvent s’en tenir à générali-
ser à partir d’un seul exemple. Et les pa-
rents le comprennent habituellement
sans difficulté.
Enfin, cette technique fait l’objet de l’ex-
périence de très nombreuses équipes, et
depuis plus de dix ans, des demandes
ont été faites pour obtenir la possibilité
d’en évaluer les effets thérapeutiques en
référence aux critères habituellement
reconnus en médecine et en psychiatrie
sous la forme de dossiers de Programme
Hospitalier de Recherche Clinique.
Après plusieurs demandes déposées au-
près des commissions ad hoc, un Pro-
gramme Hospitalier de Recherche Cli-
nique National a été obtenu en 2007,
suivi d’un avis favorable du Comité de
Protection des Personnes du CHRU de
Lille (à l’unanimité et à bulletin secret)
fin 2008. Nous venons donc de rassem-
bler tous les éléments qui nous permet-
tent de lancer cette recherche pour dé-
montrer les effets de cette méthode et
en évaluer l’efficacité. Je rappelle qu’une
telle évaluation ne peut être entreprise
que si la technique est réalisée en fonc-
tion de critères éthiques admis par la
communauté scientifique médicale. Ce
qui est le cas pour notre recherche.
Nous voici donc dans la position para-
doxale d’avoir enfin réuni les éléments
permettant d’évaluer clairement et ri-
goureusement ce que l’expérience nous
montre depuis longtemps. Et c’est préci-
sément à ce moment-là que des voix
s’élèvent pour demander un arrêt de ces
pratiques, sans avoir pris la précaution
de se renseigner suffisamment sur elles
ni auprès de ceux qui les proposent. Et
loin de le faire dans un esprit consistant
à s’informer à partir des expériences de
ceux qui en expriment le besoin, à sa-
voir des professionnels posant les indi-
cations de soins par packing pour les
raisons déjà évoquées, mais aussi plus
fréquemment que ces détracteurs ne
veulent le reconnaître, par des parents
qui y trouvent une réponse aux symp-
tômes épouvantables que sont, entre
autres, les automutilations graves.
Je crois pour ma part que cet aveugle-
ment manifesté par les calomniateurs
tient à plusieurs raisons : première-
ment, au fait qu’ils ont été blessés par
des praticiens s’inspirant de la psycha-
nalyse et souhaitent que tout ce qui s’en
inspire soit banni à jamais, oubliant que
si des psychanalystes ont sans doute
commis des erreurs en ce qui concerne
la prise en charge de l’autisme, la psy-
chanalyse a eu un rôle prévalent dans la
construction d’un savoir psychopatholo-
gique aux effets considérables sur les
processus civilisateurs contemporains.
Pour ce qui est de l’autisme, de nom-
breux praticiens formés aujourd’hui à la
psychothérapie des enfants présentant
des TED peuvent apporter un témoigna-
ge de leur travail dans ce domaine et
plusieurs d’entre eux participent à une
évaluation de leurs prises en charge.
Le deuxième faisceau d’arguments se
trouve dans le fait que les calomnia-
teurs ne connaissent sans doute pas as-
sez les cas les plus graves d’autisme,
aboutissant trop souvent à des symp-
tômes difficilement imaginables par la
violence que ces personnes autistes pro-
duisent soit sur eux-mêmes soit sur au-
trui. Je pense d’ailleurs à ce sujet que
les méthodes prônées de façon uni-
voque ne peuvent pas répondre en gé-
néral à toutes les formes d’autisme et
qu’il y a bon nombre de malentendus
qui résultent de cette méconnaissance.
La méthode ABA pourra répondre à cer-
tains types d’autisme tandis que
d’autres méthodes ou techniques pour-
ront répondre à d’autres types. Il en va
de même pour la plupart des symp-
tômes. Ce qui nous conduit à penser des
prises en charge multiples et complé-
mentaires réfléchies avec les parents en
fonction de chaque cas. Et d’ailleurs, les
praticiens du packing ne proposent en
aucun cas d’étendre la technique à tous
les enfants autistes, juste à ceux qui en
ont besoin. Troisièmement, il apparaît
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que lorsqu’une technique est efficace
pour certains patients, je suis toujours
surpris que des parents, dont ce n’est
somme toute pas le métier, puissent
s’arroger le droit d’empêcher d’autres
parents d’en bénéficier pour leur en-
fant, les soumettant ainsi à une tyrannie
qui se fait passer pour la vérité, y com-
pris en utilisant la science comme cau-
tion, quand elle n’est que l’expression
d’une intolérance vertigineuse et peut-
être la couverture d’une publicité com-
merciale, voire sectaire, pour la métho-
de encensée. Et d’ailleurs, n’ayant pas
les arguments pertinents pour leur plai-
doyer, ils manipulent les médias pour
faire pression sur l’opinion de façon à
obtenir par la rue ce que les procédures
classiques ne peuvent leur donner.
Les autres approches proposées dans les
lieux de soins des équipes de pédopsy-
chiatrie française, c’est-à-dire les hôpi-
taux de jour qu’il est devenu habituel de
critiquer sans vergogne, sont également
menacées par ces nouveaux contemp-
teurs de la psychiatrie : ne nous faisons
aucune illusion, leur haine tenace a
l’ensemble des équipes de pédopsychia-
trie dans le collimateur, et sitôt le pac-
king interdit, ce sont les autres soins qui
seront les victimes suivantes. Car à
quelque chose près, il s’agit de la même
pensée clivante et simplificatrice qui
consiste à utiliser la calomnie quand on
est à court d’arguments recevables. Jus-
qu’à présent, j’avais supporté avec une
indulgence trop bienveillante ces procé-
dés dignes de régimes totalitaires de si-
nistre mémoire, mais aujourd’hui, la li-
mite est franchie, il n’est pas possible de
continuer à accepter de quelques pa-
rents qui ont dépassé la norme du fonc-
tionnement démocratique, les pratiques
qu’ils utilisent pour occire leurs oppo-
sants sur le modèle inquisitorial.
Je demande à tous les parents qui béné-
ficient pour leurs enfants de prises en
charge dans les secteurs de pédopsy-
chiatrie de France de nous aider à aider
leurs enfants dans la poursuite de la mi-
se en œuvre de telles prises en charge
avec tous les partenaires nécessaires,
étant entendu que ces équipes qui les
accueillent sont dans un processus de
formation à l’intégration des différents
aspects complémentaires : l’éducatif, la
pédagogie et les soins psychiques.
Je demande à tous les professionnels
des équipes de pédopsychiatrie françai-
se de se ressaisir, et de ne pas continuer
à accepter les calomnies dont nous
sommes aujourd’hui pratiquement tous
victimes de façon scandaleuse et injusti-
fiée, et de développer avec les parents
des enfants qu’ils accueillent dans le
cadre d’une politique de secteur bien
comprise, des actions qui visent à mon-
trer que les agresseurs ne sont pas les
seuls à pouvoir parler de l’autisme de
façon autorisée, et notamment de ce
qu’ils ne connaissent pas personnelle-
ment et que leurs calomnies montrent
de façon éclatante ; j’en profite pour di-
re qu’il ne suffit pas de lire des informa-
tions sur internet pour devenir compé-
tent de ce seul fait. Si je répugne à de-
mander aux parents de nous aider, je
crois qu’aujourd’hui, après avoir obser-
vé en silence les dégâts réalisés par
notre attitude antérieure de neutralité
bienveillante, il n’est plus possible de
laisser se répandre de telles manifesta-
tions de haine sans que cela ait des
conséquences sur le travail que nous
menons.
Je demande aux scientifiques de faire
l’effort conceptuel d’avancer sur les che-
mins des neurosciences autant que faire
se peut, mais sans réduire les pratiques
admises aux seuls résultats validés. Par
définition, avant d’être validées toutes
les hypothèses doivent pouvoir être en-
visagées, posées, travaillées, sans courir
le risque d’être disqualifiées pour des
raisons idéologiques, si les conditions
éthiques dans lesquelles ces soins se dé-
livrent font l’objet d’un consensus ac-
cepté par les instances concernées. Je
ne parle pas là des caricatures toujours
faciles à faire pour dénigrer celui qu’on
veut déstabiliser.
Je demande aux politiques de ne pas
tomber dans la posture démagogique
qui consisterait à tenir compte de ceux
qui font le plus de bruits sans tenir
compte des différents points de vue
concernés. Bien au contraire, nous
avons vu que c’est de la mobilisation
des parents d’enfants autistes qu’est ve-
nue la possibilité de faire remonter au-
près des décideurs les manques inson-
dables en matière de prises en charge
sur tout le territoire national. Ils doi-
vent tenir compte de l’ensemble de la
problématique présentée, et aussi
prendre en considération les avis expri-
més par les professionnels et leurs re-
présentants. C’est de cette articulation
fondamentale que leur rôle pourra pro-
duire les meilleurs effets de déblocage
des crispations insupportables aux-
quelles nous sommes arrivés.
Je demande aux administrations natio-
nales, régionales et locales de nous aider
à mettre autour de la table de discus-
sion, quitte à se faire aider d’un média-
teur, tous les partenaires qui gravitent
autour de la question de l’autisme pour
que le dialogue qui est le seul ressort sur
lequel nous pourrons avancer puisse de-
venir le scénario le plus fréquent.
Je demande aux médias dont le rôle de
quatrième pouvoir se vérifie de plus en
plus, de continuer à tenir bon sur leur
rôle qui consiste à informer le citoyen
de la façon la plus objective possible en
donnant la parole aux différentes par-
ties en présence, et de ne pas tomber
dans une utilisation pervertie de leur
outil, qui accentuerait, déformerait et
conflictualiserait les souffrances des uns
contre les autres dans une visée média-
métrique aux effets ravageurs sur les
personnes directement concernées,
alors que cet outil recèle des possibilités
pédagogiques énormes quand il est jus-
tement utilisé. La psychiatrie est aujour-
d’hui un bouc émissaire trop facile à dé-
signer. Les professionnels qui y tra-
vaillent font dans la plupart des cas tout
ce qui est dans leurs capacités pour res-
ter humains dans la relation qu’ils ins-
taurent avec les patients qui leur sont
confiés. A trop leur faire porter l’en-
semble des malheurs qui touchent la
population des personnes autistes, on
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risque d’aboutir à un « burn out » géné-
ralisé qui aurait des conséquences dé-
sastreuses en matière de psychiatrie, et
in fine, sur le plan sociétal. Les médias
peuvent nous aider puissamment à un
véritable débat démocratique.
Je demande enfin à tous les citoyens de
ce pays de ne pas oublier que nous
sommes des corps et des esprits hu-
mains, dont les deux aspects sont insé-
parables. Une maladie, même d’origine
génétique ou neurologique, connaît
toujours des développements qui englo-
bent le psychisme du malade, et contri-
buer à une meilleure santé nécessite
d’associer des approches physiques et
psychiques pour y parvenir. Les soins
psychiques proposés par les équipes de
psychiatrie de secteur aujourd’hui ont
pour objectif d’aider à cette démarche
dans un climat pacifié. Toute polémique
haineuse ne peut qu’en minimiser les ef-
fets bénéfiques attendus.
vices sont là pour témoigner de la diffi-
culté de leur travail. Nous demandons
dans ces moments-là de l’aide à divers
spécialistes de l’autisme (notamment
les CRA), qui nous éclairent de leur sa-
voir sur le plan technique et médica-
menteux et pour l’évaluation à des fins
d’orientation de ces enfants qui aboutis-
sent dans nos services de pédopsychia-
trie, car nous sommes les seuls à pou-
voir les accueillir.
Les familles nous ont toujours remercié
de nos soins. Nous avons des difficultés
pour sortir ces enfants de nos services
faute de place et d’établissements pou-
vant les accueillir.
Quand j’entends que nous « internons »
les enfants, que nous les médicamen-
tons abusivement, que nous les « psy-
chiatrisons », j’ai le sentiment à nou-
veau que nous sommes dans l’idéologie.
Quand j’entends que les neuroleptiques
ont détérioré l’état mental d’un patient
qui a été hospitalisé dans une situation
si extrême qu’aucun service ne voulait
s’en occuper, je me dis qu’on inverse la
logique du soin (on nous demande de
soigner un patient en nous reprochant
de nous être occupés de lui).
La médecine est une affaire délicate,
beaucoup plus fine que la politique, et
qui ne se marie pas aux idéologies.
Nous faisons un métier consensuel, qui
tient compte d’une infinité d’éléments :
organiques, psychologiques, relation-
nels ; nos orientations ne sont jamais
purement théoriques, car nous sommes
sans cesse confrontés à la faisabilité de
ce que nous pensons. C’est un métier
d’artisan qui nous oblige à l’humilité.
Voilà pourquoi les attaques dont cer-
tains d’entre nous font l’objet, sont in-
supportables et injustes, et infamantes
car elles attaquent au-delà de nos per-
sonnes une médecine humaniste, de
terrain, qui réfléchit à ce qu’elle fait et
se méfie de ceux qui croient détenir des
vérités absolues et définitives.
Périodiquement, les attaques repren-
nent, n’apportant rien, car nous sommes
dans un pays libre, où les parents peu-
vent décider du suivi de leur enfant à la
condition qu’ils ne veuillent pas imposer
leur opinion comme une vérité.
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L
es médecins s’occupent de ma-
tières si complexes qu’ils sont
obligés de remettre sans cesse en
cause leur savoir et leurs pratiques. Ils
savent que chaque cas est particulier et
ils ne croient ni aux remèdes ni aux
techniques miraculeuses ou absolues.
Ils connaissent la relativité des choses et
n’ignorent pas que dans d’autres pays
où se pratique une médecine d’égale
qualité des confrères font autrement.
Les pédiatres et les pédopsychiatres ont,
eux, la difficulté supplémentaire qu’ils
ont en charge un patient, surtout s’il est
très jeune, qui est dépendant pour ses
soins de l’avis de ses parents, sauf si l’on
est dans le cas d’une urgence vitale.
Depuis des décennies, nous suivons des
enfants autistes. Jamais les parents
n’ont été mis en cause dans la pathoge-
nèse de cette maladie, bien que beau-
coup d’entre nous aient été intéressés
par les travaux de Bettelheim, dont le
succès médiatique télévisuel a pu irriter
certains. De la même manière, les tra-
vaux neuropsychologiques, comporte-
mentalistes, ou portant sur le langage
ou les méthodes éducatives intéressent
les pédopsychiatres, qui, pour la plu-
part, ont une approche pragmatique
dans un problème aussi complexe que
celui de l’autisme.
De nombreux établissements, en France,
appliquent les méthodes Teacch, ABA,
Doman et s’inspirent de la pensée de
Schopler. Les parents sont libres de
choisir pour leur enfant la méthode édu-
cative, rééducative ou de soins, quelque-
fois en complément de soins pédopsy-
chiatriques. Il arrive à chacun d’entre
nous d’établir des certificats médicaux
destinés à aider financièrement, via la
MDPH, les familles qui ne peuvent fi-
nancer les aides particulières non prises
en charge par l’assurance maladie.
Des études concernant la prise en char-
ge intensive d’enfants avant quatre ans
par des méthodes éducatives et stimu-
lantes ont montré leur bon résultat
symptomatique, en sachant qu’il ne
s’agissait pas d’enfants tout venant (ce
que nous voyons dans nos consulta-
tions) mais d’enfants au bon développe-
ment intellectuel avec un langage.
Quand on s’occupe d’unités d’hospitali-
sation, on est confronté aux cas graves,
dans lesquels la prévention, l’éducation
et les suivis aboutissent à des impasses
en raison de la gravité même de l’état
des patients ; on n’est plus dans la théo-
rie mais dans une pratique dure et dou-
loureuse. Qui reçoit les enfants dont per-
sonne ne veut, dont la violence entraîne
leur exclusion des établissements sco-
laires ou médicosociaux et qui ne sont
plus supportés dans leur famille dont ils
mettent les membres en danger ?
Les infirmiers et éducateurs de nos ser-
L’idéologie et le consensus
M. Boublil, Fondation Lenval, Nice
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