Fiche à détacher et à archiver
N° 62
Fiche
technique
Sous la responsabilité de leurs auteurs
Traitements symptomatiques
de la sclérose latérale amyotrophique
La Lettre du Neurologue - vol. X - n° 6 - juin 2006 I
Traitements symptomatiques
de la sclérose latérale amyotrophique
P. Cintas
(Centre SLA, service de neurologie, CHU de Rangueil, Toulouse)
E
n l’absence de traitement curatif, la prise en charge
symptomatique est essentielle dans la sclérose latérale
amyotrophique (SLA). Réalisée au mieux de façon pluri-
disciplinaire, elle aura pour objectif principal d’améliorer la
qualité de vie des patients. Elle fait appel à un certain nombre
de thérapeutiques ne disposant pas d’autorisation de mise sur
le marché (AMM) dans cette indication malgré leur utilisation
en pratique courante. Nous n’aborderons pas les techniques
de désencombrement
(Techniques de drainage bronchique
au cours de la sclérose latérale amyotrophique. Perrin C.,
Desnuelle C. La Lettre du Neurologue, Vol. IX - n° 10, déc.
2005).
Il s’agit de symptômes fréquents nécessitant une évaluation
précise afin d’identifier les mécanismes impliqués. Les crampes
sont plus fréquentes en début d’affection, particulièrement au
réveil, justifiant des soins spécifiques. Les douleurs nociceptives
surviennent à un stade plus avancé et sont d’origine variée
(rétractions, points de compression, etc.). Les douleurs neuropa-
thiques sont en revanche rares et peuvent répondre aux antidé-
presseurs sérotoninergiques ou mixtes, ou aux antiépileptiques.
Elle aggrave le handicap fonctionnel et les douleurs. La prise
en charge de première intention repose sur des soins phy-
siques réguliers et des soins d’hydrothérapie entre 32 °C et
34 °C. Les thérapeutiques médicamenteuses sont parfois
décevantes. Le baclofène et la tizanidine représentent les trai-
tements de première ligne. Les benzodiazépines nécessitent
des précautions en raison de leur effet sédatif et du risque
d’aggravation d’une hypoventilation alvéolaire nocturne. Le
dantrolène peut aggraver la faiblesse musculaire comme les
autres antispastiques et présente une hépatotoxicité accrue.
D’origine multifactorielle (fatigabilité musculaire, troubles du
sommeil incluant les hypoventilations nocturnes, dysthymie), elle
justifie la réalisation d’une évaluation précise. En l’absence
d’étiologie clairement identifiée, le modafinil peut apporter
un bénéfice modéré, ainsi que l’acétyl-L-carnitine. Quelques
patients rapportent une amélioration transitoire de la fati-
gabilité musculaire sous inhibiteurs de l’acétylcholinestérase
périphérique. Cet effet ponctuel, lié à l’amélioration de la
transmission neuromusculaire au niveau des jonctions néo-
formées, nécessite toutefois d’être mieux évalué.
Sa fréquence n’est pas nécessairement corrélée au stade
évolutif de la maladie. Aggravant le pronostic, elle nécessite
une prise en charge active psychologique et médicamen-
teuse. Les antidépresseurs tricycliques, et particulièrement
l’amitriptyline, sont fréquemment utilisés pour leur effet sédatif
en prise vespérale et leur action sur les troubles salivaires.
L’alternative est représentée par les inhibiteurs de la recap-
ture de la sérotonine.
Douleurs et crampes
Fatigue
Dépression
Spasticité
Soins de massage, hydrothérapie
Sulfate de quinine
Mg2+, antiépileptiques agissant sur les canaux sodiques
Encadré I. Traitements des crampes.
Éviction des facteurs favorisants
Kinésithérapie d’exercice, massages, physiothérapie
Antalgiques selon les paliers de l’OMS
Encadré II. Traitement des douleurs nociceptives.
Kinésithérapie
Hydrothérapie
Baclofène, tizanidine
Alternatives : benzodiazépines, dantrolène, baclofène intrathécal
Encadré III. Traitement de la spasticité.
D’origine pseudobulbaire, il doit être différencié des syn-
dromes dysthymiques. Cependant, les thérapeutiques les
Syndrome de labilité émotionnelle
Traitements symptomatiques
de la sclérose latérale amyotrophique
II La Lettre du Neurologue - vol. X - n° 6 - juin 2006
Fiche à détacher et à archiver
Les troubles salivaires sont à l’origine d’un inconfort important
et de risques d’inhalation. Ils sont secondaires à des modifi-
cations de la consistance salivaire, de la posture céphalique,
de l’occlusion labiale et de la déglutition. Les traitements de
première intention sont les médications anticholinergiques. En
cas d’échec, un traitement par toxine botulique A dans les
parotides et/ou les glandes sous-maxillaires peut être proposé,
idéalement guidé par échographie. En raison de sa durée
d’action (3 à 6 mois), il représente un traitement réversible et
permet un ajustement des posologies. La radiothérapie à faible
dose des glandes salivaires sous-maxillaires et accessoires est
une alternative généralement définitive. Elle expose au risque
de xérostomie ou de mucite, généralement transitoire.
Pour les patients présentant des sécrétions salivaires épaisses,
on peut proposer des traitements bêtabloquants.
L’ensemble de ces traitements doit être associé à des soins
buccaux réguliers.
La mise en œuvre des diverses mesures symptomatiques
permet d’améliorer la qualité de vie des patients. Ces
mesures nécessitent d’être appliquées le plus précocement
possible par une étroite collaboration entre les divers inter-
venants auprès du malade.
>>
>>Andersen PM et al. EFNS task force on diagnosis and management of amyo-
trophic lateral sclerosis. EFNS task force on management of amyotrophic lateral
sclerosis: guidelines for diagnosing and clinical care of patients and relatives.
Eur J Neurol 2005;12(12):921-38.
>>
>>Cintas P. Symptomatic treatment of ALS. Rev Neurol 2006 (sous presse).
>>
>>Miller RG et al. Practice parameter: the care of the patient with amyotrophic
lateral sclerosis (An evidence-based review). Muscle Nerve 1999;22(8):1104-18.
Il existe dans la SLA des modifications du collagène au
niveau du derme expliquant la très faible incidence des
complications cutanées du décubitus. Des mesures simples
de nursing et une adaptation du couchage et de l’assise sont
généralement suffisantes. La fréquence exacte des compli-
cations thromboemboliques est, en revanche, bien moins
connue. Il n’existe pas actuellement de consensus sur la
prescription d’une anticoagulation préventive.
Elle est secondaire à l’immobilité, à la diminution de
l’hydratation, aux modifications alimentaires, mais aussi à
un ralentissement du temps de transit. Les mesures non
médicamenteuses (massages, hydratation, conseils alimen-
taires et éviction des causes iatrogènes) sont essentielles. Les
traitements laxatifs seront préférentiellement de type osmo-
tique (dérivés du polyéthylène glycol, lactulose) ou lubri-
fiants. Les traitements péristaltogènes sont d’utilisation rare
et ponctuelle (érythromycine, pyridostigmine).
La présence d’une dénutrition est un facteur pronostique
péjoratif. Elle peut être secondaire à une anorexie, à des
troubles de la déglutition et à un hypermétabolisme. Des
mesures anthropométriques simples (index de la masse cor-
porelle, mesure de la circonférence musculaire brachiale et
du pli cutané tricipital) permettent une évaluation précise de
l’état nutritionnel.
Troubles trophiques et prévention des phlébites
Constipation
Compléments nutritionnels
Troubles salivaires
Conclusion
Pour en savoir plus…
Antidépresseurs tricycliques (amitriptyline 50-150 mg/j) ou sérotoninergiques (fluvoxamine
100-300 mg/j, fluoxétine 20-60 mg/j)
Alternatives : lamotrigine, lévodopa
Encadré IV. Traitement du syndrome de la labilité émotionnelle.
Perte masse maigre, patients normopondéraux : poudre de protéine (10 à 20 g/j),
crèmes enrichies
Perte de poids avec troubles de la déglutition : crèmes enrichies, plats mixés HP/HC
Perte masse grasse (apports protidiques satisfaisants) : boissons enrichies (jus de fruits)
Perte masse grasse et maigre : boissons enrichies lactées
Encadré VI. Compléments nutritionnels.
Anticholinergiques : antidépresseurs tricycliques, scopolamine en patch
ou par voie sous-cutanée, collyre d’atropine 1 % sublingual
Autres
(CI aux anticholinergiques) : clonidine
Toxine botulique A dans glandes sous-maxillaires et/ou parotides
Radiothérapie des glandes sous-maxillaires et salivaires accessoires (8 à 12 grays)
Encadré V. Traitement des hypersialorrhées.
plus efficaces sont les antidépresseurs tricycliques et séroto-
ninergiques (fluvoxamine, fluoxétine, citalopram). Quelques
cas d’amélioration sous lamotrigine et sous lévodopa ont
été rapportés. Une association de dextrométhorphane et de
quinidine a démontré son efficacité, mais pose le problème
d’une mauvaise tolérance.
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