Soins oncologiques de support, retour sur 2011 RÉTROSPECTIVE 2011

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RÉTROSPECTIVE 2011
Soins oncologiques
de support, retour sur 2011
Supportive care in cancer, back to 2011
F. Scotté1, 2, S. Richard1, 2, J. Gachet1, N. Pecuchet1, E. Kempf1, S. Oudard1
Définitions, environnement,
organisation
L’étude de J. Temel et al., présentée en 2010 dans le
New England Journal of Medicine, a de nouveau fait
l’objet d’une publication dans le Journal of Clinical
Oncology (1, 2). Cette étude randomisée menée
auprès de 151 patients traités pour un cancer bronchique non à petites cellules métastatique avait pour
objectif d’évaluer l’impact d’une intervention précoce
d’une équipe palliative versus un accompagnement
oncologique standard. Les patients éligibles étaient
randomisés sans stratification dans les 8 semaines
suivant le diagnostic. Dans le bras “standard”, les
patients étaient normalement suivis par leur équipe
soignante d’oncologie médicale, et ce suivi comportait la possibilité d’un recours à l’équipe palliative à
la demande du médecin référent, du patient ou d’un
proche. Dans le bras “accompagnement précoce”
(en version originale, “early palliative care”), les
participants étaient également pris en charge par
l’équipe oncologique, mais ils rencontraient de
manière systématique l’équipe palliative dans les
3 semaines suivant leur inclusion, puis 1 fois par mois
jusqu’à leur décès, avec la possibilité d’un recours à
cette équipe à discrétion. Le suivi proposé dans le
bras accompagnement précoce s'est conformé aux
recommandations du National Consensus Project
for Quality Palliative Care. Les différents aspects mis
en valeur y sont : un travail sur la compréhension
et l’éducation thérapeutique face à la maladie, la
gestion des symptômes, l’accompagnement dans la
décision, l’aide à la compréhension d’une maladie
létale pour le patient et sa famille, la programmation
d’un plan d’accompagnement et la collaboration
multidisciplinaire. Une évaluation était menée à
l’inclusion puis aux semaines 12, 18 et 24.
À l’inclusion, 31,7 % des patients ont estimé que leur
maladie était curable, 97,2 % que le traitement avait
pour objectif de les aider à vivre plus longtemps et
100 % qu'il visait à les aider à se sentir mieux.
Dans le bras standard, 13,5 % des patients ont eu
recours à une consultation de l’équipe palliative à
l’évaluation de la douzième semaine, essentiellement pour la gestion des symptômes, et 0 % lors
de l’évaluation de la vingt-quatrième semaine de
l’étude. Ce chiffre met en évidence la faible demande
de soins adressée à une équipe d’accompagnement
lors d’une prise en charge oncologique standard.
Bien que le taux de patients ayant estimé leur
maladie curable ait été plus important dans le bras
standard que dans le bras accompagnement précoce
(respectivement 39,5 versus 22,2 % à S12), la différence n’a pas été significative (p = 0,08). Ces résultats ont été similaires à S18 et S24. Il en a été de
même pour la perception de l’objectif du traitement
quant à la disparition de la maladie. Afin d’évaluer
l’impact de l’accompagnement précoce, les changements de perception du pronostic ou des objectifs
du traitement ont alors été analysés. Une proportion plus importante et significative de patients du
groupe accompagnement précoce ont évolué vers
une prise de conscience de l’incurabilité de leur
maladie comparativement à ceux du bras standard
(82,5 versus 59,6 % ; p = 0,02). La proportion de
patients recevant une chimiothérapie (CT) dans
les 60 derniers jours de vie a été significativement
plus faible parmi ceux du groupe accompagnement
précoce (p = 0,02), du fait des discussions menées
autour du pronostic. En revanche, la prise en charge
précoce n’a pas modifié la perception de l’objectif du
traitement reçu. Par ailleurs, aucune échelle d’évaluation n’a pu être retrouvée au moment de l’étude
pour mettre en valeur le caractère multidimensionnel
F. Scotté
1 Service d’oncologie médicale,
pôle cancérologie spécialités,
­hôpital européen
Georges-­Pompidou, Paris.
2 Unité fonctionnelle de soins
de ­support, pôle cancérologie
­spécialités, hôpital européen
Georges-­Pompidou, Paris.
La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 1 - janvier 2012 | 71
Résumé
Mots-clés
Cancer
Douleur
Nausées
Soins de support
Soins palliatifs
Vomissements
Highlights
2011 has seen international
developments in supportive
care. Several recommendations
were presented, particularly
for the treatment of nausea
and vomiting, pain, but also
for the cutaneous toxicities
of targeted therapies. A key
point of the last two years is
the evolution of the supportive
care representation, which has
now to be given as a necessary
complement by medical teams
in charge of the specific treatments. What we aim at is a
comprehensive and optimal
care for cancer patients.
Keywords
Cancer
Nausea
Pain
Palliative care
Supportive care
Vomiting
L’année 2011, comme les précédentes, a connu des évolutions des soins de support au niveau international.
Plusieurs recommandations ont été présentées, notamment dans le domaine des nausées et vomissements,
de la douleur, mais également sur les toxicités cutanées des thérapies ciblées. Un point fondamental des
2 dernières années est l’évolution de la vision des soins de support, qui doivent aujourd’hui s’intégrer,
en parfaite complémentarité, aux soins prodigués par les équipes en charge des traitements spécifiques.
L’objectif poursuivi est celui d'une prise en charge globale et optimale des patients atteints de cancer.
de la compréhension de la maladie par le patient.
Une étude est à présent en cours avec adaptation
d’une échelle utilisée en pédiatrie (3, 4). En dehors
de quelques biais méthodologiques minimes, on
pourra malgré tout mettre en avant que le travail de
cette équipe de Boston se rapproche du travail mené
dans le sens du soin de support en Europe et que leur
mode de fonctionnement n’est pas aujourd’hui révélateur des pratiques habituelles en prise en charge
palliative sur le continent américain.
Un nouvel éditorial écrit par J. Klastersky, fondateur
et premier président de la MASCC (Multi­national
Association for Supportive Care in Cancer), a abordé
l'évolution sémantique qui a conduit du terme “best
supportive care” (“meilleurs soins de support”) à
celui d’“early palliative care” (“soins palliatifs
précoces”), en réaction à l’étude de l’équipe dirigée
par J. Temel (2, 5). Après avoir donné la première
définition des soins de support en 1990, J. Klastersky
a fait évoluer son message, initialement en réaction
aux nombreux décès par neutropénie fébrile, animé
par la volonté de créer un groupe de réflexion multidisciplinaire autour de l’accompagnement du patient
atteint d’un cancer. La notion de “best supportive
care”, initialement forgée par R.L. Woods et al. dans
le cadre du cancer du poumon avancé, consistait
à proposer une prise en charge symptomatique
pure, en la comparant dans le cadre d'une étude à
une CT associant cisplatine + vindésine (6). Cette
étude, développée en 1990, montrait une supériorité en survie dans le bras CT. Pourtant, les auteurs,
à l’époque, ne recommandaient pas le traitement
par CT comme traitement de routine pour favoriser
la prise en charge des symptômes. Plusieurs études
ont par la suite été menées et la définition des soins
de support a évolué. Vers la fin des années 1980,
le National Cancer Institute du Canada donnait une
définition des soins palliatifs correspondant exactement à celle du best supportive care, en incluant
une gestion des symptômes tels que les infections,
autant qu’une radiothérapie sur un syndrome cave
supérieur (5).
C’est ainsi que J. Klastersky a défini les soins de
support comme étant des soins complémentaires au traitement de la maladie cancéreuse afin
d’améliorer la qualité de vie des patients, qu’ils
soient ou non en cours de traitement spécifique.
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Une liste non exhaustive, correspondant à celle
proposée dans la circulaire française de la Direction
de l'hospitalisation et de l'organisation des soins
(DHOS) du 22 février 2005, énonce les symptômes
et les prises en charge proposés dans ce contexte,
à savoir : infection, anémie, hémorragies, nausées
et vomissements, diarrhée, support nutritionnel,
gestion de la douleur, soins palliatifs, syndromes
obstructifs, épanchements néoplasiques, mucite,
stomathérapie, abords veineux, soins intensifs,
métastases du système nerveux central, métastases
osseuses, maladie veineuse thromboembolique.
La publication de J. Temel et al. (2) amène donc
J. Klastersky à proposer de faire évoluer le terme
en “early palliative care” pour les patients dont la
maladie a atteint un stade avancé, afin de proposer
l'approche symptomatique mais également psychosociale la plus précoce possible après le diagnostic.
On insistera sur la prise en charge particulière
proposée par l’équipe de J. Temel et la notion de
prise en charge de l’ensemble des patients, y compris
de ceux qui sont en stade adjuvant dans le cadre de
la définition française des soins de support.
Pour finir sur la sémantique, il est intéressant de citer
l’étude du MD Anderson Cancer Center (États-Unis).
L’équipe de E. Bruera, une des sommités du milieu
des soins de support aux États-Unis, a transformé
l'appellation “équipe palliative” en celle d'“équipe
de soins de support” (7). L’enjeu était de modifier la
perception du travail de l’équipe, afin de permettre
l'accès le plus précoce possible des patients à leur
accompagnement, le nom “palliatif” étant considéré
comme une barrière au travail de complémentarité
précoce entre les équipes par le milieu oncologique.
Les données de 4 701 patients consécutifs pris en
charge par l’équipe ont été évaluées en comparant
2 périodes : la première allait de janvier 2006 à
août 2007, lorsque les consultations étaient identifiées “palliative care” ; la seconde, de janvier 2008
à août 2009, après changement du nom en “supportive care”.
Le changement du nom a permis :
➤➤ une augmentation de 41 % du recours aux
consultations auprès de l’équipe (p < 0,001) ;
➤➤ une majoration des demandes de conseils pour
les patients hospitalisés (p < 0,001) ;
RÉTROSPECTIVE 2011
➤➤ une réduction du délai entre le début de la prise
en charge et le recours aux consultations en ambulatoire avec l’équipe de 13,2 à 9,2 mois (p < 0,001) ;
➤➤ une réduction du délai de recours à l’équipe entre
le diagnostic de stade avancé et la consultation
auprès de l’équipe de 6,9 à 5,2 mois (p < 0,001) ;
➤➤ une meilleure survie (calculée entre le premier
contact avec l’équipe d’accompagnement et le
décès) en faveur du changement de nom (6,2 mois,
contre 4,7 mois avec le nom “palliatif” ; p < 0,001) ;
➤➤ une augmentation du nombre de patients
adressés dans un contexte de maladie non avancée
de 5 à 14 % (p < 0,001).
Si cette idée laisse entrevoir une évolution des perspectives d’accompagnement des patients, encore
faut-il que les équipes mobiles puissent matériellement assurer la prise en charge de l’afflux des
patients. Cette étude, menée dans un centre majeur,
et toujours novateur, de la prise en charge oncologique permet de mettre l’accent sur l’importance de
la sémantique dans le lien collaboratif entre équipes
d’un même centre et dans la possibilité d’une consultation plus précoce d'une équipe complémentaire à
l’accompagnement oncologique standard…
Au-delà des débats de sémantique, de survie
et d’orga­n isation, il est important de rappeler
qu'en 2010 l'on s'est focalisé sur la perception
que les soignants et les patients peuvent avoir des
symptômes (8). Un écart important a été mis en
évidence sur le ressenti, les patients éprouvant
plus de souffrances que ne l’évaluent les soignants.
Ces écarts sont visibles sur des items tels que la
fatigue, l’anorexie, la douleur ou encore les toxicités
digestives. Chaque soignant, qu’il soit médecin ou
qu'il appartienne au personnel paramédical, doit s’engager dans l'évaluation et la prise en charge la plus
optimale possible des patients atteints de cancer.
Anémie, fer, érythropoïétine
La supplémentation en fer agit bien évidemment en
cas de carence martiale et correspond à la première
étape du diagnostic d’une anémie (9). Plusieurs
études dans la littérature ont déjà fait état d’une
majoration de l’efficacité d’une telle supplémentation
en association avec un agent stimulant l’érythropoïèse (ASE). Pour tenter d’apporter une argumentation solide à cette question, une méta-analyse menée
sur 8 études randomisées incluant 1 606 patients a
confirmé l’impact significatif d’une supplémentation
intraveineuse de fer en association avec un ASE, avec
une augmentation de 29 % des chances de réponse au
traitement, par comparaison avec le traitement par
ASE seul (10). Les auteurs de cet article ont rappelé
les définitions et indications des traitements par fer et
ASE dans le cadre des recommandations du National
Comprehensive Cancer Network (NCCN) [11] et de
l’American Society of Clinical Oncology (ASCO®)/
American Society of Hematology (ASH) [12].
Les recommandations NCCN 2011 ne préconisent pas l’utilisation de fer injectable lorsque les
patients ne présentent pas de carence martiale.
Elles indiquent le recours à cette supplémentation
en cas de déficit en fer défini par une ferritinémie
inférieure à 30 ng/ml et une saturation en transferrine inférieure à 15 %. Ces mêmes recommandations
proposent l’utilisation associée de fer injectable et
d’ASE en cas de déficit fonctionnel en fer défini par
une ferritinémie inférieure ou égale à 800 ng/ml
et une saturation en transferrine inférieure à 20 %.
Les auteurs des recommandations ASCO®/ASH 2010
avancent pour leur part que, bien que l’association
d’une supplémentation martiale soit généralement
recommandée pour majorer la réponse au traitement
par ASE en cas de carence martiale, il n’existe pas
d’évidence certaine pour recommander le fer injectable comme traitement standard en pratique (12).
Au regard de ces recommandations, dont les conclusions peuvent paraître floues, les auteurs de la métaanalyse ont donc évalué les résultats de 8 études
randomisées de phases II et III sélectionnées.
Le risque relatif (RR) d’obtenir une réponse hématopoïétique a été en faveur du fer injectable versus
le fer oral (RR = 1,29 ; IC95 : 1,13-1,48 ; p = 0,0001).
En fonction de l’ASE utilisé, les résultats montrent
une augmentation de la réponse de 85 % (RR = 1,85 ;
IC95 : 1,43-2,39 ; p < 0,00001) pour une association
du fer injectable avec les époétines alpha et bêta.
Cette augmentation est de 18 % (IC95 : 1,10-1,27 ;
p < 0,00001) avec la darbépoétine. On remarquera
que ce résultat vient corroborer celui d’une étude
de phase III publiée à la fin de 2010, qui n’a pas fait
la preuve que l’adjonction d’une supplémentation
en fer à un traitement par darbépoétine pourrait
avoir de l'intérêt (13).
L’association d’un fer oral avec un ASE ne permet pas
d’augmenter significativement la réponse hématopoïétique, quel que soit l’ASE utilisé.
Le risque de recourir à une transfusion a également
été significativement inférieur avec le fer injectable
versus le fer oral, et 1 seule étude est en faveur de
l’association ASE + fer injectable sur la diminution
du recours transfusionnel. Les effets indésirables
n’ont pas été significativement différents entre les
voies d’administration du fer.
La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 1 - janvier 2012 | 73
RÉTROSPECTIVE 2011
Soins oncologiques de support, retour sur 2011
Au bout du compte, en dehors d’une seule étude
négative (avec une sous-évaluation des carences
martiales), l’ensemble des essais évalués dans cette
méta-analyse est en faveur de l’utilisation du fer
injectable pour majorer la réponse à l'ASE avec lequel
il est donné. Ce résultat vient donc renforcer les
conclusions des recommandations NCCN présentées
cette année.
Des recommandations
sur les antiémétiques
et la douleur
Une mise à jour des recommandations ASCO® de
2006 portant sur l’utilisation des antiémétiques
dans les nausées et vomissements induits par les
CT et radiothérapies a été publiée cette année (14).
Ces recommandations sont destinées aux onco­
logues médicaux et radiothérapeutes ainsi qu’aux
infirmières en oncologie ; leurs points principaux
sont :
➤➤ les patients sous CT fortement émétisante
doivent recevoir une combinaison de 3 drogues
antiémétiques comprenant un inhibiteur de la
neurokinine de type I, un sétron et un corticoïde ;
➤➤ le sétron préféré dans le cadre des CT à risque
émétisant modéré est le palonosétron ; une association de cet agent avec un corticoïde est recommandée dans cette indication ;
➤➤ le traitement antiémétique prescrit dans le cadre
d’une polychimiothérapie dépend de la substance
ayant le potentiel émétisant le plus élevé de l’association ;
➤➤ corticoïdes et sétrons sont recommandés lorsque
sont données de hautes doses de CT ;
➤➤ en pédiatrie, une association corticoïdes +
sétrons doit être proposée, que le traitement soit
hautement ou modérément émétisant à la posologie
la plus élevée ;
➤➤ dans le cadre d'une radiothérapie à haut risque
émétique, un sétron doit être proposé avant chaque
fraction et un traitement par corticothérapie sur
5 jours est recommandé ;
➤➤ dans le cadre d’une radiothérapie à risque
émétique modéré, un sétron doit être proposé avant
chaque fraction ; un traitement par corticothérapie
sur 5 jours est optionnel ;
➤➤ dans le cadre d’une association radio-­
chimiothérapie, le risque de nausées et de vomissements de la CT prime, même si la radiothérapie
est fortement émétisante.
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Les principales modifications retenues à la lecture de
ces recommandations sont, pour les CT hautement
émétisantes :
➤➤ le passage de l’association anthracycline + cyclophosphamide en catégorie hautement émétisante ;
➤➤ la place du fosaprépitant (i.v.) équivalente à celle
de l’aprépitant (oral) ;
➤➤ la place de l’olanzapine, qui reste à définir dans
cette indication ;
➤➤ la corticothérapie doit être menée jusqu’à 3 ou
4 jours.
Pour les CT modérément émétisantes, les principales
modifications sont les suivantes :
➤➤ une double association corticoïdes de J1 à J3 avec
du palonosétron à J1 uniquement (ou à défaut granisétron ou ondansétron) est proposée ;
➤➤ l’intérêt de l’utilisation de l’aprépitant a été mis
en évidence par l’étude PN130 ; ces résultats sont
trop isolés pour proposer une recommandation
systématique, mais son utilisation est acceptée en
association avec n’importe quel sétron et en diminuant les doses de corticoïdes (qui sont d’ailleurs
en cours d’évaluation).
Pour les CT modérément émétisantes, l'on retiendra
notamment :
➤➤ pas de nouveauté, l’utilisation d’une cortico­
thérapie est préconisée ; on pourra noter ici la
différence avec les recommandations Multinational Association of Supportive Care In Cancer
(MASCC)/European Society for Medical Oncology
(ESMO) 2010, puisqu'il est désormais proposé de
choisir entre l’utilisation d’un corticoïde et celle d’un
sétron ou d’un antagoniste dopaminergique dans
cette indication.
Mais d’autres points sont à noter, tels que l’absence
de bénéfice des recommandations pour des médecines complémentaires et la place de l’olanzapine, en
cours de démonstration dans les nausées et vomissements en phase retardée.
En cas de nausées et vomissements réfractaires, il
est toujours recommandé de réévaluer le protocole antiémétique initial. L’adjonction de lorazépam
ou d'alprazolam ainsi que d'olanzapine peut être
évaluée. Il est également proposé de recourir au
métoclopramide injectable ou à un antagoniste
dopaminergique.
Pour les CT sur plusieurs jours, il n’y a pas de modification. Il est toujours suggéré d’administrer le traitement antiémétique approprié au grade de toxicité
émétique et de le poursuivre jusqu’à 2 jours après
la fin d’administration de la CT.
Quant aux nausées et vomissements induits par
la radiothérapie (NVIR), l’utilisation d’un sétron
RÉTROSPECTIVE 2011
avant chaque séance de radiothérapie, qu’elle soit
hautement émétisante (irradiation corporelle totale)
ou modérément émétisante (partie supérieure de
l’abdomen, du corps, irradiation hémicorporelle), est
recommandée. Dans le cas de l'irradiation hautement émétisante, le sétron est également préconisé
le lendemain de sa fin et en association avec une
corticothérapie durant les fractions 1 à 5. Cette
même corticothérapie est proposée également dans
les irradiations modérément émétisantes.
Dans le cas des irradiations à faible risque, un traitement de sauvetage par sétron seul est proposé.
Ce dernier sera alors poursuivi jusqu’à la fin de
l’irradiation.
Pour les irradiations de risque émétique minime, seul
un traitement de sauvetage par sétron ou antagoniste dopaminergique est proposé.
Les auteurs de ces recommandations américaines
ont intégré le recours à l’utilisation de sétron en
lyophilisat oral, de granisétron en patch transdermique et de palonosétron sous forme orale ou
intraveineuse.
Ils ont également insisté sur l’importance du dépistage spécifique des nausées, sous-évaluées, afin
d’optimiser à l’avenir le confort des malades sous
CT ou radiothérapie.
Dans l’attente des Standards, Options Recommandations (SOR) français, en cours de mise à jour par les
différentes sociétés savantes, l’ESMO a publié ses
recommandations pratiques pour la prise en charge
de la douleur cancéreuse (15).
L’évaluation de la douleur peut être menée par le
biais de 3 échelles : l’échelle visuelle analogique,
l’échelle verbale et l’échelle numérique simple
(ENS). En cas de troubles cognitifs, les signes
d’inconfort doivent être recherchés. L’ensemble
des composantes de la douleur cancéreuse doit
également être analysé, par exemple la détresse
psychosociale. Cette évaluation doit être effectuée
régulièrement.
En ce qui concerne la prise en charge, tous les
soignants doivent être mobilisés autour de l’évaluation et de la gestion de la douleur. La voie orale
semble être la plus aisée, et les traitements proposés
seront ceux qui sont le plus facilement gérables par
le patient et ses proches, en incluant un traitement
de fond mais également un traitement des accès
douloureux paroxystiques. Les 3 paliers de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sont toujours
d’actualité pour évaluer et adapter le traitement
antalgique (douleur faible : ENS ≤ 4 ; modérée : ENS
5-6 ; sévère : ENS ≥ 7).
Le traitement des douleurs faibles s’appuie sur le
paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), avec une vigilance particulière pour
les inhibiteurs de la COX-2.
Les douleurs modérées sont prises en charge par
une combinaison d’antalgiques non opioïdes et
d’opioïdes mineurs tels que la codéine, le tramadol
et la dihydrocodéine. Il est également proposé d’utiliser de faibles doses d’opioïdes forts (palier 3) en
remplacement des opioïdes mineurs.
Les douleurs sévères sont prises en charge par des
opioïdes forts en fonction de leur disponibilité dans
les différents pays ; néanmoins, le choix doit se porter
d’abord vers la morphine orale. Les administrations
transcutanées devraient être réservées aux douleurs
stabilisées.
Les accès douloureux paroxystiques doivent être
gérés par des interdoses d’opioïdes à demi-vie
courte et dispensation rapide. Lorsque le patient
doit prendre plus de 4 doses par jour, il faut réévaluer
la posologie du traitement de fond.
Les autres techniques antalgiques, telles que la
radiothérapie sous ses différentes formes (externe,
métabolique), peuvent être proposées, notamment
dans le cadre des métastases osseuses douloureuses.
Le cas des biphosphonates a été discuté dans ces
recommandations. Ces derniers ne doivent pas représenter une alternative aux traitements antalgiques,
et il convient que leur prescription soit systématiquement précédée d’une évaluation dentaire.
Les douleurs neuropathiques peuvent être traitées
soit par antidépresseur tricyclique, soit par anti­
convulsivant, la prise en compte des effets indésirables de ces traitements étant nécessaire.
Enfin, dans le contexte des douleurs de fin de vie,
certaines situations réfractaires peuvent amener à
choisir la voie de la sédation. Cette dernière doit être
titrée afin de trouver la dose minimale efficace et
après avoir identifié toutes les causes de douleurs
accessibles à un autre traitement étiologique.
Si cette mise à jour des recommandations précédentes ne bouleverse pas les données connues, elle
permet toutefois de rappeler l’enjeu majeur que
représente au quotidien la lutte contre la douleur
cancéreuse.
Quelques brèves
Dans une revue de la littérature, l’équipe de
M. Lacouture a montré quel était l’impact des
thérapies ciblées de l’Epidermal Growth Factor
Receptor (EGFR) sur les modifications unguéales :
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Soins oncologiques de support, retour sur 2011
le risque de développer une toxicité unguéale était de
17,2 % (IC95 : 13,8-21,3), dont 1,4 % de grades 3 et 4
(IC95 : 0,9-2,1) [16]. Ce risque devrait être corrélé aux
agents cytotoxiques associés, mais une intervention
précoce doit être menée afin de prévenir la survenue
d’une telle toxicité.
On pourra également recommander la lecture des
recommandations pour la prévention et le traitement des toxicités cutanées liées aux inhibiteurs
de l’EGFR, dont le premier auteur est le même
M. Lacouture (17).
La prévalence et les facteurs associés à des troubles
de la sexualité après traitement pour un cancer du
sein localisé ont été analysés par l’équipe de l’institut
Curie à Paris (18). Un ensemble de 850 patientes
âgées de 18 à 70 ans ont été interrogées à distance
de la prise en charge de leur pathologie (entre
6 mois et 5 ans). Des échelles de qualité de vie,
d’image corporelle et d’évaluation des dysfonctions
sexuelles ont été soumises aux 378 patientes (53 %)
ayant accepté de participer. La survenue de troubles
sexuels a été plus importante pour ces patientes que
pour un échantillon représentatif de la population
féminine non malade (p < 0,0001). L’absence de
satisfaction ou d’activité sexuelle a été associée
à une sensation de distance émotionnelle dans le
couple ou de crainte ressentie par le partenaire face
à l’acte sexuel, à une mauvaise image corporelle et
à des comorbidités. Les patientes ayant une activité sexuelle conservée ont néanmoins éprouvé une
diminution de celle-ci ainsi qu’un inconfort sexuel,
liés aux mêmes sujets de plaintes. L’âge (plus de
50 ans), les nausées et l’insomnie ont également
été des facteurs limitant l’activité sexuelle.
Le recours des hommes aux médecines complémentaires et alternatives (MAC) a été évalué
dans le cadre d’une étude australienne (19). Sur
403 patients, 52,9 % des hommes interrogés ont eu
recours régulièrement aux MAC et 61,5 % pour une
indication précise. Les compléments alimentaires
(36,1 %), les prières (25,9 %), les herbes médicinales
(21,4 %) et les techniques de relaxation (15,2 %) ont
été les techniques les plus utilisées. Seulement 9,9 %
des patients ont été adressés par leur spécialiste.
Les facteurs prédictifs de recours aux MAC ont été
le stade avancé de la maladie (p = 0,022), le caractère religieux pratiquant (p = 0,008) et un niveau
d’éducation élevé (p = 0,007).
■
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76 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 1 - janvier 2012
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