Signes cutanés des pathologies endocriniennes

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Article
Journées
Nationales du DES
d’EndocrinologieDiabète et Maladies
Métaboliques
Christophe J.
Le Coz
Cabinet de
Dermatologie,
19 rue de l’Observatoire
67000 Strasbourg
& Laboratoire
de Dermatochimie,
4 rue Blaise Pascal BP
1032 67070 Strasbourg
Cedex
Tél : 33 3 88 60 13 12
Fax : 33 3 88 60 82 99
E-mail : christophe.
[email protected]
Mots clés :
syndrome de Cushing,
maladie d’Addison,
myxœdème,
hyperthyroïdie,
diabète
Signes cutanés des pathologies
endocriniennes
L
La plupart des endocrinopathies s’accompagnent de manifestations cutanées, des
muqueuses et/ou des phanères. Celles-ci
peuvent révéler l’affection ou apparaître en
cours d’évolution, éventuellement après traitement. Leur physiopathologie est variable :
effet direct sur le tégument de l’excès ou de
l’insuffisance hormonale (myxœdème de l’hypothyroïdie par exemple) ou des processus
tentant de compenser l’insuffisance hormonale (mélanodermie de la maladie d’Addison
par exemple), conséquences indirectes sur la
peau des dysfonctionnements d’organes (dans
le diabète), rôle du processus physiopathologique lui-même, effets secondaires des médicaments...
Affections thyroïdiennes
Hypothyroïdie [1-3]
Les signes cliniques seront d’autant plus
flagrants que la maladie aura longtemps
évolué, ceci étant plus fréquemment le cas lors
des hypothyroïdies primitives.
Signes cutanés
Le myxœdème infiltre diffusément peau
et muqueuses : la peau est capitonnée par un
œdème ne prenant pas le godet. Le visage
cireux, lunaire, donne un aspect d’hébétude :
paupières infiltrées, joues tombantes, nez élargi,
lèvres gonflées et entrouvertes, froides et parfois
cyanosées tout comme les pommettes. Cette
infiltration myxœdémateuse est également
manifeste dans les creux sus-claviculaires et aux
extrémités (doigts boudinés, froids voire cyanosés). Sur les muqueuses, le myxœdème induit
macroglossie, raucicité de la voix, ronflements,
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surdité et bourdonnement d’oreilles. Le myxœdème résulte d’une accumulation dermique et
chorionique de mucopolysaccharides dont la
chondroïtine sulfate et l’acide hyaluronique,
hydrophiles, dont la dégradation est diminuée ;
d’une baisse du drainage lymphatique et d’une
extravasation protéique ; il épargne les hypothyroïdies d’origine hypophysaire.
La peau est sèche, par hyperkératose
épidermique et diminution des sécrétions sébacée et sudorale. Ceci peut se traduire par un
eczéma craquelé astéatotique, une kératodermie palmo-plantaire. On note encore fragilité
cutanée, ecchymoses et retards de cicatrisation.
On observe une caroténodermie (qui participe à la couleur cireuse) par défaut de conversion du carotène en vitamine A, qui se traduit
par une coloration orange des paumes et des
plantes.
Les poils tombent : la queue du sourcil est
dépilée (ce signe de Hertoghe est peu spécifique, fréquent chez les sujets âgés et lors du
prurit de la dermatite atopique), les cheveux
secs et cassants. On note une diminution de la
pilosité axillaire et pubienne. Les ongles sont
cassants et poussent lentement.
Accompagnant l’infiltration de la face,
des mains et des pieds, la macroglossie, l’hernie ombilicale et l’hypotonie musculaire, les
troubles psychomoteurs du crétinisme (idiotie myxoedémateuse de Bournevile) sont
l’apanage de l’hypothyroïdie congénitale. Le
nanisme dysharmonieux survient en cas d’hypothyroïdie juvénile non traitée.
Signes extra-cutanés
Les autres signes cliniques traduisent le
ralentissement global du fonctionnement
de l’organisme : asthénie, ralentissement
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psychique et physique, frilosité, prise de
poids malgré la perte d’appétit, bradycardie, crampes et fatigabilité musculaires, constipation.
Confirmation diagnostique
Elle se fait par l’élévation-précoce- de
la TSH (en cas d’hypothyroïdie périphérique) et la baisse de la fT4 (et de la fT3).
Traitement
L’opothérapie substitutive permet
une disparition des symptômes survenant chez l’adulte.
Hyperthyroïdie [1-6]
Le patient consulte parfois le dermatologue en raison d’un prurit, d’un
dermographisme urticarien ou d’une
urticaire.
Signes cutanés
L’hyperactivité du système sympathique entraîne vasodilatation et hypersudation. La peau est chaude, érythémateuse. Le patient se plaint de bouffées
de chaleur et de poussées d’érythrose du
visage (flush). On rencontre une hyperidrose surtout palmo-plantaire, détectable en serrant la main du patient. Le
prurit est fréquent, majoré par la nervosité du patient. Un dermographisme
urticarien ou une urticaire peut révéler la dysthyroïdie. Une pigmentation
addisonienne est possible par augmentation des concentraions d’ACTH, en cas
de maladie d’Addison associée, de même
qu’une hyperpigmentation palpébrale.
Des érythrodermies dues à une hypercalcitoninémie, par hypersécrétion de
thyrocalcitonine par les cellules C de la
thyroïde, ont été décrites.
L’atteinte phanérienne se manifeste
par des cheveux fins et soyeux ou une
alopécie diffuse, classiquement aggravée
par les prises des traitements (carbimazole, propylthiouracile ou benzythiouracile), ongles fins, brillants à pousse rapide,
hippocratisme digital, onycholyse.
Le myxœdème prétibial touche
moins de 10% des patients : il s’agit
d’une infiltration de la partie inférieure
des crêtes tibiales, ferme, en nodules ou
en plaque réalisant un aspect de peau
d’orange ou ayant une allure bosselée,
survenant le plus souvent après traitement chirurgical ou radio-isotopique
d’une maladie de Basedow, rarement
comme signe annonciateur de la maladie. Son équivalent antébrachial réalise
une mucinose préradiale. Il résulte d’une
synthèse accrue et d’une accumulation
de glycosaminoglycanes produits par les
fibroblastes, peut-être stimulés par un
facteur sérique.
Dans la maladie de Basedow, se
rajoutent un goitre et une atteinte
oculaire. L’exophtalmie peut être précédée d’un œdème palpébral qui est
souvent pris à tort pour une manifestation allergique. L’imagerie (scannographie ou mieux IRM) permet de visualiser l’hypertrophie des muscles orbitaires
responsable de cette ophtalmopathie basedowienne. Le syndrome de
Diamond associe un myxœdème prétibial, une exophtalmie et un hippocratisme digital ou une ostéoarthropathie
de Pierre-Marie, encore nommée acropathie thyroïdienne. Cette dernière est
due à une néoformation osseuse à partir
du périoste des doigts et des os longs.
Signes extra-cutanés
Ce sont des signes de thyréotoxicose : nervosité, labilité émotionnelle
avec asthénie, tremblement distal, tachycardie, amaigrissement malgré la polyphagie, polydipsie, diarrhées motrices.
Confirmation diagnostique
On note un abaissement de la
concentration de TSH et une augmentation de celle des hormones thyroïdiennes.
Traitement
Les signes cutanés disparaissent avec
le traitement de l’hyperthyroïdie. Le
myxœdème prétibial est toutefois difficile à soigner, requérant le plus souvent
une corticothérapie locale à forte dose.
Affections
parathyroïdiennes [1, 3, 7]
Hyperparathyroïdie
Le prurit est classiquement fréquent,
généralisé, sine materia (sans signes
autres que des lésions de grattage).
Des calcifications cutanées ou souscutanées peuvent apparaître lorsque
s’élève le produit calcium-phosphore.
Elles sont ainsi plus fréquentes dans les
hyperparathyroïdies secondaires à une
insuffisance rénale chronique. Elles se
manifestent par un livédo, des placards
infiltrés, des papules, des nodules souscutanés. Les atteintes de la graisse hypodermique induisent des placards nécrotiques ou une sclérose cutanée.
Hypoparathyroïdie
Les manifestations cutanées associées sont peu spécifiques : xérose cutanée, éruption eczématiforme, alopécie,
onychopathies diverses (stries et fissure,
onycholyse distale, ongles cassants).
Les candidoses cutanéo-muqueuses
chroniques (ongles et cavité buccale) se
rencontrent en cas de polyendocrinopathie auto-immune type APECED ou de
syndrome de Di George.
Des éruptions pustuleuses amicrobiennes sont imputées à l’hypocalcémie (due à une hypoparathyroîdie ou
non): psoriasis pustuleux gravidique
(ancien « impétigo herpétiforme »),
pustulose généralisée amicrobienne non
gravidique.
Dans les pseudo-hypoparathyroïdies et les pseudo-pseudo-hypoparathyroïdies, dues à des anomalies génétiques des récepteurs hormonaux, on
observe un retard mental, des anomalies
du morphotype, et des calcifications ou
ossifiations sous-cutanées (en particulier
dans le syndrome d’Albright).
Affections surrénaliennes
Syndrome de Cushing [1, 3, 8, 9]
Le syndrome de Cushing résulte d’un
excès d’hormones glucocorticoïdes.
Signes cutanés
L’obésité facio-tronculaire résulte
d’une modification de la répartition
des graisses. Le facies bouffi et lunaire
s’accompagne d’une bosse de bison
(buffalo-hump), d’une obésité abdominale contrastant avec la maigreur amyotrophique des membres. Le visage est
rouge, vultueux, avec des télangiectasies.
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Article
L’atrophie cutanée accentue le
vieillissement photo-induit : peau en
papier à cigarette, réseau veineux visible,
ecchymoses spontanées ou au moindre
traumatisme (purpura de Bateman),
cicatrices stellaires blanchâtres
(Figure 1). Elle s’accompagne de retards
de cicatrisation. Les vergetures sont
souvent impressionnantes : pourpres,
larges et profondes, sur l’abdomen, les
seins et la racine des membres (Figure 2).
L’acné touche principalement le
tronc : les lésions sont monomorphes,
inflammatoires sans comédons, papulopustuleuses.
Les femmes souffrent d’hirsutisme
facial, parfois d’alopécie androgénique
et d’hypertrophie clitoridienne et les
hommes se plaignent d’impuissance.
Une mélanodermie rappelant celle
des addisoniens (par hypersécrétion
de proopiomélanocortine en cas d’atteinte pituitaire), un acanthosis nigricans peuvent apparaître. Les infections
cutanées fongiques, à levures et dermatophytes, sont plus fréquentes.
Signes extra-cutanés
Hypertension artérielle, asthénie,
insomnie, troubles psychiques avec
dépression, faiblesse musculaire par
amyotrophie, tassements vertébraux par
ostéoporose.
Diagnostic
Hypokaliémie, hyperglycémie et
élévation de la cortisolurie des 24 heures,
test de freination à la dexaméthasone.
Traitement
Le traitement étiologique ne permet
qu’une régression lente et partielle des
symptômes cutanés ; l’acné disparaît,
les vergetures pâlissent mais persistent,
l’atrophie cutanée est longue à s’atténuer.
Maladie d’Addison [1, 3, 10, 11]
Elle associe une mélanodermie et les
signes généraux d’insuffisance en glucocorticoïdes et minéralocorticoïdes.
Signes cutanés
La mélanodermie, de couleur brunrouge ou gris-brunâtre, bronzée, prédomine aux zones normalement les plus
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Figure 1. Conséquences cutanées d’un excès de
glucocorticoïdes (ici par application itérative durant
plusieurs mois), avec atrophie cutanée, purpura
ecchymotique de Bateman, cicatrices stellaires et
hypertrichose.
Diagnostic
On observe une tendance à l’hyponatrémie (avec natriurèse élevée) et à
l’hyperkaliémie, une anémie, lymphocytose, hypoglycémie, faible réponse au
test au Synacthène, élévation de l’’ACTH
plasmatique en cas d’atteinte périphérique, abaissement des taux de gluco et
minéralo-corticoïdes.
Traitement
Le traitement substitutif fait disparaitre plus ou moins rapidement la mélanodermie, qui persiste sur les cicatrices.
Phéochromocytome
F i g u r e 2 . Vergetures pourpres, larges et
profondes devant faire rechercher un syndrome de
Cushing, ici iatrogène.
colorées : zones découvertes, plis de
flexion, régions génitales et mamelons,
cicatrices anciennes, surfaces soumises à
la friction ou irritées. Une mélanonychie
en bandes est possible. Les pigmentations muqueuses affectent joues, lèvres,
langue, gencives et palais. Les cheveux
peuvent foncer, de même que les naevus
anciens ; l’apparition de nouveaux naevus
est possible. Cette pigmentation exagérée
résulte d’une stimulation du fonctionnement mélanocytaire par l’ACTH synthétisée en excès par l’hypophyse en réponse à
l’insuffisance surrénalienne périphérique.
Chez la femme, la privation en
androgènes, dont les surrénales sont les
principales pourvoyeuses, entraîne une
dépilation axillaire et pubienne. Un
vitiligo oriente vers une origine autoimmune comme dans les polyendocrinopathies de type 1 ou 2.
Signes extra-cutanés
Ils associent asthénie croissante
dans la journée, hypotension orthostatique, déshydratation et amaigrissement
par anorexie, instabilité émotionnelle,
douleurs abdominales, douleurs musculaires ou articulaires, aménorrhée.
La triade classique associe céphalées,
sueurs et palpitation. Ces crises, liées à
la décharge de catécholamines, surviennent chez un sujet brutalement pâle,
victime d’une poussée hypertensive.
Le phéochromocytome peut être
associé à une affection génétique :
neurofibromatose de type I (maladie de
von Recklinghausen), maladie de von
Hippel-Lindau (angiomatose rétinienne),
néoplasie endocrinienne multiple de
type 2, le syndrome phéochromocytomeparagangliome. Le diagnostic est fait par
la mise en évidence de l’élévation des
catécholamines urinaires.
Maladies hypophysaires
[1, 12, 13]
Touchant avec plus ou moins d’intensité les sécrétions antéhypophysaires
stimulant les fonctions gonadiques (FSH,
LH), surrénaliennes (ACTH) et thyroïdiennes (TSH), ainsi que les productions
d’hormone de croissance (GH), de prolactine, elles induisent divers signes cutanés.
Insuffisance hypophysaire
L’insuffisance hypophysaire peut être
partielle ou globale. Les signes cutanés
concernent pigmentation, structures
dermo-épidermiques et fonction pilosébacée.
La pâleur cutanéo-muqueuse est en
rapport avec l’anémie et l’hypomélanose par baisse de la pigmentation cutanée (baisse de la sécrétion d’ACTH),
plus visible sur les zones normalement
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pigmentées. Le sujet devient sensible
au soleil, ne bronze plus ou peu. La
peau s’atrophie, devient sèche et squameuse. Les cheveux sont fins et rêches,
les ongles cassant et poussant peu. La
carence en androgène fait perdre la pilosité axillaire puis pubienne.
Le malade décrit asthénie et frilosité,
avec baisse de la libido chez la femme
ou impuissance chez l’homme.
Diagnostic
Elévation de la GH (souvent de la
prolactine) et de l’IGF-1 ; ceci concerne
les concentrations basales et lors de l’hyperglycémie provoquée par voie orale.
Les polyendocrinopathies
[1, 3, 14, 15]
Plusieurs atteintes du système endocrinien peuvent affecter le même sujet
Adénome à prolactine
Le syndrome aménorrhée-galactorrhée affecte la femme. Il peut s’associer à
une obésité, un hirsutisme, une hyperséborrhée. L’homme souffrira de galactorrhée avec gynécomastie et signes d’hypogonadisme (fatigue, impuissance).
Acromégalie et gigantisme
Signes cutanés
Le syndrome dysmorphique de l’acromégalie apparaît très progressivement.
Il est dû à l’hypertrophie osseuse et à
celle des parties molles (peau, tissu souscutané et viscères). On note une accumulation de glycosaminoglycanes et une
hyperplasie épidermique et annexielle,
en réponse à l’hypersécrétion d’hormone de croissance et celle, consécutive,
d’IGF-1. Le visage est infiltré, avec proéminence des arcades sourcilières, empâtement et protrusion des lèvres, du nez,
des oreilles larges et triangulaires, front
plissé, aspect de cutis verticis gyrata du
cuir chevelu, prognathisme. Le sujet voit
s’épaissir mains et pied, les doigts apparaissant courts et boudinés, avec des
ongles épais. Hyperséborrhée, pores dilatés, hyperidrose sont habituelles. On peut
observer une hypertrichose, des molluscum pendulum multiples, une mélanodermie diffuse ou un acanthosis nigricans. Un syndrome du canal carpien est
fréquent.
Signes extra cutanés
L’organomégalie touche la langue
avec macroglossie, ainsi que les viscères.
Les troubles visuels par compression
surviennent en cas de tumeur hypophysaire. Le gigantisme touchera l’enfant
dont les épiphyses osseuses ne se sont
pas soudées.
Les polyendocrinopathies
auto-immunes
Elles associent au moins deux endocrinopathies auito-immunes.
Le rare type 1 est encore dénommé
APECED (autoimmune-poly-endocrinopathy-candidiasis-ectodemal-dystrophy), associe une candidose cutanéo-muqueuse
dès la petite enfance, une hypoparathyroïdie puis une maladie d’Addison.
Diabète insulino-dépendant, hypogonadisme, maladie thyroïdienne, pelade et
vitiligo, hépatite autoimmune, dysplasie ectodermique (altérations dentaires et
unguéales) peuvent compléter le tableau
clinique. L’atteinte est autosomique
récessive, liée à des mutations du gène
AIRE situé en sur le chromosome 21q22.3
et contrôlant l’auto-immunité.
Le type 2 concerne plus souvent la
femme, associant souvent un diabète de
type 1, une maladie d’Addison et/ou une
thyroïdite auto-immune.
Le syndrome POEMS
L’ a c r o n y m e ( P o l y n e u r o p a t h y,
Organomegaly, Endocrinopathy, Monoclonal
protein, Skin changes) désigne un syndrome
associé à une dyscrasie plasmocytaire
(plasmocytome ou myélome). Les signes
cutanés associent hyperpigmentation
diffuse ou des extrémités, état sclérodermiforme, hypertrichose, atrophie des boules
graisseuses de Bichat, angiomes cutanés
tubéreux gloméruloïdes en histologie,
d’apparition brutale et leuconychies.
Les néoplasies endocriniennes
multiples
Ces syndromes malformatifs
complexes très rares se définissent par
la présence de tumeurs d’au moins deux
glandes endocrines. Les signes cutanés
concernent :
– Le syndrome de Gorlin (NEM2B) :
phéochromocytome, carcinome
médullaire de la thyroïde et neuromes
multiples
– Le syndrome de Wermer ou NEM1 :
il associe adénome ou hyperplasie des
parathyroïdes, adénome antéhypophysaire, hyperplasie ou tumeur du pancréas
endocrine et parfois atteinte corticosurrénale. Les manifestations cutanées
sont des angiofibromes, des collagénomes, des macules hypopigmentées,
des lipomes, des papules des gencives
– Le syndrome de Carney avec
myxomes cardiaques et (sous-)cutanés,
lésions pigmentées (naevus, lentigos) et
troubles endocriniens (surrénale, testicules, hypophyse)
Le diabète [3, 16, 17, 18]
Le diabète compliqué s’accompagne
d’altérations des fonctions vasculaires,
oculaires, rénales et neurologiques. Sur
la peau, la microangiopathie diabétique
et la macroangiopathie, la neuropathie
et d’autres altérations comme la glycosylation du collagène ou des éléments figurés du sang se combinent dans la physiopathologie d’affections diverses.
Manifestations vasculaires
Ont été décrites diverses situations
pouvant relever de la microangiopathie.
Le pseudo-érysipèle réalise un érythème
bien limité des pieds et des jambes. La
rubéose diabétique se manifeste par
une rougeur ou une roseur de la face.
L’érythème palmo-plantaire peut être
associé à la rubéose faciale.
La macroangiopathie est responsable
d’athérome avec artérite des membres
inférieurs, gangrènes des orteils et risque
majeur d’amputation.
Infections cutanées
Elles sont plus fréquentes chez les
diabétiques, favorisées par le défaut
d’oxygénation tissulaire, l’altération
des fonctions de polynucléaires neutrophiles.
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Article
Streptococcies et staphylococcies
sont fréquentes, pouvant conduire à la
formation d’abcès d’évolution torpide.
Les infections à Peudomonas aeruginosa,
ou à germes anaérobies peuvent avoir un
proniostic catastrophique.
Les candidoses cutanées et
muqueuses sont plus fréquentes en cas
d’obésité (candidose buccale, interdigitale, atteinte des plis, balanite avec
phimosis chez l’homme), récidivant
en cas de déséquilibre du diabète. Elles
occasionnent un érythème rouge vif,
prurigineux, accompagné de pustules
avec une collerette desquamative périphérique en cas d’atteinte cutanée.
Les dermatophytoses des pieds (intertrigo et onyxis) sont des portes d’entrées
pour les infections bactériennes potentiellement graves (érysipèle, cellulite).
Manifestations cutanées variées
Nécrobiose lipoïdique
Quoique rare chez le diabétique
(environ 1%), elle est classiquement
évocatrice de cette affection. Il s’agit
de placards pré-tibiaux ovalaires à
grand axe vertical, d’évolution scléroatrophique. Les bords polycycliques
sont nets, surélevés, télangiectasiques,
alors que le centre cicatriciel est lisse et
brillant, souvent jaunâtre.
Etats scléreux et sclérodermiformes
La sclérose des extrémités digitales et
des mains, s’accompagne parfois d’un
enraidissement articulaire avec tendinopathie et impossibilité d’extension
totale des mains. La forme cutanéo-articulaire affecte surtout les diabètes de
type 1 mal contrôlés.
Le sclérœdème diabétique infiltre
initialement en pèlerine la peau de
la partie haute du tronc et du cou des
diabétiques de type 2. Il peut se généraliser mais habituellement sans conséquence grave. Sa physiopathologie est
mal connue.
Bullose des diabétiques
Il s’agit de bulles non inflammatoires,
apparaissant en cas de diabète compliqué.
Elles surviennent préférentiellement aux
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Le pied diabétique
Figure 3. Les onychomycoses à dermatophytes
constituent des portes d’entrée infectieuses et
doivent être traitées
zones traumatisées (mains, pieds, jambes
et avant-bras) et cicatrisent en quelques
jours ou semaines.
Dermopathie diabétique
Ce sont de petites lésions infracentimétriques des crêtes tibiales ou des
avant-bras, initialement papuleuses,
devenant atrophiques et pigmentées.
Peu spécifiques, plus fréquentes chez
l’homme, elles semblent induites par
les microtraumatismes.
Vitiligo
Il est plus fréquent chez les diabétiques, en faveur (mais non systématiquement) d’une origine autoimmune du
diabète.
Xanthomes éruptifs
Ce sont des papules rouges, jaunâtres
ou brunes. Ils apparaissent brutalement
sur les fesses et les cuisses en cas d’hyperlipémie portant sur les triglycérides.
Molluscum pendulums
Ces lésions pédiculées apparaissent
dans les régions axillaires, cervicales,
inguinales et aux paupières. Ils semblent
plus fréquents chez les diabétiques obèses.
Acanthosis nigricans
Il s’agit d’un épaississement
pigmenté des plis de flexion : cou, plis
axillaires, inguinaux. Il traduit une
insulinorésistance, et s’associe le plus
fréquemment à une surcharge pondérale. Le mécanisme résulterait d’une
fixation de l’insuline sur les récepteurs
des facteurs de croissance kératinocytaires et fibroblastiques.
C’est l’une des plus graves conséquences du diabète compliqué. En
raison de l’amyotrophie, de la raideur
articulaire, et de l’hypoesthésie profonde
le diabétique est exposé à des troubles de
la statique du pied, responsable de l’apparition de callosités. Durillons et cors,
indolores en cas de neuropathie, sont
responsables de complications qui, sous
l’effet de l’artériopathie et des altérations des fonctions des polynucléaires
neutrophiles, peuvent conduire à l’amputation : décollement cutané sous les
durillons et infarcissement de durillons,
apparition de mal performant plantaire,
surinfections cutanées, sous-cutanées
avec gangrène, osseuses avec ostéomyélite, tendineuses et articulaires.
Outre l’équilibre du diabète, les soins
locaux (chaussage convenable, lavage et
séchage des pieds, traitement des infections) et de pédicurie sont indispensables. Les consultations spécialisées dans
le traitement du pied diabétique (collaboration dermatologue-endocrinologuechirurgien orthopédiste) sont utiles.
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