Unités de soins Alzheimer Rares mais nécessaires L’un des problèmes aigus de santé publique pour les années futures est celui de la prise en charge de la maladie d’Alzheimer. Le diagnostic et le suivi médical des patients nécessitent une véritable spécialisation des personnels soignants. D’où l’intérêt de créer des unités spécifiques. M ême si la maladie d’Alzheimer est, pour l’instant, une pathologie difficile, il est possible d’agir pour soulager les patients (et leurs familles). En effet, de nombreux facteurs provoquent ou aggravent les différents troubles, dont les évolutions sont influencées par les médicaments cholinergiques, mais aussi la façon de prendre en charge le patient. Les soins doivent donc être adaptés et il devient nécessaire de former des personnels qualifiés qui travaillent dans un environnement adéquat. Un problème de société On estime que, dans 20 ans, plus de 600 000 personnes seront atteintes de maladie d’Alzheimer. De graves problèmes de santé publique se poseront alors, car ces personnes désorientées (pendant environ 80 % du temps), ne peuvent plus vivre à domicile. Il vient un moment où le placement en institution s’impose. Mais les institutions pour personnes âgées sont-elles aptes à recevoir ces personnes particulières ? « La maladie d’Alzheimer, affirme le Pr Vellas, du CHU de Toulouse, évolue en moyenne sur 8 à 10 ans, avec un maximum autour de 20 ans ; il est donc essentiel de prévoir un environnement médical de qualité capable de faire face aux problèmes posés dans la durée. » Premiers éléments de solution : le développement de systèmes de soins en réseau comprenant les services à domicile avec personnel soignant et médecin généraliste, les centres de diagnostic, les 8 centres de jour, les unités de soins aigus et celles spécialisées dans les moyens et longs séjours. Diagnostic trop tardif Tout d’abord, un véritable déficit diagnostique de la maladie est à déplorer. En effet, seul un patient atteint sur deux est détecté. Pourtant, des tests simples existent et sont à la portée de tout médecin traitant. Une fois le diagnostic confirmé par un neurologue ou par un centre spécialisé, commence alors, pour la famille comme pour l’équipe soignante, un véritable parcours d’obstacles. Peu d’infirmières, peu de médecins sont formés pour aborder ce genre de malade au sein d’une famille elle-même mal préparée car mal informée sur la maladie. « Il y a donc véritablement urgence, poursuit le Pr Vellas, comme nous le faisons à Toulouse, à mettre en œuvre un projet de soins spécialisé, finalisé avec la famille et le per- Unité de soins spécialisés • Les patients sont en état de démence caractérisée. • L’environnement architectural adapté permet d’éviter les fugues, les accidents, tout en assurant un maximum de confort au patient et à sa famille. • Le personnel est formé, spécialisé et expérimenté. • La famille est impliquée, jusqu’à la faire participer aux soins. • Un projet spécifique de soins et d’activités est assuré. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 23 - janvier-février 2001 sonnel médical, dans lequel tout le monde trouverait sa place. Il y a aussi urgence à aménager, en nombre suffisant, des unités de soins spécialisées au sein même des maisons de retraite comme des services hospitaliers. Car peu de maisons, peu d’hôpitaux sont en effet équipés pour recevoir de tels patients qui perturbent nécessairement la bonne marche de tout l’établissement, au point parfois de contraindre à l’utilisation de camisoles chimiques ou de contentions physiques pour des personnes qui n’en auraient nullement besoin dans une structure adaptée à leur cas. Sans surcoût, ni en matériel ni en personnel, il convient simplement de penser l’environnement en fonction de la maladie, comme une crèche est adaptée aux enfants qui la fréquentent. » Au sein de l’unité, l’équipe soignante comprend des infirmières et aides-soignantes, des gériatres, des psychiatres, des neurologues, des psychologues, une diététicienne et une assistante sociale. Leur rôle, grâce à un fonctionnement multidisciplinaire, est d’assurer le suivi des patients, d’informer et d’éduquer les familles, ce qui diminue notablement les troubles comportementaux du malade, voire facilite sa resocialisation. Peu de centres ayant développé ce projet thérapeutique existent en France : quatre dans le Sud de la France (de Montpellier à Bordeaux, avec Marseille et Toulouse) et un dans le Nord (Lille). Ce type de projet devient pourtant nécessaire. D’une part, pour la santé du patient lui-même, d’autre part, pour la qualité de vie des autres résidents des institutions et pour la qualité des soins dispensés par les soignants. Devra-t-on, là aussi, attendre, pour développer cette prise en charge, que le problème devienne incontournable ? Dr Michel Farge