VIE PROFESSIONNELLE
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La Lettre du Rhumatologue - n° 257 - décembre 1999
e médecin est tenu de donner
une information sur les
risques graves afférents aux
investigations et soins proposés, et
il n’est pas dispensé de cette obli-
gation par le seul fait que ces
risques ne se réalisent qu’excep-
tionnellement.
L’acte de soin constitue une atteinte à l’in-
tégrité physique de la personne, qui ne
devient légitime que par la réunion de deux
conditions : un but thérapeutique et le
consentement de la personne. Pour qu’il
soit valable, le consentement doit être
éclairé, c’est-à-dire précédé d’une infor-
mation complète, intelligible et loyale. Se
posent ainsi les questions de l’étendue de
l’information préalable et des moyens de
preuve.
LE CADRE LÉGAL
L’énoncé solennel de la règle relève désor-
mais de l’article 16-3 du Code civil : “Il ne
peut être porté atteinte à l’intégrité du corps
humain qu’en cas de nécessité thérapeu-
tique pour la personne. Le consentement
de l’intéressé doit être recueilli préalable-
ment, hors le cas où son état rend néces-
saire une intervention thérapeutique à
laquelle il n’est pas à même de consentir.”
Le Code de déontologie médicale précise
en son article 35 : “Le médecin doit à la
personne qu’il examine, qu’il soigne ou
qu’il conseille une information loyale,
claire et appropriée sur son état, les inves-
tigations et les soins qu’il lui propose. Tout
au long de la maladie, il tient compte de la
personnalité du patient dans ses explica-
tions et veille à leur compréhension.”
L’APPORT JURISPRUDENTIEL
Le régime de l’information préalable a été
très discuté en jurisprudence et la Cour de
cassation, par trois arrêts rendus le
14 octobre 1997, le 27 mai 1998 et le
7octobre 1998, a fixé des règles qui désor-
mais doivent être tenues pour établies :
–il incombe au médecin de prouver qu’il
a bien fourni une information préalable
adaptée ;
–cette preuve peut être rapportée par tout
moyen, soit donc l’écrit, mais aussi les
indices ou témoignages ;
–l’information doit porter sur tous les
risques graves afférents aux investigations
et soins, même s’ils sont exceptionnels.
Le premier arrêt avait causé un grand émoi
dans la profession car il avait inversé la
charge de la preuve sans en préciser le
régime. Ce régime est aujourd’hui bien
défini, et la Cour administrative d’appel de
Paris a adopté le 9 juin 1998 une règle
strictement identique. On peut penser que
le Conseil d’État confirmera cette solution.
Secteur privé et secteur public relèvent
donc du même régime. Personne ne peut
désormais ignorer la donne, et l’on doit
rappeler que ces règles d’origine jurispru-
dentielle ont un effet rétroactif, c’est-à-
dire qu’elles s’appliquent aux faits anciens
et aux procédures en cours.
QUEL MODE DE PREUVE ?
C’est la question du recours à l’écrit, dans
l’esprit de ce que doivent être la relation
médicale et le respect du patient. Le
formalisme de la preuve ne doit pas
parasiter l’indispensable confiance.
L’écrit
n’est pas obligatoire
Il s’agit de prouver un fait juridique,
et peuvent être utilisés des indices
(fiches de rendez-vous, notes dans le
dossier, correspondances) ou des témoi-
gnages émanant de l’environnement fami-
lial ou amical du patient, mais non de
l’équipe médicale, tenue par le secret. Si
l’écrit n’est pas obligatoire, il est haute-
ment souhaitable.
Un écrit qui ne serait
qu’un alibi formaliste
serait sans valeur
Il pourrait être analysé par les tribunaux
comme un renoncement du médecin à son
rôle informatif, voire une forme de désin-
volture. Par exemple, la signature d’un
ensemble de documents préimprimés,
même particulièrement complet, ne répond
pas à l’exigence de preuve, car elle ne
démontre pas que le médecin a bien expli-
qué au patient les tenants et les aboutis-
sants des soins et de l’examen en cause.
L’écrit n’a pas tant pour fonction d’infor-
mer le patient que de protéger le médecin,
ce que les tribunaux ne sauraient tolérer.
Le médecin doit mettre
en œuvre un processus cohérent,
signe d’une qualité relationnelle
L’information doit être adaptée à chaque
situation et témoigner de la force de
conviction du médecin et de l’équipe. Le
droit reconnaît à la relation médecin/
patient un régime exorbitant incluant la
plus large protection du secret, et les
acteurs de soin doivent se montrer à la hau-
teur de cette reconnaissance.
Consentement,
information
préalable et preuve
L
G. Devers