langage, fonction et co(n)texte selon B. Malinowski (Les jardins de

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langage, fonction et co(n)texte selon
B. Malinowski (Les jardins de corail)
•  La principale fonction du langage
n’est pas d’exprimer la pensée
mais au contraire de jouer un rôle
pragmatique actif dans le
comportement humain … Les
mots participent de l’action et
sont autant d’actions
Bronisław
Malinowski
(1884-1942)
conditions qui rendent la performance
d’un acte de parole efficace
•  L’essence de la magie est dans la formule. Mais celle-ci
doit être manipulée par un magicien accrédité au cours
d’un cérémonial approprié … Les mots agissent en
vertu de leur ancienneté, du fait qu’ils ont été transmis
régulièrement au cours d’une filiation magique
ininterrompue, qu’ils ont été correctement recueillis
par le nouveau magicien auprès de son prédécesseur, et
qu’ils sont prononcés par une personne socialement
autorisée qui observe en même temps les tabous et les
restrictions nécessaires
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co-texte et contexte
•  (i) contexte linguistique — Les phrases qui le
précède [un énoncé] ou le suivent, mais c’est aussi la
famille des termes affins par rapport auxquels les
mots se définissent par contiguïté
•  co-texte syntagmatique et relations paradigmatiques
•  le paralangage fait également partie du contexte
linguistique : gestes, ton de la voix, mimiques
(ii) le contexte de la situation
•  l’ensemble des circonstances immédiates et
perceptibles dans lesquelles est produit
l’énoncé :
•  identité de l’énonciateur
•  identité des interlocuteurs
•  temps, lieu, etc.
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(iii) l’entour culturel
(« context of cultural reality »)
•  les réalités physiques et non physiques,
outillage, matériel, équipement; mais aussi
valeurs, idées, représentations, etc.
•  toutes réalités auxquelles les énoncés sont liés
par association
•  La formule magique a une phonétique
différente. À des très rares exceptions
près, elle est toujours psalmodiée. Elle
est également différente dans son
contexte. C’est à dire, que le
comportement du magicien et des
personnes présentes n’est pas le même.
Elle n’est prononcée qu’au cours d’une
cérémonie rituelle complète, de
séances d’enseignement, c’est à dire,
quand le magicien accrédité transmet
son savoir à ses successeurs, et dans les
veillées funéraires. En général, les
magiciens ne peuvent pas répéter leurs
formules lentement, de manière
fragmentaire, ou d’un ton ordinaire.
Coefficient of
weirdness
(= degré de
l’étrangeté)
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Les éléments de la communication
verbale
(Roman Jakobson [1896-1982] “Closing
statement: linguistics & poetics”)
les fonctions de la
communication, associées aux
six éléments
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les six fonctions de l’énoncé
•  (i) ÉMOTIVE: expression de l’attitude de
l’ÉMETTEUR (les pronoms de la 1ère
personne; les jurons et exclamations)
•  (ii) CONATIVE: fonction relative au
RÉCEPTEUR, afin de l’influencer ou de le
faire agir (impératifs, vocatifs; publicités)
•  (iii) RÉFÉRENTIELLE: faire référence
au CONTEXTE (afin d’informer, de
préciser, de dire la vérité). C’était la
seule fonction d’intérêt aux philosophes
jusqu’au 20e siècle
•  (iv) MÉTALINGUISTIQUE: discours
concernant le CODE (choix de langue
ou de registre sociolinguistique; donner
des définitions ou des synonymes des
expressions)
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•  (v) PHATIQUE: établir, confirmer et
maintenir le CONTACT entre l’émetteur
et le récepteur. Selon Malinowski,
certains rituels de la conversation
avaient la fonction d’établir la
« communion phatique » entre les
interactants: salutations, remarques
concernant le temps qu’il fait, etc.
« system requirements » pour la
conversation [Goffman Forms of Talk, pg 10]
•  canal à deux sens
•  signaux de contact (ouverture et fermeture du canal)
•  signaux de renvoi [feedback] sur la qualité de la
transmission
•  signaux de changement de tour [turnover]
•  signaux de préemption (interruption, demande de
clarification)
•  signaux d’encadrement [framing]
•  normes de coopérativité
•  contraintes et filtres (écoute par non participants;
bruit; contact visuel; proxémique)
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(vi) POÉTIQUE: centrée sur le MESSAGE
en tant que forme (ou objet esthétique)
la philosophie du langage ordinaire
Bertrand Russell
(1872-1970)
J. L. Austin
(1911-1960)
Ludwig Wittgenstein
(1889-1951)
John Searle
(1932- )
W. V. O. Quine
(1908-2000)
Saul Kripke (1940- )
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Snow is white.
The King of France is bald.
•  Critique de la philosophie positiviste du
langage, qui s’intéressait aux
PROPOSITIONS, qui sont « vraies » ou
« fausses » (e.g. « la neige est blanche »).
•  Russell: Quoi faire avec des propositions
comme « L’actuel roi de France est
chauve », si il n’y a plus de roi de France?
How to do things with words:
La théorie des actes de parole
•  Wittgenstein: le langage fait partie de
la vie; la signification des
expressions est identifiée à leur
USAGE dans la vie de tous les jours
•  J. L. Austin faisait la distinction entre
deux types d’énonciations:
constatifs (propositions qui sont
vraies ou fausses) et
performatifs: l’énonciation de la
phrase est l'exécution d'une action
(Quand dire p.40)
J. L. Austin
(1911-1960)
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les performatifs explicites
•  produire l’énonciation est
performer une action:
•  Je te baptise …
•  Je te promets (de faire X)
•  Je vous condamne (à la prison à
perpétuité)
•  Je vous déclare mari et femme
•  Je t’adoube (chevalier)
les performatifs primaires (ou
implicites)
•  énoncés de forme non performative qui
ont la fonction performative dans leur
contexte d’usage
•  « Je serai là », ou simplement « oui »
comme confirmation d’une promesse
•  « il fait chaud ici » comme commande
implicite d’ouvrir la fenêtre; etc.
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l’évaluation des performatifs:
elles ne sont pas vraies ou fausses, mais plutôt
réussies (efficaces) ou échouées (inefficaces)
•  Nous ne parlons pas d'un faux pari ou
d'un faux baptême [...] (p.45)
•  Nous appelons la doctrine des choses
qui peuvent se mal présenter et
fonctionner mal, lors de telles
énonciations, la doctrine des Échecs
[infelicities ]. (p.48)
les « conditions de
bonheur » (felicity conditions)
•  les préalables pour qu’un acte de parole
soit efficace:
•  (1) agents/participants autorisés
•  (2) procédure exécutée correctement et
intégralement
•  (3) les autres conditions établies par la
convention sont respectées
(instruments, lieu, temps, etc.)
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un baptême raté:
les conditions de bonheur n’ont pas été respectées
les trois aspects d’un acte de
parole, selon Austin (pg. 28)
•  LOCUTION: la production de sons … auxquels
sont attachés un sens et une référence
•  ILLOCUTION: acte conventionnel « produit en
disant quelque chose », selon les normes
partagées par les membres d’un groupe et d’une
société
•  PERLOCUTION : « acte produit par le fait de dire
quelque chose »; les conséquences d’un acte
de parole (qui ne sont pas nécessairement
conventionnelles)
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la taxonomie d’actes
illocutoires de J. Searle
• 
• 
• 
• 
• 
assertifs (constats, propositions)
directifs (commandes, ordres, demandes)
commissifs (promesses)
expressifs (condoléances, salutations, &c)
déclaratifs (performatifs de mariage,
baptême, condamnation, &c.)
•  En fin de compte, selon Austin, TOUT
ÉNONCÉ socialement situé a un
composant illocutoire. Chaque énoncé est
produit (et interprété) selon les
conventions d’une société ou d’un groupe
comme acte communicatif qui contribue à
la construction d’une interaction entre
acteurs sociaux.
•  La distinction entre « constatifs » et
« performatifs » n’existe que dans les
théories des philosophes.
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présupposition et transformation
•  chaque participant dans une
interaction présuppose que
certaines connaissances et
conventions sont partagées
par les autres interactants
•  en même temps, chaque
énoncé transforme
l’interaction émergente
(nouvelle information,
évolution de la relation entre
les interactants, etc.)
Michael Silverstein
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Microhistoire d’un dialogue
•  Présupposition: langue, contexte
•  A. Deux
institutionnel et ses normes
cheeseburgers,
interactionnelles, normes de politesse
un café, SVP.
•  B. 12,50$.
•  A. Merci!
Transformation: initiation d’une
interaction, attente de réponse
•  Présupposition: interprétation du rôle de
A (client), des ses objectifs
Transformation: réponse et demande en
même temps, structurant le prochain tour
du client
•  Présupposition: normes des interactions
de service, normes de politesse
Transformation: terminaison de
l’interaction
les zones de connaissances et normes
présupposables
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la sémiotique de C. S. Peirce
•  système philosophique
construit à partir de trois
relations fondamentales:
« firstness » (priméité),
« secondness »
(secondéité),
« thirdness » (tiercéité)
•  trois modes de
signification: iconique,
indexical, symbolique
Charles Peirce (1839-1914)
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les catégories de signes
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icône,
indexe,
symbole
dans plusieurs instances, deux ou même
tous les trois modes sémiotiques sont
déployés dans le même signe
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l’indexicalité
•  concept basé sur la relation indexicale en
sémiologie: relation dyadique de contiguïté,
cause-effet (la fumée comme indexe du feu)
•  l’indexicalité par rapport à la communication:
les composants d’un acte communicatif qui
indique l’identité du locuteur, les
circonstances entourant l’interaction (choix
de code ou variété; variables
sociolinguistiques; marqueurs de l’âge, sexe,
classe, ethnicité du locuteur …)
L’interaction du langage et de la
vie sociale
•  trois niveaux d’analyse:
•  (i) situation de communication — marquée
par la présence (ou l’absence) de la parole
(cérémonie, repas, chasse, festival …)
•  (ii) événement de parole — activité
caractérisée par des conventions sur
l’utilisation de la parole (conversation,
discours formel …)
•  (iii) acte de parole — unité minimale
(salutation, blague, invocation, commande …)
Dell Hymes
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grille étique pour la description de situations de
communication (S.P.E.A.K.I.N.G.)
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• 
• 
Setting & Scene (lieu, temps, scène)
Participants (locuteurs, interlocuteurs, auditeurs)
Ends (objectifs, conséquences)
Act sequence (forme, structure, séquence )
Key (« tonalité »)
Instrumentalities (canal, registre, style)
Norms (normes sociales, conventions)
Genres (catégorie d’événement ou d’acte de parole)
(équivalent en français): P-A-R-L-A-N-T:
participants, actes, raison (résultat), locale, agents
(instrumentalités), normes, ton, types (genres)
(i) Setting & Scene
•  Setting = temps, lieu, circonstances
physiques entourant un événement
•  Scène = « cadre culturel ou
psychologique » (caractérisation
« émique » de la situation): fête
d’anniversaire, baptême, jeu de bridge …
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(ii) Participants
•  catégories d’interactants: locuteurs,
interlocuteurs, auditeurs
•  types de locuteurs: énonciateur (celui/celle
qui parle), source du message, rôle joué
par l’énonciateur (p. ex. dans une pièce de
théâtre); singulier vs. pluriel, inclusif/exclusif
•  types d’auditeurs: interlocuteur, auditeurs
autorisés / non autorisés / présumés /
potentiels
(iii) Ends
•  objectifs de l’acte de parole et ses
conséquences
•  Cp. Austin (« How to do things with
words »): les intentions ILLOCUTOIRES
et les effets PERLOCUTOIRES
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(iv) Act sequence
•  la forme et la structure d’un acte de
parole
•  l’axe syntagmatique
•  la séquence des composants de l’acte
de parole (« morphologie »), et sa place
dans l’événement encadrant
(« syntaxe »)
(v) Key
•  métaphore musicale: « clé » =
« tonalité » à la Goffman
•  le « ton, manière ou esprit » d’un acte
de parole: sérieux, ludique, parodie,
répétition, représentation théâtrale, etc.
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(vi) Instrumentalités
•  code: choix de langue en contexte bi-/multilingue
•  style, registre: niveau de formalité, traits
stylistiques et sociolinguistiques (littéraire,
académique, populaire, indices de classe
sociale, …)
•  canal: oral, écrit; transmission encryptée;
langages sifflés, « tambours parlants »
•  béarnais sifflé
(vii) Normes
•  normes sociales et conventions réglant
la performance de(s) locuteur(s) et la
participations de(s) auditeur(s)
•  signaux régulateurs, interventions du
« back channel »; normes concernant
les chevauchements, interruptions
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(viii) Genres
•  catégorie d’événement ou d’acte de
parole (selon les conventions de la
société): genres littéraires, narratifs,
discursifs …
•  certains genres sont explicitement
désignés comme tels par les membres
de la société (« poème », « conte de
fée », « blague »)
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