I i Université de Sherbrooke Prévalence et incidence de la douleur lombaire récurrente au Québec : Une perspective administrative Par Nicolas Beaudet Programmes de Sciences Cliniques Thèse présentée à la Faculté de médecine et des sciences de la santé en vue de l’obtention du grade de philosophiae doctor (Ph.D.) en Sciences Cliniques Sherbrooke, Québec, Canada Octobre, 2013 Membres du jury d’évaluation Pr Alain Vanasse, Département de médecine de famille et de médecine d’urgence Pr Philippe Sarret, Département de physiologie et biophysique Pre Patricia Bourgault, École des sciences infirmières Pr Clermont E. Dionne, Département de Réadaptation, Faculté de Médecine, Université Laval Pre Anaïs Lacasse, Unité d'enseignement et de recherche en sciences de la santé, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue © Nicolas Beaudet, 2013 ii RÉSUMÉ Prévalence et incidence de la douleur lombaire récurrente au Québec : Une perspective administrative Par Nicolas Beaudet Programmes de Sciences Cliniques Thèse présentée à la Faculté de médecine et des sciences de la santé en vue de l’obtention du diplôme de philosophiae doctor (Ph.D.) en Sciences Cliniques, Faculté de médecine et des sciences de la santé, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Québec, Canada, J1H 5N4 La douleur lombaire (DL) est l’une des conditions musculosquelettiques les plus fréquentes et couteuses au Canada. La prévalence annuelle de DL aigüe varierait de 19 % à 57 %, et un patient sur quatre souffrirait de récurrence dans la même année. La présente étude vise donc à produire une analyse descriptive de l’épidémiologie de la DL récurrente à l’échelle de la population. Une nouvelle approche méthodologique est proposée afin d’optimiser l’identification de vrais cas incidents de DL récurrente à partir d’une analyse secondaire de données administratives. Puisque 10 % des patients ayant de la DL seraient responsables de 80 % des couts qui y sont associée, nous avons également déterminé la tendance séculaire des couts d’interventions médicales des patients récurrents incidents entre 2003 et 2008. En utilisant le fichier des services médicaux rémunérés à l’acte de la Régie de l’assurance maladie du Québec, des cohortes prévalentes ont été construites à partir de 401 264 dossiers de patients ayant consulté au moins trois fois pour de la DL entre 1999 et 2008. Onze ans d’historique médical des 81 329 patients de la cohorte de 2007 ont ensuite été analysés afin d’exclure les patients ayant eu des consultations antérieures de DL. Une valeur prédictive positive et un coefficient de Kappa élevés ont permis d’identifier une clairance optimale pour récupérer les cas véritablement incidents. Les couts de consultations ont ensuite été calculés pour tous les patients incidents de 2003 à 2007 à partir des manuels de facturation. Nous avons observé une prévalence annuelle de la DL récurrente de 1,64 % en 2000 chez les hommes diminuant à 1,33 % en 2007. Cette baisse a majoritairement eu lieu dans le groupe d’âge des 35-59 ans. Les femmes âgées (> 65 ans) étaient 1,4 fois plus à risque de consulter un médecin de manière récurrente que les hommes du même âge. L’incidence annuelle de la DL en 2007 était de 242 par 100 000 personnes. Les hommes de 18 à 34 ans étaient 1,2 fois plus à risque que les femmes de développer un premier épisode récurrent et les personnes âgées 1,9 fois plus à rique que les jeunes. L’incidence annuelle a diminué de 12 % entre 2003 et 2007 pendant que les couts totaux augmentaient de 1,4 %. La médiane des couts était la plus élevée chez les femmes âgées et tendait à augmenter dans le temps. Ces analyses secondaires suggèrent de s’intéresser particulièrement à la DL chez les personnes très âgées, et de déterminer si la baisse de fréquence de consultations récurrentes observée dans le temps est liée à une meilleure gestion de la DL ou à un problème d’accessibilité. Les couts devraient faire l’objet d’un suivi continu pour limiter les hausses. Mots clés : Douleur lombaire récurrente, lombalgie, données administratives, CIM-9, épidémiologie, couts directs, analyse secondaire. iii SUMMARY Prevalence and incidence of claims-based recurrent low back pain in Quebec: An administrative perspective By Nicolas Beaudet Clinical Sciences Program Thesis presented at the Faculty of medicine and health sciences for the obtention of a diploma of philosophiae doctor (Ph.D.) in Clinical Sciences, Faculty of medicine and health sciences, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Québec, Canada, J1H 5N4 Low back pain (LBP) is one of the most frequent and costly musculoskeletal health conditions in Canada. Annual prevalence was found to vary between 19 % and 57 % and likely one out of four patients experience a LBP recurrence within one year. The body of knowledge on the prevalence of recurrent LBP is still limited. This study sought to present a descriptive analysis on the epidemiology of recurrent LBP in a medical population. A new methodology is also proposed to identify true cases of incident recurrent LBP. Since 10 % of LBP patients have been reported to generate 80 % of the costs, we will sought to determine the secular trend of medical costs for the incident cohorts of 2003 to 2008. Using the Canadian province of Quebec medical administrative physicians’ claims database, 401 264 prevalent claims-based recurrent LBP patients were identified between 1999 to 2008 for having consulted at least three times for LBP in a period of 365 days. The medical history of 81 329 prevalent patients in 2007 was screened for a retrospective period of 11 years. High positive predictive values and Kappa statistics were used to determine the optimal clearance period for capturing true incidence cases among patients with no prior encounters for LBP. Physicians’ claims manuals were then used to apply a price for every intervention provided to LBP incident patients in their index year and follow-up years. We observed a decrease from 1.64 % to 1.33 % in the LBP annual prevalence between 2000 and 2007 for men. This decrease was mostly observed between 35 and 59 years of age. Older women (≥ 65 years) were 1.4 times more at risk to consult a physician for LBP in a recurrent manner than older men. The annual incidence in 2007 of adult claims-based recurrent LBP was 242 per 100 000 persons. Males of 18 to 34 years of age were found 1.2 times more at risk than their counterparts. Altogether, elderlies were 1.9 times more at risk than young adults to consult in a recurrent manner for LBP. The annual incidence decreased by 12 % between 2003 and 2007, while the direct costs increase by 1.4 %. The median cost for consultations was highest for elder women and increasing in time. These secondary analyses emphasize the importance to keep the watch on the elders in regards to LBP, and to determine if the timely decrease in morbidity is related to improvements in LBP management or to a medical accessibility issue. Also, costs will need to be surveyed on a regular basis to limit the impact of future increases. Keywords: Recurrent low back pain, administrative data, ICD-9, epidemiology, secondary analysis, direct costs, medical resource utilization. vi À tous ceux qui m’ont épaulé dans ce retour aux études, qui ont supporté mon hyperactivité et mes humeurs : Aux amis toujours à l’écoute de mes délires, À mes parents qui ont toujours encouragé leurs gars dans leurs projets de vie, … et à toi ma chérie avec qui j’ai cheminé dans cette aventure. vi Rien ne sert de courir ; il faut partir à point. Jean de la Fontaine Fables, Livre VI vii TABLE DES MATIERES Résumé .................................................................................................................................. ii Summary .............................................................................................................................. iii Table des matières .............................................................................................................. vii Liste des figures .................................................................................................................... x Liste des tableaux ................................................................................................................ xi Liste des abréviations ......................................................................................................... xii 1. Problématique ................................................................................................................. 13 2. État des connaissances ................................................................................................... 16 2.1 Douleur lombaire : définitions. ............................................................................................ 16 2.1.1 Définitions cliniques ........................................................................................................ 17 2.1.2 Algorithmes d’analyse ..................................................................................................... 19 2.1.3 Définitions se rapportant à la gravité de la douleur lombaire .......................................... 23 2.1.3.1 Aigüe et subaigüe ..................................................................................................................... 24 2.1.3.2 Chronique ................................................................................................................................. 24 2.1.3.3 Récurrente ................................................................................................................................ 24 2.2 Épidémiologie de la douleur lombaire ................................................................................. 26 2.2.1 Prévalence de la douleur lombaire ................................................................................... 26 2.2.1.1 Notions de prévalence .............................................................................................................. 26 2.2.1.2 Survol de la littérature .............................................................................................................. 26 2.2.1.3 Les avantages d’étudier la prévalence de la douleur lombaire ................................................ 31 2.2.2 Incidence de la douleur lombaire ..................................................................................... 33 2.2.2.1 Notions d’incidence ................................................................................................................. 33 2.2.2.2 Survol de la littérature .............................................................................................................. 36 2.2.2.3 Les avantages d’étudier l’incidence de la douleur lombaire .................................................... 40 2.2.3 Résumé de la section épidémiologie ................................................................................ 41 2.3 L’utilisation des banques de données administratives en épidémiologie ......................... 42 2.3.1 Banques de données en santé ........................................................................................... 42 2.3.2 Provenance des données d’actes et de diagnostics consignées à la RAMQ .................... 43 2.3.3 Validité des banques de données administratives ............................................................ 48 2.3.4 Précisions sur les fichiers de la RAMQ ........................................................................... 50 2.3.5 Résumé de la section sur les banques administratives ..................................................... 54 2.4 Le cout sanitaire de la douleur lombaire ............................................................................ 56 2.4.1 L’importance de la question économique en santé .......................................................... 56 2.4.2 Les perspectives analytiques et les différentes catégories de couts ................................. 60 viii 2.4.2.1 Couts directs............................................................................................................................. 60 2.4.2.2 Couts indirects ......................................................................................................................... 60 2.4.2.3 Couts intangibles ...................................................................................................................... 61 2.4.3 Survol de la littérature ...................................................................................................... 61 2.4.4 Résumé de la section sur les couts de la douleur lombaire .............................................. 62 2.5 Synthèse de la recension des écrits....................................................................................... 64 2.6 Objectifs ................................................................................................................................. 64 2.6.1 Objectif principal ............................................................................................................. 64 2.6.2 Objectif secondaire .......................................................................................................... 64 2.7 Hypothèse ............................................................................................................................... 65 3. Méthodes additionnelles................................................................................................. 66 3.1 Méthodologie présentée dans les articles 1 et 2 .................................................................. 66 3.1.1 Extraction de la cohorte ayant servi à produire l’atlas québécois de douleur chronique . 66 3.1.2 Critères de sélection pour la création d’une sous-cohorte de douleur lombaire .............. 68 3.1.3 Construction des cohortes pour la détermination de la prévalence annuelle ................... 71 3.1.4 Construction des cohortes pour la détermination de l’incidence annuelle ...................... 73 3.2 Approche méthodologique pour l’étude de couts ............................................................... 74 3.2.1 Utilisation des cohortes incidentes pour la détermination des couts ............................... 75 3.1.2 Préparation des matrices de couts pour les années 2003 à 2007...................................... 75 3.1.3 Analyse sommaire des couts ............................................................................................ 77 4. Résultats .......................................................................................................................... 80 4.1 Présentation de l’article 1 portant principalement sur la prévalence de consultations récurrentes pour de la douleur lombaire. .......................................................... 80 4.1.1 Avant-propos.................................................................................................................... 80 4.1.2 Résumé de l’article en français ........................................................................................ 81 4.1.3 Article sous format manuscrit .......................................................................................... 83 4.2 Présentation de l’article 2 portant principalement sur l’optimisation d’un algorithme de sélection de patients incidents présentant une récurrence de consultations pour de la douleur lombaire. ............................................................................ 105 4.2.1 Avant-propos.................................................................................................................. 105 4.2.2 Résumé de l’article en français ...................................................................................... 106 4.2.3 Article sous format manuscrit ........................................................................................ 108 ix 5. résultats additionnels: analyse partielle des couts directs ........................................ 130 5.1 Couts totaux et médians d’intervention auprès de patients incidents ............................ 130 5.2 Couts totaux et volume d’actes lors de l’année index et des années de suivi ................. 134 6. Discussion générale....................................................................................................... 137 6.1 Synthèse des précédentes sections ...................................................................................... 137 6.2 La morbidité de la douleur lombaire récurrente en déclin? ........................................... 140 6.3 Est-ce que vieillir rime avec une fréquence accrue de douleur lombaire? .................... 146 6.4 La douleur lombaire récurrente, un phénomène masculin ou féminin? ........................ 152 6.5 Doit-on optimiser la construction de cohortes incidentes de douleur lombaire? .......... 155 6.6 Une tendance de couts d’intervention en mal de diminution. ......................................... 160 6.7 Limites du projet de recherche .......................................................................................... 166 6.7.1 Biais de sélection ........................................................................................................... 167 6.7.2 Biais d’information ........................................................................................................ 170 6.7.3 Limites reliées à l’analyse des couts sanitaires de la douleur lombaire ......................... 174 6.8 Forces du projet de recherche ............................................................................................ 178 7. Perspectives et Conclusions ......................................................................................... 182 Remerciements.................................................................................................................. 186 Liste des références .......................................................................................................... 187 Annexe i. Autorisation du comité d’éthique de la recherche en santé sur l’humain du chus .............................................................................................................. 197 205 Annexe ii. Autorisation de la Commission d’accès à l’information du Québec ......... 204 x LISTE DES FIGURES Figure 1. Schématisation anatomique de la douleur lombaire sur représentation de Manikin._________________________________________________ 18 Figure 2. Définition minimale consensus pour décrire la douleur lombaire ___________ 19 Figure 3. Schématisation de la mesure de l’incidence de douleur lombaire. __________ 34 Figure 4. Provenance des données administratives ______________________________ 43 Figure 5. Bordereau de paiement de la RAMQ _________________________________ 44 Figure 6. Approche pour déterminer la validité des diagnostics dans une source de données à l’étude ________________________________________________ 49 Figure 7. Comparaison de la validité de diverses banques administratives connues ____ 50 Figure 8. Dépenses en santé (secteurs privé et public) en fonction du produit intérieur brut (PIB)au Canada de 1995 à 2012. ________________________________ 57 Figure 9. Efficience des systèmes de santé selon le Commonwealth Fund ____________ 59 Figure 10. Exemple de parcours idiosyncrasique d’un patient avec douleur lombaire __ 69 Figure 11. Différents scénarios d’inclusion d’un patient considéré prévalent pour de la douleur lombaire récurrente. __________________________________________ 72 Figure 12. Distribution des couts de services médicaux de patients incidents pour une récurrence de consultations pour de la douleur lombaire ____________________ 131 Figure 13. Couts totaux d’actes selon l’année de suivi des patients incidents en 2003 _ 134 Figure 14. Rappel de l’hypothèse et des objectifs ______________________________ 137 Figure 15. Résumé des principaux résultats __________________________________ 138 Figure 16. Prévalence brute de la douleur chronique dans la population Canadienne _ 141 Figure 17. Prévalence de la douleur chronique dans la population Canadienne, par âge147 Figure 18. Groupes de pays partageant des institutions similaires en matière de système de santé. _____________________________________________________ 160 xi LISTE DES TABLEAUX Tableau 1. Description d’algorithmes de douleur au dos basés sur l’utilisation de codes CIM-9 .................................................................................................................... 21 Tableau 2. Résumé des études portant sur la prévalence de la douleur chronique au Canada ................................................................................................................................. 30 Tableau 3. Résumé d’études récentes portant sur l’incidence de la douleur lombaire ....... 39 Tableau 4. Pourcentage des adultes couverts par le régime d’assurance médicament du Québec de 2000 à 2008. .................................................................................................. 47 Tableau 5. Taux d’ajustement pour comparer les données en dollars constants de 2007... 78 Tableau 6. Couts médians et totaux des patients incidents pour des consultations récurrentes de douleur lombaire, en dollars de 2007. ....................................................... 132 Tableau 7. Couts totaux et médians des services médicaux ajustés en dollars de 2007, par âge et sexe .................................................................................................................... 133 Tableau 8. Comparaison des couts totaux et du volume d’actes entre l’année index et l’année de suivi de 2003 à 2007 ......................................................................................... 135 xii LISTE DES ABRÉVIATIONS APR-DRG CA CI CIM-10 CIM-11 CIM-9 CSST DC DL DME Dx ENSP ESCC EUR G ICIS IMC IRR LBP MAC MEPS MeSH MSSS N/D NEISS NHDR NIRRU NML OCDE OMS PIB RAMQ USA VAS VPP All-Patient-Refined-Diagnostic-RelatedGroup Canadien Intervalle de confiance Classification internationale des maladies, 10e édition Classification internationale des maladies, 11e édition Classification internationale des maladies, 9e édition Commission de la sécurité et de la santé du travail Douleur chronique Douleur lombaire Dossier médical électronique Diagnostic Enquête nationale sur la santé de la population Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes Euros Milliard Institut canadien d’information sur la santé Indice de masse corporelle Incidence rate ratio Low back pain Médecine alternative et complémentaire Medical Expenditure Panel Survey Medical Subject Heading Ministère de la santé et des services sociaux Non disponible National Electronic Injury Surveillance System National Hospital Discharge Registry Niveau d’intensité relative des ressources utilisées National Library of Medicine Organisation de coopération et de développement économique Organisation mondiale de la santé Produit intérieur brut Régie de l’assurance maladie du Québec États-Unis Visual analog scale Valeur prédictive positive 1. PROBLÉMATIQUE1 La douleur lombaire est l’une des six conditions de santé les plus fréquentes dans les pays développés (Berenguera et al., 2011). Plus spécifiquement, la douleur du plan dorsal est depuis plus d’une décennie une des trois complications les plus rapportées parmi les troubles musculosquelettiques dans les sociétés occidentales (Urwin et al., 1998; Churcher et al., 2013), et il est attendu que la prévalence des complications musculosquelettiques soit en hausse dans le futur (McBeth & Jones, 2007). La prévalence à vie de la douleur lombaire se situerait autour de 39 % mondialement (Hoy et al., 2012). Le pic de prévalence se situerait dans la fourchette de 35 à 55 ans dans les pays industrialisés (van Tulder & Koes, 2006). Il s’agirait de la maladie musculosquelettique la plus présente chez les moins de 65 ans, bien qu’il ait été rapporté que les personnes âgées seraient plus à risque pour les cas graves de douleur lombaire et que cette population devrait être particulièrement surveillée en raison de la population vieillissante dans les sociétés occidentales (Dionne et al., 2006). Le fardeau socioéconomique de la douleur lombaire, en terme de couts de santé et de pertes de productivité estimés par différentes équipes internationales, surpasserait les maladies cardiovasculaires et pulmonaires (Maniadakis & Gray, 2000). Baldwin soulevait qu'en 1994, au Canada, les atteintes musculosquelettiques au niveau du dos comptaient à elles seules pour plus de huit milliards de dollars en couts directs (santé) et indirects (perte de productivité) (Baldwin, 2004). La douleur lombaire serait responsable d’une grande proportion des pensions d’invalidité (Bachmann et al., 2009). Dans un contexte d’austérité et de dépenses de santé atteignant un niveau alarmant au Canada (ICIS, 2012) et dans d’autres pays occidentaux (OCDE, 2011a), il importe d’identifier les maladies chroniques qui contribuent davantage à drainer les ressources économiques de manière à freiner l’hémorragie tout en maintenant une couverture de soins de qualité (Patra et al., 2007). La douleur lombaire n’a jamais été considérée par les gouvernements de divers pays comme un problème majeur car la dernière étude de la charge mondiale de la morbidité en 1990 ne portait pas spécifiquement sur cette condition, et le nombre d’études populationnelles de qualité permettant de recenser la douleur lombaire étaient limité à cette époque (Hoy et al., 2010). 1"La graphie rectifiée a été utilisée dans le présent ouvrage. Par exemple, vous ne retrouverez aucun accent circonflexe sur les « i » et les « u » (e.g. couts directs). Le tréma est transféré sur le « u » au féminin (c.-à-d. douleur aigüe)." 13 Au niveau des études publiées spécifiquement sur le sujet, la douleur lombaire a généralement été qualifiée de non spécifique chez plus de 80 % des patients (Kent & Keating, 2004) et aucune différence n’a été observée entre les hommes et les femmes concernant la prévalence annuelle et à vie. Les facteurs de risque demeurent peu connus en raison de l’absence de données d’incidence qui sont nécessaires pour établir le lien de causalité (McBeth & Jones, 2007; Szklo & Nieto, 2007). La récupération suite à un épisode de douleur lombaire aigüe se situerait à l’intérieur d’une période de six semaines (van Tulder & Koes, 2006), cependant il a été rapporté que 40 % des individus continuaient d’être incommodés au-delà de six mois, dont 14 % connaissaient une aggravation de leur condition (Cassidy et al., 2005). Plusieurs études rapportent en effet qu’un épisode de douleur lombaire aigüe conduirait à une récurrence d’épisodes de consultation et pourrait être associé au phénomène de chronicisation (Wasiak et al., 2003; Kääriä et al., 2005; Stanton et al., 2008). Sur une vie entière, une proportion importante d’individus souffrirait de douleur lombaire récurrente. Il a été rapporté que un patient sur quatre était aux prises avec une condition récurrente de douleur lombaire (Stanton et al., 2009). De plus, approximativement 10 % présenteraient de la douleur lombaire chronique (Johannes et al., 2010). Au Canada, la prévalence de la douleur chronique chez les adultes a été estimée à 18,5 % en 2007-2008, la douleur lombaire représentant la condition principale avec 22,3 % des cas (Schopflocher et al., 2011). Qu’il s’agisse d’épisodes récurrents ou chroniques, ces cas graves seraient responsables de la majorité des dépenses de santé de douleur lombaire (Linton et al., 1998; Bachmann et al., 2009; Juniper et al., 2009). Le but de la présente étude s’inscrivait donc dans ce contexte et visait à fournir le portrait de la morbidité de la douleur lombaire dans une province canadienne de manière à participer à l’effort de recherche international dans l’identification du fardeau réel de cette condition de santé. En adoptant une perspective administrative, nous avons voulu présenter le portrait de la douleur lombaire récurrente dans le système de santé québécois, quantifier le nombre de nouveaux cas par année, et établir les cout directs médicaux qui en découlaient. Les données présentées dans cette étude visaient à fournir un état de la situation pour les décideurs afin de prendre conscience de l’ampleur de cette condition de santé à l’échelle du Québec et d’identifier les populations les plus à risque. D’un point de 14 vue méthodologique, un des objectifs principaux était de suggérer une approche novatrice à la communauté scientifique afin de participer à l’effort qui vise l’amélioration de la qualité des études d’incidence sur la douleur lombaire, qui sont très peu nombreuses et souvent constituées de cohortes contaminées par des patients prévalents. 15 2. ÉTAT DES CONNAISSANCES 2.1 Douleur lombaire : définitions. Contrairement à certaines pathologies dont la définition est tranchée et spécifique, la douleur lombaire doit à sa complexité et ses origines multiples une diversité de définitions responsable d’une littérature hétérogène (Vellucci, 2012). Avant de faire un survol de la littérature en lien avec l’épidémiologie de la douleur lombaire, il est donc primordial d’étayer les différentes définitions qui lui sont rattachées. L’ensemble des auteurs de revues systématiques sur la douleur lombaire s’entend pour dire qu’il y a une hétérogénéité importante dans les définitions. Par exemple, Walker, dans sa revue systématique de 1966 à 1998, rapporte que 75 % des études extraites présentent des définitions inadéquates de douleur lombaire ainsi qu’une période de rappel (semaine, mois, année…) mal définie une fois sur cinq (Walker, 2000). À titre d’exemple, les auteurs soulèvent que la prévalence à vie diminue significativement (c.-à-d. 13,8 % contre une moyenne de 38 %) lorsque l’on fait varier la définition de douleur lombaire d’une formulation sans durée à la formulation « la plupart des jours pendant deux semaines » (Walker, 2000). Dans la même veine, les études qui visaient à vérifier la fréquence de douleur lombaire le jour du sondage rendent une prévalence ponctuelle plus élevée que des sondages se basant sur la présence d’épisodes de plus de deux semaines (Loney & Stratford, 1999). La durée et la gravité sont donc des critères importants à inclure dans les définitions, tel que se sont récemment entendus la plupart des spécialistes dans le domaine (Dionne et al., 2008). L’éventail de définitions de douleur au dos influence sans conteste l’issue de l’étude. Idéalement, la prévalence devrait être aussi rapportée selon une analyse stratifiée de la gravité de la condition de douleur lombaire (Dionne et al., 2006). Le peu de clarté, ou même voire l’absence de définition peut faire varier énormément les résultats et la qualité d’une étude. Si une étude s’intéresse à la douleur lombaire (low back pain), alors que la définition parle en terme général de douleur au dos (back pain), le patient pourrait très bien associer le plan dorsal à des douleurs se référant au niveau thoracique, voire même cervical. La prévalence serait alors surestimée par des données sur des sites anatomiques « contaminants ». Il est également important de spécifier si les radiculopathies (c.-à-d. atteinte d’une racine nerveuse), les symptômes liés au cancer, etc. sont pris en compte. L’interprétation de 16 l’étude est donc directement liée au degré de précision de la définition fournie par les auteurs. 2.1.1 Définitions cliniques En français, la lombalgie est souvent le terme qui réfère à la douleur lombaire (DL : douleur au bas du dos) et exclut les régions cervicale et thoracique (Rozenberg, 2008). La correspondance en anglais réfère la plupart du temps à « Low Back Pain » (LBP) et les traductions spécifiques sont connues comme représentant une limite (Dionne et al., 2008). Le terme « low back pain » est introduit en 1993 comme « Medical Subject Heading » (aka MeSH2) à la librairie nationale de médecine des Etats-Unis (i.e. NML aka PubMed). La définition en est : « douleur aigüe ou chronique dans la région lombaire ou sacrée, qui peut être associée à des entorses ou étirements musculoligamentaires ; déplacements de disques intervertébraux ; et autres conditions ». Dans la littérature médicale, une définition avec des repères anatomiques est souvent rapportée dans les termes suivants : « toute douleur du plan dorsal se situant de l’angle costal à la fosse glutéale, et comprenant les douleurs de types lombaires et sacrococcygiennes, avec ou sans irradiation aux membres inférieurs » (voir Figure 1) (Leboeuf-Yde & Lauritsen, 1995; Airaksinen et al., 2006; van Tulder & Koes, 2006; Rozenberg, 2008; Juniper et al., 2009; Stanton et al., 2010a). Ces définitions sont d’usage courant dans les études datant d’avant 2008 dans lesquelles des variables cliniques n’étaient souvent pas évaluées ou considérées (p. ex. durée et gravité). 2 Les MeSH font partie d’un vocabulaire contrôlé. Il s’agit d’un ensemble de termes qui identifient un mot descripteur dans une structure hiérarchique qui permet de procéder à des recherches dans la littérature en identifiant un niveau de spécificité d’intérêt. Les MeSH sont créés et mis à jour par une équipe d’experts dans chaque domaine concerné par le vocabulaire à définir." 17 Figure 1. Schématisation anatomique de la douleur lombaire sur représentation de Manikin. Légende. La représentation « manikin » est souvent utilisée dans les questionnaires pour aider à situer et spécifier le site d’une douleur. Dans le cas présent, la partie ombragée permet de guider le patient à repérer anatomiquement le site décrit dans la définition susmentionnée et correspondant à de la douleur lombaire (tiré de Jones et al., 2013 avec permission). En 2008, un panel de 28 experts internationaux a statué sur deux définitions de douleur lombaire (c.-à-d. « low back pain ») à préconiser lors de la publication d’études de prévalence. La définition minimale recommandée, pour des études comprenant des entrevues face à face ou des sondages, étant la suivante : «Dans les quatre dernières semaines, avez-vous éprouvé de la douleur dans le bas de votre dos? Si oui, assez intense pour vous restreindre dans vos activités habituelles ou modifier votre routine journalière pour plus d’une journée? » (voir Figure 2) (Dionne et al., 2008). 18 Figure 2. Définition minimale consensus pour décrire la douleur lombaire Légende. Cette définition est recommandée pour les entrevues face à face ou pour les questionnaires papier ou électronique. La définition découle d’une étude Delphi et fait suite à quatre rondes d’échanges (tiré de Dionne et al., 2008 avec permission). En plus du site et des symptômes, la définition optimale recommandée vérifie la douleur radiante aux membres inférieurs, la fréquence, la durée et la gravité et soulève quelques exclusions (Dionne et al., 2008). Bien que les auteurs n’aient pas la prétention de forcer la communauté médicale et scientifique à utiliser ces deux définitions, ils recommandent néanmoins fortement leur adoption dans tout devis basé sur des entrevues ou des questionnaires afin de rendre plus homogène la littérature sur la prévalence de la douleur lombaire et faciliter les comparaisons éventuelles à l’échelle de la population. 2.1.2 Algorithmes d’analyse Malheureusement peu d’études d’analyses secondaires de données médicoadministratives peuvent se baser sur les définitions consensuelles en raison de l’absence de données cliniques ou autorapportées. Ainsi, dans les banques de données administratives, il est question d’algorithmes, manière différente de décrire une définition traduite en instruction logique, pour interroger à l’aide d’un logiciel des milliers, voire des millions, de dossiers médicoadministratifs liés à des patients. Ainsi, la plupart des bases de données ont un langage d’entrée uniformisé sous l’aspect d’une nomenclature diagnostique 19 établie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Nommément, la « classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes », suivi d’un numéro correspondant à l’édition en vigueur (c.-à-d. CIM-9, CIM-10, CIM-11) (WHO, 2013). La section 2.3 est consacrée à la description de ces banques de données médicoadministratives et à leur utilité en recherche épidémiologique. En bref, ces banques de données centralisent l’information de facturation des médecins pour des services prodigués aux patients pour un diagnostic précis, ce dernier étant codé en général en CIM9. Plus spécifiquement, les douleurs lombaires sont regroupées sous différents codes diagnostiques CIM-9 dans la rubrique des « affectations des régions du plan dorsal ». Le plan dorsal est une description anatomique floue qui peut s’étendre du coccyx jusqu’aux vertèbres cervicales, il est donc nécessaire d’ajouter des critères d’exclusion pour se restreindre aux codes se rapportant aux définitions médicales des douleurs lombaires et/ou aux régions plus spécifiques de ce niveau. Différentes équipes ont publié des algorithmes de criblage des codes CIM-9 se rapportant à la douleur lombaire (voir Tableau 1) (Sinnott et al., 2012). 20 21 Source de données Washington State Department of Health data set Canadian Institute for Health Information Database and Washington State Comprehensive Hospital Abstract Reporting System Taylor et Hospitalisations pour al, 1998 problèmes de dos et de cou : une comparaison entre la province de l’Ontario et l’état de Washington, Health Services Research Utilisation des CIM- National Hospital 9-CM pour identifier Discharge Survey les hospitalisations de problèmes mécaniques de douleur lombaire dans les banques administratives, Spine Titre, Journal Volin et Analyse dans une al, 1992 petite région pour les opérations liées aux douleurs lombaires, Spine Auteur, Année Cherkin et al, 1992 Cou et dos: Cherkin Deyo pour la région lombaire et Einstadter pour la région cervicale. Cas chirurgicaux et non chirurgicaux (dos = thoracolombaire; cou = cervical) Procédures : 03.09; 80.5; 81.06; 81.07; 81.08 Région lombaire: 721.3; 722.10; 722.52; 722.83; 724.2; 724.3; 738.4; 756.11; 756.12; 847.2 Pour identifier les cas de chirurgie : 03.0; 03.09; 80.5; 80.50; 80.51; 80.52; 80.59; 81.00; 81.06; 81.07; 81.08; 81.09; 03.6; 03.02; 78.69 Région lombaire (rachis lombosacré) : hernie discale ; changements probablement dégénératifs ; sténose spinale ; fractures d’instabilité suspectées ; douleur lombaire non spécifique ; séquelle d’une chirurgie antérieure ; divers. Inclusion Tableau 1. Description d’algorithmes de douleur au dos basés sur l’utilisation de codes CIM-9 Néoplasmes (140.0-239.0, 733.1) Infections (324.1,730.0–730.9) Maladies inflammatoires (720.0– 720.9) Conditions reliées à la grossesse (630.0–676.9) Traumas (805.0–806.9, 839.0–839. <20 ans Problème autre que lombaire ; trauma, infection, sténose. Néoplasmes Abcès intraspinal ; grossesse ; spondylarthropathies inflammatoires ; ostéomyélites ; fractures vertébrales ouvertes avec ou sans atteinte spinale ; dislocation vertébrale ; accidents de la route (E800-E849.9) ; chordotomie (procédure 3.203.29) ; fusions cervicales et thoraciques (81.01-81.09). Néoplasmes <18 ans Exclusion 22 Codes majeurs pour dos et cou: 720, 721, 722, 723, 724, 737, 805, 806, 839, 846, 847 et sous-familles de codes. < 18 ans; Fracture pathologique 733.13; complication mécanique d’un système orthopédique interne ; greffe ou implant ; raideur et arthralgie, car incapacité de distinguer entre rachis ou non. Pas de codes de procédure, car données MEPS insuffisantes pour identifier les codes reliés au rachis. Légende : Ce tableau résume les études nord-américaines qui ont trait à l’utilisation d’algorithmes basés sur des CIM-9 pour produire des études épidémiologiques sur la douleur lombaire ou la douleur du rachis. Ces définitions logiques basées sur des codes diagnostiques permettent d’interroger des banques médicoadministratives qui regroupent des millions de dossiers médicaux de patients afin de construire une cohorte qui répond à des critères de sélection spécifiques à la douleur lombaire. La section 2.3 porte sur les banques de données médicoadministratives et permet de mieux comprendre la provenance des données et la portée de telles définitions pour la recherche épidémiologique. Traduction libre du tableau en français. Retrait des algorithmes de deux études portant sur la douleur au cou et sur deux analyses non publiées du Healthcare Cost and Utilization Project. Adapté de Sinnott et al., 2012 avec permission. Martin et Dépenses et état de Medical al, 2008 santé parmi les Expenditure Panel adultes présentant des Survey (MEPS) problèmes de dos et de cou, JAMA Les études rapportées dans le Tableau 1 portaient sur des analyses sur la douleur au dos et ont pour la plupart exclu les cas de cancer, les traumas et les problèmes liés à des infections, limitant ainsi la sélection des codes diagnostics liés aux problèmes majoritairement d’origine mécanique. La plupart des études publiées dans ce tableau se basent sur des données médicoadministratives ou de registres codifiées en CIM-9. Progressivement, des algorithmes adaptés pour les équivalences en codes CIM-10 feront leur apparition dans la littérature. Dans la nouvelle édition CIM-10-CA (version canadienne), les douleurs lombaires se retrouvent principalement sous l’onglet « Dorsalgies » (code M54), qui est le nouveau terme utilisé pour remplacer la précédente terminologie en CIM-9 «affectations des régions du plan dorsal » (ICIS, 2009). Notons que la version anglaise CIM-10-CA contient un diagnostic intitulé « low back pain » (M54.5) qui est traduit dans le guide français par « lombalgie basse ». Cependant, ce diagnostic ne regroupe pas toutes les affectations lombaires tels les radiculopathies, le lumbago avec indications spécifiques, les déplacements de disques, etc., pouvant être associé aux douleurs lombaires décrites précédemment. Tout comme pour les CIM-9, il est important d’analyser chaque code pour s’assurer de sélectionner les diagnostics en fonction des objectifs de l’étude et de la définition appropriée de « douleur lombaire ». Avec les avancées technologiques en informatique permettant de gérer des entrepôts de données contenant des « petabytes » d’information, le recoupement des banques de dossiers médicaux et des banques administratives (« data linking ») sera peut-être envisageable dans un futur rapproché pour améliorer la portée des algorithmes se rapportant à une condition de santé et accroitre la validité externe des études. 2.1.3 Définitions se rapportant à la gravité de la douleur lombaire Il est toujours délicat de parler avec précision de douleur lombaire récurrente ou chronique (Cedraschi et al., 1999). En général, qu’il soit question de douleur aigüe, subaigüe, récurrente ou chronique, les définitions se basent sur le concept de la durée d’un épisode (Balagué et al., 2012), bien que les définitions consensuelles plus récentes fassent intervenir davantage de paramètres cliniques (Dionne et al., 2008). 23 2.1.3.1 Aigüe et subaigüe La douleur lombaire aigüe se définit en général en Europe par un épisode d’une durée de moins de six semaines alors que la douleur subaigüe persiste de 6 à 12 semaines (Walker, 2000; van Tulder & Koes, 2006). La coupure est plutôt de quatre semaines aux États-Unis et de 4 à 12 semaines pour la douleur subaigüe (Chou et al., 2007). Ces définitions sont encore d’actualité bien que la définition consensuelle de 2008 (Dionne et al., 2008) devrait progressivement faire son apparition dans les études publiées de nos jours. 2.1.3.2 Chronique Selon les directives européennes de prise en charge de la douleur lombaire non spécifique en soins de première ligne, la douleur lombaire chronique est considérée comme telle lorsque l’épisode persiste au-delà de 12 semaines (van Tulder & Koes, 2006). Selon la société américaine de douleur et le collège américain des médecins généralistes, la douleur doit être présente plus de trois mois, ce qui revient sensiblement à la même définition (Chou et al., 2007). Certaines équipes ont proposé d’autres approches, soit une durée de plus de 6 mois (Moulin et al., 2002; Boulanger et al., 2007) ou l’un des deux critères suivants : une durée de plus de trois mois ou plus de 24 épisodes dans la dernière année ayant limité l’activité pendant une journée (Freburger et al., 2009). Cette dernière définition s’appuyait sur une étude de 1995, qui suggérait une durée supérieure à trois mois ou 25 épisodes pendant une année (Carey et al., 1995). Cependant, les propositions de chronicité s’appuyant sur un nombre d’épisodes (>24 ou >25), tel que dans les deux précédentes études, ne sont pas référencées ou appuyées par la littérature. La définition de durée, sans référence au nombre d’épisodes, prédomine donc dans la littérature. 2.1.3.3 Récurrente La douleur lombaire récurrente est étonnamment plus difficile à définir. En fait, plusieurs études confondent le concept de récurrence et de chronicité. Une récente analyse systématique révélait que seulement 38 % des études sélectionnées définissaient explicitement ce qu’il était entendu par douleur lombaire récurrente. Une des conclusions de l’étude avance que les chercheurs en sont encore à l’étape de créer de nouvelles 24 définitions de récurrence ce qui ajoute à la confusion et rend la comparaison d’études épidémiologiques ou économiques difficile (Stanton et al., 2010a). Au final, il est recommandé d’utiliser le concept de « récupération » entre deux épisodes pour considérer qu’un premier épisode est bel et bien terminé et confirmer la présence d’un nouvel épisode et donc d’une récurrence. Cependant, parmi 13 % des études qui présentent ce concept, aucune ne propose la même durée de récupération entre deux épisodes (Stanton, Latimer, Maher, & Hancock, 2010b). Les définitions de récurrence de la douleur lombaire sont donc presque aussi nombreuses que le nombre d’études publiées. Suite à ce constat, quarante experts internationaux ont donc été invités à participer à une étude Delphi modifiée. La définition consensuelle adoptée a été la suivante: « douleur lombaire étant survenue au moins deux fois dans la dernière année dont chaque épisode a eu une durée minimale de 24h et une intensité >2/11 sur une échelle numérique ou >2/10 sur une échelle visuelle analogue, et dont les deux épisodes ont été séparés par une période sans douleur d’au moins 30 jours » (Stanton, Latimer, Maher, & Hancock, 2010b). Telle la définition de douleur lombaire non spécifique de l’étude de Dionne et collaborateurs (Dionne et al., 2008), il s’agit seulement d’une recommandation, un processus pour faire progresser la qualité de la recherche et l’homogénéité des études publiées. Il faut également noter que cette définition requiert l’utilisation de variables cliniques qui ne sont malheureusement pas disponibles dans des bases de données médicoadministratives. Tel que décrit à la section 2.1.2, dans le cas d’analyses secondaires de données administratives, il sera plutôt question d’algorithmes de récurrence. En ce sens, il peut s’agir d’une récurrence de visites médicales, de réclamations, de diagnostics, etc., et il est hautement improbable de pouvoir définir la fin d’un épisode et le début d’un autre à partir de ces données. À ce jour, il n’y a pas « d’algorithme consensuel », seulement des analyses descriptives qui cherchent à décrire l’utilisation des soins en termes de récurrence ou d’espacement des visites (Wasiak et al., 2003; Ritzwoller et al., 2006). 25 2.2 Épidémiologie de la douleur lombaire 2.2.1 Prévalence de la douleur lombaire 2.2.1.1 Notions de prévalence La prévalence d’une maladie, d’un état ou d’une condition de santé est définie comme la proportion de cas « existants » dans une population donnée à un moment déterminé et pendant une période définie (Szklo & Nieto, 2007). La prévalence nous renseigne sur l’étendue de la condition de santé à ce moment précis. Les termes proportion de prévalence, ou prévalence ponctuelle sont souvent utilisés comme synonymes (Rothman et al., 2008). Le bassin de prévalence est l’ensemble de la population pour laquelle une condition est à l’étude. Les conditions médicales ayant une très faible incidence peuvent avoir une prévalence importante si la condition est non-létale et incurable (Rothman et al., 2008). 2.2.1.2 Survol de la littérature Depuis 1995, huit revues systématiques sur la prévalence de la douleur lombaire chez les adultes ont été publiées, couvrant la littérature médicale de 1954 à 2009 (LeboeufYde & Lauritsen, 1995; Bressler et al., 1999; Loney & Stratford, 1999; Walker, 2000; Hestbaek et al., 2003; Dionne et al., 2006; Hoy et al., 2012), dont une revue systématique portant uniquement sur le continent africain scrutant des banques de données de 1800 à 2006 (Louw et al., 2007). Les revues systématiques de Bressler (Bressler et al., 1999) et Dionne (Dionne et al., 2006) portaient principalement sur l’influence de l’âge et du vieillissement sur la prévalence de douleur lombaire. Les revues systématiques de Walker (Walker, 2000) et de Hoy (Hoy et al., 2012), séparées de 12 années, portaient sur la prévalence globale de la douleur lombaire. D’ailleurs, Hoy et collaborateurs rapportaient que 64 % de toutes les publications ayant servi à la préparation des revues systématiques de prévalence globale entre 1980 et 2009 avaient été publiées entre 1999 et 2009. C’est donc dire qu’il y a eu une croissance du nombre de publications depuis 15 ans rapportant l’évolution de cette condition de santé dont le fardeau socioéconomique énorme est désormais reconnu (Dagenais et al., 2008). La publication de Hestbaek (Hestbaek et al., 26 2003) portait sur la prévalence dans la population générale seulement et sur les études basées sur un minimum de 12 mois de suivi. L’étude de Walker en 2000 reprend et améliore les critères d’évaluation méthodologique proposés par Leboeuf-Yde en 1995 et Loney en 1999. Sur une fourchette de 1966 à 1998, Walker (Walker, 2000) rapporte que 54 % des études extraites de la littérature, soit 30 études, ont reçu la note de passage subjective de qualité méthodologique de 75 %. De ces trente études, toutes langues de communication confondues, 21 ont défini le terme de douleur lombaire plus précisément. Les autres études faisant état de douleur au dos (« back pain ») sans précision quant à la région anatomique concernée. L’hétérogénéité des données avait également empêché de mettre en commun les données pour dériver des estimations de prévalence. L’auteur rapportait donc les fourchettes de valeurs; la prévalence ponctuelle variant entre 12 et 33 %, la prévalence à un an entre 22 et 65 % et la prévalence à vie entre 11 et 84 % (Walker, 2000). L’étude de Hoy et collaborateurs en 2012 (Hoy et al., 2012) était basée sur un nombre considérable d’études, 165 en tout, entre 1980 et 2009. Parmi celles-ci, certaines avaient été rejetées dans l’étude de Walker en 2000. Au lieu d’exclure selon la qualité des critères méthodologiques, Hoy et collaborateurs ont plutôt proposé une analyse de 10 critères visant à mesurer les biais de mesure, de sélection et d’analyse sur l’ensemble des études sélectionnées (élevé, modéré, faible) afin de mettre en commun les données. Une analyse approfondie de sensibilité a ensuite été réalisée en fonction des risques de biais élevés, entre autres, pour évaluer leur impact sur les estimations de prévalence calculées. En tout, les 165 études ont fourni 966 estimations de prévalence de douleur lombaire aigüe selon des catégories d’âge et de sexe dans 54 pays. La prévalence ponctuelle a été estimée à 18,3 %, significativement plus basse que la prévalence à un mois à 30,8 %, et que la prévalence annuelle de 38,0 %. La prévalence à vie ne différait pas de la prévalence annuelle à 38,9 %. Bressler et collaborateurs (Bressler et al., 1999) rapportaient que parmi les 12 études retenues pour leur revue systématique, chez les individus de plus de 65 ans, la 27 prévalence oscillait entre 13 et 49 %. Chez les individus très âgés (> 80 ans), celle-ci était sensiblement dans les mêmes eaux, variant entre 6 et 40 %. En général, les femmes présentaient un taux de prévalence plus élevé que les hommes. Dans une étude plus récente, Dionne et collaborateurs (Dionne et al., 2006) démontraient une tendance significative à l’augmentation de la prévalence de douleurs graves au dos en fonction de l’âge. La proportion d’épisodes de douleur lombaire grave à 21 ans était de 8 % et augmentait avec l’âge jusqu’à 25 % à 90 ans, un phénomène potentiellement responsable d’interférence avec les activités sociales et physiques diminuant la qualité de vie. Cependant, l’analyse de douleurs au dos de tous types (bénignes, mixtes et graves), dans la catégorie d’âge de 60 ans et plus, ne présentait aucune tendance à la hausse avec une prévalence constante autour de 20 % (Dionne et al., 2006). En Afrique, la prévalence ponctuelle chez les adultes variait entre 10 et 59 %, une fourchette sensiblement identique aux pays développés (Louw et al., 2007). La prévalence annuelle a été identifiée comme se situant de 14 à 72 % et la prévalence à vie entre 28 et 74 %. Les fourchettes de taux de prévalence observés en Afrique ne différaient pas outre mesure de celles observées dans la revue systématique de Walker en 2000. L’hétérogénéité des définitions ayant empêché la mise en commun des données, il est difficile de comparer les résultats de cette revue systématique aux résultats de Hoy en 2012, outre le fait que certaines études utilisées dans Louw (2007) ont été intégrées à la revue de Hoy en 2012. De 2010 à 2013, il y a eu plusieurs autres études publiées portant sur la prévalence de la douleur lombaire. Une étude japonaise réalisée auprès d’un échantillon de 65 000 internautes parmi la population urbaine a permis de déterminer une prévalence à vie de 83 %, bien au-delà de la moyenne et d’un écart-type de ce qui est retrouvé dans la littérature en général (39 % ± 24 %). La douleur lombaire était répandue dans la population japonaise, étant la cinquième raison la plus fréquente de consultation médicale selon des données de 2010 (Fujii & Matsudaira, 2013). Parmi l’échantillon, 3,9 % des répondants ont rapporté être atteints de douleur lombaire chronique (durée ≥ 3 mois). De manière intéressante, les répondants ayant de la douleur radiante aux membres inférieurs, et ayant eu un historique 28 de chirurgie dorsale avaient respectivement cinq et dix fois plus de chances d’avoir de la douleur chronique. Au niveau de la prévalence de la douleur lombaire chronique, il existe peu d’études longitudinales ayant déterminé la tendance séculaire de cette condition. Notons l’étude de Freburger et collaborateurs (Freburger et al., 2009) qui présentait le portrait d’une progression majeure entre 1992 et 2006 dans la population de l’état de la Caroline du Nord. Dans cette étude, la définition clinique avec repères anatomiques était employée, ainsi que les deux définitions de douleur lombaire chronique (durée > 3 mois ou > 24 épisodes en un an) dans une série d’entrevues téléphoniques parmi des foyers sélectionnés de manière aléatoire en 1992 et en 2006. Sur la période étudiée de 14 ans, la prévalence de la douleur lombaire chronique a fait un bon marqué de 3,9 % à 10,2 %, un phénomène que les auteurs ne pouvaient expliquer spécifiquement. Au Canada, l’ampleur de la douleur au dos (« back pain ») n’est soit pas évaluée dans les sondages portant sur la douleur chronique, ou soit évaluée à l’aide de questions dans une sous-section des enquêtes sur la douleur chronique. Plusieurs équipes canadiennes ont ainsi rapporté des mesures de prévalence de douleur chronique et certaines se sont intéressées à la douleur au dos comme le décrit le Tableau 2. 29 30 1 Canada (National) (1994-2008) [25 et +] (10 992) [18 et +] (2 000) [18 et +] (69 365) [15 et +] (1 055) 18 et +] (1 067) [20 et +] (129 695) [20 et +] (13 756) [18 - 75] (340) [18 - 75] (2 012) [18 et +] (69 365) Cat. Âge (n) ENSP et ESCC1 Entrevue téléphonique (Firme) ENSP Entrevue téléphonique (Firme) Entrevue téléphonique ESCC Entrevue téléphonique (Firme) Entrevue téléphonique (Firme) ENSP ENSP Source « Are you usually free of pain or discomfort ? » Sondage court Douleur > 6 mois Fréquence élevée Intensité >5/10 « Are you usually free of pain or discomfort ? » [Cohorte de 1994] Sondage court Douleur > 6 mois Fréquence élevée Intensité ?/10 Douleur ≥ 90 jours Douleur > 6 mois + Douleur au dos Douleur > 6 mois (Cohorte entière de patients DC) N/D Douleur > 6 mois Douleur > 6 mois Définition Douleur chronique de 15.3 % (1996) 19,5 % (2004) 18.9 % [Québec] 15.7 % 49 % Moderate to severe = 18.5 % 29 % (2001) 25 % (2004) [Québec] 18 % (2001) 16 % (2004) 14.1 % N/D N/D 100 % 29 % Prévalence douleur chronique 17 % ~14 : ~17 (1996) ~16 : ~21 (2007) Rapporté par groupe d’âge (12.4 : 15.6) (22 : 27) Rapporté par grade de dlr N/D N/D N/D (27 : 31) (15 : 20) Prévalence Hom. : Fem. dos dans N/D 6.7 % 6.0 % Cause #1 selon les MD = 21 % des cas de DC N/D N/D 18,6 % (3.5 % unique DC) 15.7 % 35 % parmi 340 patients DC (** échantillon ≠) 35 % 6.3 % Douleur au l’échantillon Enquête nationale sur la santé de la population (longitudinale) et Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (transversale) Reitsma ML (2012) Schopflocher D (2011) Rashiq S (2009) Boulanger A (2007) Tripp DA (2006) Jacobs P (2004) Rappoport J (2004) Moulin DE (2002) Canada (National) (1996-1997) Canada (National) (2007-2008) Canada (National) (1996-1997) Canada (National) (2001) Canada (National) (2001) Canada (National) (1998-1999) Canada (National) (2000-2001) Canada (Ontario) (2004) Canada (National) (2001, 2004) Millar WJ (1996) Moulin DE (2002) Lieu (année cohorte) Auteurs (année publi.) Tableau 2. Résumé des études portant sur la prévalence de la douleur chronique au Canada En bref, en fonction de la source de données ou de l’approche méthodologique, la prévalence de la douleur chronique variait de 14 % à 49 % au Canada entre 1994 et 2008. Dans bien des cas, la douleur du plan dorsal (« back pain ») était la condition la plus rapportée variant de 19 % à 35 % de l’échantillon de douleur chronique, soit environ 6 % de la population totale sondée. La prévalence varie énormément en fonction des définitions, de la sévérité et des populations étudiées. L’étude récente de Hoy et collaborateurs recensait une prévalence annuelle de douleur lombaire aigüe autour de 38 %. La prévalence de la douleur lombaire était relativement stable en fonction de l’âge, mais les manifestations graves étaient plus fréquentes chez les personnes âgées et chez les femmes. Les manifestations de douleur chronique du plan dorsal affichaient une tendance à la hausse, et représentaient une importante proportion des conditions de santé chroniques. Il s’agit donc d’une condition de santé dont l’impact peut être considéré comme majeur. 2.2.1.3 Les avantages d’étudier la prévalence de la douleur lombaire La prévalence présente un intérêt autant pour les chercheurs que les décideurs. Certains prônent son utilité pour servir de base pour des études sur les fondements étiologiques, pour l’évaluation du système de santé et évaluer l’effet de la douleur lombaire sur la population générale (Walker, 2000). Les taux de prévalence peuvent permettre de prioriser la planification des services de santé sur une base annuelle, voire même à accroitre le financement de la recherche visant à améliorer l’évaluation et le traitement de cette condition (Loney & Stratford, 1999). Au niveau des différentes mesures de prévalence qui peuvent être dérivés (ponctuel, annuel, à vie), celles-ci présentent des avantages selon la perspective de l’utilisateur. Par exemple, du point de vue d’un chercheur qui utilise des questionnaires, un des avantages de la prévalence ponctuelle par rapport à la prévalence par période (mois ou années), permet de s’affranchir du biais de rappel (Carey et al., 1995), surtout pour les recherches portant sur les populations âgées. Les estimations pourront être plus précises et comparables si les autres failles méthodologiques sont contrôlées. Si nous prenons la perspective des patients, ceux-ci peuvent être sensibilisés par l’importance de s’informer et d’adopter de bonnes pratiques de travail pour prévenir des congés forcés et limiter d’éventuelles pertes 31 financières. Par exemple, cela a mené à la rédaction du « Back Book », un outil informatif et préventif pour renseigner les patients sur la santé du dos (Roland et al., 2001). La perspective de l’employeur ou de la Commission de la santé et de la sécurité au travail (CSST) peut être d’effectuer une surveillance mensuelle ou annuelle pour suivre la progression de cette condition. Par exemple, réduire les pertes de productivité en lien au présentéisme ou à l’absentéisme ou minimiser les réclamations d’invalidité dans des études sur des cohortes de travailleurs peut leur être particulièrement utile. La prévalence à vie peut servir à déterminer si la condition de santé présente une forte probabilité de survenue dans la pratique générale d’un professionnel de la santé. Il peut être intéressant à ce moment d’investir du temps et de l’argent dans la formation continue visant une meilleure gestion thérapeutique des douleurs lombaires si la prévalence s’avère élevée tel que décrit dans les précédents paragraphes. Du point de vue des décideurs, la prévalence est un indicateur simple qui dresse le portrait de l’impact d’une condition sur le système de santé ou sur l’état (Hoy et al., 2012). Bref, les études de prévalence sont en général pratiques et abordables en termes de couts. Elles permettent de fournir un aperçu de la tendance séculaire 3 de la douleur lombaire dans la population. De plus, les études de prévalence sont l’une des approches préconisées pour déterminer l’impact social, en termes de couts et de perte de productivité, à l’échelle de la population dans une société. Il existe une abondante littérature sur la prévalence des maux de dos pour des sous-populations plus spécifiques (p. ex. divers métiers, enfants et adolescents, groupes de patients avec une pathologie préexistante, etc.). Ces études sont cependant moins généralisables et bien qu’intéressantes pour de la microgestion ne font pas partie de l’objectif du présent ouvrage. 3"Tendance"séculaire":"Évolution"d’un"phénomène"de"santé"dans"le"temps"(d’une"année"ou"d’une" génération"à"l’autre)."Selon"Jenicek"M"et"Cléroux"R."(1987)"Epidémiologie":"principes,"techniques"et" applications."484p.)" 32 2.2.2 Incidence de la douleur lombaire 2.2.2.1 Notions d’incidence L’incidence cumulée (ou cumulative) est le nombre de nouveaux évènements qui surviennent dans une population définie pendant une période de temps spécifique (numérateur) divisé par la population à risque pour cet évènement pendant la même période (dénominateur) (Szklo & Nieto, 2007). L’incidence nous renseigne sur le risque de développer une maladie. L’incidence cumulative peut être déterminée sur une population stable (population fermée) qui n’a subi aucune perte de suivi. Il arrive par contre fréquemment que le suivi ne soit pas complet pour tous les individus d’une population, soit en raison du décès d’individus en raison d’une condition différente de celle à l’étude, par des « perdus de vue », ou par des individus recrutés plus tard dans l’étude. Toutes ces raisons produisent des observations censurées qui peuvent être analysées avec des tables de mortalité (Szklo & Nieto, 2007). Cependant, en présence d’observations censurées ou en présence d’une population ouverte (dynamique), les épidémiologistes se rapportent traditionnellement au concept de taux d’incidence qui s’exprime en personnes-temps (Rothman et al., 2008). Ce concept peut se baser sur la période de contribution en temps de chaque individu dans la population à risque pour la condition à l’étude et permet d’éliminer le biais de sélection dans des études de cohorte (Szklo & Nieto, 2007). Ainsi, il est possible de calculer le « taux d’incidence » d’une population en déterminant les nouveaux cas de maladie (nombre incident) divisés par la somme de tous les temps d’observation des individus : [Taux d’incidence = Nombre d’évènements / Σpersonnes temps passé dans la population]. Par contre, en utilisant cette approche, il faut partir de l’hypothèse que le risque demeure approximativement constant dans l’intervalle de temps à l’étude. Soit n personnes suivies sur une période de temps t sont équivalentes à t personnes observées pendant n unités de temps. Si nous prenons en exemple la douleur lombaire chez des ouvriers en maçonnerie, il est difficile de se faire à l’idée que le maçon suivi pendant 10 ans aura un risque équivalent à 10 maçons suivis pendant un an. La manière de pallier cette limite de l’approche personne-temps est de déterminer des intervalles de temps plus restreints et de calculer un taux pour chacun (Szklo & Nieto, 2007). Pour réduire les facteurs confondants, si la taille de l’échantillon le permet, il est aussi suggéré de stratifier selon des variables tel l’âge ou le sexe, deux variables qui peuvent influencer la survenue 33 de symptômes douloureux. Une deuxième approche consiste à utiliser des données agrégées si la contribution en personne-temps ne peut être déterminée. Par exemple, le dénominateur prendra la valeur de la population moyenne de la province du Québec pour une période donnée (p. ex. l’année 2007), considérant une certaine stabilité pour la zone géographique en question et la composante démographique (Szklo & Nieto, 2007). Au-delà de la description du concept général, déterminer l’incidence cumulée ou le taux d’incidence de la douleur lombaire demeure difficile et représente une bête noire pour les épidémiologistes. Normalement lors du calcul d’une mesure d’incidence d’une maladie infectieuse, les individus immunisés sont retirés de la population à risque suite à l’épisode initial (dénominateur) puisqu’ils ne devraient plus jamais contracter l’infection. Ce n’est pas le cas pour l’incidence de la douleur lombaire, pour laquelle la prévalence à vie et le taux de récurrence élevés complexifient l’identification de l’épisode initial. Pour faciliter la compréhension, appuyons-nous sur la Figure 3. Figure 3. Schématisation de la mesure de l’incidence de douleur lombaire. 34 Pour une sous-population hypothétique de 25 individus, les données médicoadministratives de consultation par des professionnels de la santé sont obtenues pour une durée de cinq ans. Cinq patients développent au moins un épisode de douleur lombaire durant cette période. L’incidence annuelle en 2003 est de 2/25, soit 8,0 % (patients A et B). En réalité, le patient A ne devrait pas être considéré comme incident en 2003, car son épisode a débuté en 2002. La véritable incidence devrait plutôt être de 4,2 % en 2003 (patient B / (25 – patient A)). Cependant, n’ayant pas accès aux données de 2002 (voir zone ombragée, Figure 3), nous devons supposer que le patient A développe son problème lombaire en 2003. Il y a donc surestimation de l’incidence annuelle. Pour l’année 2004, l’incidence annuelle devrait être considérée ainsi : patient C / (25 – (A+B)) = 1/23 = 4,3 %. Cependant, la complexité vient du fait que le patient B peut être considéré comme ayant récupéré de son épisode antérieur de douleur lombaire. Devrait-il être réintégré dans la population à risque de développer un épisode de douleur lombaire, ou doit-il en être retiré, car il est désormais plus à risque de développer un deuxième épisode, et devrait donc être considéré comme un patient avec un potentiel de récurrence? Si le patient B est réintégré dans la population à risque, l’incidence annuelle sera de 4,2 % au lieu de 4,3 %, donc une légère sous-estimation s’il est considéré qu’un épisode antérieur est garant d’un épisode futur. Prenons en dernier exemple l’année 2007, l’incidence annuelle pourrait se définir ainsi : patients E+B / (25 – (A+C)) = 8,7 %. Plusieurs questions peuvent être soulevées; 1) Le patient B devrait-il être considéré un nouveau cas de douleur lombaire, même s’il s’agit de son troisième épisode en cinq ans? Ne devrait-il pas plutôt être retiré de la population à risque comme dans la simulation de 2004?; 2) Le patient D ne devrait-il pas lui aussi être retiré de la population à risque puisqu’il a déjà développé un épisode en 2005, ou devraiton le considérer également comme un patient pouvant développer un nouvel épisode de douleur lombaire indépendant du précédent? L’incidence annuelle pourrait donc être en réalité de 4,7 % (E/ 25- (A+B+C+D)). L’estimation de 8,7 % surestimant encore la véritable incidence. 35 Ces quelques simulations démontrent la complexité à déterminer l’incidence de la douleur lombaire considérant qu’un épisode aigu puisse conduire à des épisodes récurrents, voire à une condition chronique. Devrait-on considérer les patients ayant déjà eu un épisode aigu comme des patients présentant un risque similaire à la population n’ayant jamais eu d’épisode antérieur? La possibilité de surestimer l’incidence est bien réelle, et si nous rapportons cet exemple à l’échelle de la population, l’erreur peut devenir davantage importante. Le défi devient donc d’identifier le tout premier évènement d’un individu pour le considérer comme un « vrai » cas incident de douleur lombaire. Ce phénomène a été décrit par McBeth et Jones en lien avec la douleur musculosquelettique. Ces derniers suggèrent ainsi que bien que nombre d’études disent rapporter une incidence, il s’agirait plutôt d’une prévalence à partir d’une population d’individus asymptomatiques lors de leur recrutement dans une étude portant sur l’identification de nouveaux cas de douleur (McBeth & Jones, 2007). Notons que l’exemple hypothétique de la Figure 3 s’appuie sur la disponibilité de données de consultation d’une durée de cinq ans. Prenons le cas d’études qui s’appuient sur des données autorapportées par des patients et qui peuvent difficilement aller au-delà de six mois de recul d’historique sans risquer d’introduire un biais de rappel (Carey et al., 1995). Ainsi la question prend davantage d’importance dans ces études échafaudées pour déterminer l’incidence; les cohortes de patients construites sur la prémisse que les participants sont initialement exempts de douleur lombaire sont-elles fiables ou contaminées par une proportion importante d’individus qui sont en réalité des patients ayant déjà soufferts d’épisodes antérieurs de douleur lombaire et devant être considérés à risque d’une récurrence d’épisode? 2.2.2.2 Survol de la littérature La littérature portant sur l’incidence de la douleur lombaire à l’échelle de la population est plutôt limitée (Abenhaim & Suissa, 1987; Papageorgiou et al., 1996; Zitting et al., 1998; George, 2002; Elders & Burdorf, 2004; Kopec et al., 2004; Jacob, 2006; Bernatsky et al., 2007; Mattila et al., 2009; Knox et al., 2011; Waterman et al., 2012). Aucune revue systématique n’est disponible à ce jour. Également, bien que quelques études datant d’avant 2000 aient rapporté des résultats d’incidence, certaines sont questionnables eu égard aux définitions utilisées autant pour la douleur lombaire que pour l’incidence. La 36 littérature est donc récente en comparaison des nombreuses études de prévalence publiées depuis 30 ans. Afin de simplifier cette section, un résumé des 10 études les plus pertinentes à l’échelle de la population est présenté au Tableau 3. Notons que dans la dernière décennie, l’utilisation de banques de données médicoadministratives a été fréquente pour la détermination de l’incidence de la douleur lombaire sous une perspective populationnelle. Cependant, ces études portent souvent sur des populations militaires qui peuvent être considérées comme peu représentatives de la population générale. La comparaison des résultats de ces études est une aventure délicate. Les définitions, le type et la taille de la population ainsi que les mesures d’estimation varient énormément. Notons qu’au niveau des études américaines, le taux d’incidence était beaucoup plus élevé chez les militaires que dans la population générale, et le ratio homme versus femme était déséquilibré (Knox et al., 2011; Waterman et al., 2012). Le taux de consultation en urgence pour de la douleur lombaire était nettement inférieur dans la population générale américaine de la tranche des 20 à 39 ans (0,011 par 1000 personneannées) en comparaison du taux d’incidence d’hospitalisation pour les jeunes militaires américains de 20 à 29 ans (35,5 par 1000 personne-années), ou les jeunes militaires finlandais des 18 à 29 ans (27,0 par 1000 personne-années). Mattila et collaborateurs indiquaient que leur étude sur les jeunes militaires finlandais était représentative de la population générale des jeunes hommes puisque le service militaire était obligatoire, contrairement aux Etats-Unis (Mattila et al., 2009). Si nous comparons plus spécifiquement les populations militaires américaine et finlandaise de 18-20 à 29 ans, les taux étaient sensiblement les mêmes à première vue. Cependant, l’étude américaine n’évaluait que le code CIM-9 de « lumbago », alors que l’étude finlandaise répertoriait les cas d’hospitalisation basés sur huit codes CIM-9 et CIM-10, dont le lumbago. Au final, les auteurs avançaient que par la nature de leur travail et les charges portées et des exercices intensifs, les militaires étaient plus à risque de se blesser au bas du dos. Nous pourrions également discuter de la divergence de résultats par exemple entre l’étude populationnelle faite au Canada par Kopec et celle de Waterman sur la population américaine. L’une utilisait les données d’un sondage national (Kopec et al., 2004), l’autre 37 des données administratives d’une banque de veille sanitaire (Waterman et al., 2012). Deux sources de données différentes (autorapportées vs administratives), deux définitions différentes d’un cas de douleur lombaire et au final, des taux d’incidence de douleur au dos de 47,0 vs 1,3 par personne-années chez les femmes au Canada et aux États-Unis respectivement. L’hétérogénéité est donc importante entre ces deux études et il est crucial de décortiquer chacune d’elles pour en tirer les conclusions adéquates. La complexité vient également de la problématique susmentionnée concernant la qualité des cohortes initiales afin de s’assurer qu’il n’y ait pas surestimation de l’incidence. Au final, à ce jour, le peu d’études sur l’incidence de la douleur lombaire à l’échelle de la population ne nous permet pas de tirer de grandes tendances. 38 39 Angleterre (Manchester) ( 1993)1 Finlande (1994) Canada (Saskatchewan) (1995-1996) Canada (1995-1997) Papageorgiou A (1996) George C (2002) Finlande (1990-2002) É-U (1998-2006) É-U (2004-2008) Suède (Scanie) (2009) Mattila VM (2009) Knox J (2011) Waterman BR (2012) Joud A (2012) Comté [20 et +] National [0 et +] Militaires [18 et +] Militaires [18 – 29] Ville [22 – 70] Province [20-69] National [18 et +] Province [20 – 69] National [0 – 28] Ville [18 – 75] Cat. âge Base de données Base de données Base de données Base de données Sondage et entrevue tel. Sondage questionnaire Sondage questionnaire Sondage questionnaire Base de données Questionnaire et et et Source de données CIM-10 (- 5 ans) CIM-9 (Nil) Hospitalisations CIM-9 CIM-10 (Nil) CIM-9 (Oui ; N/D) Région, durée, sévérité (- 6 mois) Région et durée (- 1 mois) Région, durée, sévérité (- 6 mois) Problème au dos (- 1 an) CIM-9 (- 28 ans) Région et durée (- 1 mois) Définition LBP (ligne de base)2 1an 5 ans 9 ans 13 ans 1 an 6 mois 2 ans 6 mois 28 ans 1 an Suivi à 1 200 000 1 485 241 300 pers.-an. 13 754 261 pers.an. 267 700 pers.-an.3 212 318 10 077 628 10 692 109 Population risque (20.9 : 26.5) (1,46 : 1,33) (37,6 : 58,3) (27,0 : N/D) 18,5 % 18.0 % : 19.7 % (269) 8,1 % : 9,0 % (42.2 : 47,0)4 8% 2 % : 0,76 % 3,1 % : 4,7 % Incidence Hom. : Fem. 1. L’année de la collecte des données n’était pas précisée ni dans cette étude ni dans celle à laquelle elle référait. 2. Réfère à la période de rappel initial pour déterminer l’échantillon « sans » douleur lombaire pour la suite de l’étude. 3. Corresponds à la population à risque en personne-années. 4. Parenthèses = taux d’incidence rapportés par1000 personne-années ou par 1000 personnes. Les autres résultats sont des incidences cumulatives. 5. L’étude de Kopec porte sur la douleur globale au dos, sans spécification propre à la région lombaire. Jacob T (2006) Canada (Saskatchewan) (1995-1996) Israël (ville) (1999-2000) Cassidy JD (2005) Kopec JA5 (2004) Zitting P (1998) Lieu (année étude) Auteurs (année publi.) Tableau 3. Résumé d’études récentes portant sur l’incidence de la douleur lombaire 2.2.2.3 Les avantages d’étudier l’incidence de la douleur lombaire Combien de nouveaux cas de douleur lombaire annuellement les professionnels de la santé doivent-ils envisager dans leur pratique? Peut-on diminuer le nombre de nouveau cas en identifiant les facteurs de risque dans certaines sous-populations ? Les cohortes incidentes peuvent permettre une analyse plus poussée que les cohortes de prévalence pour répondre à ces questions. Les données d’incidence sont particulièrement importantes pour estimer le risque et évaluer la causalité (Szklo & Nieto, 2007). Ce genre d’information peut servir de manière encore plus précise à planifier l’organisation des soins et des ressources en matière de santé (Jacob et al., 2004). Malgré ce constat, le nombre d’études sur l’incidence de la douleur lombaire demeure limité entre autres en raison d’une prévalence à vie élevée (Waterman et al., 2012) et de la récurrence importante de cette condition (Stanton et al., 2008) qui rendent la détection du premier épisode difficile (McBeth & Jones, 2007). Comme Loney et collègues le précisaient, pour déterminer l’incidence, il faut idéalement favoriser un devis longitudinal prospectif (Loney et al., 1998). Cela permet de suivre et faire des mesures répétées dans le temps d’individus sélectionnés aléatoirement pour éviter tout biais pouvant influencer l’incidence. Plusieurs groupes ont tenté de déterminer l’incidence de la douleur lombaire dans la population générale à partir de sondages et de questionnaires dont les groupes ont été suivis de manière prospective, mais ces études demandent des ressources et du temps et la préparation de l’échantillon de départ n’est pas toujours adéquate. Deux études ont effectué un suivi prospectif à partir de cohortes de naissances, cas rares en épidémiologie pour une étude de douleur lombaire pour lesquels l’historique complet de l’individu est disponible depuis sa naissance. Il s’agit de l’étude de Zitting et collaborateurs qui a pu exclure tous les cas de récurrence de leurs analyses pour déterminer les taux d’incidence de douleur lombaire en Finlande (Zitting et al., 1998) et l’étude de Leboeuf-Yde sur une cohorte de jumeaux danois (Leboeuf-Yde et al., 1996; 2009). Sans l’accès à ce genre de cohorte de valeur inestimable, et dans l’optique d’améliorer la construction d’une cohorte incidente, l’analyse secondaire de données médicoadministratives revêt un certain intérêt. Au Québec, l’accès aux données de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) est somme tout peu couteux comparativement à la réalisation d’études prospectives et 40 surtout, les données sont disponibles pour des périodes continues à partir de 1996. Les banques de données médicoadministratives sont donc un complément aux sondages (Asghari et al., 2009). C’est probablement l’une des raisons pour laquelle ces banques de données sont de plus en plus utilisées pour le suivi de maladies chroniques, mais également pour des conditions telles la douleur lombaire aigüe ou grave comme la tendance semble l’indiquer dans le Tableau 3. Tel que dans l’étude de Joud et collaborateurs, ou dans l’étude de Knox et collaborateurs, l’analyse de ces banques de données permet d’examiner le passé médical de chaque patient et de s’affranchir des cas récurrents. 2.2.3 Résumé de la section épidémiologie En bref, la prévalence et l’incidence sont des mesures de fréquence nécessaires pour aider les chercheurs et les décideurs à suivre la santé des populations et ajuster les programmes de soins et les besoins. La prévalence dresse le portrait global de la condition alors que l’incidence renseigne sur la fréquence d’apparition et permet d’étudier les facteurs de risque. Aucune étude de morbidité n’est parfaite en ce qui a trait à la douleur lombaire en raison de la complexité de cette condition. À cet effet, notons entre autres qu’il aura fallu plus de 30 ans pour que de nombreux experts se consultent et statuent sur une définition consensuelle de douleur lombaire aigüe alors qu’il était su que le fardeau socioéconomique de la douleur lombaire était majeur. C’est donc dire que les failles méthodologiques sont nombreuses, mais que l’on peut progressivement aspirer à avoir une littérature plus homogène dans les années à venir sur ce sujet. Pour les douleurs lombaires de type récurrente ou chronique, le défi est encore plus grand, car les définitions sont nombreuses et un consensus n’a été publié que très récemment pour la douleur récurrente. De plus, les études de douleur chronique et récurrente sont encore souvent comparées à tort en raison d’une mauvaise compréhension des définitions qui sous-tendent ces deux conditions de douleur lombaire. 41 2.3 L’utilisation des banques de données administratives en épidémiologie Comme discuté dans la précédente section, les banques de données administratives revêtent une importance grandissante pour l’analyse de données sur des conditions de santé chroniques telles que la douleur lombaire. En effet, les données ambulatoires et d’hospitalisation sont quotidiennement répertoriées au Canada. Chaque province dirige une couverture d’assurance maladie universelle permettant l’accès à des soins de santé médicaux pour l’ensemble de la population. L’information est centralisée dans des banques de données dites médicoadministratives dans lesquelles se retrouvent entre autres les services prodigués par les médecins et les médicaments d’ordonnance récupérés en pharmacie. Les prochaines pages serviront à mieux décrire ces banques de données médicoadministratives dans l’optique de mieux cerner les analyses présentées dans cet ouvrage. 2.3.1 Banques de données en santé Les banques qui recoupent les données de santé se déclinent sous deux grandes catégories : les banques de dossiers médicaux et les banques administratives. Les banques de dossiers médicaux (ou banques de données cliniques aussi appelées Dossier médical électronique (DME)) rassemblent les variables cliniques de chaque patient pour des fins de traitement (Strom et al., 2012). Elles servent au suivi du patient et à optimiser son traitement thérapeutique. Ces banques contiennent des informations telles que la consommation d’alcool, l’usage de tabac, les résultats de tests biochimiques, l’indice de masse corporelle, etc. Les banques de dossiers médicaux sont en essor étant donné le virage technologique dans le domaine de la santé et l’orientation des programmes vers la médecine personnalisée (Jutte et al., 2011). Les banques de données médicoadministratives (ou banques de données administratives) ont pour but de rassembler les données de facturation et des ordonnances réclamées suite à l’utilisation de ressources médicales par un individu (voir Figure 4). Leur but premier est de permettre le remboursement du pourvoyeur de soins basé sur une réclamation d’acte, un diagnostic posé ou une ordonnance récupérée. 42 Figure 4. Provenance des données administratives Légende : Les banques de données médicoadministratives regroupent les données de facturation de plusieurs prestataires. Chaque prestataire fait parvenir au payeur sa requête pour le service prodigué au patient. Dans notre cas le payeur est l’état par le biais de la Régie de l’assurance maladie du Québec. L’utilisateur de données, l’équipe Primus dans notre cas, demande ensuite accès aux données pour produire une étude épidémiologique Adapté de (Strom et al., 2012) avec permission 2.3.2 Provenance des données d’actes et de diagnostics consignées à la RAMQ Lors de la visite médicale, le médecin traitant produit un dossier patient dans lequel se retrouveront en général les notes cliniques et de suivi ainsi que les résultats d’examens. Un patient présentant un cas de douleur lombaire l’empêchant de se rendre travailler depuis deux jours pourrait par exemple se présenter chez son médecin de famille. L’omnipraticien fera une anamnèse et procèdera à un examen physique, et si la condition n’est pas jugée grave, le patient aura son congé avec ou sans ordonnance pharmaceutique. En présence d’un indicateur modéré (yellow flag), l’omnipraticien pourrait décider de donner son congé au patient en considérant l’option du suivi rapproché, idéalement il proposerait une séance d’éducation et/ou pourrait référer le patient en spécialité. Par exemple, un patient ayant un emploi physiquement exigeant, ou un historique de mal de dos ou un épisode dont la résolution est longue, pourrait se voir étiqueter un indicateur modéré. Dans le cas d’un indicateur majeur (red flag), il devra avoir référence immédiate en spécialité selon l’échelle d’urgence, décrite dans les guides de pratique clinique (Guidelines, 2011), pour une investigation approfondie (conduction nerveuse, imagerie médicale, blocage nerveux, chirurgie). Par exemple, un patient qui présente une atteinte neurologique, dont la douleur lombaire est accompagnée d’une perte de poids importante et de fièvre pourrait être 43 étiqueté avec un indicateur majeur. Dans toutes les situations, l’omnipraticien procède à une demande de paiement afin de recevoir son dû pour la consultation effectuée et les formulaires d’arrêt de travail remplis, information qui sera inscrite au Québec à la case 8 du bordereau de paiement (voir Figure 5). Si l’omnipraticien a suivi plusieurs formations en gestion de la douleur, pratique à une grande distance de centres spécialisés ou pour d’autres raisons, il se pourrait que des codes d’actes soient inscrits dans la case 6, en lien avec des interventions spécifiques pour la douleur. Le médecin spécialiste à qui le patient est recommandé utilisera le même type de bordereau de paiement. Cependant, il est en général plus fréquent de retrouver des codes d’actes dans la case 6 lorsque le patient est vu en spécialité. Figure 5. Bordereau de paiement de la RAMQ Légende : Bordereau de paiement de la Régie de l’assurance maladie du Québec. La case 4 permet d’inscrire le code CIM-9 jusqu’à quatre chiffres de précision en plus des diagnostiques secondaires dans l’espace blanc. Les cases 6 et 8 permettent d’inscrire les codes d’actes posés ou le type d’examen effectué. Tiré du manuel de facturation des omnipraticiens rendu disponible par la RAMQ. Aux fins d’analyses secondaires de données telles que dans la présente étude, la case 4 de ce bordereau de paiement revêt un intérêt capital. En effet, le transfert à la RAMQ des informations liées aux diagnostics s’effectue par un processus de classification. Contrairement au dossier patient dans lequel le médecin traitant note ses observations et diagnostics de manière manuscrite, y inscrit sa stratégie de traitement et documente 44 extensivement la consultation, les dossiers administratifs s’appuient plutôt sur un système de réclamation homogène et concis visant à optimiser le remboursement des professionnels et déterminer le volume de procédures par établissement. En référence à la case 4 de la Figure 5, le médecin inscrit le diagnostic principal selon la nomenclature CIM-9. Le manuel des CIM-9 est préparé en plusieurs langues par l’OMS, qui autorise par la suite les pays à l’adapter à leur réalité, tâche réalisée au Canada par l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS). Si le médecin ne décèle aucune condition particulière (examen de routine), un code d’état « normal » est inscrit. S’il y a des diagnostics concomitants, ou des comorbidités, la RAMQ demande d’inscrire premièrement le code principal composé de trois à quatre chiffres dans la case réservée à cet effet. En deuxième lieu, les diagnostics secondaires ou les comorbidités ou toute autre indication pouvant avoir un impact sur le pronostic devraient être inscrits dans la case adjacente des renseignements complémentaires (voir case 4, Figure 5). En milieu hospitalier, bien que le médecin émette quand même sa demande de paiement, une étape s’ajoute étant donné que les données sont également centralisées dans une banque ministérielle pour les séjours hospitaliers (Med-Echo). Au niveau du dossierpatient, un formulaire supplémentaire est ajouté, la feuille sommaire, sur laquelle l’information en lien avec la trajectoire de soins du patient est résumée. Sur celle-ci, il y a la liste du diagnostic principal (un seul) et des diagnostics secondaires, la confirmation ou l’infirmation que le diagnostic d’admission demeure le diagnostic principal et la liste des traitements prodigués. Des archivistes spécialisés en nomenclature médicale procèdent ensuite à la révision des informations de la feuille sommaire. L’archiviste annote au besoin la section « traitement » de la feuille sommaire et demande des éclaircissements au médecin traitant si nécessaire. Ces étapes de validation augmentent la qualité des diagnostics inscrits au rapport. L’archiviste complète ensuite la codification de l’ensemble des données en données CIM-9 (jusqu’en avril 2006), ou en données CIM-10-CA (depuis avril 2006). Notons que la codification en CIM-10 a été endossée par la 43e assemblée pour la santé mondiale en mai 1990 et a commencé à être utilisée par des pays membres de l’OMS à partir de 1994 (WHO, 2013). Le Canada a signé son accord de participation en 1995 pour une implantation dès 2001. Puisque les systèmes de santé sont de juridiction provinciale, chaque province a décidé du moment opportun d’implanter la codification CIM-10 45 (Johnson, 2004), le Québec étant l’une des dernières provinces à s’y conformer en 2006. Cette transition entre les codes CIM-9 et CIM-10 en 2006 était nécessaire afin d’ajuster les données du Québec à celles d’autres provinces canadiennes ou d’autres pays. La correspondance des codes CIM-10 a été validée et la supériorité aux codes CIM-9 évaluée (ICIS, 2013). Une fois la codification approuvée, les données liées à l’hospitalisation sont traitées et catégorisées dans un autre système de classification nommé le All-PatientRefined-Diagnostic-Related-Group (APR-DRG). Les APR-DRG offrent une classification des données hospitalières couvrant de façon exhaustive toute la clientèle hospitalisée en centre hospitalier de soins généraux et spécialisés. Ils aident à cibler les efforts de revue d'utilisation des ressources hospitalières et d'amélioration de la qualité des soins. Nous reviendrons aux APR-DRG dans la discussion liée à l’évaluation des couts (section 6.7.3). En bref, la base même du système de codification des diagnostics peut affecter la validité des études épidémiologiques, d’où la nécessité de tenter d’en comprendre son fonctionnement. Il ne faut pas oublier qu’en Amérique du Nord les banques administratives n’ont pas été créées dans un but initial de recherche, mais de remboursement. En parallèle du fichier des services médicaux de la RAMQ qui centralise les données propres aux diagnostiques et aux actes, notons également l’existence du fichier des services pharmaceutiques. Afin d’obtenir un remboursement, les pharmacies font parvenir à la RAMQ ou à l’assureur privé, selon le régime, une réclamation pour les services offerts et les médicaments dispensés au patient suite au traitement de l’ordonnance de ce dernier. La RAMQ assure donc les adultes, ainsi que leurs enfants, qui se retrouvent dans l’une des trois catégories suivantes : 1) prestataires d’aide financière de dernier recours; 2) personnes de 65 ans et plus sans régime privé ou dont le régime privé est moins avantageux que celui de la RAMQ; 3) les individus de moins de 65 ans qui n’ont ni accès à une assurance privée ni à des prestations d’aide financière (RAMQ, 2008). Les limites du fichier pharmaceutique pour une étude épidémiologique ou de couts se situent au niveau de la population active des 18 à 64 ans (voir Tableau 4). 46 Tableau 4. Pourcentage des adultes couverts par le régime d’assurance médicament du Québec de 2000 à 2008. Année Adultes assurés* 18 – 64 ans 65 ans et plus (%) (%) (%) 2000 54,4 35,6 91,3 2001 54,3 35,7 90,9 2002 53,7 35,3 90,5 2003 53,3 35,0 90,2 2004 52,9 34,8 90,1 2005 52,5 34,6 90,0 2006 52,0 34,1 89,7 2007 51,7 33,8 89,4 2008 51,2 33,5 89,1 * Adultes de 18 ans et +, inscrits au régime public d’assurance médicament, calculé en équivalents de temps complet. Calculé à partir des tableaux AM.06 de la RAMQ. En effet, le groupe des 18 à 64 ans du régime public représente en moyenne seulement 34,7 % de la population « active ». Ajoutons à cela qu’approximativement 31 % des 34,7 % des assurés de cette sous-population sont des prestataires d’aide financière de dernier recours. Nos résultats sur l’utilisation des drogues renseigneront donc adéquatement sur les prestataires d’aide sociale, mais malheureusement, les résultats pour la souspopulation des autres adhérents dont les employés, les travailleurs autonomes, les gens au chômage, etc. seront difficilement comparables à la population générale (c.-à-d. validité externe, voir sous-section suivante 2.3.3). Également, les médicaments en accès libre n’y sont pas comptabilisés, ni les informations sur les médicaments dispensés en établissements hospitaliers ou de soins de longue durée (CHSLD). La population active étant reconnue pour être particulièrement affectée par la douleur lombaire, seul le profil de consommation de médicaments dans le tiers de la population pourra être exploité et difficilement extrapolable aux deux autres tiers. Pour cette raison, l’étude présentée dans ce document ne se fonde pas sur l’analyse des données du fichier des services pharmaceutiques. 47 2.3.3 Validité des banques de données administratives Le concept de validité revient souvent au cœur des discussions lorsqu’il est question d’utilisation de banques de données administratives à des fins de recherche. Le concept général de validité est la capacité d’un test ou d’une approche à distinguer entre l’individu qui présente une maladie (ou toute autre caractéristique recherchée) et celui qui n’en présente pas (Gordis, 2004). Il sera question de validité interne lorsque qu’il y aura discussion des biais potentiels permettant d’établir que ces derniers ont été minimisés ou contrôlés afin de produire des analyses qui tendent vers des résultats véridiques (Szklo & Nieto, 2007). Il sera question de validité externe lorsqu’il y aura analyse ou discussion des caractéristiques de la cohorte étudiée en rapport à la population qu’elle est sensée représenter. Ce dernier concept de validité s’apparente à la « généralisabilité », et permet au lecteur de saisir la portée des conclusions de l’étude sur un échantillon par rapport à un groupe d’intérêt. Par exemple, l’étude de Matilla et collaborateurs portait sur la douleur lombaire dans une cohorte de militaires finlandais de 18-29 ans (Mattila et al., 2009). Les auteurs avançaient que cette sous-population était plus souvent hospitalisée que la population masculine générale de la même tranche d’âge pour une raison de logistique et qu’il fallait faire attention à la généralisabilité (c.-à-d. les auteurs discutent de la validité externe de leur étude). Lors de la conduite d’études épidémiologiques ou pharmacoépidémiologiques, une partie de la validation interne s’effectue par la validation des mesures utilisées. Par exemple, lors de l’utilisation d’algorithmes pour construire une cohorte de douleur lombaire, une étude de validité des mesures permettrait de s’assurer que les codes diagnostics de douleur inscrits dans le fichier des services médicaux rémunérés à l’acte de la RAMQ soient représentatifs de la condition réelle de douleur lombaire du patient établie par le médecin lors de l’examen physique et notée au dossier médical, ou que les analgésiques inscrits dans le fichier des données pharmaceutiques de la RAMQ soient conformes à ce que le médecin a réellement prescrit. West et collègues réfèrent plutôt aux termes de « concordance » et d’ « accord » pour se rapporter à ce genre d’études de validité, puisqu’il s’agit d’établir une validation à partir d’une comparaison entre plusieurs sources de données dont l’une est considérée comme la source étalon et l’autre la source à 48 l’étude (Strom et al., 2012 Chapitre 41). Les deux paramètres permettant de s’exprimer sur la validité sont la sensibilité et la spécificité (voir Figure 6). Figure 6. Approche pour déterminer la validité des diagnostics dans une source de données à l’étude Légende : Dans cet exemple, nous cherchons à vérifier la validité des diagnostics identifiés dans le fichier des services médicaux rémunérés à l’acte de la RAMQ en comparaison d’une source étalon, soit dans ce cas-ci la banque de données cliniques du Registre Québec Douleur. Le registre consigne les diagnostics et l’étiologie de la condition de douleur lombaire de chaque patient qui consulte un spécialiste de la douleur en 3e ligne de traitement. Sensibilité = A/(A+C); habilité à détecter les patients qui ont réellement un diagnostic de douleur lombaire. Spécificité = D/(B+D); habilité à détecter les individus qui n’ont pas de douleur lombaire. La sensibilité mesure la capacité de la source de données « évaluée » à correctement identifier les individus qui, selon la source de données « étalon », possèdent l’issue d’intérêt. La spécificité mesure, à l’inverse, la capacité de détecter les individus qui ne possèdent pas l’issue d’intérêt entre les deux sources de données. Il est fréquent qu’une méthode présentant une grande sensibilité ait une spécificité faible et vice versa. En fonction de la perspective de l’étude, une sensibilité ou une spécificité élevée sera recherchée. 49 Dans les banques de données administratives, il est en général question de la validité des mesures sur les deux principales variables que sont les diagnostics et les médicaments. Globalement, les banques de données administratives du Canada présentent des données valides et représentatives de la population (voir Figure 7). Figure 7. Comparaison de la validité de diverses banques administratives connues Légende : Plusieurs banques de données médicoadministratives existent internationalement, mais leur validité pour effectuer de la recherche épidémiologique varie énormément. Le présent tableau recense la validité des banques médicoadministratives à partir du recoupement de plusieurs études publiées. Les banques canadiennes (encadré) possèdent une validité élevée dans plusieurs catégories dont les diagnostics. Tiré de Strom et al., 2012 avec permission. 2.3.4 Précisions sur les fichiers de la RAMQ Les données administratives sont utilisées depuis plus de 25 ans, les chercheurs en ayant tiré un constat plutôt positif pour effectuer des études épidémiologiques et pharmacoépidémiologiques (Strom et al., 2012). Il demeure que la validité des données administratives a été soulevée maintes fois (Tamblyn et al., 1995; Sorensen et al., 1996). Il existe de nombreuses banques de données entièrement administratives (p. ex. RAMQ, Health Service Database en Saskatchewan, Medicaid (É.-U.), etc.), des banques administratives pouvant être qualifiées de mixtes qui contiennent certaines variables cliniques (e.g. HMO Research Network (É.-U.)), et enfin des banques de dossiers médicaux (e.g. UK general practice research database, The Health Improvement Network (É.-U.)). 50 De nombreux pays occidentaux font donc usage de banques de données administratives pour des fins de réclamation et de suivi des services cliniques depuis les années 1950. Leur utilisation pour des fins de recherche ne s’est faite qu’autour des années 1980. Cependant, la tendance en Europe dans la même décennie a plutôt été de créer des banques de données pour des fins de recherche. Depuis quelques années, les banques médicoadministratives de l’Amérique du Nord s’adaptent progressivement à cette réalité du chercheur, soit de rendre disponibles les données médicoadministratives qui peuvent y être exploitées et de permettre de les lier à des données de banques de dossiers médicaux afin d’accroitre le nombre et la qualité des études épidémiologiques et ainsi faciliter le processus de veille sanitaire (Strom et al., 2012). La banque administrative de la RAMQ n’est donc pas un exemple unique de banque médicoadministrative en Amérique du Nord. Historiquement, elle a été constituée en novembre 1970 sous une perspective visionnaire de couverture universelle pour des fins purement administratives. Cependant, dans la littérature médicale, certaines études portant sur des données de la RAMQ apparaissent dans PubMed au début des années 1980, suivi d’une nette progression d’études publiées depuis 1995. Les banques de données médicoadministratives sont avantageuses à plusieurs égards. Elles permettent d’étudier des maladies rares, des maladies orphelines et d’étudier l’exposition à plusieurs molécules pharmacologiques particulièrement en raison de leur grande taille d’échantillon (Sorensen et al., 1996; Vinet et al., 2011). Au Québec, entre autres, la banque RAMQ a une excellente représentativité de la population (c.-à-d. bonne validité externe) puisqu’elle regroupe les données médicales d’individus ayant accès à une couverture universelle. Les banques de données médicoadministratives sont également particulièrement intéressantes pour des études longitudinales et permettent de s’affranchir des biais de rappel (Bernatsky et al., 2007; Asghari et al., 2009; Strom et al., 2012). Afin d’étudier certaines maladies, ou pour déterminer la fréquence d’une condition médicale, des algorithmes basés sur des codes de diagnostics CIM-9 ou CIM-10 à partir de fichiers d’actes médicaux, croisés aux fichiers des données pharmaceutiques sont de plus en plus répandus. Cela permet avant tout de faire des gains en terme de temps par l’analyse 51 secondaire de données déjà disponibles et d’économiser des sommes importantes qui devraient sinon être déboursées à produire de nouvelles données primaires en procédant à des études cliniques classiques utilisant des devis prospectifs (Sorensen et al., 1996). Avec la demande accrue pour des données administratives en vue d’études épidémiologiques, la proportion d’études portant sur la validité des données de ces banques médicoadministratives augmente progressivement depuis quelques années. Malgré la très bonne validité globale de nos banques médicoadministratives au Canada (voir Figure 7), il faut demeurer critique en fonction des limites qui existent pour les mesures utilisées (données pharmaceutiques ou diagnostiques) et des conditions de santé étudiées. Deux publications se sont principalement penchées sur cette question de validité, soit celle de Wilchesky et collaborateurs sur la validation des diagnostics (Wilchesky et al., 2004) et celle de Tamblyn et collaborateurs sur la validation des données pharmaceutiques (Tamblyn et al., 1995). En terme de validation des diagnostics, la banque de données étalon (« gold standard ») était celle rassemblant les dossiers d’une étude clinique portant sur 15 000 patients de 66 ans et plus de la province du Québec. Un ensemble de 14 maladies, pour lesquelles il y avait des contrindications d’utilisation de médicaments, a été étudié. Parmi toutes les réclamations de services médicaux, 72 % présentaient des codes diagnostics CIM-9 valides, 23 % une absence de codes et 5 % des codes invalides. Parmi les maladies étudiées, la spécificité des codes CIM-9 était de plus de 90 %, voire même de plus de 98 % pour la plupart des maladies, sauf pour l’hypertension (88 %). La sensibilité des données était cependant inférieure à la spécificité, comme attendu, avec des valeurs sous les 61 %. Cependant, en liant les données diagnostiques de l’étude clinique aux données diagnostiques extraites du fichier de rémunération à l’acte de la RAMQ pour un même patient, la sensibilité augmentait de plusieurs points de pourcentage, jusqu’à 72 % dans le cas du glaucome. La spécificité de ces analyses de données diagnostiques agrégées se maintenait au-delà de 90 %. Cette étude indiquait donc que la spécificité était excellente dans la banque administrative de la RAMQ (c.-à-d. capacité à détecter ceux qui n’ont pas la maladie), mais que la sensibilité était inférieure (c.-à-d. capacité à détecter ceux qui ont la maladie), constituant une faille de validité interne. Le fait que 28 % des diagnostics étaient manquants ou invalides pouvait également contribuer à affecter la sensibilité en augmentant la proportion de faux négatifs. Il faut aussi garder à l’esprit que la mesure étalon était 52 potentiellement imparfaite (c.-à-d. les dossiers cliniques des patients), ce qui fait que ces mesures de validité devraient être considérées des estimés conservateurs. Le besoin de travailler avec des données plus sensibles est important pour contrôler l’effet de facteurs confondants et pour permettre la comparaison des performances entre les dispensateurs de soins de différents établissements. Pour améliorer la sensibilité, il pourrait être intéressant d’accroitre la fenêtre de temps d’observation pour capturer plus de diagnostics pour un même patient. Il serait aussi envisageable de croiser les données diagnostiques avec d’autres sources, telles que les codes d’actes ou les données pharmaceutiques. Par exemple, une équipe de recherche s’est penchée sur la sensibilité des codes diagnostics de la RAMQ liés aux blessures de chute dans la population des plus de 65 ans se présentant à l’urgence. La sensibilité des codes diagnostics CIM-9 a été évaluée à 54 % en utilisant une fenêtre de temps élargie, et de 81 % si le CIM-9 était croisé à un code d’acte spécifique aux fractures (Tamblyn et al., 2000). Néanmoins, il est important de garder à l’esprit que ces deux précédentes études de validité portaient sur l’analyse de dossiers-patients de plus de 65ans, et que la validité des données pourrait être inférieure en prenant en compte la population de tous âges. Une étude a cependant rapporté que les diagnostics d’asthme dans le fichier des services de la RAMQ étaient très sensibles et spécifiques chez les 16 à 45 ans (85 % et 95 % respectivement) (Blais et al., 2006). L’étude de Tamblyn et collaborateurs se basait pour sa part sur le fichier pharmaceutique de la RAMQ et l’analyse des données de prescriptions de 1 917 214 entrées de dossiers-patient âgés de 65 ans et plus. Les dossiers étalons consistaient en des dossiers de patients consentants de l’hôpital Royal Victoria de Montréal. Sur l’ensemble des dossiers, seulement 0,4 % présentaient une erreur d’attribution du code d’identification ou l’absence d’information de paiement pour la prescription. En termes de données manquantes ou aberrantes (prescriptions hors des normes), peu d’erreurs ont été relevées. Les plus fréquentes étaient l’absence de précision pour un ordre verbal ou écrit (0,7 %), s’il s’agissait d’une nouvelle prescription ou d’un renouvèlement (0,7 %), ou l’inscription d’un codes de moins de cinq chiffres (trois entiers et deux décimales) pour indiquer un dosage (0,4 %). Un échantillon composé des dossiers initiaux de prescription de 311 patients vus en clinique a ensuite été croisé avec les données de ces mêmes patients, puis envoyé à la RAMQ pour évaluer la validité des informations. L’étude révélait que le degré de précision 53 était supérieur à 83 % pour rapporter l’information du patient, des médicaments et du médecin traitant. La validité des informations de quantité et de durée avoisinait les 70 %. Les auteurs qualifient de raisonnablement précis le fichier pharmaceutique de la RAMQ, le classant équivalent ou meilleur que d’autres sources de données. Cependant, il s’agissait encore d’une étude sur la population des 65 ans et plus, dont la représentativité était d’environ 90 % dans le fichier des services pharmaceutiques de la RAMQ (voir Tableau 4). Une autre étude portant sur le profil de consommation de médicaments chez les femmes de moins de 65 ans avançait la conclusion que la validité interne dans cette tranche d’âge était acceptable, mais que c’était plutôt la validité externe, la généralisabilité à l’ensemble de la population, qui risquait d’être grandement affectée à partir d’analyses portants sur les fichiers pharmaceutiques de la RAMQ (Bérard & Lacasse, 2009). 2.3.5 Résumé de la section sur les banques administratives En dehors de ces deux études, il existe de nombreuses autres équipes qui ont validé les données RAMQ pour des conditions de santé bien précises que ce soit en lien avec les diagnostics, les codes d’acte ou les données pharmaceutiques (Bartlett et al., 2004; Blais et al., 2006; Monfared & Lelorier, 2006; Cadieux & Tamblyn, 2008; Bérard & Lacasse, 2009; Kawasumi et al., 2011). Les conclusions étaient en général les mêmes, soit une spécificité supérieure à la sensibilité, bien que pour améliorer la validité, l’utilisation d’algorithmes croisés était suggérée (diagnostics x médicaments x actes). Par contre, il est important de tenir compte de deux critères cruciaux lorsque les conclusions de ces études sont prises en considération. D’une part, la validité interne peut varier grandement en fonction de la condition de santé d’intérêt lorsque des données médicoadministratives sont utilisées. Malheureusement, il n’existe aucune étude publiée ayant visé à valider les codes diagnostics de douleur au Canada (validité interne). Depuis 2009, le Réseau québécois de recherche sur la douleur supporte la mise en place d’un registre de données-patient pour les consultations en cliniques spécialisées de la douleur. Une étude est en cours pour déterminer la validité interne et externe des études portant sur l’utilisation des banques médicoadministratives de la RAMQ grâce au jumelage de cette banque aux données cliniques du Registre Québec Douleur (référence étalon). Les résultats préliminaires de cette étude démontrent que des différences significatives existent au niveau du profil et de l’état de santé des patients souffrant de douleur chronique assurés par un régime 54 d’assurance médicament privé versus le régime public d’assurance médicament de la RAMQ, suggérant ainsi que la validité externe des études pharmacoépidémiologiques réalisées à partir de ces données est discutable (Lacasse et al., 2012). Les résultats concernant la validité des codes diagnostics pour identifier les patients souffrant de douleur chronique au sein des banques médicoadministratives québécoises ne sont pas encore publiés. D’autre part, la validité externe peut varier également selon la représentativité des données médicoadministratives face à la population globale. Par exemple, les résultats obtenus à partir des données pharmaceutiques de la RAMQ sont moins généralisables à la population des 18-64 ans. En bref, les banques de données médicoadministratives ont une valeur inestimable pour permettre de produire des analyses secondaires à faible cout, sur plusieurs années et tout en limitant le biais de rappel, cependant il faut rester critique quant à leurs potentielles limites de validité interne et externe. 55 2.4 Le cout sanitaire de la douleur lombaire La rencontre entre l’économie et la santé permet de produire des indicateurs au niveau de la population qui seront utiles pour les chercheurs et les décideurs. Il existe plusieurs types d’évaluations économiques (p. ex. évaluation du fardeau économique des maladies, analyses des couts et bénéfices des traitements [cout-efficacité, cout-bénéfice, cout-utilité], etc.) et différentes perspectives à partir desquels les indicateurs permettent aux décideurs d’intervenir pour optimiser le système de santé (perspective de l’état payeur, perspective sociétale, perspective de l’assureur privé, perspective de l’employeur, etc.). 2.4.1 L’importance de la question économique en santé Les systèmes de soins de santé sont actuellement confrontés à plusieurs défis d’envergure : complexité des besoins et des processus de soins, augmentation de la demande de soins (particulièrement pour les conditions chroniques) et enfin, émergence d’un paysage économique dans lequel les systèmes de soins doivent faire plus avec moins. Le défi : une qualité de soins optimum malgré les contraintes. En effet, une qualité de soins médiocre compromet tous les objectifs des systèmes de santé modernes. Elle est synonyme de faible satisfaction des patients, de surmorbidité, de mortalité prématurée, et de majoration des couts de santé (OCDE, 2011b). L’une des recommandations de l’Organisation de coopération et de développement économique en 2011 (OCDE; un organisme qui veille sur le bien-être économique de 34 pays dont le Canada) concernant la mesure des indicateurs de la qualité des soins de santé est: « d’exploiter pleinement le potentiel des registres et bases de données administratives (à l’échelle nationale) pour la mesure de la qualité des soins, notamment grâce à l’adoption d’identifiants uniques par patient, au codage des diagnostics secondaires et à l’utilisation de la mention « affection présente à l’admission » (pour faciliter la distinction entre les problèmes de qualité qui relèvent de la responsabilité de l’hôpital et ceux qui ont d’autres causes) » (OCDE, 2011b). Plus précisément, l’OCDE encourage l’utilisation du dossier médical électronique pour dégager des statistiques populationnelles, établir des systèmes de collecte 56 d’informations longitudinales, utiliser des indicateurs communs, veiller à la cohérence des initiatives de qualité en lien avec les ressources hospitalières, technologiques et professionnelles et enfin identifier des indices de qualité pour mettre à profit la performance axée sur les politiques nationales (OCDE, 2011b). Les dernières années ont vu croitre les couts de santé à une vitesse vertigineuse. En 15 ans, le ratio des dépenses en santé, dans les secteurs privé et public en fonction du produit intérieur brut (PIB), a connu une augmentation de 25 % au Canada (Figure 8). La même tendance a été observée aux États-Unis, totalisant une hausse de 32 % pendant la même période avec un sommet à 17,9 % en 2010. Figure 8. Dépenses en santé (secteurs privé et public) en fonction du produit intérieur brut (PIB) au Canada de 1995 à 2012. Légende : Les dépenses en santé du Canada occupent une proportion de plus en plus élevée du produit intérieur brut. Tiré de Perspective Monde avec permission, outil pédagogique des grandes tendances depuis 1945, Université de Sherbrooke. Des faits saillants dégagés par un autre rapport de l’OCDE (OCDE, 2011a) décrivent bien l’avantage d’études de couts, aussi partielles soient-elles, mais qui permettent de faire progresser notre compréhension vis-à-vis des dépenses de santé : 57 • Entre 1990 et 2008, les dépenses de santé par habitant de la zone OCDE ont progressé en moyenne de 74 % en termes réels. Elles ont absorbé près de 10 % du PIB en 2008, contre à peine plus de 5 % en 1970 ; • La majeure partie de cette hausse des dépenses de santé a été financée par le secteur public ; ces dépenses représentent aujourd’hui l’un des principaux postes budgétaires de l’État : en moyenne, dans la zone OCDE, elles ont absorbé 15 % de la dépense totale des administrations publiques ; • Le vieillissement de la population, une progression rapide des prix des soins médicaux et l’évolution couteuse des technologies médicales exercent de fortes pressions sur les budgets de la santé. Si l’on en croit les projections de l’OCDE, les dépenses publiques de santé, dans les pays membres de l’Organisation, pourraient croitre en moyenne de 3.5 à 6 points de pourcentage de PIB d’ici 2050. De ce fait, l’OCDE suggère de : • Fournir davantage d’informations sur la qualité et les prix, afin de renforcer la concurrence et de permettre une évaluation comparative des prestataires, ce qui contribuerait à diffuser des pratiques optimales. • Élaborer des politiques de prise en charge des inégalités rencontrées dans le domaine de la santé et mieux comprendre les raisons de ces inégalités. Cette hausse marquée de l’indice des couts de santé est responsable d’un regain d’intérêt entre autres en regard des stratégies de réduction de couts ayant trait aux réclamations liées aux accidents de travail ou aux pensions d’invalidité (Wasiak et al., 2006; Lambeek et al., 2011). Plus spécifiquement, la mise en place de programmes de prise en charge, suite à un épisode incident de douleur lombaire par exemple, a vu le jour afin d’assurer une réintégration accélérée des travailleurs blessés et réduire le risque de primes d’invalidité de longue durée (Loisel et al., 2002). La pression fiscale accrue sur les systèmes publics d’assurance maladie a même forcé certains pays, comme les Pays-Bas, à réformer leur système d’allocation en 2006 entre interventions de courtes et longues durées et couvertures privée et publique (Lambeek et al., 2011). D’ailleurs, cette stratégie s’est avérée à court terme une bonne décision, permettant aux Pays-Bas de prendre le premier rang de l’efficience globale des systèmes de santé parmi certains de l’OCDE pour la période 2007-2009 (Figure 9) (Davis et al., 2010). 58 Figure 9. Efficience des systèmes de santé selon le Commonwealth Fund Légende : Le Canada occupe le 6e rang sur 7 en terme d’efficience dans le domaine de la santé selon un sondage de politique des soins parmi une sélection de pays occidentaux de l’OCDE. Le Canada est tiré en queue de peloton par l’efficacité, la sureté et le temps de soins. Il est également le 2e pays qui paye le plus cher par habitant pour les soins de santé. Tiré de OCDE, 2011a avec permission. Il n’y a aucune solution miracle à la spirale des couts en cours vu la complexité du problème. C’est donc dans ce contexte que les études de couts sanitaires présentent une grande utilité pour aborder la question du fardeau socioéconomique des conditions de santé majeures sur les différents paliers de la société. Ces études permettent aux nombreux intervenants tels les patients, les professionnels de la santé, les politiciens et assureurs de cibler des interventions et d’orienter l’allocation des ressources de santé le plus adéquatement possible (Baldwin, 2004). Cependant, il est important de garder un esprit critique lors de l’analyse de ces études. 59 2.4.2 Les perspectives analytiques et les différentes catégories de couts Le pionnier de la pharmacoéconomie nous rappelle que tout est une question de perspective (Drummond et al., 2005). Ainsi, si l’étude est commanditée par une compagnie d’assurance, la perspective sera focalisée sur le poids fiscal des indemnités en vue d’établir la profitabilité d’une couverture d’assurance (Lahiri et al., 2005). Dans d’autres cas, la perspective privilégiée sera celle de l’état payeur : l’impact budgétaire au Ministère de la santé et la fréquence de la problématique de santé à l’échelle d’un régime provincial tel celui du Québec. Enfin, la perspective sociétale sera la plus complète et prendra en considération les dépenses et le cout de renonciation du patient et de son entourage, les pertes de productivité liées à l’emploi, l’investissement du gouvernement et les indemnités versées par l’assureur, etc. Elle englobe un maximum de variables liées à la condition de santé à l’étude. Ces variables sont regroupées dans trois ensembles, soit les couts directs, les couts indirects (absentéisme et pertes de productivité) et les couts intangibles. Les définitions suivantes sont en partie ou en totalité tirées d’un rapport de l’Agence de la Santé publique du Canada (Ball et al., 2009). 2.4.2.1 Couts directs Les couts directs renvoient à « la valeur des biens et des services pour lesquels des sommes ont été payées et des ressources utilisées en vue du traitement, des soins et de la réadaptation liés à la maladie ou aux blessures ». Lorsque la perspective sociétale est utilisée, les couts directs comprennent les couts engagés par le système de santé, mais également les dépenses du patient pour se rendre au lieu de traitement et les dépenses reliées à l’achat de médicaments en vente libre (c.-à-d. « over-the-counter ») achetés à la pharmacie, etc. 2.4.2.2 Couts indirects Les couts indirects représentent « la valeur de la production économique perdue en raison de maladies, de blessures rendant inapte au travail ou de décès prématurés », souvent rapportés sous le terme « absentéisme ». Les autres couts indirects comprennent le sousrendement au travail causé par la maladie (« présentéisme »), la valeur de la perte de la 60 production non marchande (p. ex., l’aide aux personnes malades, le travail non payé) entrainée par la maladie ou un handicap et la valeur du temps de travail ou de loisir perdu par les membres de la famille ou les amis fournissant des soins à la personne malade. 2.4.2.3 Couts intangibles La valeur de la morbimortalité (parfois appelée « investissements intangibles ») reflète la valeur intrinsèque attribuée à une meilleure santé et comprend « les conséquences personnelles et subjectives associées à la maladie, telles que la douleur physique, la souffrance morale, l’anxiété, la peur, la détérioration de la santé, le stress dans les relations personnelles et la vie familiale ». Ce sont des couts considérés intangibles, car il est difficile de leur attribuer une valeur. Drummond et collaborateurs (Drummond et al., 2005), les pionniers dans le domaine de l’évaluation économique en santé, suggèrent de remplacer le terme, car ces conséquences sont de plus en plus évaluées en termes économiques dans les études de « propension à payer » ou de cout-utilité. 2.4.3 Survol de la littérature En 1996 aux États-Unis, une étude a été entreprise pour déterminer les 15 conditions de santé les plus couteuses. La douleur du plan dorsal (« back pain ») était classée au 6e rang national avec 12,2 milliards de dollars, au 3e rang en terme de condition incapacitante et au 1er rang national pour les jours de travail manqués (Druss et al., 2002). Une seconde étude portant sur une banque de six employeurs majeurs répartis dans 43 états américains représentant 375 000 employés de 1997 à 1999 a permis de classer la douleur lombaire non spécifique au 4e rang des conditions de santé physique les plus couteuses aux entreprises (Goetzel et al., 2003). Une étude sur l’enquête 2007-2008 sur la santé dans les collectivités canadiennes nous renseignait dernièrement que les hommes aux prises avec des problèmes chroniques au dos avaient plus de difficulté à trouver un nouvel emploi et que tous sexes confondus, les problèmes chroniques au dos présentaient un risque sept fois plus élevé de ne plus participer à la main-d’œuvre au pays (Churcher et al., 2013). Aux États-Unis, les couts de santé chez les personnes présentant de la douleur spinale ont connu une croissance de 65 % de 1997 à 2005. La hausse était principalement en lien avec les visites ambulatoires et la médication (Martin et al., 2008). Dagenais et collaborateurs 61 rappellent qu’il est risqué de comparer les données de toutes ces études publiées en raison de la qualité hétérogène des analyses, mais les couts directs de la douleur lombaire se chiffreraient entre 12,2 et 90,6 G$ US annuellement (Dagenais et al., 2008). C’est d’ailleurs une étude de 1998 qui rapporte des couts directs de 90 G$ US, soit 1 % du PIB des États-Unis et quelque 2,5 % du budget global de santé pendant cette année (Luo et al., 2004). D’autres pays industrialisés sont également fortement affectés par la prévalence de la douleur lombaire. Le régime d’assurance national français rapporte entre autres des dépenses de 1,2 G EUR en 1994 et 13 % des raisons d’absentéisme au travail (Depont et al., 2010). En Allemagne, la douleur lombaire est l’une des sept maladies les plus couteuses, qui représentait des dépenses de santé de 17,4 G € en 1998 (Becker et al., 2010). En Grande-Bretagne en 1994, la douleur du plan dorsal (1,6 G £) était tout juste derrière les maladies coronariennes en ne considérant que les couts directs (voir Figure 10). En prenant en compte la perte de productivité et autres couts indirects, la douleur du plan dorsal se classait au premier rang des maladies les plus couteuses à la société (Maniadakis & Gray, 2000). Plus récemment, une étude sur des données de 2005 en Suisse avançait que les couts de santé pour traiter la douleur lombaire représentaient 2,5 % du PIB de ce pays (Wieser et al., 2011). 2.4.4 Résumé de la section sur les couts de la douleur lombaire Les rapports du fardeau socioéconomique de la douleur lombaire sont donc nombreux, et ce pour plusieurs pays industrialisés. Le constat demeure irrémédiablement le même; les couts directs de santé de la douleur lombaire sont constamment dans le top 10 des conditions les plus couteuses et en y ajoutant les couts indirects, il s’agit bien souvent de la condition de santé ayant le fardeau socioéconomique le plus important. Les études sur des données plus récentes sortent cependant au compte-goutte, comme le démontre cette étude de Wieser et collaborateurs publiée en 2011 et portant sur des données de 2005 (Wieser et al., 2011). L’autre constat qui est souvent établi concernant les couts de santé de la douleur lombaire se rapporte au fait qu’un faible pourcentage d’individus serait responsable de la majorité des dépenses de santé engendrées (Luo et al., 2004). Il est rapporté que bon 62 nombre des patients qui consultent pour un épisode aigu de douleur lombaire récupèrent en général rapidement. Cependant, davantage de données permettent désormais d’avancer que le décours naturel de la douleur lombaire peut comprendre une phase d’exacerbation et devenir un phénomène récurrent chez certains patients, voire chronique (Fritz et al., 2008). Ce faible pourcentage de patients aux prises avec de la douleur récurrente, ou chronique dans certains cas, représente une sous-population dont la condition est complexe à traiter entrainant des dépenses de santé élevées (Ritzwoller et al., 2006; Fritz et al., 2008). Malgré plusieurs études fort pertinentes, en Europe et aux États-Unis, démontrant la lourdeur économique de la douleur lombaire sur les systèmes de santé, il reste beaucoup à faire. Les études économiques spécifiquement sur la douleur chronique ou récurrente sont peu nombreuses et surtout basées sur des données autorapportées et sur des études de prévalence (Boonen et al., 2005; Ekman et al., 2005; Depont et al., 2010). Peu de stratégies sur l’utilisation des données administratives à des fins de recherche sur la douleur lombaire récurrente ont été élaborées. Au Canada en particulier, il n’y a pas eu d’évaluation économique effectuée sur la douleur lombaire à l’échelle de la population, du moins selon une perspective étatique. Le peu de littérature sur l’épidémiologie de la douleur lombaire au Canada joue un rôle dans ce constat étant donné que les études économiques s’appuient, règle générale, sur des études de prévalence ou d’incidence. Avantageusement, les systèmes de santé des différentes provinces canadiennes utilisent des bases de données médicoadministratives afin de colliger l’information sur les diagnostics, mais également sur le volume de services médicaux prodigués par les médecins payés à l’acte. Selon l’ICIS, la rémunération des médecins pour les services médicaux a augmenté annuellement d’environ 3,6 % de 1998 à 2008, ce qui est une inflation plus élevée que celle de travailleurs dans d’autres secteurs. La rémunération des médecins serait d’ailleurs le deuxième secteur en importance en regard aux dépenses dans notre système de santé canadien, derrière les dépenses d’hôpitaux (ICIS, 2012). Cette composante des couts directs devrait donc être surveillée en vue d’une potentielle optimisation des soins de santé. 63 2.5 Synthèse de la recension des écrits La prévalence et l’incidence annuelle de la douleur lombaire ont été démontrées comme élevées à l’échelle de la population. La douleur lombaire est également reconnue comme un fardeau socioéconomique grandissant et un enjeu majeur particulièrement dans les sociétés occidentalisées. Une étude a démontré une hausse de prévalence de douleur chronique dans la dernière décennie au Canada, et une étude américaine a démontré une nette progression de la prévalence de la douleur lombaire chronique entre 1992 et 2006. À partir des ces observations basées sur ces données empiriques, nos objectifs sont les suivants : 2.6 Objectifs 2.6.1 Objectif principal Établir le portrait épidémiologique de la douleur lombaire récurrente dans la population québécoise adulte par une approche basée sur la récurrence de consultations médicales. Plus précisément nous allons utiliser une banque de données administratives pour: 1) Mesurer la prévalence annuelle de la douleur lombaire récurrente pour les années 2000 à 2007 selon l’âge et le sexe. 2) Mesurer l’incidence annuelle de la douleur lombaire récurrente au Québec pour les années 2000 à 2007 selon l’âge et le sexe. Afin d’atteindre le deuxième objectif principal, nous allons proposer une approche méthodologique basée sur la révision de l’historique médical de chaque patient de manière à minimiser la présence de patients considérés à tort naïfs à la douleur lombaire et qui pourrait contaminer la construction de cohortes incidentes de douleur lombaire. 2.6.2 Objectif secondaire En adoptant la perspective du système de santé québécois, nous allons évaluer la tendance séculaire de l’une des composantes des couts directs liés à la douleur lombaire récurrente sur notre système de santé. Les couts de services médicaux prodigués par les 64 médecins rémunérés à l’acte et liés aux nouveaux cas de douleur lombaire pour les années 2003 à 2007 seront étudiés. 2.7 Hypothèse Nous proposons que le nombre d’épisodes de douleur lombaire augmente dans la population et donc que la prévalence de consultations médicales récurrentes pour de la douleur lombaire devrait augmenter entre les années 2000 et 2007 au Québec. Nous avançons également l’hypothèse que l’incidence de consultations médicales pour de la douleur lombaire récurrente est en hausse pendant la même période. La population adulte en âge de travailler devrait être surreprésentée dans les profils de prévalence et d’incidence annuelle et devrait engendrer la plus importante proportion des couts directs. 65 3. MÉTHODES ADDITIONNELLES Pour simplifier la compréhension des articles qui suivent, des détails méthodologiques additionnels sur la construction de la cohorte de patients à l’étude dans les articles 1 et 2 sont fournis dans la présente section. Une sous-section sur la méthodologie ayant permis de produire l’évaluation des couts est ensuite décrite, ces résultats n’ayant pas fait l’objet d’une publication à ce jour. 3.1 Méthodologie présentée dans les articles 1 et 2 Le projet présenté dans cette thèse fait partie d’un programme de recherche qui vise à produire un atlas québécois de douleur chronique. La douleur lombaire est donc l’une des quatre conditions de douleur étudiées avec l’arthrite, la migraine et la fibromyalgie. Le programme de recherche a été autorisé par le comité éthique de la recherche en santé chez l’humain du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (voir Annexe 1) et par la Commission d’accès à l’information du Québec (voir Annexe 2). Un devis a ensuite été négocié avec la Régie de l’assurance maladie du Québec puis l’extraction finale autorisée. Il s’agit donc d’une analyse secondaire sur des données médicoadministratives rétrospectives de la population adulte du Québec (18 ans et +) ayant consulté pour une condition de douleur pendant la période s’échelonnant du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2008. 3.1.1 Extraction de la cohorte ayant servi à produire l’atlas québécois de douleur chronique Les critères d’extraction fournis aux analystes de la RAMQ étaient les suivants : A. Sélectionner dans le fichier des services médicaux rémunérés à l’acte de la RAMQ tous les individus ayant reçu des services médiaux entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2008 et présentant au moins trois codes diagnostics CIM-9 identiques (trois premières positions) de migraine, fibromyalgie, douleur lombaire et douleur articulaire sur une période de 365 jours : codes CIM-9: 346 ou 712 à 735 ou 739. 66 B. À partir du fichier des séjours hospitaliers de la banque MedÉcho du Ministère de la santé et des services sociaux, hébergé par la RAMQ, sélectionner tous les individus ayant eu un séjour hospitalier avec une date de départ comprise entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2008 et au moins un diagnostic parmi les codes CIM-9 346, 712 à 735 ou 739 ou CIM-10-CA G43, G44, M00 à M99, R26, R29. Conserver la plus petite date de départ pour chacun des individus. C. Conserver les individus âgés de 18 ans ou plus à la première date du service en (A) et (B). D. Des individus du point (C), conserver ceux dont le numéro d’assurance maladie est existant et valide dans les banques de la RAMQ. E. Extraire les dossiers médicoadministratifs de tous les individus du point (D) pour la période s’échelonnant du 1er janvier 1996 au 31 décembre 2008 parmi le fichier des services médicaux rémunérés à l’acte, le fichier des services pharmaceutiques, le fichier des bénéficiaires, le fichier de séjours hospitaliers, le fichier séjours hospitaliersdiagnostics, le fichier d’information sur les professionnels, le fichier d’admissibilité à l’assurance médicament, le fichier indice de défavorisation et le fichier aire de diffusion. À l’étape (E), 1 656 420 dossiers médicoadministratifs de patients présentant un diagnostic de douleur ont été extraits pour la période à l’étude et transférés de la RAMQ à l’équipe du Pr Vanasse. Le nombre de patients exclus à chaque étape ne nous a pas été communiqué. À partir de cette cohorte, une sous-cohorte de patients aux prises avec de la douleur lombaire récurrente a été construite pour le projet de recherche présenté dans cette thèse. 67 3.1.2 Critères de sélection pour la création d’une sous-cohorte de douleur lombaire Afin d’isoler une sous-cohorte entièrement dédiée à l’étude des problématiques de douleur lombaire récurrente depuis la cohorte principale de douleur chronique, nous avons procédé ainsi : F. Explorer les codes CIM-9, à un degré de précision de quatre chiffres, de la cohorte de douleur chronique du point (E), et ne sélectionner que les codes CIM-9 à quatre chiffres s’apparentant à la région lombaire (c.-à-d. exclusion des régions cervicales et thoraciques). Sélection des codes CIM-9 721.3 à 721.9, 722.1 à 722.3, 722.5 à 722.9, 724.0 à 724.9, 739.3 et 739.4. Cette étape a permis de sélectionner 962 458 patients. G. Éliminer tous les diagnostics identiques du point (F) qui sont répétés dans une même journée. H. Sélectionner tous les patients du point (G) qui présentent un minimum de trois diagnostics similaires, à partir des trois premiers chiffres des codes CIM-9 retenus en (F), dans une période de 365 jours entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2008. Cette étape a permis de sélectionner 401 264 patients. Il y a ensuite eu une phase finale de validation des données. En premier lieu, nous avons vérifié que chaque patient possédait un âge et que celui-ci était égal ou supérieur à 18 ans et inférieur ou égal à 115 ans et 124 jours (c.-à-d. Mme Julie Winnefred Bertrand, la Canadienne la plus âgée, décédée en 2007 à Montréal à l’âge de 115 ans et 124 jours 4). Nous nous sommes ensuite assurés que chaque individu possédait un sexe (homme ou femme) et un code CIM-9 correspondant à nos critères de sélection. Également nous avons vérifié pour chaque patient pour lequel il existait une date de décès, qu’aucune entrée n’était postérieure à cette date (c.-à-d. consultation, prescription de médicament, etc.). Pour expliquer de manière plus concrète comment un patient aux prises avec de la douleur lombaire récurrente peut être fiché à la RAMQ et se retrouver dans la sous-cohorte de douleur lombaire, un exemple hypothétique du parcours idiosyncrasique d’un patient est présenté à la Figure 10. 4"Tiré"de"sources"en"ligne"de"fiabilité"nonPvérifiée":""http://archives.radioP canada.ca/societe/famille/clips/15670/"et" http://en.wikipedia.org/wiki/Julie_Winnefred_Bertrand" 68 Figure 10. Exemple de parcours idiosyncrasique d’un patient avec douleur lombaire Supposons que le patient se présente deux fois pour une douleur lombaire chez son médecin de famille à l’intérieur de 30 jours, et que ce dernier, à la première rencontre, note un diagnostic (Dx) de lumbago sur son bordereau de paiement (Dx 1A = CIM-9 724.2). À la deuxième rencontre, l’état du patient s’aggrave et son médecin de famille détecte une irradiation au membre inférieur à l’examen physique et note une sciatalgie sur son bordereau de paiement (Dx 2A = CIM-9; 724.3), puis décide de recommander le patient à un spécialiste tel qu’un chirurgien orthopédiste. À ce stade, notre patient ne pourrait pas encore être sélectionné dans la sous-cohorte de douleur lombaire, car il ne répond que partiellement au critère de trois codes CIM-9 similaires (trois premiers chiffres) à l’intérieur de 365 jours. Le patient est donc recommandé à un orthopédiste qui procède à une série d’examens et diagnostique une hernie discale (Dx 1B = bordereau de paiement; CIM-9 722.1). Puisque le diagnostic vient de se préciser et qu’il passe de la catégorie CIM-9 69 « 724 » à la catégorie « 722 », le patient ne sera pas non plus sélectionné dans notre cohorte lors de l’inscription de ce troisième diagnostic. Pourtant il s’agit bel et bien d’une consultation récurrente pour un même épisode de douleur lombaire, mais les trois premiers chiffres CIM-9 lors des trois visites diffèrent. Trois scénarios pourraient faire en sorte que ce patient soit sélectionné dans notre sous-cohorte au final : A) le patient n’est pas opéré, l’orthopédiste lui recommande un suivi rapproché avec son médecin de famille, et lors du suivi ce dernier réinscrit le même code que lors de la dernière visite du patient (724.3; Dx 3A, Figure 10, boites gris clair) au lieu du code indiqué par l’orthopédiste (722.1), B) le patient n’est pas opéré et le médecin de famille et/ou l’orthopédiste effectuent au moins deux visites de suivi dans la même année avec le code diagnostic d’hernie discale 722.1 (Dx 2B, 2B’, 3B, 3B’, Figure 10 boites, gris intermédiaire); C) le patient se fait opérer pour son hernie discale à un moment ou un autre et sera récupéré par l’envoi du bordereau du médecin pour la chirurgie effectuée (Figure 10, boites gris charbon) ou dans l’extraction des patients hospitalisés du fichier des services hospitaliers Med-Echo si nous avions utilisé ce critère dans l’algorithme de sélection de la sous-cohorte. Ces trois scénarios feraient en sorte que le critère de trois diagnostics identiques en 365 jours soit rempli et permettrait à ce patient d’être inclus dans la cohorte de patients récurrents pour de la douleur lombaire dans le cadre de notre étude. 70 3.1.3 Construction des cohortes pour la détermination de la prévalence annuelle À partir de la sous-cohorte de patients récurrents pour de la douleur lombaire entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2008 décrite à la sous-section 3.1.2, des cohortes identifiant des patients récurrents pour chacune des années de 2000 à 2007 ont été construites. La raison expliquant l’absence de cohortes pour les années 1999 et 2008 s’explique par l’approche méthodologique que nous avons préconisée. En effet, nous avons considéré un patient prévalent si ce dernier avait au moins un de ses trois diagnostics pendant une période de 365 jours à l’intérieur de l’année d’intérêt. Nous avons donc conçu un programme permettant de déplacer un cadre de lecture mobile de 365 jours autour de la date index d’un diagnostic de douleur lombaire dans l’année d’intérêt. Donc si nous prenons l’année 2007 en exemple, et que le patient se présente le 1er janvier 2007 pour de la douleur lombaire, le cadre de lecture sera mobile du 2 janvier 2006 au 31 décembre 2007 pour valider la présence de deux autres diagnostics de douleur lombaire et décider d’inclure le patient dans la cohorte de 2007 (Scénario 1, Figure 11). Par le fait même, le patient sera aussi un patient prévalent pour la cohorte de 2006. D’autre part, si le patient a trois diagnostics dans l’année civile de 2007, ce sera également un patient dans la cohorte de 2007 (Scénario 2, Figure 11). Enfin si le patient se présente avec un premier épisode de douleur lombaire le 31 décembre 2007, le cadre de lecture de 365 jours s’étendra jusqu’au 30 décembre 2008 pour vérifier la présence de deux autres diagnostics de douleur lombaire (Scénario 3, Figure 11). Le patient pourrait ultimement être considéré dans une cohorte de 2008, cependant étant donné que le cadre de lecture ne puisse pas s’étendre en 2009 (c.-à-d. données non disponibles), la cohorte serait considérée incomplète, la raison pour laquelle aucune cohorte n’a été construite pour les années 1999 et 2008. 71 Figure 11. Différents scénarios d’inclusion d’un patient considéré prévalent pour de la douleur lombaire récurrente. Une fois les cohortes de patients construites, la prévalence est ensuite déterminée en divisant le nombre d’individus présentant de la douleur lombaire récurrente par la population adulte totale de la province du Québec pour chacune des années d’intérêt. Les estimés démographiques en fonction de l’âge et du sexe pour la population québécoise de 2000 à 2007 ont été obtenus de Statistiques Canada (StatCan, 2012). 72 3.1.4 Construction des cohortes pour la détermination de l’incidence annuelle Dans un deuxième temps, nous avons tenté de définir l’incidence de la douleur lombaire récurrente. À partir des cohortes annuelles de prévalence construites selon la méthodologie présentée à la sous-section 3.1.3, nous avons examiné l’historique médical de chacun des patients. Ainsi, en bénéficiant de données médicoadministratives débutant le 1er janvier 1996, nous avons disposé, par exemple, de 11 années d’historique médicoadministratif pour la cohorte de 2007. Nous avons procédé par une approche de clairance de diagnostics, c’est à dire qu’à partir de la date index du premier diagnostic inscrit en 2007 pour un patient, nous avons examiné son passé médical pour déterminer s’il avait consulté antérieurement pour un problème de douleur lombaire. Dès que nous rencontrions un diagnostic de douleur lombaire parmi les codes CIM-9 721, 722, 724 ou 739 dans le passé médical du patient, le patient était exclus de la cohorte incidente. Nous avons donc programmé un compteur de « jours de recul », la date index de chaque patient étant le jour 0, et le 1er janvier 1996 pouvant correspondre au maximum au jour 4 371 de recul, par exemple dans le cas d’un patient ayant consulté pour la première fois de sa vie le 31 décembre 2007 (c.-à-d. que pour ce patient nous aurions eu 4371 jours de dossier médical vierge de tout diagnostic de douleur lombaire avant la date index du 31 décembre 2007). Nous avons ensuite transformé le nombre de « jours de recul » en mois ou en années de manière à produire une courbe de clairance de diagnostics. Des valeurs prédictives positives (VPP) et des coefficients de Kappa ont ensuite été calculé pour déterminer la période de recul optimale pour construire une cohorte incidente la moins contaminée possible par des cas prévalents. La même procédure a ensuite été répétée pour chacune des cohortes annuelles de prévalence, soit au final de 2000 à 2007. Chacune des cohortes annuelles a ensuite été divisée par la population à risque adulte du Québec pour l’année d’intérêt correspondante. Une description détaillée des méthodes statistiques utilisées se retrouve à la section 4.2.3 correspondant aux méthodes de l’article 2. 73 3.2 Approche méthodologique pour l’étude de couts Une fois la morbidité d’une condition de santé établie, il est intéressant d’en étudier le poids économique pour en connaitre son impact sur les budgets de fonctionnement. En prenant la perspective de l’état payeur, le cout sanitaire d’une maladie sera représenté par des variables telles que le cout des services médicaux, des médicaments, et des dépenses hospitalières (ressources humaines, matérielles et immobilisations). Les épisodes de soins sont reconnus pour être idiosyncrasiques dans notre système public (voir Figure 10). Chaque patient se présentant avec une douleur lombaire ne sera pas nécessairement traité de manière identique (Kaplan & Porter, 2011). Ainsi, bien que d’apparence simple, l’évaluation du cout sanitaire d’une condition de santé multifactorielle telle que la douleur lombaire devient une tâche ardue. Il est donc préconisé de tenter de suivre le parcours de chaque patient pour lui étiqueter un cout individuel qui servira à produire des couts médians pour une population donnée. De manière générale, l’analyse de couts directs selon la perspective étatique propre au système public en place au Québec se décline sous trois classes : le cout des services médicaux (consultations, examens et interventions), les couts pharmaceutiques sous ordonnance ainsi que les couts d’hospitalisation. En raison de la représentativité limitée des données pharmaceutiques pour la population adulte de 18 à 65 ans, nous avons décidé de nous concentrer davantage sur l’évaluation des couts d’interventions pour lesquels nous avions des données pour l’ensemble de la population. Également, nous n’avons pas produit d’analyses pour les couts d’hospitalisation autre que la rémunération des médecins spécialistes pour des chirurgies. Cette décision vient du fait qu’il est difficile de déterminer un cout de ressources d’hospitalisation (c.-à-d. ressources humaines, taxes foncières, électricité, matériel, etc.) en raison de l’approche déductive utilisée par le Ministère de la santé et des services sociaux pour déterminer les couts liés spécifiquement aux interventions pour douleur lombaire en centre hospitalier qui sont inclus dans une grande catégorie de soins de santé physique. Des détails en regard de ces limites sont fournis dans la discussion à la section 6.7.3. La section additionnelle des méthodes portera donc sur les couts des services médicaux rémunérés à l’acte uniquement. 74 3.2.1 Utilisation des cohortes incidentes pour la détermination des couts Afin d’évaluer le cout des actes médicaux, nous avons sélectionné les cohortes incidentes de patients avec douleur lombaire récurrente pour les années 2003 à 2007. Ce choix a été basé sur l’analyse de clairance de l’article 2 (voir section 4.2.3) étant donné la nécessité de tenir compte d’une période tampon de sept années pour obtenir une très bonne convergence du coefficient de Kappa et de la valeur prédictive positive, et en fonction de la disponibilité de données médicoadministratives de 1996 à 2007. Le dossier médical de chaque patient a ensuite été isolé en fonction de chaque période de 365 jours suivant la date index de la première consultation médicale en lien avec un diagnostic de douleur lombaire. Chaque période a été numérotée en conséquence. Par exemple, pour la cohorte de patients incidents de l’année 2003, si un patient a eu un diagnostic de douleur lombaire le 15 mars 2003, tous les actes et consultations en lien avec de la douleur lombaire ont été extraits pour l’année index (an 1 : 15 mars 2003 au 14 mars 2004) et pour les quatre années de suivi, soit pour l’an 2 (15 mars 2004 au 14 mars 2005), pour l’an 3 (15 mars 2005 au 14 mars 2006), pour l’an 4 (15 mars 2006 au 14 mars 2007) ainsi que pour l’an 5 (15 mars 2007 au 14 mars 2008). 3.1.2 Préparation des matrices de couts pour les années 2003 à 2007 Un programme d’analyse a ensuite été préparé à l’aide du logiciel SAS (version 9.3) de manière à obtenir une matrice des combinaisons uniques des codes d’actes. La première étape a consisté à récupérer tous les codes d’actes correspondant à un code diagnostic lié à la douleur lombaire pour chaque année à l’étude. La matrice a donc été programmée de manière à croiser chaque code d’acte selon le type d’établissement (cabinet privé, clinique privée, CLSC, CHSLD, établissements hospitaliers, etc.), le type de spécialiste (45 spécialités médicales), le type de facturation (c.-à-d. manuel des omnipraticiens, manuel des spécialistes, manuel de rémunération mixte, manuel de laboratoire, etc.), le rôle de facturation (médecin traitant, anesthésie, assistance en anesthésie, assistance médicale, hors Québec) et l’année de facturation. Toutes les combinaisons pouvant produire une clé unique de cout ont été transférées dans un tableur Excel. Pour clarifier la séquence, prenons l’exemple d’un patient ayant consulté un médecin pour de la douleur lombaire à trois occasions dans une période de 365 jours (voir Figure 12). 75 Figure 12. Différents scénarios pour l’inclusion d’un patient dans une cohorte incidente de consultations récurrentes pour douleur lombaire pour l’analyse des couts Dans le scénario 1, il s’agit d’un patient prévalent en 2006 et en 2007, mais le patient est cependant incident en 2006 uniquement. Notre algorithme de clairance aura permis d’exclure ce patient de notre cohorte incidente de 2007. Les données de ce patient ne seront donc pas retenues pour l’analyse de couts directs pertinente aux patients incidents en 2007. Dans le scénario 2, le patient consulte le 4 février 2007 et de manière rapprochée pour sa douleur lombaire au cours de l’année 2007. Chaque clé unique pour ses consultations médicales sera associée à un cout de service médical disponible dans les manuels de facturation de 2007. Dans le scénario 3, le patient a une date index en février 2007, cependant sa 3e consultation a lieu en début d’année 2008. Le patient est donc bel et bien incident en 2007, bien que sa fenêtre d’incidence de 365 jours s’étende jusqu’en février 2008 et englobe une 3e consultation dans une autre année civile. Dans ce scénario, les clés uniques devront correspondre aux dates respectives des manuels de facturation des 76 années 2007 et 2008, selon le cas. La préparation des matrices de clés uniques a donc été effectuée pour l’année index et chacune des années de suivi disponibles. Au total, 15 matrices ont été préparées pour chacune des cinq années index des cohortes incidentes et chacune des années de suivi. Ces 15 matrices ont ensuite été associées à des prix identifiés dans 89 manuels de facturation (c.-à-d. les manuels de l’omnipraticien, les manuels des spécialistes, les brochures de rajustement, les manuels des services de laboratoire, les manuels de rémunération mixte), puis été catégorisés par année et par profession (omnipraticien vs spécialiste). L’information extraite de ces manuels a été consignée dans un tableur Excel. Les fichiers ont été partagés entre deux codeurs (stagiaire de niveau prédoctoral (François Michaud) et NB). Des rencontres hebdomadaires entre les évaluateurs ont eu lieu pour valider les codes complexes et clarifier les exceptions (codes de déplacement, de primes, etc.). Les 15 matrices ont ensuite été fusionnées afin de produire cinq grandes matrices englobant tous les codes et les couts pour chacune des années de 2003 à 2008. Une validation d’un échantillon de 10 % des codes parmi ces cinq matrices a été effectuée par NB. 3.1.3 Analyse sommaire des couts Une analyse descriptive a été effectuée afin de rapporter la tendance séculaire des couts associés à un premier épisode de consultation récurrente de douleur lombaire. Afin de permettre la comparaison des couts de services médicaux déduits pour chacune des cohortes incidentes, nous avons procédé à une correction des valeurs monétaires afin de les ajuster en dollars constants de 2007 correspondant à la dernière année de notre cohorte. Pour ce faire, la façon la plus commune de procéder est d’ajuster les dollars d’une année d’intérêt (p. ex. 2003) à une année référence (c.-à-d. 2007). La Banque du Canada fournit une feuille de calcul de l’inflation qui utilise les données mensuelles de l’indice des prix à la consommation fournis par Statistiques Canada. Cela permet de déterminer la valeur actuelle d’un produit de consommation d’une année antérieure (c.-à-d. aliments, logement, transport, loisirs, etc.) (Voir Tableau 5). Cependant, les services médicaux ne suivent pas nécessairement la fluctuation des biens de consommation. À cet égard, l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS) rapporte qu’aucun indice ou méthodologie consensuelle n’est accepté pour déflater les dépenses de santé au Canada (ICIS, 2005). De ce fait, les 77 ajustements sont également effectués avec l’indice implicite des prix, ou selon d’autres approches, par exemple à l’aide des indices d’honoraires générés par les médecins si les couts calculés y font référence, sinon à l’indice implicite des prix des dépenses courantes du gouvernement. L’ICIS dégage ces indices à partir de données fournies par les provinces. Ainsi, la RAMQ produit des tableaux sur l’évolution du cout des services médicaux et du nombre de médecins, selon le mode de rémunération au Québec. Nous avons donc utilisé les tableaux de 1999-2003 et de 2003-2007 afin de dégager les dépenses spécifiques aux rémunérations à l’acte. Puisque tous les couts directs analysés dans la présente étude proviennent d’actes prodigués par les médecins, soit leurs données de facturation, nous avons divisé l’ensemble de cette rémunération annuelle par le nombre de médecins, afin d’obtenir un salaire moyen. La fluctuation du salaire annuel moyen par rapport à l’année de référence de 2007 nous permet donc de calculer un taux d’ajustement pour pouvoir comparer les couts de services médicaux sur une même base. Le tableau 5 présente la fluctuation de la rémunération à l’acte en comparaison de l’inflation basée sur l’indice des prix à la consommation ou sur l’indice implicite des prix. Tableau 5. Taux d’ajustement pour comparer les données en dollars constants de 2007 Années Ensemble de la Nombre de Salaire rémunération à médecins moyen l’acte et à ($) l’unité ($) 2000 1 942 003 641 13 563 2001 2 118 205 824 13 864 2002 2 124 820 440 14 083 2003 2 290 015 673 14 452 2004 2 398 696 706 14 660 2005 2 437 229 125 14 999 2006 2 493 810 576 15 158 2007 2 606 121 308 15 423 * Année de référence pour l’ajustement 143 184 152 785 150 878 158 457 163 622 162 493 164 521 168 976 Inflation des salaires des médecins (Québec) (%) 18,01 10,60 12,00 6,64 3,27 3,99 2,71 -* Inflation Banque du Canada (%) Indices implicites de prix (Québec) (%)5 15,89 13,76 10,28 8,56 6,08 3,43 2,39 -* 15,08 13,44 11,40 8,58 6,39 4,60 2,57 -* 5 Statistique Canada, tableau CANSIM 384-0036, Indices implicites de prix, produit intérieur brut (PIB), comptes économiques provinciaux, annuel (indice, 2002=100), publié le 1 mai 2012. " 78 Les données de facturation annuelles liées à chacun des diagnostics de douleur lombaire des patients investigués par un médecin ont ensuite été colligées à l’échelle de la cohorte. Le total de chacun de ces patients a permis de déduire un cout total de services médicaux liés à une première année de consultation récurrente de douleur lombaire. Les couts médians ont ensuite été stratifiés en cinq fourchettes d’âge de 15 ans, et selon le sexe pour chacune des années de 2000 à 2007. Les patients incidents de 2003 bénéficiant de cinq années de suivi longitudinal après leur date index, nous avons pu également analyser le profil séculaire des couts de cette cohorte de manière « prospective ». Enfin, les cohortes incidentes de 2003, 2004, 2005 et 2006 nous ont permis de dégager deux périodes consécutives de consultation d’une durée 365 jours permettant d’examiner l’évolution des couts de patients incidents pour de la douleur lombaire à l’année index et à leur première année de suivi. Nous avons donc calculé et comparé les couts médians et totaux entre la première année de traitement et la seconde pour chacun des patients incidents. 79 4. RÉSULTATS 4.1 Présentation de l’article 1 portant principalement sur la prévalence de consultations récurrentes pour de la douleur lombaire. 4.1.1 Avant-propos Titre Prevalence of claims-based recurrent low back pain in a Canadian population: A secondary analysis of an administrative database. Auteurs Nicolas Beaudet Josiane Courteau Philippe Sarret Alain Vanasse (candidat au PhD) (PhD; associée de recherche) (PhD; professeur titulaire, codirecteur) (MD PhD FCMF; professeur titulaire, directeur principal) Statut de l’article Soumis : Accepté : Publié : 9 janvier 2013 19 avril 2013 29 avril 2013 Titre du journal BMC Musculoskeletal Disorders 2013, 14:151 Facteur d’impact : 1.88 Statistiques de consultation (en date du 31 octobre 2013) : 1 273 Précisions détaillées sur la contribution Cet article présente une analyse effectuée sur le fichier des services rémunérés à l’acte de la Régie de l’assurance maladie du Québec afin de déterminer la prévalence de la douleur lombaire récurrente en terme de consultations médicales. L’étude propose une analyse descriptive du nombre de cas en fonction de l’âge, du sexe et du type de diagnostic. L’étudiant (NB) a contribué à raison de 75 % dans la stratégie de préparation du manuscrit en soumettant ses idées, hypothèses et vision de l’étude. Les deux directeurs (AV et PS) ainsi que l’associée de recherche de l’équipe Primus (JC) ont ensuite orienté l’étudiant au travers de discussions et de rencontres de suivi pour produire une étude compréhensive et 80 publiable. NB a contribué à 80 % de l’analyse des résultats. JC a encadré NB dans l’utilisation de logiciels d’analyse tels que SAS et la compréhension des statistiques à préconiser. JC a également fourni des analyses initiales qui ont servi de base à NB pour pousser plus loin sa compréhension et recréer lui-même l’ensemble des analyses en modifiant les paramètres et les variables selon les discussions de suivi avec AV, JC et PS. NB a contribué à 90 % de l’écriture du manuscrit. Il a produit une première ébauche qui a été annotée par AV, JC et PS. Une version définitive a ensuite été produite puis envoyée à Mme Catherine Brown, offrant des services de révision de l’anglais scientifique. 4.1.2 Résumé de l’article en français De nombreuses études présentent une prévalence élevée et à la hausse pour la douleur lombaire. Il est également suggéré qu’une proportion importante des cas aigus de douleur lombaire se mue en douleur lombaire récurrente à l’intérieur d’une fourchette de 12 mois. Cependant, peu d’équipes se penchent sur la tendance de la prévalence annuelle de la douleur lombaire récurrente sur plusieurs années successives ou en fonction d’une catégorisation par âge et sexe. En préconisant une perspective administrative, nous avons construit une cohorte rétrospective de 401 264 patients sélectionnés à partir d’une base de données provinciale sur les services médicaux rémunérés à l’acte. Les informations médicales de tous les adultes âgés de 18 ans et plus ayant consulté un minimum de trois fois un médecin pour une raison médicale liée à de la douleur lombaire associée à un code diagnostic CIM-9 721, 722, 724 ou 739 ont été récupérées pour une période s’échelonnant des années 2000 à 2007. Toutes les analyses ont été catégorisées selon l’âge et le sexe du patient. La prévalence annuelle de la douleur lombaire récurrente liée aux consultations médicales a diminué de 1,64 % à 1,33 % entre 2000 et 2007. Cette diminution a été observée principalement dans la fourchette d’âge des 35 à 59 ans. Les femmes âgées (>80 ans) étaient 1,35 plus à risque que les hommes du même âge à consulter un médecin pour un problème lombaire récurrent. Le diagnostic le plus fréquent entre 2000 et 2007 est demeuré le « problème de douleur lombaire non spécifique ». La catégorie de diagnostic ayant connu la 81 plus grande augmentation pendant la même période correspond aux « séquelles de chirurgies lombaires antérieures ». La prévalence annuelle de la douleur lombaire liée à des consultations médicales a progressivement diminué de 2000 à 2007 chez les jeunes adultes (< 65 ans), alors qu’elle a connu une augmentation chez les personnes âgées (> 65 ans). La population canadienne faisant actuellement face à une augmentation drastique de la proportion de personnes âgées, il est envisageable que la douleur lombaire récurrente ait un impact négatif grandissant sur la qualité de vie des ainés et sur notre système de santé. 82 4.1.3 Article sous format manuscrit Prevalence of claims-based recurrent low back pain in a Canadian population: A secondary analysis of an administrative database. Nicolas Beaudet1, Josiane Courteau1, Philippe Sarret2 and Alain Vanasse1* Institution : 1- Department of Family Medicine, 2-Department of Physiology and Biophysics, Faculty of Medicine and Health Sciences, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Quebec, Canada. Short Title: Recurrent low back pain prevalence between 2000 and 2007. *Corresponding Author: Alain Vanasse, MD, PhD, FCMF Department of Family Medicine, Faculty of Medicine and Health Sciences, Université de Sherbrooke 3001, 12e Avenue Nord, Sherbrooke, Quebec, J1H 5N4, Canada Phone : (819) 820-6868, ext. 15 130 FAX : (819) 564-5424 Email : [email protected] Key words : prevalence, recurrence, low back pain, administrative database, registry, elderly, secondary analysis, universal health plan 83 ABSTRACT BACKGROUND : There is a vast literature reporting that the point prevalence of low back pain (LBP) is high and increasing. It is also known that a large proportion of acute LBP episodes are recurrent within 12 months. However, few studies report the annual trends in the prevalence of recurrent LBP or describe these trends according to age and sex categories. METHODS: We conducted a retrospective cohort study involving 401 264 adults selected from the administrative database of physician claims for the province of Quebec, Canada. These adults, aged 18 years and over, met the criteria of having consulted a physician three times within a 365-day period between 2000 and 2007 for a LBP condition corresponding to ICD-9 codes 721, 722, 724 or 739. All data were analyzed by sex and clustered according to specific age categories. RESULTS: We observed a decrease from 1.64 % to 1.33 % in the annual prevalence between 2000 and 2007 for men. This decrease in prevalence was mostly observed between 35 and 59 years of age. Older (≥65 years) women were 1.35 times more at risk to consult a physician for LBP in a recurrent manner than older men. The most frequently reported diagnosis was non-specific LBP between 2000 to 2007. During the same period, sequelae of previous back surgery and spinal stenosis were the categories with the largest increases. CONCLUSION : The annual prevalence of claims-based recurrent LBP progressively decreased between 2000 and 2007 for younger adults (<65 years) while older adults (≥65 years) showed an increase. Given the aging Canadian population, recurrent low back pain could have an increasing impact on the quality of life of the elderly as well as on the healthcare system. 84 BACKGROUND Low back pain (LBP) is a common and costly health condition [1, 2]. Lifetime prevalence has an average of 39 % (+/- SD 24 %), with a large variability depending on the surveyed population and the LBP definition [3]. In a lifetime, recurrent episodes will affect a large subset of the LBP population [2, 4, 5]. One patient out of four presenting with an acute LBP episode is likely to experience a LBP recurrence within one year [3, 6]. Approximately 10 % of the LBP-presenting individuals will suffer from chronic LBP [7]. These recurrent episodes and chronic cases are responsible for most of the health expenses related to LBP [8-10]. An overview of the extensive literature on low back pain led us to the following observations: 1) only 38 % of prevalence studies that were reviewed provide definitions for recurrent LBP, thus making comparisons difficult [11]; 2) LBP is often reported as a point prevalence but its longitudinal progression is seldom investigated [12-14]; 3) sex and age variables are often aggregated, which limits descriptive and categorical analyses of the data. International experts recently used a consensus approach to propose definitions for back pain [15] or recurrent low back pain [16]. This issue has been examined frequently in recent years, and the community is already adopting these standards. Regarding the prevalence of low back pain over time, the use of survey- or questionnaire-based designs is not optimal. Recall biases, small sample sizes and costs are drawbacks to longitudinal studies. While national surveys allow repeated measurements of the prevalence over time, definitions regarding low back pain are not always specific [17], and the accuracy of LBP estimates generated with large population surveys remains debatable with regards to the variations reported [18]. To complement the results obtained with surveys, the frequency of a health condition can be estimated based on the secondary analysis of administrative healthcare 85 databases [19]. Administrative databases are often developed for preparing healthcare economic evaluations [20, 21]. Recall biases are avoided [22] and data is homogeneously extracted (Cherkin et al., 1992). In a universal healthcare system based on a centralized feefor-service, the specificity of the administrative databases is high, in part because physicians promptly submit claims for the services provided to patients [24]. Therefore, by analyzing large data sets such as those found in administrative health care databases, prevalence can be determined over a longer period than in other designs. Also, the sample size is larger; therefore, categorical analyses by sex and age can be performed allowing for a better understanding of the LBP condition in different subpopulations over time. The objective of our study was to evaluate the prevalence of claims-based recurrent low back pain in a universal health care system for the population of the province of Quebec over an 8-year period starting in 2000. By performing secondary analyses on this extensive administrative database, we provide a descriptive portrait of the longitudinal progression of the annual prevalence of recurrent LBP cases in specific age and sex categories. 86 METHODS Design and data sources A secondary analysis of medical administrative data, obtained from the databases of the Régie de l’Assurance Maladie du Québec (RAMQ), was used to perform a retrospective population-based cohort study. In the province of Quebec, the RAMQ is the government agency responsible for administering the provincial health plan, which came into effect in 1970. This plan covers medical services for Quebec residents. The RAMQ centralizes billing and service information from physicians and hospitals. In this study, the physician claims database for Quebec was used, providing information on the patient’s identification, the date of service and the primary diagnosis of the visit (four-digit International Classification of Diseases, 9th Revision, or ICD-9, codes). Each Quebec resident is assigned a unique health insurance number for identification purposes, and it is further encrypted by the RAMQ for confidentiality reasons. Demographic estimates by sex and age for the province of Quebec were obtained from Statistics Canada [25]. The local Institutional Ethics Board and the Commission d’accès à l’information du Québec approved this study. Study cohort for claims-based recurrent low back pain The cohort was selected among Quebec residents, aged 18 and older, who consulted a physician (primary care or specialist) in an ambulatory care facility (emergency, urgent care clinic or outpatient clinic) for a low back pain condition between January 1, 1999 and December 31, 2008. In this study, we considered the older population as being ageg 65 or older. 401 264 adult patients were selected using the physician claims database for “claimsbased recurrent low back pain” if they had at least three identical LBP diagnoses (3-digit ICD-9 codes 721, 722, 724 or 739) within a period of 365 days, with at least one of the 87 diagnoses in the year under study. Data analyses The annual prevalence reports the proportion of patients identified with recurrent claimsbased LBP for the estimated adult population in the province of Quebec for every year between 2000 and 2007. The annual frequency of ICD-9 codes was also reported according to a classification proposed by Cherkin and colleagues, which is based on clinical categories of mechanical low back problems [23]. Extraction of the data was performed with SAS (version 9.2; SAS Institute Inc, NC, USA). Graphing, linear regressions and prevalence ratios were prepared with GraphPad (version 5.d; Graphpad Software Inc., CA, USA). Confidence intervals (99 %) were determined with the Wilson score interval method. 88 RESULTS In 2000, among the total population of 5.8 million adults in the province of Quebec, 89 687 patients consulted a physician at least three times within a one-year period for a condition related to low back pain. This resulted in a recurrent claims-based LBP prevalence of 1.64 % for men and 1.47 % for women. Eight years later, in 2007, 81 329 patients were selected based on the same criteria, leading to a prevalence of 1.33 % for both sexes (Figure 1). Figure 1. Annual prevalence of claims-based recurrent low back pain or men and women for 2000 to 2007. Figure 1. Bars represent the annual prevalence of claims-based recurrent low back pain in the Canadian province of Quebec for men (black bars) and women (shaded bars). The 8year mean prevalence for men (solid line) and women (dotted line) shows the difference between the sexes (shaded area). Both distributions display a progressive and significant decrease from 2000 to 2007. Although the demographic growth of the adult population of Quebec was on average 0.63 % per year between 2000 and 2007, the prevalence of recurrent claims-based low back pain progressively decreased in the same period. A detailed analysis using 5-year age categories allowed us to determine a prevalence peak of 2.1 % for adult men presenting a recurrent LBP consultation pattern between the ages of 35 to 59 in 2000 (Figures 2A). 89 Figure 2. Annual prevalence of claims-based recurrent low back pain in 2000 and 2007. Figure 2. Annual prevalence of claims-based recurrent low back pain in 2000 and 2007 by age categories and sex. A) Profile of the male cohort prevalence. The mean prevalence in 2000 (solid line) is higher than in 2007 (dotted line). B) Profile of the female cohort prevalence. The mean prevalence in 2000 (solid line) is slightly lower than in 2007 (dotted line). In 2007, this peak reached 1.8 %, a decrease of 17 %. On the other hand, in 2000, women presented a bi-phasic distribution, with peaks in their early fifties (1.9 %) and in their late 90 seventies (1.8 %) (Figure 2B). Similar to men, a prevalence decrease was observed in 2007 for women under 65 years of age, while older female cohorts showed an increase (2 %). The greatest annual prevalence drop between 2000 and 2007 was observed in younger men and women (18-34 years) with a decrease of 38 % and 28 % respectively (Table 1). Table 1. Comparison of claims-based recurrent LBP prevalence by age category and sex between 2000 and 2007. Age/Sex Prev1 2000 (%) [99 % CI] Prev 2007 (%) [99 % CI] % Var2 Slope3 18-34 Male 1.13 [1.10 – 1.16] 0.70 [0.68 – 0.73] -38 -0.061 Female 0.89 [0.87 – 0.92] 0.64 [0.62 – 0.66] -28 -0.033 35-49 Male 2.05 [2.01 – 2.09] 1.63 [1.59 – 1.66] -21 -0.062 Female 1.65 [1.62 – 1.69] 1.45 [1.41 – 1.48] -12 -0.027 50-64 Male 1.93 [1.89 – 1.98] 1.68 [1.64 – 1.72] -13 -0.032 Female 1.78 [1.73 – 1.82] 1.55 [1.52 – 1.59] -13 -0.028 65-80 Male 1.36 [1.31 – 1.41] 1.33 [1.29 – 1.38] -2 -0.001 Female 1.72 [1.67 – 1.78] 1.79 [1.74 – 1.84] +4 +0.016 80 + Male 1.29 [1.18 – 1.41] 1.35 [1.26 – 1.45] +5 +0.004 Female 1.58 [1.50 – 1.67] 1.83 [1.75 – 1.91] +16 +0.005 [1] Prev : Prevalence in percentage [2] % Var : percentage of variation between 2000 and 2007. [3] Slope values based on the linear regressions of the prevalence for every age category, years 2000 to 2007. Negative slopes, reflecting the longitudinal decrease across the eight years analyzed, were also observed for all age categories corresponding to the labor force population (under 65 years). Nonetheless, even if the cohort of men, overall, showed a greater decrease in their prevalence between 2000 and 2007 than the cohort of women, men between 18 and 64 years of age were 1.08 to 1.26 times more likely than women to consult in a recurrent manner for low back pain (Table 2). Table 2. Men’s prevalence ratio for claims-based recurrent LBP compared to women in 2000 and 2007. 91 Age / Year 2000 [99 % CI] 2007 [99 % CI] 1.26 [1.22 – 1.32] 1.10 [1.05 – 1.16] 1.24 [1.20 – 1.27] 1.12 [1.09 – 1.16] 1.09 [1.05 – 1.13] 1.08 [1.05 – 1.12] 0.79 [0.75 – 0.83] 0.75 [0.72 – 0.79] 0.81 [0.73 – 0.90] 0.74 [0.69 – 0.81] 18-34 35-49 50-64 65-80 80 + Interestingly, there was an exception for the female cohort for which the age categories greater than 65 years were consistent with a progressive increase in the prevalence of recurrent claims-based medical visits for 2007. Based on the annual prevalence from 2000 to 2007, this increase resulted in a positive slope of 16 % (Table 1). More importantly, older women were up to 1.35 times more at risk to consult a physician for low back pain than were older men, which is the reverse of the trend previously observed in adults under 65 years of age (Table 2). Finally, the frequency of the specific diagnoses (4-digit ICD-9 codes) that were claimed by physicians in 2000 and 2007 was analyzed for all the selected patients. According to the seven-category LBP classification proposed by Cherkin and colleagues (Table 3) [23], the type of claims was rather stable with variations below 2 %. 92 Table 3. Variation in the frequency of ICD-9 codes for patients with claims-based recurrent mechanical LBP in 2000 and 2007. Condition ICD-9 Frequency Frequency Variation over Variation by 2000 (n) 2007 (n) all diagnoses category % % (n) Herniated disc 722.1 1.4 % 2.0 % +0.6 % 11 % 722.2 (5 270) (5 825) (555) 722.7 Probably 721.3 18.5 % 17.2 % -1.3 % -18 % degenerative changes 721.5(70 162) (57 764) (-12 398) 8 721.9 722.5 722.6 722.9 Spinal stenosis Possible instability Non-specific back aches Sequelae of previous back surgery Miscellaneous 721.4 724.0 724.6 724.2 724.5 722.8 722.3 724.34 724.89 739.34 1.9 % (7 250) 0.2 % (655) 66.9 % (254 385) 0.0 % (8) 11.2 % (42 422) 3.8 % (12 765) 0.1 % (415) 65.1 % (218 228) 0.1 % (212) 11.7 % (39 224) +1.9 % -0.1 % -1.8 % +0.1 % +0.5 % 43 % (5 515) -37 % (-240) -14 % (-36 157) 2 650 % (204) +8 % (3 198) As expected, the most recurrent diagnoses were part of the non-specific back aches category, at 66.9 % and 65.1 %, and the probably degenerative changes category, at 18.5 % and 17.2 %, for 2000 and 2007 respectively. In the same period, the most important increase within a diagnosis category corresponded to sequelae of previous back surgery, which was claimed 26 times more. Spinal stenosis claims also increased by 43 %. 93 DISCUSSION Based on the 2001 and 2006 census population counts, Quebec is the second most populous province, representing 24 % of the Canadian population, and has a median age of 41.5 years. Quebec’s demographic characteristics are similar to the other Canadian provinces [26]. Canada’s public health care system offers universal coverage for comprehensive health care services, which are delivered by each of the country’s provincial and territorial insurance plans in accordance with the Canada Health Act [27]. Our secondary analysis of Quebec’s administrative claims database revealed a progressive decrease in the annual prevalence for recurrent claims-based LBP from 2000 to 2007 for both men and women. We also showed that men under 65 years of age were more likely than women to consult a physician for low back pain in a recurrent manner. This trend was reversed after the retirement age. Overall, the type of LBP diagnoses provided to patients by physicians remained stable over time, with an over-representation of non-specific backache diagnoses. Most studies show an increase in the LBP annual prevalence over time [13, 22, 28] whereas few studies show a decrease in LBP diagnoses [14]. Our results show a sustained decrease in claims-based recurrent LBP prevalence from 2000 to 2007. From 1996 to 2002, Deyo and colleagues identified that the percentage of medical visits for LBP was rather stable (2.3 %) [29]. In our study, unmet medical needs and accessibility issues could, in part, explain the decrease in prevalence. In fact, it was shown that the waiting time for accessing a multidisciplinary pain treatment facility was over 6 months in Canada, and that LBP was the most frequently encountered condition in these clinical facilities (28 %) [30]. There is also a shortage of general practitioners in Canada, where 14 % of the population reported being without a family physician in 2003 [31]. In the province of Quebec, 25 % of the population reported being without a family physician in 2005 [32]. The observed decrease 94 in the annual prevalence could also reflect an increase of complementary and alternative medicine (CAM) consultations not covered by the universal health insurance plan. A study of an American population, from 2001 to 2003, showed that among a cohort of 2000 patients, 62 % were seeking care from a physician, the other 38 % were receiving care from chiropractors or physiotherapists [33]. Six percent of the American population in 2002 consulted CAM practitioners for back pain [34]. Furthermore, a national survey in 2007 revealed that the most frequent condition for consulting CAM providers was back pain or back problems (17 %) [35]. Chronic back pain patients are frequent users of CAM. They are thought to choose this option when their pain remains undermanaged with conventional approaches or to prevent worsening of their condition (Foltz et al., 2005). Chiropractic care was by far the preferred alternative care for chronic pain patients in a Canadian nationwide survey in 1996-1997 [36]. The administrative database used in this study did not allow us to verify these hypotheses, but future studies involving medical data linkage and private insurance records could provide answers. Age and sex differences Our data showed that adult men in the age categories corresponding to the labor force represented a peak of recurrent medical visits for LBP. This is in accordance with a previous report that showed a predominance of LBP episodes in the 45-54 age category, representing 24.8 % of a 15 567 patient cohort [21]. However, our results also showed that women behave differently than men with respect to the number of recurrent visits for a low back pain condition. The female cohort showed a sharper bi-phasic distribution, with a large increase in the peak of visits after the retirement age in 2007 compared to 2000. In line with this, a 2002 US national health survey on a sample of 31 000 respondents reported an increase from 15 %, in the 18-24 age category, to 19.7 % in the aging population (>65 95 years) [37]. Overall, women were also significantly more prevalent than men in that study, although the authors did not specifically state whether they were older women. Furthermore, our data also pointed out that men were at greater risk than women in age categories corresponding to the labor force. This observation was noted for early 2000, and it leveled out towards 2007. This could be the result of many factors including a transition away from professions involving manual labor in Quebec in this 8-year period, or an improvement in the prevention and security rules at work. Our results also revealed a higher prevalence for claims-based recurrent LBP in 2000 in men compared to women. However, in 2007, the prevalence of LBP in both sexes became equal at 1.33 %. While many studies report a higher prevalence for chronic pain in women [38, 39], a recent webbased survey study in the US revealed no difference in the prevalence between men and women for chronic LBP [7]. Also, we noted that for both sexes, there was a drop in the prevalence in the 60-64 age category in comparison to the peak in the early fifties. In Canada, the mean retirement age is 61 years of age [40], which is in line with the prevalence decrease in the 60-64 age category. It has been reported that the frequency of severe back pain increases with age, but that adults in age categories under 65 years of age are most affected by benign and mixed back pain [41]. In addition, based on a decennial survey in France, active men and women of pre-retirement age showed a higher prevalence of LBP of more than 30 days, which progressively decreased past the retirement age and stabilized around the age category of 70-74 [42]. However, our data revealed that the prevalence of claims-based recurrent LBP increased in the elderly, with older women being more at risk than older men. In older adults, the prevalence of co-morbidities increases [43]. Hypertension, lipid metabolism disorders and chronic low back pain was found to be the most prevalent triad in the elderly [44]. Also, in a Japanese national survey, a trend for 96 a higher point prevalence of LBP complaints for women aged over 65 was reported [45]. It is noteworthy that in 2010, the population of the province of Quebec ranked among the oldest worldwide, behind Japan [45, 46]. Therefore, this increase of recurrent consultations for LBP might become more frequent in aging populations, especially for older women. Larger proportion of non-specific LBP diagnoses Our study confirmed that among the patients with claims-based recurrent LBP, 65 % were diagnosed with non-specific LBP with respect to the classification proposed by Cherkin and colleagues [23]. This proportion is lower than the previously reported 84 % [21], 76 % [47] and 86 % (Nimgade et al., 2010) for non-specific diagnoses from claims-related databases in the US, but higher than the 53 % reported by Martin and colleagues based on a survey [12]. In primary care, other studies have reported that 80 % of LBP diagnoses are labeled as non-specific and that no anatomopathological markers helped to explain the patient’s pain [49]. The frequency that we report here may, however, underestimate the true proportion of non-specific LBP diagnoses in the population since our cohort selection was based on the occurrence of 3 diagnoses within a 365-day period, in comparison to single LBP episodes. For instance, it was shown that a group of patients consulting physicians 6 times or more for LBP had fewer non-specific diagnoses than those consulting once (57 % vs 84 %, respectively) [21]. There are several hypotheses that can explain this overrepresentation of the non-specific label. First, in studies analyzing administrative databases, we have to keep in mind that physicians or their administrative staff may be using the most common ICD-9 codes in their specialty practice, among which are the non-specific labels. There have also been reports that among physicians, 63 % felt that they lacked adequate training in chronic pain management [50]. Between 2000 and 2007, there was a substantial 97 increase in spinal stenosis diagnoses in our analyses. Yet, a study reported that less than 50 % of general practitioners were “very confident” in diagnosing specific conditions such as lumbar spinal stenosis and scoliosis in elderly populations. While diagnostic procedures are consistently focused on first identifying “red flags” or suspected serious pathologies, imaging is only recommended after 4 to 7 weeks, if no improvement in the condition is observed (Koes 2010). Therefore, patients diagnosed with a non-specific condition and initially no apparent serious pathology might have successive medical visits with a nonspecific label before an exhaustive examination is conducted. Limitations Our study has several limitations related to secondary analyses of administrative health care databases. First, the recent definitions for acute or recurrent LBP could not be used in the context of our study [15, 16]. Indeed, the absence of clinical information on the duration and the intensity of LBP episodes in the administrative data is incompatible with the most recent definitions. Administrative data do not differentiate between a new LBP episode and a claim related to a previous episode that is ongoing [19]. The concept of recurrence in our study is therefore based only on repeatedly consulting a physician. Second, we proposed that three or more diagnoses in a period of one year would identify most of the cases of recurrent claims. A potential information bias thus remains if LBP was a secondary condition for patients presenting with multi-morbidities [51]. Indeed, physicians can only bill one diagnosis claim related to their patient’s condition, a peculiarity of the RAMQ claims database [52]. Selecting patients with only one or two LBP diagnoses could have also allowed for a greater sensitivity, but would have led to less specificity. Ultimately, a future study linking administrative and medical data could optimize both sensitivity and 98 specificity. Time gaps between consultations have not been taken into account in this study. Time gaps between claims have been proposed as an option for improving the accuracy of the identification of the recurrence of a LBP episode. To date, the most frequently used clinical variable to report recurrence is the duration of the event [11]. The mean gap between two distinct LBP episodes was previously reported to be 40 days [19]. Algorithms involving the notion of time gaps between claims have to be further developed to obtain a more specific selection of patients in administrative databases. Medical data linkage to administrative data would also be helpful to increase the validity of such algorithms. Finally, we could not use exactly the same diagnosis categories reported by Vogt or Cherkin and colleagues[23, 47], which decreased the specificity of our results. We only had access to 26 ICD-9 codes with a 4-digit precision. Fortunately, we were granted access to the most frequent LBP diagnoses reported in the literature. CONCLUSION In summary, this study highlighted the importance of reporting LBP conditions by age categories and sex. It also showed an overall decrease of claims-based recurrent LBP prevalence in the healthcare system in recent years. Older women were more likely to consult a physician for LBP in a recurrent pattern, and this trend will probably increase in aging populations. Secondary analyses of administrative healthcare databases can be useful for determining the morbidity of prevalent health conditions as well as for surveillance, decision-making, cost-of-illness evaluations and guiding research programs. 99 COMPETING INTEREST None of the authors report a conflict of interest. AUTHORS’ CONTRIBUTIONS NB participated in the design of the study, performed the analyses and drafted the manuscript. JC participated in the design and analyses. PS participated in the design. AV participated in the design. All authors read and approved the final manuscript. ACKNOWLEDGEMENTS This work was supported by a grant from the ACCORD research program. NB is supported by the Fonds de la Recherche en Santé du Québec (FRSQ) and the Canadian Institutes for Health Research (CIHR) Ph.D. scholarships. PS is the recipient of a FRSQ Junior 2 salary support and AV of a FRSQ senior salary support. The authors thank StatSciences for assistance in biostatistics. Philippe Feredj and Myriam Beaudet are thanked for their assistance in retrieving census reports and data. 100 REFERENCES 1. Lin C-WC, Haas M, Maher CG, Machado LAC, van Tulder MW : Cost-effectiveness of guideline-endorsed treatments for low back pain: a systematic review. Eur Spine J 2011, 20:1024–1038. 2. Dagenais S, Caro J, Haldeman S: A systematic review of low back pain cost of illness studies in the United States and internationally. 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Auteurs Nicolas Beaudet Josiane Courteau Philippe Sarret Alain Vanasse (candidat au PhD) (PhD; associée de recherche) (PhD; professeur titulaire, codirecteur) (MD PhD FCMF; professeur titulaire, directeur principal) Statut de l’article Soumis : Accepté : Publié : 29 mai 2013 13 novembre 2013 16 décembre 2013 Titre du journal European Journal of Pain Facteur d’impact : 3.07 Précisions détaillées sur la contribution Cet article constitue le deuxième volet d’analyses à partir des données médicoadministratives de la RAMQ et se veut la suite logique de la première étude (article 1). Le but principal était de proposer une approche méthodologique visant à améliorer l’identification des cas incidents de douleur lombaire récurrente à l’échelle de la population tout en limitant la contamination de la cohorte par des cas prévalents. L’étudiant (NB) a contribué à raison de 75 % à la stratégie de préparation de l’étude en soumettant ses idées suite à la relecture de précédentes études de l’équipe Primus portant sur l’identification des cas incidents de diabète et de schizophrénie dans les banques de données de la RAMQ. L’identification du tout premier épisode de douleur lombaire étant plus complexe à situer dans le temps, NB a proposé plusieurs approches à explorer à partir de constats tirés de la 105 littérature. Les deux directeurs (AV et PS) ainsi que l’associée de recherche de l’équipe Primus (JC) ont ensuite discuté de l’approche méthodologique la plus compréhensible et facile à utiliser de manière à la publier pour qu’elle soit exploitée par d’autres équipes de recherche dans le futur. NB a contribué à 80 % à l’analyse des résultats. Le consultant Marc Dorais, président de StatSciences Inc., a supervisé NB dans la programmation d’algorithmes d’analyse complexes avec le logiciel SAS. Lors de la révision du manuscrit suite à l’évaluation par les pairs, JC a revu en profondeur l’approche mathématique de la méthodologie « Brameld-Holman backcasting » pour pondérer les résultats et permettre de produire des projections d’incidence sur 8 années consécutives. JC a ensuite encadré NB dans l’ajustement des valeurs et la compréhension des équations pour s’assurer que le lectorat comprenne les modifications et que les exigences des pairs soient rencontrées. NB a contribué à 90 % de l’écriture du manuscrit. Il a produit une première ébauche qui a été annotée par AV, JC et PS. La version définitive a été révisée pour l’anglais scientifique par Mme Catherine Brown. 4.2.2 Résumé de l’article en français Il est difficile de déterminer avec précision le début d’un épisode de douleur lombaire. Cela limite la capacité de calculer l’incidence de la douleur lombaire et d’identifier des facteurs de risque à l’échelle populationnelle. Plusieurs études ont procédé à la construction de cohortes incidentes en sélectionnant des patients considérés exempts de douleur lombaire pour une période de 6 à 12 mois avant leur participation à l’étude. Cependant, cette période pourrait s’avérer insuffisante pour s’affranchir des patients récurrents ayant pu avoir expérimenté un épisode antérieur. La littérature ne permet pas de clairement statuer si un épisode de douleur lombaire antérieur peut contribuer à un nouvel épisode. Il est donc important d’étudier la période tampon optimale pour sélectionner des cas de douleur lombaire véritablement incidents. Par le biais d’une base de données provinciale sur les services médicaux rémunérés à l’acte, une cohorte de patients prévalents pour un épisode de consultations médicales récurrentes pour de la douleur lombaire a été construite pour l’année 2007. Le dossier médical des 81 329 patients sélectionnés a été criblé sur une période rétrospective de 11 ans. Les patients présentant un épisode antérieur de douleur lombaire ont été exclus en fonction d’une 106 approche de clairance temporelle. La valeur prédictive positive (VPP) et le Kappa de Cohen ont été calculés de manière à déterminer la période de clairance optimale à rechercher pour permettre de sélectionner des cas de douleur lombaire véritablement incidents. Une très bonne convergence entre la VPP et le Kappa a été observée en utilisant une clairance temporelle de sept années. Le taux d’incidence de la douleur lombaire liée à des consultations récurrentes atteignait 242 cas par 100 00 individus en 2007. Les hommes de 18 à 34 ans présentaient 1,18 fois plus de risque que les femmes d’avoir un nouvel épisode de douleur lombaire. Les ainés de plus de 80 ans, dans l’ensemble, avaient 52 % plus de cas incidents que le groupe des 18-34 ans. L’incidence annuelle a connu une baisse de 26 % de 2000 à 2007. Le fait de cribler le passé médical des patients présentant des épisodes de douleur lombaire pourrait s’avérer une approche plus précise pour déterminer des taux d’incidence. Ce genre d’approche permettrait entre autres de déterminer les couts médicaux et de médicaments liés à de nouveaux épisodes récurrents. 107 4.2.3 Article sous format manuscrit IMPROVING THE SELECTION OF TRUE INCIDENT CASES OF LOW BACK PAIN BY SCREENING RETROSPECTIVE ADMINISTRATIVE DATA Nicolas Beaudet1,2,3, Josiane Courteau2 Philippe Sarret3 and Alain Vanasse1,2* Institution : 1- The PRIMUS Group, Clinical Research Centre Etienne-Le Bel, (CHUS) ; 2-Department of Family and Emergency Medicine 3-Department of Physiology and Biophysics, Faculty of Medicine and Health Sciences, Université de Sherbrooke, Sherbrooke, Quebec, Canada. Short Title: Claims-based recurrent low back pain incidence *Corresponding Author: Alain Vanasse, MD, PhD, FCMF Department of Family Medicine, Faculty of Medicine and Health Sciences, Université de Sherbrooke 3001, 12e Avenue Nord, Sherbrooke, Quebec, J1H 5N4 Canada Phone : (819) 820-6868, ext. 15 130 FAX : (819) 564-5424 Email : [email protected] Key words : incidence, claims-based recurrence, low back pain, clearance, sex, elders, medical history Category : Original article Funding: This project was supported by a grant from the Quebec Pain Research Network and from the ACCORD program. NB is supported by the Fonds de la Recherche en Santé du Québec (FRSQ) and the Canadian Institutes for Health Research (CIHR) Ph.D. scholarships. PS is the Canada Research Chair in Neurophysiopharmacology and Chronic Pain. AV receives FRSQ senior salary support. Competing interests: None of the authors report a conflict of interest. • Despite low back pain is a very common health condition, there are only a few studies on its incidence at the population level. • This study proposes a new method to optimize the identification of true incident cases. • This study also provides incidence rates of claims-based recurrent low back pain for the years 2000 to 2007. 108 ABSTRACT BACKGROUND : The difficulty in identifying the onset of low back pain (LBP) limits the capacity to determine the incidence of LBP at the population level and, further, to identify risk factors. In the literature, incidence cohorts have been built with patients initially considered LBP-free for 6 to 12 months prior to their selection. This “clearance period” might not be sufficient to exclude recurrent patients having experienced previous LBP episodes and might result in a misclassification bias. METHODS: Using the Canadian province of Quebec’s medical administrative physicians’ claims database, a cohort of prevalent claims-based recurrent LBP patients was built for 2007. The medical history of 81 329 patients was screened for a period of 11 years. Positive predictive values (PPV), kappa statistics and a survival function were calculated to determine the optimal clearance period for capturing first-time events. RESULTS: The 2007 annual incidence of adult claims-based recurrent LBP was estimated at 242 per 100 000 persons. Males between 18 and 34 years of age were found to be 1.18 times more at risk than their counterparts. Altogether, the elderly (over 80 years) had 52 % more new cases than the 18-34 group. A very good convergence for PPV and Kappa was found for a 7-year clearance period. This allowed determining the annual incidence from 2000 to 2007, showing a decrease of 26 %. CONCLUSION : Screening the medical history of LBP patients can provide more accurate incidence estimates by limiting the over-ascertainment of first-time LBP patients. A 4 to 7-year clearance period should be considered. 109 BACKGROUND Low back pain (LBP) is a common health condition (Louw et al., 2007; Fourney et al., 2011), with a lifetime prevalence of approximately 38.9 % (Hoy et al., 2012). The frequent occurrence of LBP in a lifetime and the array of health conditions from which it can arise represent clinical and epidemiological challenges in defining its onset (George, 2002; McBeth & Jones, 2007). Knowledge on acute, recurrent and chronic LBP incidence is central to planning health services and improving LBP management (George, 2002; Kopec et al., 2004). However, prospective studies have been limited in providing this information, in part because of the difficulty of identifying true first-time LBP episodes (Balagué 2012), especially for population-based studies (Juniper et al., 2009). Data mining of medical administrative databases for large populations over a long period of time could be a low-cost method for conducting population-based LBP incidence studies (Juniper et al., 2009). This approach could decrease the risks of recall biases related to survey-based studies (Zitting et al., 1998). In databases, LBP cases are often reported as diagnoses coded with the International Classification of Diseases, 9th or 10th revisions (ICD-9 or ICD-10) instead of being perceptions of respondents based on general LBP definitions. For example, incidence rates (IR) of LBP in the American population consulting for an emergency medical evaluation were estimated from a register of a sample of approximately 100 hospitals (Waterman et al., 2012). Previous to that the incidence for lumbar disc disease was determined in a birth cohort linked to Finland’s National Hospital Discharge Register (Zitting et al., 1998). IR for first-time occurrence LBP for a Swedish population were determined using a centralized health care register (Jöud et al., 2012). A Belgian study also reported the incidence of LBP for a family physicians’ database (Bartholomeeusen et al., 2012). In 2009 and 2011, LBP IR in the military populations of Finland and the United States were published using the National Hospital Discharge Register (Mattila et al., 2009) and the USA Defense Medical Epidemiology Database, respectively (Knox et al., 2011). Distinguishing between an incident and a recurrent episode can be seen as arbitrary (Elders and Burdorf, 2004) and can lead to misclassification biases. Many registry-based or interview-based studies consider a minimum “clearance period” of a few months without 110 prior LBP episodes for constructing a cohort of LBP-free participants. The use of such a short clearance period is, therefore, debatable as to whether it is appropriate for considering a patient as being LBP-free and, eventually, as a truly new LBP case. The objectives of this study were 1) to test different clearance periods when screening the medical history of claims-based recurrent LBP patients for optimizing the selection of new cases in a medical administrative database; 2) to determine the level of agreement and predictability of these clearance periods for optimizing the capture of incident claims-based recurrent cases; 3) finally, to measure with an optimal clearance period the annual incidence of claims-based recurrent LBP over time in the population of Quebec using a population-based administrative perspective. 111 METHODS Design and data sources A retrospective population-based cohort study was prepared using medical administrative data extracted from the registries of the Régie de l’Assurance Maladie du Québec (RAMQ) (Beaudet et al., 2013). Analyses were performed on the RAMQ provincial physicians’ claims database, which provided information on the patients’ identification, the date of service and the primary diagnosis for each visit (four-digit ICD-9). The RAMQ administrative database was found reasonably precise for research purposes and offers a good representativeness of the general population (Wilchesky et al., 2004; Asghari et al., 2009; Strom et al., 2012). Demographic estimates by sex and age for Quebec were obtained from Statistics Canada (StatCan, 2012). This study is part of a larger project on health inequalities and chronic pain, which was approved by the local Institutional Ethics Board and the Commission d’accès à l’information du Québec. Study population The total study population included all adult individuals (≥18 years) living in the province of Quebec, and identified as having a claims-based recurrent LBP condition between 2000 and 2007. Prevalent claims-based recurrent LBP patients were selected if they had at least three identical LBP diagnoses in a period of 365 days (Beaudet et al., 2013). The following ICD-9 3-digit codes were selected: 721, 722, 724 or 739, exception made of codes corresponding to anatomical sites or conditions different from low back pain : 721.0-721.2, 722.0, 722.4, 739.0-739.2, 739.5-739.9 (Cherkin et al., 1992; Vogt et al., 2005). The administrative medical data was made available from 1996 for all patient included in the study between 2000 and 2007. For the aforementioned objectives 1 and 2, the study cohort was limited to the year 2007, presenting the longest period of retrospective data (19962007). The index date refers to the first date of a LBP diagnosis in 2007. Finally, for objective 3, eight cohorts (from 2000 to 2007) were extracted using optimal selection criteria determined in the objectives 1 and 2 of this study. Clearance period method The strategy used to determine incident cases was to start from a prevalent cohort of claims-based recurrent LBP patients and then proceed to a retrospective screening of their medical administrative history. Therefore, the clearance period method verified if claims112 based recurrent LBP patients in 2007 had a medical encounter for LBP (one of the ICD-9 codes 721, 722, 724 or 739) prior to their index date. If the patient had no previous encounter, he was considered as a new case of claims-based recurrent LBP. This method allowed a clearance period to be calculated in order to reach a good agreement with what could be considered an incident cohort with minimal over-ascertainment. Statistical analyses The use of kappa coefficients and Positive Predictive Values (PPV) for determining an optimal clearance period for capturing incident cases has previously been described (Asghari et al., 2009; Vanasse et al., 2011). Briefly, the kappa coefficient is used to estimate the level of agreement between different clearance periods. The PPV calculation, on the other hand, is used to provide an estimate of the probability of identifying a true incident case among those identified as being new cases. An optimal strategy for determining a fairly predictive incident cohort would have converging high kappa and PPV coefficients. Kappa coefficients between 0.6 and 0.8 correspond to a “good” agreement; most kappa classifications will consider a “very good” agreement to be between 0.8 and 0.9 and an “excellent” agreement to be above 0.9 (Szklo and Nieto, 2007). In addition, a retrograde survival analysis was produced using the life-table method estimators for survival and hazard functions (Asghari et al., 2009). The survival function (probability of being incident) at a given time is the probability of surviving (not having a preceding record) to a specific time [S(t)=Pr(T>t), where T is the year of the preceding LBP record]. The hazard function represents the instantaneous probability of an event between time (t, t+Δt) conditional on survival up to time “t” or later [λ(t)=S'(t)/S(t), where S'(t) is the derivative of S(t)]. This approach was used to graphically justify the proposed optimal clearance period (Brameld et al., 2003; Asghari et al., 2009). Once the optimal clearance period (topt) was selected, the annual incidence from 2000 to 2007 was described by age and sex. However, in the absence of 7-year retrospective medical administrative data for cohorts of years 2000 to 2002, the Brameld-Holman backcasting method was used for correcting the annual incidence (Brameld et al., 2003). This approach consists in calculating a correction factor for over-ascertainment of first-time events in the case of less than optimal historical data (t < topt). The correction factor is defined as the conditional probability of being a "true incident case" given that no previous medical encounter for 113 LBP up to year t (t < topt) was recorded in the database [C(t)=S(topt)/S(t)] (Brameld et al., 2003). Annual incidence was determined by using the number of cases (numerator) identified with a 11-year clearance period (maximal; Table 2) or a 7-year clearance period (optimal; Table 3) divided by the age- and sex-standardised population of the province of Quebec (denominator) (Szklo and Nieto, 2007; StatCan, 2012). Confidence intervals (95 %) were determined with the Wald score interval method. Extraction and analyses were performed with SAS (version 9.2; SAS Institute Inc, NC, USA). Graphing was performed with GraphPad (version 6.b; GraphPad Software Inc., CA, USA). 114 RESULTS The medical administrative history of 81 329 prevalent claims-based recurrent LBP patients in 2007 was screened with the clearance period method in order to identify incident cases. Fifty-seven percent of the initial cohort of prevalent patients was excluded for having had a previous medical encounter for a LBP condition in the first year prior to their index date (Table 1). Table 1. Positive predictive values (PPV) and kappa coefficients according to the medical history clearance period. Clearance Algorithm Clearance (years) Men (n) Women Adults (n) (n) PPV Kappa (%) 0 (Prevalent) 39 901 41 428 81 329 0.25 0.50 0.75 1 1.5 2 3 4 5 6 7 8 9 10 24 576 20 431 18 385 17 144 15 640 14 521 12 808 11 618 10 691 9839 9192 8657 8200 7781 26 306 21 792 19 487 18 131 16 386 15 171 13 324 12 022 11 023 10 139 9390 8774 8226 7790 50 882 42 223 37 872 35 275 32 026 29 692 26 132 23 640 21 714 19 978 18 582 17 431 16 426 15 571 29.2 35.2 39.2 42.1 46.4 50.0 56.8 62.8 68.4 74.3 79.9 85.2 90.4 95.4 0.236 0.343 0.408 0.452 0.512 0.560 0.641 0.706 0.760 0.814 0.860 0.900 0.938 0.971 11 (Incident) 7432 7418 14 850 100 1.000 Thus, the one-year clearance period positive predictive value (PPV) of 42 % revealed that a majority of patients were not representative of the cohort of truly incident cases. After one year, the rate of exclusion of patients gradually decreased over time and tended towards a plateau until reaching a clearance period of 11 years (Fig. 1a,b). The remaining 14 850 patients were those with no previous medical encounters for LBP between 1996 and 2006 (Table 1), which corresponded to a cohort of "true" incident claims-based recurrent LBP 115 Figure 1. Survival and hazard functions of claims-based recurrent low back pain patients. 1.0 0.8 0.6 0.4 S(t) 0.2 -11 -10 -9 -8 -7 -6 -5 -4 -3 Clearance period (years) -2 0.0 -1 2007 Proportion with no previous diagnosis A B 1.0 0.8 0.4 Hazard function 0.6 0.2 λ(t)=S'(t)/S(t) -11 -10 -9 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 0.0 -1 2007 Clearance period (years) Legend. a) Probability (Survival function (S(t)) and number of incident cases for claimsbased recurrent low back pain (n in thousands) in the 2007 prevalent cohort as a function of the clearance period. The dark grey circle (-4 years) corresponds to a good PPV and Kappa convergence, the closed-circle (- 7 years) to a very good convergence and optimal clearance and the light grey circle to the maximal clearance; b) Corresponding hazard function λ(t) with a long tick marking the optimal 7-year clearance period. patients given the maximum follow-up time available. There was no difference in the results if using the prevalent cohort built from both the physicians’ claims and hospital discharge registries (data not shown). Males and females had the same absolute number of 116 new claims-based recurrent LBP cases in 2007. Kappa and PPV showed a “good” convergence after a 4-year clearance period (> 0.6) (Table 1). A “very good” convergence was only reached after retrospectively screening the patients’ medical administrative records for a clearance period of 7 years (> 0.8) (Table 1). The retrograde survival function graphically represents the annual clearance, showing the greatest attrition in the prevalence pool the first year of screening (Fig. 1a). The more retrospective data screened, the more the survival function converges to the "true" probability of being incident (Fig. 1a). This also means that the derivative (slope) of the survival function (S'(t)) tends to zero as we approach the maximum clearance period, as is illustrated by the hazard function converging to zero (Fig. 1b). At a 7-year clearance period, the incident cohort represented 23 % of the initial claims-based recurrent LBP prevalent pool (Table 1). The 2007 incident cohort obtained with an 11-year clearance period allowed the calculation of an annual incidence of 246 and 237 per 100 000 persons for men and women respectively (Fig. 2). 117 Figure 2. The 2007 annual incidence per 100 000 persons of claims-based recurrent low back. 386 Male Female 331 279 259 209 246 229 236 259 M:F 1.04 246 237 177 18-34 35-49 50-64 65-79 Age (years) 80+ Total Legend. The 2007 annual incidence per 100 000 persons of claims-based recurrent low back pain in the adult population according to the age and sex of patients. The 2007 incident cohort was determined with the maximal 11-year clearance period. The total represents the overall population annual incidence and its corresponding male-to-female ratio (M:F). Overall the 2007 incidence was 242 per 100 000 persons and males had a risk similar to females with an incidence risk ratio (IRR) of 1.04 (95 % CI [1.01 – 1.07]) (Table 2). The greatest risk when categorizing by age was found in the 18-34 age group where young men were found 1.18 times more at risk than young women (95 % CI [1.10 – 1.26]). The overall population of the elderly (over 80 years) had an average of 52 % more new cases per 100 000 persons than the 18-34 age group, corresponding to an IRR of 1.90 (95 % CI [1.77 – 2.04]) (Table 2). 118 Table 2. Annual incidence of claims-based recurrent LBP in 2007 using the maximal 11-year clearance period. AGE 18-34 35-49 50-64 65-79 80 + All Incidence (n per 100 000) 193 269 237 249 367 242 95 % CI IRRb 95 % CI [187 – 200] [261 – 277] [230 – 245] [238 – 259] [345 – 389] [238 – 246] –c 1.39 1.23 1.29 1.90 1.25 – [1.33 – 1.45] [1.17 – 1.29] [1.22 – 1.36] [1.77 – 2.04] [1.20 – 1.30] IRR M/Fd 1.18 1.07 1.07 0.91 0.86 1.04 95 % CI [1.10 – 1.26] [1.02 – 1.14] [1.01 – 1.14] [0.84 – 1.00] [0.75 – 0.98] [1.01 – 1.07] a. Incidence risk ratio b. The 18-34 age group is the reference category c. The females are the reference category Given the “very good” convergence determined with the kappa, PPV and the survival function analyses for a 7-year clearance period (Table 1, Fig. 1a,b), new analyses were performed with this clearance period on the annual LBP cohorts of 2000 to 2007. Each cohort from 2003 to 2007 provided at least 7 years of medical administrative history given that data were available from January 1996. However, for cohorts of 2000 to 2002, only 4 to 6 years of retrospective administrative medical data were available. In these instances, a correction factor (Table S1) was estimated and used for providing an adjusted number of “true” incident cases (Table S2). This allowed minimizing the over-ascertainment of incident cases to provide a more accurate portrait of the secular trend of the recurrent claims-based LBP incidence over 8 years (Fig. 3). 119 Figure 3. Annual incidence of claims-based recurrent low back pain from 2000 to 2007. Annual incidence (per 100 000 persons) 500 Observed 450 400 350 Adjusted 300 250 0 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 Legend. Observed (dotted line) and adjusted (solid line) annual incidence of claims-based recurrent low back pain in the adult population from 2000 to 2007 using the optimal 7-year clearance period and Brameld-Holman backcasting method. Overall, the annual incidence in the adult population of the province of Quebec showed a step-wise decrease of 26 % between 2000 and 2007 (Fig. 3). The first step occurred from 2000 to 2002 moving from an annual incidence of 380 to 342 cases per 100 000 persons. The second step occurred from 2004 to 2007 with a drop from 338 to 302 cases per 100 000 persons (Fig. 3). Patients who were 18 to 49 years old followed this 2-step downward trend. The 50-64 age category had a decrease at the first step then remained relatively stable from 2002 to 2007 (Table 3). Interestingly, the elderly over 80 years of age showed a U-shape profile where they had a decrease in 2001 but showed an increase of a similar magnitude in 2007 going from 420 in 2003 to 461 cases per 100 000 persons. This category also accounted for the most new cases of claims-based recurrent LBP (Table 3). 120 Table 3. Annual incidence of claims-based recurrent LBP by age categories between 2000 and 2007 with a 7-year clearance (n per 100 000 persons). Year Age Categories 18-34 35-49 50-64 65-79 80+ All 2007 220 338 310 328 461 302 [213-227] [330-347] [302-319] [315-340] [436-486] [298-307] 2006 247 361 329 358 428 324 [239-254] [353-370] [320-338] [345-372] [403-452] [319-328] 2005 256 357 329 337 432 322 [248-264] [348-365] [320-338] [325-350] [406-457] [318-327] 2004 276 372 338 362 433 338 [268-284] [363-381] [328-347] [348-375] [407-459] [333-343] 2003 284 385 322 355 420 339 [276-292] [376-394] [312-331] [341-368] [394-446] [334-343] 2002* 292 385 329 343 440 342 [283-300] [376-394] [319-339] [330-356] [413-468] [337-346] 2001* 319 398 350 342 432 357 [311-328] [389-407] [340-360] [329-356] [405-460] [353-362] 2000* 345 426 378 340 491 380 [336-354] [416-435] [368-389] [326-353] [458-523] [375-385] *Adjusted values with the Brameld-Holman backcasting correction factor to control for the absence of 7 years of retrospective data. 121 DISCUSSION Identifying a population at risk for LBP is a difficult task. Recently, research teams have used administrative and medical surveillance databases to determine incidence rates for LBP at the population level. Many studies derived their estimates based on cohorts of patients initially considered LBP-free or without pain in the previous 6 months to 1 year before their selection. This raises the question as to whether only new LBP cases are truly identified or, if in fact, there is a contamination with LBP patients having a recurrence. Advances in informatics open new avenues for exploring large observational datasets using data mining techniques, even if the data were collected for operational purposes (Yoo et al., 2012). Accordingly, our study proposes a method for determining an optimal clearance period for improving the selection of LBP cases in a large administrative dataset. Using the clearance method for building a cohort The present study has shown that among the prevalent pool of claims-based recurrent LBP patients, 57 % have had a medical visit for a LBP condition in the year previous to the index date of their inclusion in the cohort. This observation suggests that studies reporting new LBP cases based on the selection criteria of LBP-free patients in the previous 6months to 1-year of the investigation could be only in “fair agreement” with what could come closer to a “true” incident cohort. Thus, patients having had past episodes could contaminate the initial LBP-free cohort and lead to an overestimation of the LBP incidence. Interestingly, some research teams mentioned that they carried out a systematic review of the medical administrative history of every patient for determining the first-time occurrence of LBP (Knox et al., 2011; Jöud et al., 2012). In line with this, our results show that ideally, a clearance period of 4 years, optimally 7 years, would improve the selection of incident cases. Incidence of low back pain at the population level In the Swedish county of Skåne in 2009, the first-time LBP medical consultation rate was found to be 2 380 per 100 000 persons. Interestingly, Joud and colleagues controlled for the absence of LBP consultations for 5 calendar years prior to the LBP index date (Jöud et al., 2012). According to our results, a 5-year clearance period was found to have a good convergence for the selection of patients in order to limit the over-ascertainment of firsttime LBP encounters. Their results are 6 to 8 times higher than the annual incidence found 122 in the present study for the province of Quebec, the latter varying between 380 and 302 per 100 000 persons between 2000 and 2007. The main difference here was probably that Joud and colleagues investigated on the occurrence of incident claims-based “acute” LBP, whereas the present study sought to determine the incidence of claims-based “recurrent” LBP. Indeed, the proportion of acute LBP patients that may become chronic are thought to be in a proportion of 6 to 10 % of all cases (Ekman et al., 2005). Another study based on a workers’ claims database reported a recurrence rate of 7.9 % for all LBP encounters, most occurring within the first year of follow-up (Wasiak et al., 2003). More recently, Stanton and colleagues observed 17 % to 23 % of recurrence for patients with no previous LBP episode in an Australian population (Stanton et al., 2008). These observations support the difference found between the incidence estimates of acute and recurrent LBP given that the Swedish healthcare system shares similarities with the Canadian one in terms of accessibility, and that both studies have used a clearance period method based on the screening of ICD codes. Further, in Belgium, a LBP IR of 5 140 per 100 000 patients was found in general practice based on a physician registry, among which up to 25 % had experienced a previous LBP episode (Bartholomeeusen et al., 2012). Other studies have reported LBP incidence using different rate calculations. For instance, an IR of 4 470 per 100 000 person-years for long-term LBP was reported in a representative sample of the Canadian population in 1996-1997 (Kopec et al., 2004). Kopec and colleagues used a national survey to build an inception cohort of 1-year LBP-free patients. The participants were interviewed using a general question on overall long-lasting back pain and the consultation of health professionals. The difference in study designs could explain an IR 12 to 15 times lower for the province of Quebec. Indeed, our study used medical administrative data of 11-year LBP consultation-free patients and specific LBP diagnoses provided by physicians, instead of self-reported experiences. Similarly, a 5-year IR of 139 per 100 000 person-years of hospital emergency department visits related to LBP in the USA was also reported (Waterman et al., 2012). Yet, we might have expected higher estimates from that study since they investigated on the occurrence of acute LBP encounters. However, the study focused on emergency departments’ encounters whereas we investigated all outpatient visits. In occupational populations such as the army, the IR for first-time acute encounters was high with 4 050 per 100 000 person-years between 1998 123 and 2006 (Knox et al., 2011). This IR is 1.7 times higher than that found for the general adult population of Skåne in Sweden (Jöud et al., 2012). However, an active-duty military population has a greater exposure to heavy training and tense situations than the general population, which could lead to greater risks of injuries. Interestingly, Knox and colleagues also verified the medical history of every patient to capture only the first occurrence of lumbago (Knox et al., 2011), but the clearance period was not further described. Overall, care must be taken when comparing these estimates since the method to measure the incidence may vary, as well as the sampling strategies and the case definitions. Age and sex We observed approximately the same number of incident cases for men than for women, with a ratio of 1.04, which is similar to a ratio previously reported for LBP emergency encounters in the USA in the same decade (Waterman et al., 2012). This ratio, for all medical encounters in a Swedish population, was found lower with 0.81 (Jöud et al., 2012). However, men were shown to utilize a similar level of health care resources than did women. In Finland, the male-to-female ratios were found higher than 1.9 for different conditions leading to LBP hospitalizations during the first 28 years of life (Zitting et al., 1998). It is worthy of note that hospitalizations occurred mostly after the age of 20 for males, an age corresponding to the compulsory military service in Finland. In line with this, the 18-29 group of male conscripts in Finland had an annual IR of 2 700 per 100 000 person-years for event-based LBP hospitalizations (Mattila et al., 2009). This incidence rate is 10-fold greater than that for the 18-34 age category in the present study cohort. However, military service is not compulsory in Canada. Also, in the present study, the 3449 age group was the most at risk together with the elderly over 80 years. A similar biphasic trend in LBP emergency encounters was observed for the American population (Waterman et al., 2012). In the Swedish population, the incidence increased with age with most first-time encounters found in the elderly 75 years and older (Jöud et al., 2012). A similar trend was found in our data for new cases of recurrent visits for LBP in the elderly. Finally, between 2000 and 2007, the annual incidence of the whole claims-based recurrent LBP adult cohort showed a decrease of 26 % greater than the 9 % drop in prevalence found 124 for the same period (Beaudet et al., 2013). Further research should allow identifying factors that could have contributed to this annual decrease in prevalence and incidence in Quebec. Limitations This study used the medical administrative data from the whole population of adult patients across all social strata in Quebec for a long period ranging from 1996 to 2008. However, this study presents limitations related to the use of administrative databases. Information biases result from the use of the physicians’ claims registry since it is primarily exploited for billing purposes rather than research (Beaudet et al., 2013). The ICD-9 codes reported can lack in precision and only one code can be claimed for every medical encounter (Lachaine et al., 2011). Patients with co-morbidities might therefore consult primarily for another condition even in the presence of LBP; therefore an underestimation of the incidence is possible. However, the fact that this study focuses on claims-based recurrent LBP patients (at least 3 episodes) instead of single acute episodes might increase the chances of selecting patients primarily consulting for a severe LBP condition. Other reasons can lead to an underestimation of the incidence. First, everyone with LBP does not seek consultations with medical practitioners; half of the elderly were reported to not seek care (Hicks et al., 2008). Second, encounters with complementary and alternative medicine health professionals are not recorded in the RAMQ database. Third, physicians working in local community health centers are paid on an hourly fee basis and are not required to report billing and diagnosis information in Quebec (Vanasse et al., 2012). There is also a selection bias related to the restriction of having access to only half of the ICD-9 codes presented in the algorithms by Cherkin or Vogt and colleagues (Cherkin et al., 1992; Vogt et al., 2005). Finally, it is important to realize that the clearance period method used here was stringent, excluding every patient having had one previous LBP episode in his medical history. Considering a clearance period of 7 years could be seen as exaggerated. However, studies report that previous acute episodes could be risk factors leading to poor prognoses as well as chronic or recurrent states (Kent & Keating, 2008; Fourney et al., 2011; Balagué et al., 2012), and that recovery of a LBP episode is often slow and incomplete (Henschke et al., 2008). A long clearance period would therefore represent a severe exclusion criterion when constructing a cohort but would increase the chances of limiting the overascertainment of first-time LBP patients. 125 CONCLUSION The observations reported here propose that studies using large medical databases should use a minimal clearance period of 4 years, but optimally 7 years, to optimize the construction of an incident cohort. The annual incidence was shown to decrease in the population overall. Elders are however showing an annual incidence increase for recurrent LBP medical encounters. 126 ACKNOWLEDGEMENTS The authors thank StatSciences Inc. for assistance in biostatistics, Myriam Beaudet for her assistance in retrieving census reports and data, and Catherine Brown for proofreading the manuscript. AUTHORS’ CONTRIBUTIONS NB participated in the design of the study, performed the analyses and drafted the manuscript. JC participated in the design and analyses. PS participated in the design. AV participated in the design. All authors read and approved the final manuscript. 127 REFERENCES Asghari, S., Courteau, J., Carpentier, A.C., Vanasse, A. (2009) Optimal strategy to identify incidence of diagnostic of diabetes using administrative data. BMC Med Res Methodol, 9, 62. Balagué, F., Mannion, A.F., Pellisé, F., Cedraschi, C. (2012) Non-specific low back pain. Lancet, 379, 482–491. 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Par exemple, en 2007, la valeur minimale des couts d’interventions prodigués à un patient pendant sa première année de consultation récurrente pour de douleur lombaire se situait à 20,50 $ alors que la dépense la plus élevée atteignait 7 820,00 $. Pour cette raison, les données seront présentées selon le cout médian et l’écart interquartile (c.-à-d. q1 et q3, correspondant à 25 % et 75 % de la cohorte, soit les 50 % des patients se situant autour de la valeur médiane) plutôt qu’en fonction de la moyenne et d’un écart-type (l’écart-type dans ce cas-ci est plus important que la moyenne, par exemple pour nos données de 2007, la moyenne des couts chez les femmes est de 300 $ ± 319 $). 130 Figure 12. Distribution des couts de services médicaux de patients incidents pour une récurrence de consultations pour de la douleur lombaire Parmi nos cohortes incidentes, le nombre absolu de patients a diminué de 8 % sur la période de cinq ans, le ratio homme/femme est demeuré sensiblement constant et l’âge moyen a augmenté de 2,5 années (Tableau 6). Alors qu’entre 2003 et 2007 l’incidence de consultations récurrentes pour de la douleur lombaire a diminué de 12 %, le cout médian des interventions annuelles a pour sa part augmenté de 14 %. Les couts totaux sont le reflet du cout des interventions prodiguées à l’ensemble des individus de la cohorte incidente. Les couts totaux de 2007 ont affiché une hausse de 1,4 % par rapport à 2003. Cependant, cette hausse est demeurée minime et était secondaire à une reprise à partir de 2004. 131 Tableau 6. Couts médians et totaux des patients incidents pour des consultations récurrentes de douleur lombaire, en dollars de 2007. 2003 N 20 074 Ratio H : F 1,05 Age (+/- 48,2 (17,1) ET) Cout 172 médian ($) [108 – 312] [q1, q3] Cout total 5 584 986 ET : Écart-type, q1 : premier Femmes 2004 20 212 1,01 48,8 (17,3) 2005 19 448 0,99 49,3 (17,3) 2006 19 709 1,01 49,9 (17,3) 2007 18 533 0,99 50,7 (17,5) 170 [109 – 305] 182 [115 – 317] 183 [116 – 315] 196 [122 – 354] 5 496 161 5 535 429 5 583 370 5 664 071 quintile (25 %), q3 : 3e quintile (75 %), H : Hommes, F : Puisque les jeunes hommes (18-34 ans) étaient 1,2 fois plus à risque que les jeunes femmes de consulter de manière récurrente pour de la douleur lombaire, et étant donné que les personnes très âgées avaient un risque 1,9 fois plus élevé que les jeunes de consulter, nous avons voulu déterminer les tendances de couts dans les différentes strates de la population (Tableau 7). Nos analyses ont permis de constater que les couts médians étaient continuellement plus élevés chez les hommes dans toutes les strates d’âge entre 18 et 64 ans que chez les femmes du même âge de 2003 à 2007, cependant cette tendance s’est inversée dans les groupes des 64-79 ans et 80 ans et plus. Chez les hommes très âgés, à partir de 2004, les couts médians se sont stabilisés autour d’environ 240 $/an alors que chez les femmes les couts médians ont progressés linéairement de 225 $/an en 2004 à 264 $/an en 2007. La tendance séculaire des couts totaux était à la baisse chez les hommes, avec une diminution en escalier qui atteignait 4 % entre 2003 et 2007. À l’inverse, chez les femmes la tendance était à la hausse, affichant une augmentation progressive qui atteignait 8 % de 2003 à 2007. C’est-à-dire que si la tendance s’est maintenue, les couts d’interventions générés par les hommes devraient avoir croisé les couts totaux d’interventions générés par les femmes au moment de l’écriture de cette thèse. 132 133 186 [115-328] 190 [120-369] 197 [119-365] 215 [143-391] 243 [163-427] 197 [122-364] 156 [101-269] 159 [101-294] 154 [100-263] 199 [128-379] 226 [148-372] 168 [107-300] 2003 F 147 [100-251] 165 [102-290] 156 [101-264] 198 [131-345] 225 [152-370] 168 [107-291] 2004 F 2005 F 2006 F 2 670 127 171 [108-296] 179 [110-332] 177 [113-321] 212 [143-369] 236 [161-387] 184 [116-328] 2007 H 2 978 100 2 886 870 2 888 681 2 913 242 2 857 032 2 606 886 2 609 291 2 646 748 Cout total er e *Le cout médian en $ de 2007 est rapporté suivi du 1 et 3 quartile (q1 [25 %] — q3 [75 %]) entre crochets. Pop. totale 80+ 65-79 50-64 35-49 176 [110-308] 190 [117-354] 179 [113-321] 203 [135-348] 246 [151-397] 186 [118-337] 2006 H 165 [103-276] 169 [106-280] 166 [109-277] 211 [141-365] 253 [165-427] 180 [116-305] 163 [105-294] 176 [112-333] 167 [105-306] 186 [123-324] 237 [159-361] 174 [111-319] 167 [108-307] 177 [110-342] 167 [104-297] 194 [123-353] 212 [136-358] 174 [110-324] 2005 H 159 [102-274] 171 [105-291] 162 [104-272] 206 [137-353] 239 [158-388] 176 [113-303] Age\Sexe 18-34 2004 H 2003 H Tableau 7. Couts totaux et médians des services médicaux ajustés en dollars de 2007, par âge et sexe 2 807 040 167 [106-292] 185 [117-329] 180 [116-313] 228 [142-401] 264 [173-437] 194 [123-344] 2007 F 5.2 Couts totaux et volume d’actes lors de l’année index et des années de suivi Nous avons ensuite déterminé le profil d’utilisation des services médicaux des patients incidents en prenant l’année de référence 2003 étant donné que nous avions pour cette cohorte cinq années de suivi. Nos résultats démontrent qu’en terme de couts totaux la première année génère au-delà de 2,2 fois plus de couts que l’ensemble des quatre années de suivi combinées autant chez les hommes que les femmes (Figure 13). Figure 13. Couts totaux d’actes selon l’année de suivi des patients incidents en 2003 En matière de couts totaux, les hommes généraient plus de couts en 2003 lors de leur année index que les femmes. La différence tend cependant vers l’équilibre autour de la 5e année de suivi. En fonction de cette observation, nous avons voulu vérifier si cette chute abrupte des couts entre l’année index (an 1) et la première année de suivi (an 2) était constante dans toutes nos cohortes incidentes. En nous basant sur les cohortes pour lesquelles nous bénéficions de deux années de données longitudinales (2003 à 2006), nous avons établi un portrait de consommation (Tableau 8). Nous avons pu constater que la chute de couts d’interventions observée en 2003 entre l’année index (an 1) et la première année de suivi (an 2) était constante dans les différentes cohortes. 134 135 Couts totaux ($) 2 978 100 2 606 886 F 94 208 F H 103 307 9 772 F H 10 302 H Nombre de patients Volume d’actes 2003 Cohorte 2 609 291 2 886 870 90 648 99 225 9 973 10 239 2004 Année index 264 6748 288 8681 90 782 95 718 9 799 9 649 2005 2 670 127 2 913 242 93 590 97 648 9 795 9 914 2006 2 807 040 2 857 032 94 569 93 906 9369 9164 2007 495 590 582 537 14 252 16 359 2914 3052 2003 520 099 601 847 14 293 16 852 3053 3004 2004 Année de suivi 502 404 580 240 14 223 16 389 2943 2899 2005 503 202 581 520 14 345 16 130 2 890 2 949 2006 Tableau 8. Comparaison des couts totaux et du volume d’actes entre l’année index et l’année de suivi de 2003 à 2007 N/D N/D N/D N/D N/D N/D 2007 Dans tous les cas, la première année de consultations récurrentes pour de la douleur lombaire coutait en moyenne cinq fois plus que l’année de suivi autant pour les hommes que les femmes. Le nombre de patients qui consultaient lors de l’année de suivi pour un problème de douleur lombaire correspondait à environ 30 % de la cohorte incidente initiale, et ce pour toutes les cohortes de 2003 à 2006. La moyenne d’actes ne différait pas entre les sexes ni entre les cohortes pour chacune des années index (10 actes/patient) et de suivi (5 actes/patient). La différence de couts entre hommes et femmes vient donc majoritairement du fait que les hommes nécessitent des soins plus couteux que les femmes, une tendance qui est perceptible en observant les médianes et 1er et 3e interquartiles des différents groupes d’âge de 18 à 64 ans (Tableau 7). Cette tendance s’inverse néanmoins pour les groupes de 65 ans et plus, mais puisque ces groupes d’âge ne représentent que 20 % de chacune des cohortes de patients, la résultante est que les hommes génèraient davantage de couts entre 2003 et 2007. 136 6. DISCUSSION GÉNÉRALE 6.1 Synthèse des précédentes sections Cette étude représente un des volets d’un programme de recherche qui visait à produire un atlas québécois de la douleur chronique. L’échantillon de départ correspondait à 1 656 420 patients ayant consulté de manière récurrente un médecin affilié à la RAMQ ou ayant été hospitalisé pour un diagnostic de migraine ou de fibromyalgie ou de douleur au dos ou de douleur articulaire entre 1999 et 2008. La cohorte secondaire de 401 264 patients présentant de la douleur lombaire récurrente a été extraite de cette cohorte principale afin de dresser un portrait de l’ampleur de cette condition de santé dans la province du Québec. Figure 14. Rappel de l’hypothèse et des objectifs Objectif principal : Établir le portrait épidémiologique de la douleur lombaire récurrente dans la population québécoise de 2000 à 2007 tout en améliorant l’approche méthodologique basée sur l’analyse secondaire de banques de données administratives. Objectif secondaire : Évaluer la tendance séculaire des couts directs de la douleur lombaire récurrente sur notre système de santé, plus particulièrement en ce qui a trait aux services médicaux prodigués. Hypothèse : La prévalence et l’incidence de la douleur lombaire récurrente augmentent dans la population entre 2000 et 2007 au Québec, se reflétant par une hausse des dépenses de santé. La réalisation de l’objectif principal a permis la publication de deux manuscrits, l’un portant sur la prévalence annuelle de la douleur lombaire récurrente, l’autre portant sur l’optimisation de la construction d’une cohorte incidente et sur l’incidence annuelle de la douleur lombaire récurrente de 2000 à 2007. L’objectif secondaire a permis de préparer des analyses sur la composante des couts directs de santé imputés au système de santé par les patients récurrents incidents entre 2003 et 2007. La figure 15 résume les principaux résultats issus des analyses produites. 137 Figure 15. Résumé des principaux résultats PRÉVALENCE • La prévalence annuelle de la douleur lombaire récurrente, basée sur la fréquence de consultations médicales, a diminué de 9 % dans la population québécoise de 2000 à 2007; • Le pic de prévalence chez les hommes et les femmes se situait entre 40 et 55 ans; • Les femmes très âgées étaient plus à risque que les hommes de consulter de manière récurrente pour de la douleur lombaire; • Plus de 65 % des diagnostics de douleur lombaire étaient non-spécifiques. INCIDENCE • Dans les bases de données médicoadministratives, la construction d’une cohorte incidente peut être optimisée en procédant à une révision systématique de l’historique de chaque patient et en sélectionnant des patients exempts de douleur lombaire pour une période de sept ans ; • L’incidence annuelle de la douleur lombaire récurrente, basée sur la fréquence de nouveaux épisodes de consultations médicales, a diminué de 26 % dans la population québécoise de 2000 à 2008; • Les personnes très âgées ont eu 52 % plus de nouvelles consultations récurrentes pour de la douleur lombaire que les jeunes adultes de 18 à 34 ans. COUTS DIRECTS • Les couts totaux d’intervention ont augmentés de 1,4 % entre 2003 et 2007, soit une baisse de 4 % chez les hommes contrée par une hausse de 8 % chez les femmes. • Le cout médian des interventions a augmenté de 14 % entre 2003 et 2007, dont une hausse notable chez les femmes très âgées. • Au total, les hommes ont engendré plus de couts que les femmes surtout lors de leurs deux premières années de traitement. • L’année index de douleur lombaire engendrait 5 fois plus de couts que l’année de suivi, autant chez les hommes que les femmes. 138 À la vue de la synthèse de ces résultats, un premier constat a été de rejeter la première partie de notre hypothèse de départ basée sur une hausse de la prévalence et de l’incidence de la douleur lombaire récurrente au Québec entre 2000 et 2007. À la lecture des nombreuses études de prévalence de douleur lombaire aigüe dans la littérature, ce constat était inattendu. Il était même à l’encontre de données séculaires rapportées pour la prévalence de douleur lombaire chronique (Freburger et al., 2009). Pour ce qui est de l’incidence, bien qu’aucune étude ne présentait de données séculaires, nous basions notre hypothèse sur l’observation d’une augmentation des cas de consultation pour des problèmes de santé affectant le rachis de 1998 à 2005 (Martin et al., 2008), et sur le maintien des taux annuels de consultation médicale pour de la douleur lombaire aux États-Unis de 1996 à 2002 (2,3 % des visites hebdomadaires) (Deyo et al., 2006). Malgré la baisse de 26 % du taux d’incidence entre 2000 et 2007 au Québec, force a été de constater que les budgets de santé n’ont obtenu aucun sursis du côté de la douleur lombaire récurrente, affichant une légère hausse des dépenses de services médicaux, particulièrement dans la population féminine. Tous ces résultats ont soulevé quelques questions qui seront abordées dans les prochaines pages en étoffant davantage certains éléments de discussions soulevés dans les deux articles publiés. 139 6.2 La morbidité de la douleur lombaire récurrente en déclin? Il y a peu d’études qui présentent des données de prévalence annuelle sur plusieurs années successives, surtout en ce qui a trait à la douleur lombaire récurrente ou chronique. Tel que décrit dans l’introduction, la morbidité annuelle est considérée élevée, mais n’aurait pas fluctuée de manière significative ces 30 dernières années (Walker, 2000; Deyo et al., 2006; Freburger et al., 2009). Cependant, tous s’entendent pour dire qu’il est périlleux de tenter de comparer les études de prévalence de douleur lombaire en raison de la grande hétérogénéité des définitions utilisées et des différences entre devis ou cohortes (Walker, 2000; Hestbaek et al., 2003; Louw et al., 2007; Hoy et al., 2012). À la lecture des études d’incidence de douleur lombaire dans la population (voir Tableau 3), le même genre de conclusion peut être formulée. Nos résultats de prévalence annuelle de douleur lombaire récurrente sont malheureusement peu comparables car aucune autre étude n’a présenté de données séculaires de récurrence. De plus, nos résultats indiquent une baisse dans le temps. En termes de douleur chronique, les données disponibles dans les enquêtes canadiennes (ENSP et ESCC), la prévalence était élevée (15 % à 19 %), et stable dans le temps (voir Figure 16) (Reitsma et al., 2011). Dans une étude portant sur l’enquête de 1996-1997, il est décrit que 36 % des individus rapportant de la douleur chronique présentaient également des problèmes de dos, soit l’un des deux corrélats indépendants les plus forts avec l’arthrite, dans la catégorie de douleur chronique (Rashiq & Dick, 2009).C’est également la condition la plus fréquemment rapportée selon une étude sur les données de 2008 (Schopflocher et al., 2011). Nous pourrions donc avancer l’hypothèse que la douleur lombaire chronique au niveau canadien est demeurée à un niveau stable de 1994 à 2008. Cela va à l’encontre de nos résultats qui démontrent une baisse de prévalence de 2000 à 2008. Cependant, il s’agit de données autorapportées dans les enquêtes, la prévalence est donc en général plus élevée que celle retrouvée lors de l’analyse secondaire de données médicoadministratives (Picavet et al., 2008). Également, dans ces enquêtes, les individus rapportent avoir mal au dos, mais cela n’indique pas qu’ils aient consulté un médecin pour autant, contrairement aux données de la RAMQ pour lesquelles seuls les patients qui consultent sont consignés. 140 Figure 16. Prévalence brute de la douleur chronique dans la population Canadienne Légende : Prévalence de la douleur chronique dans un échantillon représentatif de la population canadienne selon les résultats des enquêtes nationales de santé des populations de 1994 à 2008. Il n’y a pas de tendance séculaire à la hausse ou à la baisse autant chez les hommes que les femmes. Tiré de Reitsma et al., 2011 avec permission. En termes plus spécifiques de douleur lombaire chronique, Freburger et collaborateurs ont rapporté des données de prévalence pour les années 1992 et 2006 (Freburger et al., 2009). Ils ont mis l’accent sur une hausse importante de la prévalence (+ 6 %) pendant ces 14 années, toutefois cette conclusion était basée sur une étude transversale plutôt que longitudinale sur la population d’un état américain. En ayant seulement deux relevés annuels sur une période de 14 ans (le début (1990) et la fin (2006)), il est très risqué d’émettre des conclusions tranchées sur les tendances survenues dans l’intervalle. Rien n’indique qu’il s’agisse d’une hausse progressive et constante, non plus qu’il s’agisse d’un pic record et unique de prévalence en 2006 dans cette région. Cette étude était basée sur des données de sondage recueillies dans des foyers sélectionnés, et tel que décrit précédemment, les données autorapportées mènent à une prévalence plus élevée que lors de l’utilisation de données administratives (Picavet et al., 2008). Nonobstant, si une hausse de plaintes de douleur lombaire chronique est observée dans la population, nous pourrions nous attendre à une hausse concomitante de consultations médicales récurrentes pour cette condition de santé. 141 À cet égard, Deyo et collaborateurs ont étudié la tendance des consultations médicales pour les problèmes de dos entre 1996 et 2002 aux États-Unis à partir de sondages nationaux recueillis par des organismes de surveillance (Deyo et al., 2006). Durant ces sept années, le taux de consultation pour douleur au dos est demeuré constant, soit à environ 2,3 % de toutes les consultations médicales. Cependant, les auteurs n’ont pas voulu tirer de conclusion sur la tendance séculaire de la prévalence de douleur lombaire étant donné la trop grande variabilité dans les définitions utilisées dans les différents sondages examinés. C’est la raison pour laquelle ils utilisent de façon générale le terme « douleur au dos » plutôt que « douleur lombaire ». Les définitions faisait également plus référence à de la douleur aigüe que récurrente ou chronique. Le système de santé américain est cependant bien différent de notre système de santé universel, et les conclusions tirées à partir des profils de consultations médicales peuvent être délicates à comparer. Mais à la lumière de la conclusion de Freburger d’une augmentation de douleur lombaire chronique dans la population de Caroline du Nord (Freburger et al., 2009) et de la conclusion de Deyo d’une stabilité nationale dans le profil de consultation médicale pour de la douleur au dos (Deyo et al., 2006), aucune n’abondait dans le sens de nos conclusions qui démontrent une baisse de prévalence. Si le nombre de consultations médicales était stable aux Etats-Unis, que la douleur chronique, dont la manifestation la plus fréquente était la douleur au dos, était stable (Canada) ou en hausse (Etats-Unis), pourquoi observons nous une baisse de prévalence de douleur lombaire récurrente dans notre étude? Martin et Deyo ont poussé l’analyse plus loin dans une étude subséquente sur l’utilisation des ressources médicales pour des problèmes du rachis (Martin et al., 2009). Cette étude était basée sur les enquêtes du Medical Expenditure Panel Survey (MEPS) qui relevait le profil de consommation des services de la santé (consultations médicales et certaines consultations en médecine complémentaire et alternative [MAC]) d’un échantillon national de foyers américains, informations complémentées par les dossiers des pourvoyeurs de soins et des assureurs. Il s’agissait d’un profil global de santé spinale sans égard à la gravité, qui rapportait une hausse de prévalence de 10,8 % à 13,5 % de 1997 à 2006. Cette hausse était particulièrement marquée par une augmentation annuelle de 4,7 % des visites ambulatoires (en moyenne sept visites annuelles incluant le chiropraticien et le 142 physiothérapeute), mais une baisse totale de 3,7 % du nombre d’hospitalisations (Martin et al., 2009). Encore une fois, nos résultats ont divergé grandement de cette conclusion. Par contre, dans cette même étude de Martin (Martin et al., 2009), les visites ambulatoires (médicales et MAC) pour douleur spinale étaient en hausse alors que dans l’étude de Deyo (Deyo et al., 2006) le nombre de visites médicales était stable. La différence pourrait venir du fait que Martin et collaborateurs ont évalué les visites chez les physiothérapeutes et chiropraticiens en plus des visites médicales contrairement à Deyo. Il y aurait donc une potentielle augmentation de la fréquence de consultation dans le temps, entre autres en soins chiropratiques selon Martin. Cette observation pourrait sous-tendre la baisse de consultations médicales observée dans nos données. Ce constat est émis en lien avec la difficulté d’accessibilité à un médecin de famille au Canada qui a été relevée en 2003. Quatorze pour cent de la population n’avaient pas de médecin de famille, dont le tiers révélait que leurs recherches pour en trouver un avaient été infructueuses (Gagnon, 2004). Le Québec affichait les pires statistiques canadiennes en 2005 avec 25 % de sa population n’ayant pas de médecin de famille (Gladu, 2007). La banque de données administratives de la RAMQ ne consigne pas les données de consultation en physiothérapie et en chiropratique, il s’est donc avéré impossible de vérifier cette hypothèse. Cependant, la consultation en MAC représente la meilleure hypothèse pour expliquer la baisse de prévalence séculaire observée dans nos données médicoadministratives. Au niveau de l’incidence de la douleur lombaire à l’échelle de la population, les études qui ont évalué la tendance séculaire sont encore plus rares que celles de prévalence. Mattila et collaborateurs ont évalué annuellement les nouveaux cas d’hospitalisation dans la population finlandaise militaire des 20-30 ans entre 1990 et 2002 (Mattila et al., 2009). La population militaire mâle représentait 80 % de la population générale du même âge en Finlande étant donné le service militaire obligatoire durant ces années. Le taux d’incidence des hospitalisations pour un problème de disque lombaire (CIM-9 = 722.7, 353.9 et équivalents CIM-10) avait diminué d’environ 30 % de 1993 à 2002. Le taux d’incidence d’hospitalisations pour douleur lombaire non spécifique (CIM-9 = 724.2, 724.5, 724.9 et équivalents CIM-10) était quant à lui resté relativement stable sur la période de 13 ans. 143 Mattilla et collaborateurs rapportaient cependant que les hospitalisations étaient plus fréquentes que dans la population, car si le soldat ne peut être soulagé par des antiinflammatoires, il était automatiquement hospitalisé. Leur étude représentait également les cas les plus graves étant donné qu’ils menaient à une hospitalisation. Donc, si nous avançons l’hypothèse que les cas récurrents de la tranche d’âge 18-34 ans dans nos analyses étaient de gravité identique à ceux de l’étude de Mattila, nous avons observé comme eux une diminution de l’incidence (voir Tableau 3). Cependant, cette diminution était davantage élevée (c.-à-d. 57 %) pour les années 2000 à 2007 dans nos analyses, dans lesquelles la représentativité des femmes était équivalente à celle des hommes et pour des catégories diagnostiques inclusives à la fois des maux non spécifiques, mais également des hernies et des sténoses. Note importante, notre étude s’intéressait principalement au taux d’incidence des visites ambulatoires, dont seulement 15 % des patients étaient hospitalisés au final. La comparaison des données des deux études demeure délicate étant donné qu’il s’agit de données majoritairement ambulatoires versus entièrement hospitalières. Une autre étude d’incidence, cette fois-ci sur les consultations pour douleur lombaire dans les départements d’urgence d’hôpitaux américains, a quant à elle rapporté de 2004 à 2008 un taux d’incidence de 139 par 100 000 personne-années avec un pic chez les 20-39 ans (Waterman et al., 2012). Cependant vu l’approche méthodologique utilisée pour rapporter l’incidence en personne-années sur une période cumulée de cinq ans, il n’est pas possible d’évaluer la tendance séculaire annuelle dans cette étude. En bref, Reitsma et collaborateurs ont fourni le portrait populationnel de la prévalence de la douleur chronique au Canada de 1994 à 2008, alors que Martin et collaborateurs ont effectué une analyse un peu plus spécifique sur la prévalence de la santé spinale aux États-Unis de 1997 à 2006 (Martin et al., 2009; Reitsma et al., 2011). Mattila et collaborateurs ont présenté la tendance séculaire de l’incidence d’hospitalisations pour de la douleur lombaire dans une population de jeunes adultes en Finlande (Mattila et al., 2009). Nos études ont été davantage spécifiques en portant seulement sur la morbidité de la douleur lombaire récurrente de 2000 à 2007, ce qu’aucune autre n’a rapporté pour une série d’années successives à notre connaissance. La tendance à la baisse que nous avons observée autant pour la prévalence que l’incidence ne peut malheureusement pas être 144 expliquée en s’appuyant sur les conclusions d’autres études de prévalence ou d’incidence de douleur lombaire autant aigüe, récurrente que chronique. Comme soulevé dans les discussions des articles présentés à la section 4, il pourrait s’agir d’un problème d’accessibilité au système de santé, un déplacement de clientèle vers les médecines alternatives et complémentaires (Kanodia et al., 2010; Shmueli et al., 2011), un changement dans les normes de sécurité au travail ou une diminution des emplois dans le secteur manufacturier ou ouvrier au Québec par exemple (Chen et al., 2006). Au niveau de l’incidence, bien que nous ayons observé un déclin global toutes catégories d’âge confondues, l’analyse stratifiée nous a indiqué que la diminution s’observait principalement chez les 18-49 ans, alors que la tendance était plutôt stable chez les adultes de 50-79 ans et en nette progression chez les personnes très âgées depuis 2005. Au final, de 2000 à 2007, les médecins auront vu moins de cas récurrents de douleur lombaire, particulièrement chez les moins de 65 ans, mais auront vu une augmentation de la clientèle âgée. Si le nombre de cas récurrents diminue chez les moins de 65 ans, il faudrait savoir où consultent ces patients si les enquêtes nous révèlent que le niveau de douleur chronique demeure stable au Canada. Ces observations devraient stimuler une réflexion à savoir si les médecins ne devraient pas être mieux formés pour l’évaluation et la gestion de la douleur, tout particulièrement chez les personnes âgées. 145 6.3 Est-ce que vieillir rime avec une fréquence accrue de douleur lombaire? Selon une analyse d’utilisation de ressources médicales produite à partir de données de l’enquête nationale de santé des populations de 1998-99, les problèmes de dos chez les moins de 60 ans seraient la plus importante cause de consultation parmi les maladies chroniques au Canada (Rapoport et al., 2004). Dans une étude comparant les données de registre aux données de sondage aux Pays-Bas, le pic de consultation d’omnipraticiens par les individus aux prises avec de la douleur lombaire avait lieu principalement dans la fourchette des 45-54 ans en 1998-2001 (Picavet et al., 2008). Une revue systématique sur 51 articles abordant le sujet de l’âge et de la douleur au dos (douleur au cou inclus), rapporte une association curvilinéaire entre âge et prévalence de douleur au dos mixte et bénigne dont le plafond se situait autour de 50 à 60 ans (Dionne et al., 2006). Une association quadratique basée sur une analyse de régression de 966 estimations de prévalence en fonction de l’âge a également démontré une prévalence accrue à un âge moyen de 40-69 ans puis un déclin vers les groupes d’âges supérieurs (Hoy et al., 2012). Cependant, Dionne et collaborateurs ont soulevé le point que lorsque la gravité de la douleur au dos est prise en considération dans les analyses, la prévalence des cas graves augmenterait linéairement avec l’âge (Dionne et al., 2006). En effet, si nous considérons les cas de douleur chronique dans la population canadienne de 1994 à 2008 (voir Figure 17), nous pouvons en effet constater une augmentation de la prévalence à partir du groupe des 25-44 ans (environ 12 %) vers les 65 ans et plus (24 à 31 %) (Reitsma et al., 2011). La douleur lombaire n’augmenterait donc pas nécessairement en fréquence avec l’âge au-delà de la retraite, mais plutôt en gravité. En comparaison, nos résultats basés sur la prévalence des cas récurrents de douleur lombaire ont démontré en effet un pic chez les adultes de 40 à 60 ans. Ce pic était suivi par un creux chez les 60 à 70 ans, tel que rapporté dans les études précédemment décrites, cependant immédiatement suivi par une recrudescence de consultations récurrentes au-delà de 75 ans. Le fait de sélectionner des patients ayant un minimum de trois consultations par année pour un problème de douleur lombaire pourrait-il justifier en partie que notre cohorte ait été composée de patients dont la gravité des épisodes était plus importante que des patients qui ne se présenteraient qu’une seule fois par année chez leur médecin pour de la 146 douleur lombaire aigüe? Parmi les études qui analysent les données au-delà de 65 ans, peu ont rapporté une augmentation de consultation dans les groupes plus âgés. Figure 17. Prévalence de la douleur chronique dans la population Canadienne, par âge Légende : Prévalence de la douleur chronique dans un échantillon représentatif de la population canadienne selon les résultats des enquêtes nationales de santé des populations de 1994 à 2008 et ce en fonction des tranches d’âge. Il n’y a pas de tendance séculaire à la hausse ou à la baisse autant chez les jeunes adultes que les personnes âgées. Tiré de Reitsma et al., 2011 avec permission. L’analyse d’une banque de données médicale et administrative de l’état du Colorado a bien démontré le pic de consultations pour les 45-54 ans, même parmi ceux qui consultaient plus de trois fois par an, cependant suivi d’une baisse progressive de 65 à 85 ans et plus (Ritzwoller et al., 2006). Par contre, lorsque les données ont été ajustées selon un algorithme de chronicité basé sur l’utilisation de médicaments, le groupe des 75 ans et plus présentait au-delà de quatre fois plus de chances d’être hospitalisé pour un problème de douleur lombaire. Il faut néanmoins concevoir qu’il s’agissait d’une analyse dans une banque qui ne couvrait que 15 % de la population et que les analyses n’étaient pas ajustées en fonction de la représentativité de chaque groupe d’âge par rapport à la population générale de l’état du Colorado. La prévalence de consultation de la classe très âgée serait peut-être donc sous-estimée dans cette étude et devrait être idéalement pondérée par rapport à la population générale du même âge. Ainsi, bien que la proportion de patients très âgés 147 qui consultaient en ambulatoire ait diminuée, leurs taux d’hospitalisation ont augmentés, ce qui pourrait être relié à la gravité des épisodes. Plusieurs raisons font que la population très âgée est peu étudiée pour la douleur lombaire. En effet, dans les études portant sur la population vieillissante, la représentativité des groupes de personnes âgées, particulièrement les groupes très âgés (> 75 ans), est en général faible compte tenu, entre autres, de leur survie, du taux d’institutionnalisation et parce que la douleur lombaire est souvent considérée comme une maladie de deuxième ordre, après les maladies létales (Bressler et al., 1999). Les déclins cognitifs, tels que les troubles de compréhension ou de mémoire, peuvent mener aussi à des biais de rappel chez la population âgée. Ces derniers peuvent aussi apprendre à mieux vivre avec leur douleur, présenter un seuil de tolérance plus élevé, perdre en sensibilité, tous des phénomènes qui pourraient mener à une baisse du taux de prévalence, ou d’incidence, dans cette fourchette d’âge (Rapoport et al., 2004; Dionne et al., 2006). Il est aussi important de considérer l’attitude de l’individu âgé; un état dépressif peut introduire un biais d’information pouvant altérer la prévalence. Il existe également, dans cette population, la probabilité qu’une tierce personne (proxy) puisse répondre à la place du patient, ajoutant au biais d’information et à la sous-estimation de la prévalence (Hoy et al., 2012). Les personnes âgées composent une sous-population qui présente énormément de variabilité autant du point de vue du milieu de vie que de la santé globale (Bressler et al., 1999). D’ailleurs, en raison du biais de rappel élevé, il devient délicat d’utiliser les questionnaires pour tenter de déterminer l’incidence ou la prévalence, puisqu’il y a peu de chance que les individus se souviennent d’épisodes antérieurs. Weiner et collaborateurs ont critiqué l’utilisation de données rapportées par le patient âgé, préconisant plutôt l’approche observationnelle pour confirmer le niveau de cognition et l’état de santé global (Weiner et al., 1996). Que ce soit chez l’individu en âge de travailler ou chez les personnes âgées, la mémoire est une faculté qui oublie. Il est donc important de bien comprendre l’étendue de la période que vise l’enquête afin de se questionner sur la validité des données de prévalence avec 6 mois ou 12 mois de recul par exemple. 148 Les revues systématiques démontrent que la prévalence annuelle et à vie sont plus élevées que la prévalence ponctuelle. Doit-on en déduire que les estimations de période sont moins précises, particulièrement dans cette tranche d’âge? Malgré les nombreuses limites des analyses secondaires de données administratives, dans un système universel d’assurance maladie, le biais de rappel ou de télescopage (voir section 6.8) peut être davantage contrôlé avec ce genre de devis que par l’utilisation d’enquêtes, particulièrement dans les populations âgées. Par contre, les données administratives peuvent difficilement aider à déterminer la gravité d’une condition autre que par la récurrence d’épisodes ou selon une analyse croisée des médicaments prescrits. Les résultats préliminaires de Lacasse et collaborateurs démontrent malheureusement une faible validité des données pharmaceutiques de la RAMQ en ce qui a trait à la douleur chronique (Lacasse et al., 2012). Partant de la prémisse que la population âgée présente un profil de consommation pharmaceutique élevé pour traiter la douleur et d’autres comorbidités (van den Bussche et al., 2011; Abdulla et al., 2013), le croisement des données du fichier des services médicaux et des données pharmaceutiques pourrait se révéler peu efficace dans le but d’accroitre la validité des données et d’obtenir un indice de gravité de douleur lombaire. Il est donc important de stratifier les résultats en fonction de l’âge et du sexe pour permettre au lecteur ou au décideur de se faire une opinion éclairée de la prévalence. Malgré l’absence d’un indice de gravité, nos résultats démontraient bien qu’au niveau de notre système de santé, une attention toute particulière devrait être portée sur les populations âgées, car alors qu’il y avait une baisse de prévalence dans la population en âge de travailler de 2000 à 2007, les personnes âgées elles consultaient davantage de manière récurrente dans la même période. Nos résultats mettent l’emphase sur ce phénomène qui est peu rapporté dans les autres études de morbidité de douleur lombaire. Ces résultats abonderaient dans le même sens qu’une étude alarmante de Smith et collaborateurs sur des données séculaires du MEPS de 2000 à 2007 sur les populations de personnes très âgées (avant 1935), pré-boomers (1935444) et boomers (1945-64) aux prises avec des douleurs au dos (Smith et al., 2013). Plus de 25 % des individus de ces populations ayant rapporté des problèmes de dos en 2000 seraient considérés des cas chroniques à l’âge de la retraite et afficheraient une augmentation de 15 % jusqu’en 2008. Les auteurs mettaient l’accent sur la croissance de la 149 population vieillissante qui s’accélèrerait, tout comme nous l’avons rapporté dans notre étude. En terme d’incidence entre 2000 et 2007, les jeunes adultes (18-34 ans) présentent le moins de nouveaux cas de douleur lombaire récurrente annuellement, les adultes de 35 à 79 ans affichent des taux relativement semblables, alors que les plus âgés de notre société affichent 52 % plus de nouvelles consultations que les jeunes adultes. À l’inverse, Waterman et collaborateurs rapportent un pic du taux d’incidence de consultations de douleur lombaire dans les urgences américaines chez les 25-34 ans. Le taux d’incidence diminue ensuite graduellement jusqu’à 74 ans et en légère hausse dans les classes d’âge supérieures. Leur profil de taux d’incidence par classe d’âge est plus ressemblant à notre profil biphasique de prévalence pour des consultations récurrentes de douleur lombaire. L’approche méthodologique de Waterman cependant ne tient pas compte de l’historique de douleur lombaire des patients se présentant aux urgences et considère tous les individus qui se présentent à l’urgence comme ayant un nouvel épisode. Cette façon de faire est en ligne avec la théorie de McBeth et Jones qui supposait que nombre d’études publient des données dites d’incidence, mais qui, en réalité, sont plutôt des études rapportant de nouveaux épisodes prévalents (McBeth & Jones, 2007). Cela expliquerait que leur profil d’incidence ressemble beaucoup plus à nos profils de prévalence. Par contre, Joud et collaborateurs ont utilisé une approche méthodologique similaire à notre approche de clairance pour produire une cohorte incidente plus spécifique pour la population de 2009 d’un comté de Suède (Jöud et al., 2012). Leurs résultats sont comparables dans la mesure où ils ont utilisé une analyse secondaire de données administratives avec clairance, cependant ils ont relevé l’incidence des consultations pour des cas de douleur lombaire aigüe, alors que nous nous sommes intéressés aux cas récurrents (Jöud et al., 2012). Nos observations d’incidence en fonction de l’âge abondaient exactement dans le même sens que les leurs, affichant un taux d’incidence de première consultation pour de la douleur lombaire au plus bas chez les 20-34 ans, en hausse, mais stable chez les 25-74 ans, puis une augmentation manifeste chez les 75 ans et plus. Leurs conclusions rejoignaient celles de Dionne (Dionne et al., 2006) quant au degré de gravité 150 de la douleur lombaire dans la population vieillissante, ce qui pourrait être relié à une surreprésentation de cas de fractures ostéoporotiques, d’arthrose ou de sténoses spinales (Jöud et al., 2012). Une étude canadienne d’incidence de la douleur lombaire basée sur des données autorapportées de 1994-95 a également rapporté que l’incidence était à son plus bas chez les 18-24 ans, puis plus élevée, mais stable chez les 25 à 65 ans et plus (Kopec et al., 2004). Au contraire, en Finlande, il a été déterminé que parmi une cohorte de naissance, il y avait un pic d’hospitalisation pour un premier épisode d’hernie discale de 19 à 22 ans. Cependant, cette hausse était marquée par une importante augmentation d’admissions dans des hôpitaux militaires, concordant avec le service militaire obligatoire dans ce pays (Zitting et al., 1998). À l’inverse, plusieurs autres diagnostics voyaient plutôt une augmentation progressive en fonction de l’âge, particulièrement chez les femmes. Dans une autre cohorte de naissances portant sur 29 000 jumeaux danois, une fréquence élevée d’un tout premier épisode était plutôt rapportée à l’adolescence autour de 12-13 ans (LeboeufYde & Kyvik, 1998). La douleur lombaire serait un phénomène beaucoup plus précoce que plusieurs études le laissent entendre, ainsi plusieurs équipes s’intéressent désormais au phénomène (Jeffries et al., 2007). Plus de 50 % des jeunes femmes et hommes de 18 à 20 ans auraient donc déjà vécu un épisode de douleur lombaire (Leboeuf-Yde & Kyvik, 1998). Cependant, le service militaire est encore obligatoire au Danemark, ce qui pourrait expliquer une présence élevée de nouveaux épisodes chez les jeunes hommes à cet âge dans cette cohorte de naissance scandinave. Il faut néanmoins garder à l’esprit que dans le cadre de notre étude, nous nous intéressions aux nouveaux épisodes récurrents, et que l’occurrence élevée d’une consultation pour douleur lombaire aigüe à l’intérieur d’une année en jeune âge pourrait être précurseur d’un épisode de consultations récurrentes à un âge plus tardif. 151 6.4 La douleur lombaire récurrente, un phénomène masculin ou féminin? Plusieurs études rapportent que dans la population en âge de travailler, les hommes seraient plus à risque d’être importunés par de la douleur lombaire (Punnett et al., 2005). Nos résultats sous-tendaient le même résultat pour les épisodes récurrents chez les hommes de 18 à 64 ans. Cependant, nos données démontrent que les femmes âgées de 65 à 80 ans étaient plus à risque que les hommes de développer des épisodes récurrents. Tel que discuté dans la section précédente sur les données d’incidence de Waterman et collaborateurs sur les consultations pour douleur lombaire en urgence, qui s’assimilent davantage à des données de prévalence, notons que les hommes de 20 à 49 ans étaient plus à risque de développer des douleurs lombaires et les femmes de 65 à 94 ans présentaient significativement plus de chances de développer de la douleur lombaire récurrente que les hommes (Waterman et al., 2012). En ce sens, selon des données canadiennes autorapportées, en terme de prévalence, les femmes présentaient plus de douleur chronique que les hommes entre 1996 et 2008 (Reitsma et al., 2012). Le risque de vivre de manière prolongée avec cette condition, en comparaison des hommes, serait particulièrement élevé chez les femmes plus âgées, d’un niveau d’éducation plus faible, veuves ou divorcées (Reitsma et al., 2012). Toujours selon les données d’enquête canadienne de 2007-2008, à partir de 56 ans, les femmes présentaient plus de douleur chronique que les hommes (Schopflocher et al., 2011). Dans un sondage téléphonique de prévalence et d’impact de la douleur chronique, dont la douleur au dos était le site anatomique le plus fréquent (35 %), les femmes avaient également une plus grande propension que les hommes à consommer des analgésiques sous ordonnance (Moulin et al., 2002). Dans une étude portant sur la population allemande de 1997 à 1999, il a été relevé que les femmes avaient 25 % de fois plus de chances de développer de la douleur au dos, indépendamment du fait que les femmes vivaient plus longtemps ou qu’elles vivaient avec un nombre plus élevé de comorbidités (Schneider et al., 2006). Leur modèle de régression en fonction de l’âge et du sexe a permis de déterminer que les femmes de 50 à 64 ans étaient plus à risque (64 ans étant la limite supérieure d’âge), et que la somatisation face à la douleur était le seul corrélat dans leurs analyses qui pourrait expliquer une différence significative entre femmes et hommes. Les auteurs n’étaient malheureusement pas capables de différencier entre 152 douleur aigüe ou chronique et en raison de leur devis transversal sur des données de prévalence, ils mettaient en garde contre leurs conclusions ne devant pas être interprétées comme étant causales (Schneider et al., 2006). L’analyse d’une cohorte prospective de 35 000 jumeaux et jumelles danois a permis de démontrer que la prévalence de douleur lombaire tendait en général à être plus élevée chez les femmes de 20 à 78 ans, cependant les intervalles de confiance se superposaient en tout temps à ceux des hommes (Leboeuf-Yde et al., 2009). Par contre, lorsque la douleur au rachis en entier était considérée, les femmes avaient plus de chances d’afficher une prévalence et un nombre de jours en douleur plus élevés que les hommes, constat semblable pour la douleur dite radiante. Les auteurs n’avaient pas de nouvelle explication pour élaborer sur cette différence (Leboeuf-Yde et al., 2009). Une autre cause potentielle, en dehors de la somatisation, qui est rapportée dans la littérature fait état de l’influence des hormones et des facteurs reproducteurs (Wijnhoven et al., 2006). Dans une étude portant sur plus de 11 000 femmes sondées de 1993 à 1997 dans trois villes hollandaises, des associations positives ont été relevées entre la douleur lombaire et des niveaux d’estrogène élevés, la durée de la prise de contraceptifs oraux, une grossesse en bas âge (< 20 ans) et la prise d’estrogène durant la ménopause. Une théorie avançait que des niveaux élevés d’estrogène pourraient conduire à une laxité articulaire et ligamentaire (Wijnhoven et al., 2006). Les auteurs mentionnent également que leur étude ne pouvait confirmer le lien de cause à effet étant donné le devis transversal utilisé dans leur étude. Enfin, un essai contrôlé randomisé visant l’implantation d’une intervention éducationnelle en soins de première ligne a permis d’évaluer la douleur lombaire chez 3400 patients allemands de deux importantes villes (Chenot et al., 2008). Les analyses ont démontré, entre autres, que les femmes avaient significativement plus de chances de développer des douleurs lombaires récurrentes ainsi que chroniques. La définition de récurrence se définissait comme des épisodes multiples de moins de 90 jours durant les 12 derniers mois. Les résultats n’ont cependant pas été stratifiés en fonction de l’âge, ne nous permettant pas de conclure si ce phénomène était relié à une sous-population de femmes en particulier. Ces études transversales pour la plupart basées sur des sondages supportaient donc que les femmes, particulièrement âgées, seraient plus à risque de développer de la douleur lombaire que les hommes du même âge. Les analyses secondaires de données administratives permettraient-elles de déterminer les facteurs de risque liés à cette 153 différence homme-femme? Par exemple, l’usage de contraceptifs sous ordonnance, l’étude du suivi et des complications liés à la grossesse, les chirurgies gynécologiques et autres causes pourraient être investigués chez les patientes aux prises avec de la douleur lombaire récurrente à l’aide des données administratives. Pour ce qui est de l’incidence, les études pouvant servir à comparer nos résultats sont peu nombreuses. Notons que le taux de consultation chez un omnipraticien pour de la douleur lombaire, sans distinction entre une condition aigüe ou chronique, était identique entre les hommes et les femmes de 25 à 74 ans en 2004 en Belgique (Bartholomeeusen et al., 2012). À l’opposé, Joud et collaborateurs ont relevé dans leurs analyses, basées sur une approche méthodologique de clairance de cinq années, que l’incidence de première consultation des femmes pour de la douleur lombaire était plus élevée que chez les hommes, exception faite de la catégorie de 85 ans et plus (Jöud et al., 2012). Aucune explication n’est fournie quant à cette différence. Dans nos analyses d’incidence de 2007, seuls les jeunes hommes (18-34 ans) avaient un risque 1,2 fois plus élevé que les jeunes femmes à présenter de nouveaux cas de douleur lombaire récurrente. Toutes les autres catégories d’âge présentaient un risque similaire. La différence entre les résultats de l’étude de Joud et la nôtre pourrait venir du fait encore une fois que l’étude de Joud s’intéressait à tous les cas de douleur lombaire, alors que nous nous sommes intéressés seulement aux cas récurrents. Il serait intéressant de connaitre la répartition des secteurs d’emplois chez les jeunes hommes et femmes québécois, à savoir si les jeunes hommes sont beaucoup plus présents dans le secteur ouvrier et manufacturier par exemple. Cela pourrait mener à une plus importante fréquence de consultations récurrentes en début de carrière en raison d’emplois manuels. Dans son étude d’incidence de la douleur lombaire dans une communauté israélienne, Jacob ne relevait pas de différence significative entre hommes et femmes ni entre les différentes classes d’âge (Jacobs et al., 2004). Cependant, l’échantillon d’individus avec douleur lombaire était probablement trop petit (n=212 sur 2000 habitants) pour permettre des analyses stratifiées concluantes. Pour la comparaison à d’autres études d’incidence, notons que les femmes sont sous représentées ou exclues dans les études de populations militaires ce qui diminue la validité externe de ces dernières et la possibilité de comparer à notre étude (Mattila et al., 2009; Knox et al., 2011). 154 6.5 Doit-on optimiser la construction de cohortes incidentes de douleur lombaire? Le caractère ubiquitaire de la douleur lombaire dans les différentes tranches d’âge de la population, l’éventail de symptômes s’apparentant à cette condition, sa récurrence, la durée et la gravité des épisodes font que l’incidence du tout premier épisode est particulièrement complexe à déterminer (Leboeuf-Yde & Kyvik, 1998; Elders & Burdorf, 2004; McBeth & Jones, 2007). Pourtant, la mesure de l’incidence est nécessaire pour estimer le risque de développer une condition de santé dans la population et évaluer des liens de causalité entre différents facteurs de risque et la survenue des maladies. L’utilisation d’études de prévalence est pourtant répandue vu la complexité à identifier ce premier épisode de douleur lombaire, mais cela introduit de nombreux biais pour la réalisation d’études de causalité et diminue énormément la validité des conclusions. Comment peut-on clairement déterminer les facteurs de risque des individus à développer un épisode de douleur basé sur la présomption qu’il s’agisse de son tout premier épisode? Par exemple, certaines études avancent que l’indice de masse corporelle (IMC) pourrait être un facteur de risque pour le développement d’un nouvel épisode de douleur lombaire, basé sur l’analyse d’études de prévalence (Lake et al., 2000). Cela peut apparaitre logique puisque la prise de poids concorde avec une augmentation de la masse portée au rachis, peut mener à des déficits posturaux, est souvent synonyme d’un manque d’activité physique, etc. Cependant, l’IMC élevé chez ce patient ne serait-il pas plutôt une conséquence de son épisode de douleur lombaire et non l’inverse? Supposons que l’individu en soit en réalité à son 6e épisode en deux ans. Initialement, il n’avait aucun surpoids. Puis est survenu un premier épisode grave suite auquel il a réduit ses activités. Après la récupération de ce premier épisode, il en développe un deuxième au bout de deux mois et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’il prenne beaucoup de poids en raison d’un manque de mobilité secondaire à sa douleur. La plupart des études qui déterminent des facteurs de risque basé sur l’analyse d’une ou plusieurs cohortes prévalentes soulèvent en général cette importante limite quant à l’impossibilité de déterminer la causalité. La relation temporelle de cause à effet entre facteur de risque et condition de santé ne peut être établie, il est donc impossible de dire lequel de l’œuf ou de la poule est arrivé le premier (Shiri et al., 2010). Ce genre d’analyse de cohorte prévalente, souvent basée sur des devis transversaux, est 155 donc considéré comme « générateur d’hypothèses » plutôt que « valideur d’hypothèse » (Schneider et al., 2006). C’est en partie la raison pour laquelle, malgré l’abondante littérature sur la prévalence de la douleur lombaire, il n’existe encore aucun consensus sur les facteurs de risques qui sont en cause autant pour les épisodes aigus, récurrents que chroniques et qu’il importe de proposer de nouvelles approches méthodologiques pour construire des cohortes incidentes de douleur lombaire. Pour pallier l’approche couteuse et logistiquement complexe d’établir des cohortes de naissance qui visent à suivre les individus tout au long de leur développement (et de l’apparition de certaines conditions de santé), certaines équipes ont proposé un devis prospectif basé sur des cohortes « de patients pris avant le début de la maladie », communément appelées selon une traduction libre : « cohortes d’inception ». La première étape dans la construction de ces cohortes consiste à évaluer la présence ou l’absence d’une condition de santé dans un échantillon représentatif de la population à une période de temps (t0) à l’aide d’une enquête ou suite à un recrutement. La deuxième étape vise à suivre longitudinalement (t1, t2, t3,… ti) les individus sélectionnés à t0 pour la condition de santé d’intérêt. Ainsi, dans le cas d’une étude d’incidence de la douleur lombaire chronique à l’échelle de la population, Kopec et collaborateurs ont utilisé les données de l’enquête canadienne de santé des populations pour identifier un échantillon d’individus qui répondaient en 1994-1995 (t0) n’avoir eu aucun problème de dos ayant limité leurs activités dans les 12 derniers mois (Kopec et al., 2004). À partir des données du volet longitudinal recueillies auprès de ces individus en 1996-1997 (t1), les auteurs ont utilisé la question : « Avez-vous été diagnostiqué par un professionnel de la santé pour un problème de dos, excluant l’arthrite »? Les répondants devaient répondre « oui » seulement si le problème durait ou était censé durer plus de six mois. Cette méthodologie a permis de produire des données d’incidence à l’échelle de la population plus rapidement qu’en suivant une cohorte de naissance. Ils ont par la suite effectué une analyse par régression logistique pour évaluer quels étaient les prédicteurs de douleur chronique au dos, étude qui est plus valide pour détecter la causalité de facteurs de risque que les analyses d’études de prévalence. Une autre équipe a également produit des études d’incidence de la douleur lombaire récurrente basées sur des cohortes d’inception, cependant sur un plus petit échantillon de la population et en utilisant un recrutement en clinique. Une cohorte de 1000 patients se présentant chez 156 des chiropraticiens, physiothérapeutes ou médecins de famille de la région métropolitaine de Sydney pour un épisode de douleur lombaire aigüe (t0) (c.-à-d. 24 h < durée < 2 semaines, précédé de un mois sans douleur) ont été recrutés. Les participants (âge moyen 43 ans, 54 % d’hommes) ont ensuite été suivis à 6 semaines (t1), 3 mois (t2) puis 12 mois (t3) (Henschke et al., 2006). Ce genre d’approche méthodologique a permis de déterminer une incidence annuelle de récurrence de 33 %, leur modèle de régression permettant d’établir que la présence d’épisodes antérieurs de douleur lombaire était prédictive d’une récurrence dans les 12 mois suivants (Stanton et al., 2008). Les auteurs avancent que leurs estimations de récurrence sont probablement plus précises que celles rapportées dans la littérature étant donné qu’ils se sont affranchis à t0 des patients dont l’épisode de douleur n’était pas résolu (c.-à-d. pas de douleur dans le dernier mois). Les auteurs recommandent également à la communauté de préconiser l’utilisation d’une cohorte d’inception avec suivi uniformisé, une définition de récurrence et de récupération bien établie, et de recruter des patients potentiels pour une récurrence, donc remis d’un épisode antérieur (Stanton et al., 2008). L’importance des définitions est en effet primordiale, d’ailleurs Stanton et collaborateurs ont proposé peu après une définition consensuelle de douleur lombaire récurrente basée sur des critères cliniques (Stanton, Latimer, Maher, & Hancock, 2010b). Cependant, bien que leur approche méthodologique soit certes intéressante et amène des éléments de discussion forts pertinents, la validité externe à l’échelle de la population demeure tout de même limitée avec un échantillon de 353 patients même si les auteurs ont vérifié la correspondance aux études de recensement. Une réticence pourrait également venir de la construction d’une cohorte à t0 basée sur l’absence de douleur le mois précédant le recrutement. Par exemple, dans l’étude de Kopec et collaborateurs, les auteurs ont vérifié l’absence de douleur les 12 mois précédant l’inclusion à t0 (Kopec et al., 2004). Bien que le but n’ait pas été le même (douleur chronique au dos [Kopec] versus douleur lombaire récurrente [Stanton]), l’étude de Stanton se basait sur des patients sans douleur depuis un mois, et l’analyse de régression sur une variable indépendante dichotomique portant sur la présence ou l’absence d’un historique d’épisodes antérieurs dans les six derniers mois. Le patient inclus était-il véritablement remis de son précédent épisode si ce dernier se situait entre un mois et six mois du recrutement? Combien d’épisodes différents avaient eu lieu dans la dernière période de six mois? Il aurait pu être plus simple de déterminer le risque 157 d’une récurrence sur des patients absolument naïfs à toute douleur lombaire et qui auraient subséquemment développé un épisode de douleur lombaire. De manière à améliorer les analyses de facteurs de risque d’une étude basée sur une cohorte d’inception, il pourrait être préférable de chercher à avoir des critères d’inclusion bien plus sévères qu’une période de récupération d’un épisode d’un mois, et de la présence d’épisodes antérieurs à six mois. Bien sûr, la perspective des auteurs était de vérifier le taux de récurrence et de récupération dans leur cohorte incidente, mais il est important de considérer que la fréquence et la gravité d’épisodes antérieurs pourraient avoir un impact sur le pronostic d’un patient en douleur aigüe et ses chances de récidiver. Les cohortes d’inception sont donc très pertinentes, mais présentent des limites et demandent une logistique et des investissements importants. Les cohortes incidentes de douleur musculosquelettique, telles celles de douleur lombaire, seraient donc composées en partie de patients ayant eu de précédents épisodes, mais asymptomatiques au moment de leur participation (McBeth & Jones, 2007). Cela résulterait potentiellement en des cohortes incidentes contaminées par des individus récurrents en rémission plutôt que naïfs à la douleur lombaire comme dans le cas de l’étude de Kopec et collaborateurs (Kopec et al., 2004), ou en des cohortes incidentes de patients récurrents qui pourraient être dichotomisés à tort dans la catégorie « sans épisode antérieur de douleur » comme dans l’étude de Stanton et collaborateurs (Stanton et al., 2008) tel que discuté précédemment. Cette hypothèse décrirait un biais de sélection, de type transversal, plus particulièrement identifié comme étant un biais d’incidence-prévalence et en général rapporté dans les études de veille médicale (Szklo & Nieto, 2007). Ce biais fait référence justement à l’utilisation de cohortes incidentes considérées pures (c.-à-d. des patients initialement considérés naïfs à la condition de santé investiguée), mais qui sont en réalité des cohortes dites mixtes composées de cas prévalents et incidents, à l’insu du chercheur. Ce biais peut diminuer la validité des inférences faites sur les risques de développer la condition de santé à l’étude. Pour prévenir ce biais, il est recommandé de procéder à une vérification minutieuse des données et à une exclusion de tous les cas prévalents au moment de la construction de la cohorte incidente (Szklo & Nieto, 2007). Présenté de la sorte, il semble évident et simple d’effectuer une telle opération, mais force est de constater 158 que peu d’études d’incidence de douleur lombaire aient mis l’accent sur cette préoccupation. Comme discuté dans le deuxième article (section 4.2.3), notons les études de Joud et collaborateurs (Jöud et al., 2012) et Knox et collaborateurs (Knox et al., 2011) qui sont les seules à notre connaissance à avoir clairement stipulé avoir pris en considération de reculer au-delà d’un an dans l’historique des patients pour s’assurer que ces derniers n’avaient pas subi d’évènements antérieurs avant leur inclusion dans une cohorte incidente. Bien que Knox et collègues soient restés flous sur la période de recul pour chacun des patients, Joud et collaborateurs ont bien indiqué avoir examiné cinq années d’historique médical, correspondant selon nos résultats à une clairance d’épisode affichant une bonne convergence de la VPP et du Kappa. L’approche méthodologique que nous avons suggéré dans notre étude, celle visant à procéder à une clairance d’épisode pour diminuer le biais de prévalence-incidence, est donc simple et permettrait de construire des cohortes plus spécifiques, et d’augmenter la qualité des analyses de régression sur les facteurs de risque pouvant mener à de nouveaux épisodes de douleur lombaire récurrente. Bien que ce biais soit soulevé en général dans les banques de veille médicale, il est particulièrement susceptible d’être présent dans les études de cohortes d’inception. Alors que dans les analyses secondaires de données administratives ou de veille médicale, ce biais puisse être contrôlé par la révision des données médicales historiques, il est hautement improbable de le réduire dans les études d’enquête ou de cohortes d’inception au-delà de 6 à 12 mois s’il s’agit de données autorapportées (biais de rappel). C’est donc dire que l’approche méthodologique que nous proposons dans cette étude puisse servir à optimiser grandement la construction des cohortes incidentes de douleur lombaire. Cette approche pourrait conduire à faire des analyses plus rigoureuses de facteurs de risque menant à cette condition de santé. Seul bémol majeur, les cohortes présentées dans cette étude sont des cohortes incidentes médicales, il faut donc que le patient ait consulté dans le système de santé. Idéalement, il faudrait avoir accès aux données de la RAMQ croisées aux données d’une banque centrale d’assureurs privés pour la couverture paramédicale offerte par des professionnels de la santé dans le domaine des médecines alternatives et complémentaires. 159 6.6 Une tendance de couts d’intervention en mal de diminution. Comme soulevé dans les précédentes sections, en raison du nombre limité d’études rapportant des données séculaires en lien avec la douleur lombaire, particulièrement la douleur récurrente, et plus spécifiquement se rapportant à des cohortes incidentes, il est très difficile de comparer nos résultats de couts directs. Ajoutons à cela que notre système de santé a la particularité d’offrir une couverture universelle, ce qui fait énormément varier les couts de santé en regard de ceux d’autres pays, dans certains cas négociés par les gouvernements, dans d’autres soumis aux mécanismes du libre marché (voir Figure 18) (OCDE, 2011a). Idéalement, nous devrions chercher à comparer nos études à celles de pays qui partagaient notre groupe entre 2000 et 2007, soit l’Australie, la Belgique et la France. Figure 18. Groupes de pays partageant des institutions similaires en matière de système de santé. Tiré de OCDE, 2011a avec permission. En ce sens, une étude nationale belge sur la douleur lombaire a rapporté qu’en 1999, au niveau d’une prise en charge interventionnelle de la douleur (épidurale, pompes 160 intrathécales, TENS, radiofréquence), le cout moyen était de 471 €/patient alors que l’approche chirurgicale représentait 1 836 €/patient (Van Zundert & van Kleef, 2005). Les auteurs n’ont pas pu retracer l’utilisation de chaque patient, mais leurs données permettaient d’estimer un cout moyen de 96,50 €/patient en combinant les approches médicale et chirurgicale. Une fois converti en dollars canadiens de 2007, ce cout moyen avoisinait les 205 $, se rapprochant du cout moyen calculé pour notre cohorte incidente la plus proximale (en 2003 : 261 $/patient). Dans la population Australienne de 2001, le cout moyen par habitant pour la prise en charge de la douleur lombaire a été évalué à 474 $ AU, soit 437 $ CA de 2007 (Walker et al., 2003; Dagenais et al., 2008). Cinquante pour cent de ces couts directs seraient imputables à la chiropratique, la physiothérapie et autres MAC, l’approximation serait donc de 219 $/an pour les dépenses en services médicaux, un cout moyen avoisinant ceux de la Belgique et du Québec. Une seule étude a étudié le cout de la douleur lombaire chronique en France parmi 98 cliniques d’omnipraticiens réparties sur l’ensemble du territoire en 2002 (Depont et al., 2010). Parmi des patients d’âge moyen de 53 ans et ayant eu de la douleur toutes les semaines pendant les trois mois précédant la participation à l’étude, le cout moyen était de 716 €/6 mois en Euros de 2007 (1 094 $ CA). En ne conservant que les couts de visites ambulatoires et les frais d’hospitalisation, le cout représentait 30 % du total, soit 215 €/6 mois. Le groupe des 24-40 ans était celui générant le plus de couts en comparaison des 41-75 ans. La tendance dans notre étude était plutôt que le groupe des 35-49 ans générait davantage de couts que les autres classes d’âge. Cependant, gardons en tête que ces comparaisons demeurent faibles en raison des divergences méthodologiques entre ces études et la nôtre (c.-à-d. définitions, type de cohorte, consultations en MAC, etc.) et de moyennes de couts provenant de distributions fortement asymétriques provoquées par un nombre restreint de patients qui engendrent des couts d’intervention très élevés. Si nous comparons à des pays hors de notre groupe administratif de systèmes de santé, quelques études se sont intéressées à produire des évaluations de couts pour de la douleur lombaire, non pas récurrente, mais chronique. L’étude de Gore et collaborateurs, portant sur les données administratives de 62 millions d’individus répartis dans 98 régimes d’assurances américains à travers le pays, rapporte que les 101 000 patients de 18 à 65 ans 161 ayant de la douleur lombaire chronique généraient en 2008 des couts directs médians de 3 623 $ US [1 384 $ - 8 784 $] (Gore et al., 2012). Les visites ambulatoires chez les médecins engendraient à elles seules un cout médian de 770 $ US [430-1 366], soit trois fois plus de couts que des patients sans douleur lombaire. Les données de Gore et collaborateurs se rapportaient à des patients dont la médiane du nombre de consultations chez l’omnipraticien était de trois par an, et chez les spécialistes de deux visites par an. Les couts de santé sont reconnus comme étant très élevés aux États-Unis (Hong et al., 2013), ce qui expliquerait l’énorme différence en comparaison du cout total calculé pour toutes les consultations et actes analysés dans notre étude en 2007 (196 $ [122-354]). Une autre étude portant sur la même banque et la même période, mais utilisant un autre algorithme de sélection pour la douleur lombaire chronique, identifiait plutôt un total de 39 000 patients engendrant des couts moyens de 2 426 $ US/an (Mehra et al., 2011). Les médicaments et la physiothérapie représentaient entre 52 % et 75 % des couts selon la présence ou pas d’une composante neuropathique. Le cout moyen en 2008, avec une approche conservatrice d’exclusion de 52 % des frais paramédicaux et de médication, était donc approximativement de 1 165 $ US/an pour les visites ambulatoires et les hospitalisations. Les patients consultaient en urgence en moyenne de 5 à 9 fois dans une période de 12 mois ce qui est particulièrement élevé. Les analyses indiquent également que les patients avec une composante neuropathique engendraient 160 % plus de couts de traitement et étaient en général plus gravement atteints (Mehra et al., 2011). L’âge moyen était de 51 ans, quatre ans de plus que dans la cohorte de Gore et collaborateurs. Dans une autre étude, portant sur plus de cinq millions de patients anglais enregistrés dans 625 cliniques de soins de première ligne répartis en Angleterre, un cout moyen de 1 129 $ pour la consultation d’omnipraticiens dans une fenêtre de 12 mois consécutifs entre 2007 et 2009 a été rapporté pour des patients aux prises avec de la douleur lombaire chronique (Hong et al., 2013). La moyenne de visites d’omnipraticiens pour des consultations était de deux par an, alors que la visite d’omnipraticiens pour des chirurgies était de 16 par an. Ce type de nomenclature (GP surgery visit) n’est malheureusement pas décrit et pas d’usage courant dans la littérature, à savoir s’il s’agit de visites lors desquelles l’omnipraticien pratique une intervention plutôt qu’un examen, ou s’il s’agit de visites de suivi suite à une chirurgie effectuée par un médecin spécialiste. Il est donc normal d’observer des couts de 162 consultation très élevés si les 53 000 patients avec douleur lombaire chronique dans leur étude consultaient en moyenne 18 fois par an dans ce système de santé (Hong et al., 2013). Notons que ces études sont basées sur des cohortes prévalentes et non pas incidentes, contrairement à notre étude. Également, il s’agit d’études de douleur lombaire chronique, et non pas de douleur récurrente, bien qu’aucune approche méthodologique n’ait visé à déterminer la gravité des épisodes sélectionnés. De plus, les algorithmes de ces trois études « chroniques » diffèrent; il est encore pire de constater que deux études sur la même base de données et sur le même sujet en arrivent à un écart de 60 % du nombre de patients entre leurs cohortes et à des couts moyens qui diffèrent de 70 %. Ces constats rejoignent certaines conclusions d’une revue de la littérature effectuée sur l’épidémiologie et les couts de la douleur lombaire chronique en Europe qui stipulait, entre autres, qu’il n’y avait aucune étude de couts à partir de cohortes incidentes et qu’il y avait un besoin de cohérence entre les définitions de douleur lombaire chronique utilisées (Juniper et al., 2009). Il peut donc sembler futile de chercher à comparer les résultats de pays dont le système de santé diffère du nôtre, mais également pour plusieurs raisons d’ordre méthodologique. Cependant, l’étude de Mehra et collaborateurs nous renseigne à tout le moins que leur cohorte de 39 000 patients de douleur lombaire chronique en 2008 présentait le même âge moyen que les patients de notre cohorte incidente, soit 51 ans. C’est donc dire qu’il commence à être urgent de faire un suivi des populations vieillissantes pour la douleur chronique musculosquelettique. Malheureusement, aucune des études précitées n’a cherché à déterminer quel groupe d’âge ou qui des hommes ou des femmes engendraient le plus de couts, alors que nous avons démontré dans notre étude que les hommes engendraient davantage de couts, mais que les couts chez les femmes étaient en nette hause. En regard de la tendance séculaire des couts, les rares études qui ont publié ce genre de données ont procédé à des analyses nationales par le truchement de grandes banques de données et l’utilisation d’une codification CIM-9. Le groupe de Lambeek et collaborateurs a par exemple révélé que les couts totaux (directs et indirects) pour le traitement de la douleur au dos aux Pays-Bas avaient diminué de 23 % entre 2002 et 2007. Cependant, malgré cette résultante fortement influencée par les couts indirects, les couts directs liés à la prise en charge ambulatoire par des médecins spécialistes avaient augmenté de 13 %, les 163 couts de chirurgies de 21 % et les couts de visites en médecine générale de 95 %. Ces derniers couts ont explosé en 2006, probablement une conséquence de la modification de la couverture du système de santé de ce pays tel qu’expliqué à la section 2.4.1. Bien que cette étude soit basée sur de nombreuses présomptions en terme d’évaluation de couts moyens et que très peu de détails soient fournis quant à la source des données primaires, il demeure que les auteurs démontrent une baisse du fardeau socioéconomique de la douleur au dos dans ce pays, plus particulièrement en 2006 et 2007 après les changements administratifs apportés à la structure même de leur système de santé. L’autre étude qui rapporte la tendance séculaire des couts de santé pour la douleur spinale est d’une équipe américaine qui rapporte une hausse de 65 % des couts directs de 1997 à 2005 (Martin et al., 2008) et de 82 % de 1997 à 2006 (Martin et al., 2009), soit une hausse de 17 % en rajoutant l’année 2006 dans leurs analyses. Ce constat est assez inquiétant, la médication étant la catégorie ayant le plus augmenté (+ 232 %). Les couts de visites ambulatoires pendant cette période, peu importe la spécialité, ont augmenté de 52 %. Les auteurs rapportent que l’augmentation des visites ambulatoires n’est pas liée au nombre de nouvelles consultations, mais plutôt à l’augmentation de la fréquence de consultation par patient. Les auteurs sous-entendent donc que les patients auraient plus de récurrences de consultation, contribuant à une hausse des couts. Cela pourrait peut-être expliquer en partie la hausse des couts médians observée dans notre cohorte de patients très âgés, particulièrement chez les femmes. Aucune de ces études n’a cependant évalué les tendances selon l’âge et le sexe. Dans notre étude, la fréquence de consultation est demeurée stable. Bref, il est particulièrement complexe de comparer les différentes études. La meilleure approche pour pallier ce problème serait de produire une revue systématique de tous les algorithmes utilisés pour la sélection de patients de douleur lombaire dans la littérature économique et épidémiologique. Comme d’autres l’ont fait pour les définitions de douleur lombaire aigüe et récurrente, il faudrait rassembler un panel d’experts internationaux sur l’analyse des banques administratives pour l’étude des maladies musculosquelettiques et établir un algorithme qui ferait consensus pour permettre la comparaison de futures études de couts. L’avantage avec les algorithmes réside dans le fait que la plupart des pays utilisent la codification CIM-9, et qu’il existe des tables de 164 conversion pour ceux qui utilisent les codes CIM-10. Cependant, à ce stade, aucune étude n’a effectué d’analyse séculaire telle que nous l’avons présentée. Comme la plupart des études le démontrent, les couts sont élevés les 12 premiers mois. Cependant, nous sommes les seuls à notre connaissance à avoir démontré que les couts de services médicaux diminuaient drastiquement dès la première année de suivi. Plusieurs questions restent en suspens, par exemple, est-ce que les patients se tournent vers les médecines alternatives et complémentaires dès la première année de suivi en raison d’un manque d’amélioration de leur condition suite à leur année index, ce qui expliquerait la chute des couts dans le système de santé? Les patients sont-ils rapidement médicamentés et les années subséquentes à l’année index se résument à des visites de suivi pour l’ajustement de la médication, ce qui diminuerait les couts d’intervention? La majorité des cas aigus sont-ils tout simplement résolus à l’intérieur de 12 mois, tel que le supportent certaines études? (Wasiak et al., 2003; Stanton et al., 2008) Les cliniques spécialisées de prise en charge de la douleur chronique sont relativement récentes au Québec. Il sera particulièrement intéressant de suivre l’évolution des couts de santé dans les prochaines années. La surspécialité de prise en charge de la douleur chronique n’est reconnue que depuis octobre 2010 par le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada. De futures analyses de données administratives de la RAMQ dans la prochaine décennie nous permettront de déterminer s’il y a une évolution dans le profil de récurrence, d’interventions et de couts séculaires auprès de la clientèle se présentant pour de la douleur lombaire. 165 6.7 Limites du projet de recherche À l’encontre des précédentes et rares études présentant des données séculaires ainsi qu’une certaine stabilité ou même une tendance à la hausse de la prévalence de la douleur lombaire, nos conclusions indiquaient une baisse. Dans notre étude, nous nous sommes intéressé aux cas récurrents de douleur lombaire à partir d’une perspective administrative. La majorité des études de morbidité publiées se rapporte à la douleur lombaire aigüe et se base sur des données autorapportées. Comme observé, nos résultats de prévalence (1,33 % en 2007) étaient nettement inférieurs à l’estimation de prévalence annuelle globale rapportée par Hoy et collaborateurs (39 %) (Hoy et al., 2012). Les cas de douleur lombaire récurrente seraient de l’ordre de 8 % des cas aigus dans une importante population de travailleurs (Wasiak et al., 2003) et de 17 % à 23 % dans un échantillon de la population de Sydney (Australie) n’ayant pas eu d’épisodes antérieurs (Stanton et al., 2008). Basé sur ces chiffres, un calcul rapide nous permettrait de nous attendre à une prévalence des cas récurrents se situant dans une fourchette de 3 % à 9 % (c.-à-d. 7 à 23 % de 39 % de prévalence globale de douleur lombaire). De plus, selon les enquêtes canadiennes dont les questions portent sur la douleur chronique et leur composante de douleur chronique au dos, la prévalence avoisinait 6 % (voir Tableau 2). Nos estimations se situent donc en deçà de la fourchette des cas récurrents ou même de l’approximation de la prévalence des douleurs chroniques au dos au Canada. En dehors du fait qu’il se pourrait très bien que la prévalence de consultations récurrentes pour de la douleur lombaire soit plus faible qu’attendu au Québec, il faut considérer un nombre important de biais pouvant mener à une sousestimation du portrait réel de la morbidité de cette condition de santé. Les prochaines pages serviront à décrire un ensemble de limites propre à nos études, la plupart abordées en partie dans la discussion des articles 1 et 2, ou dans certaines des précédentes sections de la discussion. 166 6.7.1 Biais de sélection Le fait que nos résultats soient issus d’une analyse secondaire de la banque administrative de la RAMQ pourrait expliquer en partie cette différence. En effet, tel que soulevé dans la discussion de l’article 1 (section 4.1.3), tous les individus souffrant de douleur lombaire récurrente ne consultent pas nécessairement un médecin (Hicks et al., 2008; Asghari et al., 2009). Certains apprennent à vivre avec leur douleur, d’autres consultent des médecins salariés tels que dans les CLSC, d’autres des professionnels de la santé non affiliés à la RAMQ tels que des spécialistes de médecines alternatives et complémentaires (MAC; physiothérapeute, chiropraticien, acuponcteur, ostéopathe, etc.) (Rapoport et al., 2004; Deyo et al., 2006). Ces patients aux prises avec de la douleur lombaire ne seront donc pas consignés dans les fichiers de la RAMQ. Ce qui n’empêche pas ces individus, lors d’enquêtes, de répondre avoir mal au dos de manière récurrente ou chronique, et d’indiquer avoir été diagnostiqués par un professionnel de la santé (c.-à-d. la question dans les enquêtes canadiennes ne précise pas le type de professionnel de la santé). Ainsi, Jacob et collaborateurs préconisaient plutôt une approche communautaire, car ils critiquaient les données « patient » (c.-à-d. les données administratives ou cliniques) qui selon eux ne représentaient pas la population générale (Jacob et al., 2004). Cela est vrai dans une certaine mesure selon laquelle toute la population aux prises avec des douleurs lombaires ne consulte pas nécessairement un médecin ou n’a pas accès à une couverture de soins (p. ex. États-Unis). Par exemple, le problème d’accessibilité à un médecin de famille est bien connu au Canada et au Québec (Gagnon, 2004; Gladu, 2007). Étant donné que les systèmes de santé canadiens sont basés sur la structure « médecin référant », l’individu aux prises avec de la douleur lombaire devra nécessairement consulter un médecin de famille avant d’avoir accès à un spécialiste de la douleur6. Puisque les patients ayant des épisodes de douleur lombaire doivent généralement être suivis un minimum de 4 à 6 semaines par un omnipraticien, exception faite de la présence d’un indicateur modéré ou majeur (voir section 2.3.2), et étant donné la problématique d’accessibilité aux médecins, il se peut en effet que de nombreux cas de douleur lombaire ne soient jamais consignés à la RAMQ. C’est-à-dire que le patient pourrait avoir préféré prendre du repos, des anti-inflammatoires 6"Le programme de surspécialité de « médecine de la douleur » a été officiellement reconnu en octobre 2010 par le Collège Royal des Médecins et Chirurgiens du Canada. À ce jour, aucun programme n’a cependant été agréé et le nombre de spécialistes dans ce domaine est limité." 167 disponibles en vente libre à la pharmacie, consulté un chiropraticien ou un physiothérapeute par exemple s’il possède des assurances privées, plutôt que d’attendre plusieurs heures à l’urgence ou dans une clinique sans rendez-vous sur une chaise (n’oublions pas qu’en période aigüe de douleur au dos, toute posture prolongée est inconfortable). Cette situation hypothétique n’est probablement pas si éloignée de la réalité pour bien des patients, à moins que ceux-ci doivent absolument fournir un formulaire rempli par un médecin pour avoir accès à des primes d’accident de travail de la CSST ou obtenir une absence de courte/longue durée de leur employeur. Bref, dans un système dont l’accès à un médecin de famille est difficile, cela pourrait très bien se refléter par une sous-estimation de la prévalence ou de l’incidence de la douleur lombaire récurrente à partir de l’analyse secondaire des données des banques administratives. Une façon de pallier cette problématique serait de bénéficier de l’accès à certaines banques de données d’assureurs, particulièrement dans la population en âge de travailler et qui possède une couverture privée pour les frais paramédicaux (p. ex. physiothérapie, chiropratique). Par exemple, un registre a été créé pour regrouper les données pharmaceutiques d’un échantillon de patients couverts au Québec par des assureurs privés afin d’améliorer, entre autres, la validité des analyses dans ce groupe d’âge dans les études pharmacoépidémiologiques (Blais, 2012). Malgré cette limite des banques administratives, les études d’incidence de douleur lombaire sur des petites cohortes, comme dans les approches communautaires, ont également leur limite. Si la taille d’échantillon est trop petite par rapport à la population qu’elle représente, le résultat sera peu généralisable (c.-à-d. faible validité externe). Également, une petite taille d’échantillon peut limiter la préparation d’analyses multi-variées sur les facteurs de risques (Jacob et al., 2004). Bref, tous les devis ont leurs avantages et désavantages, il s’agit seulement de spécifier la perspective adoptée et la portée de l’étude et de ne pas minimiser l’importance d’autres devis qui s’avèrent souvent complémentaires. Deuxièmement, il s’agit d’une étude sur la récurrence de consultations médicales pour de la douleur lombaire utilisant un algorithme spécifique : au moins trois diagnostics similaires (trois premiers chiffres CIM-9) sur une période de 365 jours. Cette définition n’a jamais été utilisée dans une autre étude, ce qui limite la comparaison de nos faibles taux de prévalence et d’incidence à ceux d’autres études. Également, la sélection du nombre de 168 consultations (≥ 3) est arbitraire. Pourquoi trois plutôt que deux ou quatre consultations par an pour parler de récurrence? Cette décision est en partie politique. Une ronde de négociations a eu lieu avec la RAMQ afin de trouver un terrain d’entente pour l’obtention d’un volume important de données sensibles faisant partie du programme d’envergure de créer un atlas québécois de la douleur chronique. En raison de cette requête portant sur des millions de dossiers de patients, il est concevable qu’il y ait eu davantage de questions, d’ajustements et de mesures de sécurité exigées avant la transmission des informations. Ainsi, les ambitions de départ de l’équipe de recherche ont été réduites et le critère de sélection au nombre minimal de « trois consultations par période de 365 jours » a fait consensus entre les différents partis. Idéalement, nous aurions préféré avoir accès aux dossiers de TOUS les patients ayant eu au moins UN épisode de douleur lombaire tel que réalisé dans certaines études (Wasiak et al., 2003; Ritzwoller et al., 2006; Martin et al., 2008). Nous aurions pu ensuite procéder à une analyse descriptive du profil de consultation de tous ces patients visant à produire des catégories à partir de la fréquence de récurrence et de l’espacement entre ces récurrences. Nous aurions pu aussi lever la restriction quant aux trois diagnostics similaires par année en adoptant plutôt un croisement de tous types de diagnostics associés à de la douleur lombaire dans une fenêtre de 365 jours. En effet, au cours de trois visites médicales espacées sur une année entière, il est envisageable que le diagnostic se précise. Plus spécifiquement, en présence d’un indicateur modéré ou majeur, ou en l’absence de rémission, le diagnostic principal indiqué par l’omnipraticien pourrait très bien être modifié lors d’un examen subséquemment approfondi, ce qui supporterait l’hypothèse que certains patients parmi les plus incapacités soient exclus de notre étude (voir section 3.1.2 et Figure 10). Cette situation hypothétique se veut le reflet d’un potentiel biais de sélection en raison d’une limite de l’algorithme, ce qui pourrait indiquer que nos analyses sous-estiment la prévalence et l’incidence de douleur lombaire récurrente en créant une exclusion de patients pourtant aux prises avec un problème lombaire récurrent et grave. Cependant, bien des études d’analyse secondaire de données administratives pour des problèmes de douleur lombaire se basent sur des choix arbitraires ou en fonction de contraintes pour la sélection de codes CIM-9 (Mattila et al., 2009; Knox et al., 2011; Waterman et al., 2012), alors que d’autres ont la possibilité d’explorer l’ensemble d’une banque de données sans restriction d’utilisation (voir Tableau 1). Dans le cadre de nos 169 études, lors de la sélection des codes CIM-9 liés à la douleur lombaire et soumis à la RAMQ pour extraire la cohorte de douleur « chronique », plusieurs codes pertinents ont été omis (p. ex. étirements et entorses lombaires). Cependant, la majorité des codes de douleur lombaire se retrouve sous la famille de codes CIM-9 « 724 », en majeure partie catégorisés sous l’étiquette non spécifique (724.2, 724.5, 724.9) (Vogt et al., 2005; Ritzwoller et al., 2006; Martin et al., 2008). Ce biais de sélection doit quand même être considéré pour expliquer la possible sous-estimation de la prévalence ou incidence de douleur lombaire récurrente dans nos résultats. Il est donc important de demeurer vigilant quant aux limites des algorithmes utilisés lors des analyses secondaires de banques administratives ou de registres, ainsi qu’aux codes inclus dans ces algorithmes avant de tirer des conclusions trop générales. Particulièrement dans les études pouvant servir aux décideurs, dont les connaissances peuvent être limitées dans un domaine de santé en particulier, il importe de bien exposer les limites et la portée des résultats. 6.7.2 Biais d’information Nous devons également soulever la possibilité d’un biais d’observateur (p. ex. le professionnel de la santé). Ce type de biais est en général présent lorsque les caractéristiques du patient sont connues et influencent le processus décisionnel du médecin à établir un diagnostic (p. ex. le pathologiste évalue une biopsie hépatique pour suspicion de cirrhose alcoolique, mais il a d’abord révisé le dossier médical qui précisait que le patient était alcoolique) (Szklo & Nieto, 2007). Regardons ce biais autrement, du point de vue de l’expertise du médecin à diagnostiquer de la douleur lombaire. Bien que la douleur lombaire soit un symptôme commun, le nombre d’heures d’enseignement dédié à la douleur en médecine au Canada était de 16 heures en 2008, soit cinq fois moins qu’en médecine vétérinaire (Watt-Watson et al., 2009). Les médecins qui deviendront compétents à faire un examen physique de qualité pour bien différencier les diagnostics de douleur lombaire risquent d’être ceux qui auront spécifiquement effectué de la formation continue sur le sujet. D’un observateur à l’autre, le code CIM-9 inscrit sur le bordereau de paiement peut donc varier énormément selon les intérêts et les compétences acquises. Un sondage national auprès de médecins américains rapportait que 60 % des omnipraticiens et jusqu’à 70 % des spécialistes n’avaient pas reçu suffisamment de formation pour la gestion de la 170 douleur chronique (Darer et al., 2004). Dans une étude portant sur les connaissances et habiletés de médecins généralistes et spécialistes à l’examen physique de douleur lombaire chronique dans une population âgée de 65 ans et plus, seulement 4 % avaient réussi toutes les questions pour identifier de la douleur au joint sacro-iliaque et 13 % pour identifier une sténose spinale lombaire (Cayea et al., 2006). L’évaluation clinique de la douleur nécessite des instruments validés pour optimiser la gestion de la condition du patient, et il a été rapporté qu’il y avait un manque à cet égard également (Vellucci, 2012). Tous ces éléments peuvent contribuer à introduire un biais d’information et ultimement influencer un algorithme de sélection de patients visant l’extraction de données d’une banque administrative. Dans une étude sur la douleur lombaire récurrente, les chercheurs ont contourné en partie ce biais par l’entremise de codeurs spécialisés qui leur ont extrait des réclamations liées à la région anatomique du bas du dos suite à la révision des dossiers (Wasiak et al., 2003). Cependant, dans notre cas, pour limiter l’impact de ce biais d’information, nous avons demandé à la RAMQ de procéder à une extraction des patients basée sur les trois premiers chiffres CIM-9, plutôt que d’utiliser un niveau de précision à quatre chiffres (p. ex. 724 plutôt que 724.2). Il a été rapporté que le niveau d’accord entre la description de la condition du patient et les trois premiers chiffres du code CIM-9 fournis par le médecin était élevé (Martin et al., 2008). Cette extraction, basée sur un critère de sélection de CIM-9 à trois chiffres de précision, ne nous a cependant pas empêchée d’utiliser dans un deuxième tems les codes CIM-9 à quatre chiffres de précision pour éliminer les diagnostics liés aux régions thoraciques et cervicales (voir « Méthodes » section 3.1.2). Malheureusement, à partir de la sélection de codes CIM-9 demandés à la RAMQ lors de la sélection des patients, nous n’avons réussi à recréer que partiellement les catégories présentées dans l’étude de Cherkin et collaborateurs de manière à permettre des comparaisons sommaires (voir Tableau 1 et article 1), ce qui pourrait mener à une sousestimation de la morbidité et une classification biaisée. En effet, le niveau de précision de la codification CIM-9 est plus élevé dans certains états américains qu’au Québec. Selon les conventions de codification de l’Association des hôpitaux américains, de l’Association médicale américaine, de Medicare et du Centre national des statistiques de santé, aucun patient ne doit être identifié à partir de codes CIM à trois chiffres si des codes à quatre chiffres sont disponibles, et aucun à quatre chiffres si des codes CIM à cinq chiffres sont 171 disponibles (Sinnott et al., 2012). Cela leur permet donc d’effectuer des catégorisations diagnostiques beaucoup plus complètes. Notons que les analyses effectuées avec un nombre restreint de codes CIM-9/CIM-10 ou une précision moins élevée demeurent valables, mais le biais d’échantillonnage introduit, soit en fonction de l’établissement ou du code diagnostique sélectionné, peut conduire à des sous-estimations de la morbidité. De plus, la sélection des codes CIM-9/CIM-10 est généralement réalisée en fonction de réflexions personnelles ou de contraintes propres aux banques de données (Mattila et al., 2009; Knox et al., 2011; Waterman et al., 2012). Par exemple, Waterman et collaborateurs (Waterman et al., 2012) rapportent qu’ils ne s’intéressent qu’aux épisodes « cliniquement pertinents » pour déterminer leur incidence et utilisent une catégorie « d’étirements et entorses » dans leur banque de données de surveillance qui recoupe une panoplie de codes CIM-9. La sélection n’est cependant pas détaillée à profusion et ils ne relèvent que les cas qui se présentent en salle d’urgence. Comme précédemment décrit, il est crucial de bien comprendre la perspective choisie par les auteurs avant de tirer des conclusions hâtives. Le choix méthodologique de Waterman et collaborateurs pourrait expliquer une partie du résultat d’incidence peu élevé de 139 par 100 000 personne-années comparativement à des études sur des données d’enquête ou sur des données ambulatoires autres qu’à l’urgence (voir Tableau 3). Leurs résultats permettent cependant aux autorités pertinentes de considérer la vitesse d’apparition de nouvelles consultations en urgence de manière à pouvoir prendre des mesures pour mieux former les infirmières et urgentologues dans ce département par exemple. Dans une autre étude, seul le code 724.20 (lumbago) a été analysé dans la banque de données sous prétexte que ce code était facilement utilisé par tous les médecins (Knox et al., 2011). Cependant, il s’agit d’une banque de données militaires sur la santé, et l’équipe connait peut-être le profil des médecins qui y consignent des informations. L’étude de Knox perd donc en validité externe par rapport à la population générale, mais sous-estime peut-être moins la morbidité en utilisant seulement ce code CIM dans une population militaire fermée comparativement à d’autres études sur des banques populationnelles dont la population est dynamique. 172 Aussi, il est important de mentionner que certaines maladies sont mal définies ce qui rend leur codification complexe. Dans l’étude de Chen et collaborateurs (Chen et al., 2009), les auteurs avançaient que les conditions non spécifiques, telles que retrouvées dans les maladies rhumatologiques, étaient en général moins adéquatement codées. Dans la codification CIM-9, le code le plus commun pour les douleurs au dos est le 724, qui se décline ensuite sous différentes catégories à quatre chiffres dont la rachialgie dorsale (724.1), le lumbago (724.2), la lombosciatique (724.3), la névralgie lombosacrée (724.4), la lombalgie sans précision (724.5) et l’atteinte lombaire sans précision (724.9). À moins d’une atteinte nerveuse (sciatique ou névralgie spécifique), le médecin est laissé devant bien des choix pour sélectionner un code correspondant à une douleur musculaire non spécifique de la région lombaire d’un patient. Rien ne permet de conclure à savoir si le médecin ou son personnel administratif 1) était limité par les codes CIM disponibles pour préciser la condition de douleur selon son expertise et la complexité du cas ou 2) avait simplement inscrit le code le plus fréquemment utilisé pour ce genre de condition de santé dans sa pratique. Pour marquer cette problématique, suite à une table ronde au congrès du chapitre Européen de l’Association internationale pour l’étude de la douleur, des cliniciens et chercheurs se sont entendus pour dire que la révision CIM-11 devait absolument procéder à une refonte des diagnostics de douleur, particulièrement voir à réorganiser les diagnostics de maux de dos en fonction de la spécificité et de la gravité. Leur argument à cet égard était que les banques administratives n’étaient plus utilisées seulement pour des objectifs de remboursement, mais désormais également pour de la recherche (Rief et al., 2012). Notons aussi qu’en clinique, lors de visites ambulatoires, la codification se fait directement par le médecin ou par son personnel administratif (p. ex. secrétaires). Aucun d’eux n’est spécifiquement formé pour cet exercice de codification ce qui peut affecter la validité du diagnostic inscrit sur le formulaire de remboursement fourni à la RAMQ. Ajoutons à cela qu’au Québec les médecins ne sont pas obligés d’inscrire un code CIM-9 et que cette donnée n’est pas validée par la RAMQ (RAMQ, 2013). Également, un seul diagnostic principal peut être inscrit pour chaque réclamation soumise, pouvant mener à une sous-estimation des mesures de fréquence (prévalence, incidence) dans le cas de patients qui se présentent avec plus d’une condition de santé (Martin et al., 2008; Lachaine et al., 2011). Le remboursement par la RAMQ se fait en général en rapport avec la 173 réclamation des actes posés, soit le nombre et la qualité des procédures effectuées auprès du patient (Wilchesky et al., 2004). Il n’y a donc aucun incitatif pour le médecin d’inscrire le mauvais code, bien qu’il n’y ait également aucun incitatif pour que celui-ci ou son personnel administratif fasse particulièrement attention à la précision du diagnostic inscrit. C’est ainsi que les diagnostics des patients ambulatoires sont considérés comme la plus importante faille des bases de données administratives (Strom et al., 2012). Cette réalité peut à la fois affecter la sensibilité (capacité à identifier les patients souffrant de douleur lombaire), mais également la spécificité (capacité à identifier les patients qui ne souffrent pas de douleur lombaire). En effet, la douleur lombaire peut ne pas être inscrite comme diagnostic principal, mais comme un diagnostic secondaire (non présents dans la banque de données de la RAMQ) ou les codes peuvent êtres imprécis/erronés. Il faut également faire attention aux entrées répétées dans le cas de patients qui consultent dans de multiples services de santé pour la même condition de santé. En général, certaines banques médicoadministratives permettent de lier les données médicales et d’éviter la redondance (Asghari et al., 2009). Il faut par contre faire attention entre la redondance de consultation et la récurrence d’épisodes. À partir de banques administratives, il est très difficile de les dissocier. L’avantage est que les systèmes de santé canadiens fonctionnent avec un numéro d’assurance maladie unique qui permet de retrouver le patient dans les différents fichiers de service et les registres médicaux. Par contre, comme Knox (Knox et al., 2011) le mentionnait, le codage par différents médecins peut introduire des erreurs et diminuer la précision du diagnostic d’un même épisode de douleur lombaire. Le concept de redondance peut donc provoquer une surestimation de la morbidité. 6.7.3 Limites reliées à l’analyse des couts sanitaires de la douleur lombaire Plusieurs limites lors de la réalisation de l’objectif secondaire sur l’évaluation des couts directs de la douleur lombaire récurrente affectent la portée de l’étude. Plusieurs biais d’information doivent être rapportés en rapport avec la préparation des matrices de couts dont la méthodologie est décrite à la section 3.2, et qui contribueraient à la sous-estimation des couts directs réels. Par exemple, parmi ces biais, notons entre autres, le nombre de niveaux vertébraux visés par les blocages nerveux thérapeutiques, une technique interventionnelle souvent utilisée lors de la gestion de la douleur chronique par les 174 anesthésistes. Le prix de base en 2003 pour un blocage facettaire était de 38 $ et de 19 $ pour le blocage de chaque niveau vertébral supplémentaire, jusqu’à un plafonnement de 114 $ par jour. L’analyse des données fournies par la RAMQ ne nous permettait pas de connaitre le nombre de niveaux, nous avons donc décidé d’utiliser le cout plancher de 38 $. De nombreux codes d’acte ont dû être analysés avec la valeur plancher pour des raisons similaires. Une autre figure d’exception se rapporte aux frais de déplacement. Cette réclamation comporte un nombre important de variables à considérer (temps de déplacement, kilométrage, journée et heure du jour pour les primes, type de moyen de transport, avion, etc.). La RAMQ ne rembourse que pour les déplacements supérieurs à 40 kilomètres, donc le cout plancher que nous avons considéré en 2003 par exemple était de 28,80 $ (40 km X 0,72 $), mais bien entendu les déplacements peuvent représenter plusieurs centaines de dollars en général. À cela s’ajoutent toutes les primes de soirée, de fin de semaine, de gardes à domicile ou en établissement, les surprimes spécifiques aux spécialités, les primes d’éloignement et tout autre type d’incitatif qui n’était pas indiqué dans nos fichiers. Également, comme soulevé dans l’introduction, deux autres dimensions des couts directs médicaux manquaient à l’analyse, soit les couts liés aux données pharmaceutiques et les couts d’immobilisation pour hospitalisation. Pourtant, comme indiqué dans la discussion, ces couts représentent une importante proportion des couts médicaux directs, et la médication serait même la catégorie de couts ayant la plus augmentée entre 1997 et 2006 (Martin et al., 2009). Cette variable s’est avérée hautement complexe à produire par la suite en fonction, entre autres, des nombreuses formulations, du dosage, de l’indication du médicament pour le traitement de la douleur lombaire ou d’autres conditions de santé, etc. L’autre raison qui nous a poussé à décider de ne pas produire d’analyse à ce stade pour les données pharmaceutiques se rattache à la représentativité partielle qu’aurait eue cette analyse. La moyenne de la population adulte assurée en vertu du régime public de 2000 à 2008 est de 52,9 %, le reste de la population étant assurée par une couverture privée pour laquelle nous n’avons pas accès aux données (voir Tableau 4 et section 2.3.2). Également, une étude préliminaire avance que la validité externe des données portant sur l’utilisation du fichier des services pharmaceutiques de la RAMQ pour les patients en douleur chronique pourrait être plus faible qu’attendu (Lacasse et al., 2012). Pour ces différentes 175 raisons, nous n’avons pas rapporté de couts pour la médication, engendrant ainsi une sousestimation des couts directs médicaux et peut-être même affectant la direction de la tendance séculaire des couts. Enfin, au niveau des données d’hospitalisation, particulièrement en ce qui a trait aux dépenses d’immobilisation des hôpitaux (c.-à-d. ressources humaines, matérielles, taxes, électricité, etc.), nous avons déterminé qu’il serait difficile de produire des analyses fiables. En fonction de la structure de notre système de santé, une approche déductive, basée sur l’allocation globale de budgets qui permet de calculer une enveloppe budgétaire transférée aux hôpitaux par le Ministère de la santé et des services sociaux (MSSS), est utilisée pour calculer les couts d’hospitalisation et de chirurgie par établissement. Pour calculer ces couts directs moyens, l’approche selon les All-Patient-Refined-Diagnostic-Related-Group (APRDRG) est utilisée pour préparer un contour financier et établir l’allocation des ressources et les budgets d’immobilisation par établissement de santé. Les APR-DRG offrent une classification des données hospitalières couvrant de façon exhaustive toutes la clientèle hospitalisée en centre hospitalier de soins généraux et spécialisés. Au Québec, on attribue 318 APR-DRG aux hospitalisations de courte durée et aux chirurgies d’un jour à partir des données cliniques extraites de la banque Med-Écho. Ces APR-DRG sont groupés par les archivistes en milieu hospitalier selon les codes CIM inscrits dans les dossiers de patients ayant de la douleur lombaire. Ensuite, une pondération des patients hospitalisés en courte durée est effectuée avec un indice mesurant la lourdeur de la clientèle. C’est ce qu’on appelle le niveau d’intensité relative des ressources utilisées (NIRRU). En absence des couts réels encourus par les établissements québécois, ce sont les couts observés au Maryland (É.-U.) pour des cas analogues qui servent à établir les valeurs du NIRRU selon l’APR-DRG. Afin de mieux refléter la situation québécoise, ces couts sont ajustés pour tenir compte de l’écart entre les durées moyennes de séjour du Québec et celles du Maryland. Ces données sont ensuite utilisées pour produire un contour financier par le MSSS qui catégorisera les dépenses liées aux problèmes de douleur lombaire dans une grande catégorie associée à la « santé physique ». Cette catégorie est l’une des plus importantes du budget de santé. Le cout moyen d’une hospitalisation dans cette catégorie est donc basé sur un ensemble de chirurgies et peut donc sous-estimer ou surestimer le cout 176 réel d’une hospitalisation pour douleur lombaire. En raison du manque de spécificité du cout d’hospitalisation journalier dans cette catégorie, nous avons décidé de ne pas produire d’évaluation à ce stade. Donc, pour ces différentes raisons, nous avons décidé de concentrer nos efforts sur l’analyse des couts de facturation pour service médical rendu par les médecins. La rémunération des médecins représente la deuxième catégorie de dépenses de santé en importance après les hospitalisations (ICIS, 2012). Le fait de n’avoir pas eu accès aux données réelles de facturation diminue la validité de l’étude de couts sanitaires et sousévalue grandement le cout réel engendrés, mais donne somme tout un aperçu représentatif des consultations médicales et des interventions réalisées auprès des patients avec douleur lombaire. Enfin, une autre faiblesse qui doit être mentionnée concerne la perspective utilisée. La perspective étatique n’est que partielle et sous-estime grandement les couts d’une condition de santé en regard de la perspective sociétale qui constitue la vue d’ensemble la plus complète pour renseigner sur l’impact socioéconomique réel. La perspective sociétale vise à englober un maximum de variables soit les couts directs, indirects (absentéisme et pertes de productivité) et les couts intangibles tel que décrits à la section 2.4.2. Cette approche est cependant hautement complexe, couteuse et très variable d’une étude à l’autre pour une même population (Buchbinder et al., 2011). Elle nécessite, entre autres, de cibler un échantillon de patients et de leur demander de remplir un journal de bord pour consigner toutes leurs dépenses personnelles reliées à leur condition de santé et leur perte de jouissance ou celles d’individus les entourant. Cependant, la portée de telles études est beaucoup plus grande et permet de cibler davantage des interventions pouvant permettre de réduire les dépenses et d’optimiser le suivi de patients. Il faut donc garder à l’esprit que l’étude présentée dans cette thèse ne représente qu’une petite fraction des couts sociétaires réels liés à la douleur lombaire récurrente. 177 6.8 Forces du projet de recherche La présente étude comporte plusieurs forces dont la présentation de données séculaires de morbidité et de couts et la construction d’une cohorte incidente à partir d’une approche méthodologique permettant de diminuer la présence de cas contaminants. La possibilité de construire des cohortes de prévalence ou d’incidence tout en limitant le biais de rappel a été un gain majeur dans ces analyses basées sur des données médicoadministratives. Comme discuté à plusieurs reprises, sans doute le biais le plus rapporté dans les études basées sur les enquêtes ou toute donnée autorapportée est le biais de rappel. Par exemple, la prévalence de période (p. ex. mensuelle, annuelle) peut être biaisée par des biais de rappel et peut expliquer la présence de réponses incomplètes dans les questionnaires (Walker, 2000). Selon Carey et collaborateurs, un biais de rappel peu survenir à l’intérieur de quatre mois chez des patients vivant un épisode de douleur lombaire (Carey, Garrett, et al., 1995). Cependant, il existe aussi un biais de télescopage avant (« forward telescoping ») qui implique que le patient sous-estime le temps depuis son dernier épisode. Cependant, le télescopage avant a tendance à augmenter les cas de douleur lombaire que le patient pense avoir vécus plus récemment qu’en réalité, causant un effet opposé au biais de rappel (Loney & Stratford, 1999). Dans un cas ou dans l’autre, si une étude vise à déterminer la morbidité annuelle de la douleur lombaire à partir d’enquêtes ou de sondages, les estimations ne seront pas aussi fiables que pour évaluer la morbidité ponctuelle. L’une des forces des analyses secondaires des banques administratives est sans conteste de contourner ces biais d’information. Les données consignées dans les fichiers de la RAMQ permettent d’examiner plusieurs années d’historique médical, et malgré les limites soulevées au niveau du codage des diagnostics (voir section 6.7), les données de la RAMQ sont davantage fiables que les données autorapportées au-delà de six mois. De plus, l’utilisation de banques de données administratives peut représenter un avantage pour le calcul d’incidence en raison de leur validité. Il s’agit de banques qui possèdent du moins une bonne spécificité, et pour certaines conditions de santé également une bonne sensibilité, et leur validité externe est souvent importante. Par exemple, 178 Waterman et collaborateurs indiquent que la banque de surveillance NEISS a été validée et est représentative de la population américaine. Elle offre la possibilité de déterminer une population à risque, ce qui est un avantage majeur pour dégager des estimations d’incidence représentatives pour la douleur lombaire (Waterman et al., 2012). Mattila et collaborateurs rapportent également que la banque administrative NHDR de la Finlande a été validée et que sa fiabilité est excellente (Mattila et al., 2009). Les conclusions pouvant être tirées des banques de données sont donc acceptables, considérant que le nombre de limites existantes à partir d’autres approches est également grand. Avantageusement, dans le cadre de nos études, ou d’autres effectuées au Canada, il a été démontré que les sources de données administratives comme celle de la RAMQ, en raison de la couverture universelle, sont connues pour leur représentativité élevée de la population (Asghari et al., 2009) et pour la qualité des données (Tamblyn et al., 1995; Wilchesky et al., 2004; Strom et al., 2012). Comme introduit à la section 2.1, la précision des définitions est un concept clé pour permettre de comparer les mesures d’incidence calculées dans des pays et des populations différentes. Prenons par exemple l’étude de Kopec sur la population canadienne (Kopec et al., 2004). Le fait d’avoir utilisé une définition vague de l’Enquête sur la santé dans les collectivités Canadiennes telle que : « par problème de santé de longue durée, on entend un état qui dure ou qui devrait durer six mois ou plus et qui a été diagnostiqué par un professionnel de la santé » (ESCC, 2010), rend la comparaison de la mesure d’incidence difficile vis-à-vis d’autres études d’incidence de douleur lombaire. Ce genre de définition est équivoque, le patient peut très bien considérer n’importe quelle douleur du plan dorsal des fesses à la tête si on ne lui donne aucun repère anatomique simple, voire visuel. Le biais d’information peut donc être important, menant à une surestimation du nombre de cas incidents associés à de la douleur lombaire. Le chercheur doit également réfléchir si c’est le premier épisode à vie de douleur lombaire qui l’intéresse, ou s’il ne prend en considération qu’une certaine période tampon, ce qui pourrait mener à la contamination de la cohorte incidente par des patients récurrents, par exemple dans les études de cohortes d’inception (Stanton et al., 2008). À ce moment, des intervalles de temps entre les épisodes devront être considérés avant de réintégrer un individu dans le bassin de la population à risque (Wasiak 179 et al., 2003), ou la considération d’une période de clairance, telle que nous l’avons proposé dans notre seconde étude (voir section 4.2.3). Si par contre, l’incidence est basée sur des cohortes prospectives sélectionnées à partir d’enquêtes ou de recrutement, d’autres limites sont à prendre en considération. Par exemple, un nombre important de perdus de vue peuvent affecter les analyses de régression et la validité externe de l’étude (Zitting et al., 1998). George en 2002 relevait une attrition de 26 % dans sa cohorte de Saskatchewan (George, 2002). Ce problème était bien documenté puisqu’il s’agit d’une province dont l’agriculture est l’un des principaux moteurs économiques, et en temps de moisson, les fermiers sont trop occupés pour répondre aux questionnaires. Il y a donc à ce moment danger de sous-estimer la morbidité s’il y a présence d’une importante sous-population qui peut affecter les résultats à l’échelle de la population. Dans le cas d’études qui portent sur des personnes très âgées qui présentent plusieurs comorbidités, il faudra tenir compte de la mortalité. Lors d’un suivi postal, Papageorgiou a également soulevé le danger de surestimer l’incidence de douleur lombaire (Papageorgiou et al., 1996). Ceci serait dû au fait que les patients présentant un nouvel épisode sont plus à risque de renvoyer le questionnaire que des individus ayant déjà eu des épisodes résolus par le passé. L’utilisation de banques de données administratives permet d’éliminer les biais d’information associés aux données autorapportées comme de réduire les perdus de vue (sauf en cas de migration) et de consigner les cas les plus graves peu importe l’emploi et la saison, ces cas devant en général être vus par des spécialistes pour une investigation approfondie ou pour une hospitalisation. L’ambigüité quant à la condition de santé est réduite par l’utilisation d’algorithmes construits sur le criblage de codes diagnostics inscrits par des médecins suite à une anamnèse et un examen du patient, ce qui accroit la validité du moins en lien avec l’exactitude du site anatomique de la condition de santé. Enfin, l’analyse séculaire des couts représente certainement une force de l’étude. Malgré les nombreuses limites décrites à la section 6.7, et que l’analyse ne soit que partielle en regard des différentes dimensions des couts directs ou de la perspective utilisée, il demeure qu’aucune étude n’a présenté de données de couts d’interventions sur plusieurs années subséquentes. Ces couts sont également déterminés à partir de cohortes incidentes, 180 ce qui n’avait pas encore été tenté. Contrairement à la plupart des études qui rapporte le cout global de la douleur lombaire pour des patients prévalents, notre étude rapporte plutôt le cout initial imputé à des patients consultant pour la toute première fois pour une récurrence d’épisodes médicaux de douleur lombaire. Également, à notre connaissance, aucune étude n’a cherché à déterminer, au-delà de 12 mois, le profil de consommation de services médicaux de patients aux prises avec une récurrence d’épisodes de douleur lombaire. Ces données sont particulièrement intéressantes en ce qui a trait à la différence majeure des couts engendrés entre l’année index et l’année de suivi et contribue ainsi à générer des hypothèses qui pourraient faire l’objet de futures recherches. Enfin, l’analyse de couts stratifiée par âge et selon le sexe met l’accent sur l’importance de suivre particulièrement le groupe des personnes âgées qui affiche une tendance séculaire de couts à la hausse dans notre population vieillissante. 181 7. PERSPECTIVES ET CONCLUSIONS Au final, le projet présenté dans cette thèse aura permis de mettre l’accent sur le fait que la morbidité de la douleur lombaire récurrente était en baisse autant chez les hommes que chez les femmes de moins de 65 ans dans la population québécoise. Loin de rassurer, ce constat soulève de nombreuses questions à savoir si cette baisse est réelle ou si elle cache plutôt des problèmes d’envergure : un manque d’accessibilité à des médecins de famille, une perte de confiance vis-à-vis du système médical ou face à un manque de médecins spécialisés en gestion de la douleur, un manque d’éducation de la part de patients qui préfèrent ne pas consulter. Les moins de 65 ans peuvent avoir accès à une couverture de soins paramédicaux fournie par leur employeur. Ces travailleurs sont peut-être plus enclins à rencontrer des professionnels de la santé de médecines alternatives et complémentaires plutôt que de consulter dans le système de santé. Il est crucial de savoir ce qu’il advient de cette clientèle récurrente. La douleur lombaire récurrente et chronique coute excessivement cher à la société en couts indirects. Malgré la diminution de morbidité observée dans notre étude, les couts totaux augmentent légèrement. Le ministère de la santé pourrait se satisfaire de savoir que ces couts n’explosent pas. Cependant, si cette clientèle consulte tout simplement ailleurs et subit toujours autant d’arrêts de travail, la facture est tout simplement déplacée dans un autre ministère ou transférée aux employeurs et aux employés. Le deuxième constat de notre étude est que la population de personnes âgées de plus de 65 ans consulte davantage et connait une hausse de nouveaux cas. C’est en fait la seule tranche d’âge qui voit une augmentation importante autant en terme de prévalence que d’incidence. Les femmes sont particulièrement visées par cette augmentation. Étant donné notre population vieillissante, il importe de comprendre la provenance de ce phénomène, la raison du nombre croissant de consultations pour douleur lombaire. S’agit-il d’une augmentation de cas d’arthrose, de cas d’ostéoporose, y a-t-il une explication médicale? Il est à noter que les personnes âgées présentent de nombreuses comorbidités. Cependant, les diagnostics de douleur lombaire apparaissent comme diagnostic principal sur les bordereaux de paiement, donc comme raison principale d’une consultation médicale. Comment freiner cet élan, qui si la tendance se maintien, ne fera qu’augmenter proportionnellement au vieillissement de la population dans les prochaines années. Une 182 étude plus approfondie sur les facteurs de risque d’apparition de douleur lombaire récurrente doit être commandée dans cette population. C’est également le groupe pour lequel les couts médians ont le plus augmenté autour de l’année 2007. Il faudra chercher à savoir si c’est encore le cas pendant la prochaine décennie. Enfin, dernière observation de l’étude, il faut mettre l’emphase sur la première année de consultation pour des patients récurrents. La première année engendre cinq fois plus de couts que les années de suivi. S’agit-il d’une bonne nouvelle dans ce sens que le suivi est optimisé la première année et que le patient récupère rapidement et connait un taux de réadmission faible lors des années subséquentes? Ou si le patient est vu plusieurs fois la première année sans résultats tangibles et qu’il fini par perdre confiance et décide de ne plus consulter. Ce seront aussi des avenues à explorer. Un suivi de la médication prescrite au patient sera nécessaire afin de savoir si le patient est traité pour un problème de douleur à long terme par exemple. En conclusion, le type d’étude présenté ici est nécessaire pour assurer une veille des maladies chroniques et pour faciliter l’orientation des politiques de santé à venir. Le Canada qui au siècle dernier faisait partie de l’avant-garde pour la qualité de son système de santé glissait en 2000 au 30e rang sur 190 pays selon le classement de l’OMS, et se retrouvait dans le peloton de queue parmi les pays du Commonwealth. Le directeur général de l’ICIS s’inquiétait des dépenses de santé qui atteignaient 11,6 % du produit intérieur brut en 2011 et qui ont dépassé le cap des 200 milliards de dollars annuellement. Malgré un cout par habitant au-dessus de la moyenne des pays de l’OCDE, notre système de santé ne gagne ni en efficience ni en qualité. Le Conference Board du Canada clame la nécessité d’une réforme. Ce dernier, en 2012, a mis l’accent sur cinq priorités dont : 1- Mieux former les médecins de famille et équipes multidisciplinaires en soins de première ligne pour répondre à la demande de la population vieillissante et des populations vulnérables; 2- Uniformiser et intensifier l’utilisation des données de patients pour améliorer l’efficience des traitements; 3- Transformer le système de compensation des intervenants pour diminuer le nombre de consultations et d’interventions en capitalisant sur des issues de traitement positives; 183 4- Focaliser le système sur la « santé » des populations, donc mettre l’accent sur la prévention des maladies chroniques; 5- Créer un système transparent afin de mobiliser l’ensemble des intervenants, des patients et des contribuables à participer à l’atteinte des buts d’efficience et de qualité. Tous ces points touchent certains aspects reliés au projet présenté dans cet ouvrage dans l’effort de suivre et d’évaluer le système et de donner du support aux décideurs et aux intervenants. Par exemple, le point 3 indique la nécessité de diminuer les consultations excessives pour lesquelles le rendement n’est pas au rendez-vous. Pour identifier les conditions de santé les plus récurrentes, telle la douleur lombaire, l’analyse secondaire de données administratives se révèle un outil puissant et peu couteux. Le point 1, mieux former les médecins en regard de la population vieillissante; nos données stratifiées démontrent justement une hausse inquiétante dans cette population, les analyses secondaires permettent d’identifier de tels points chauds dans les données populationnelles. Le point 5, créer un système transparent. Cette priorité rejoint le but des travaux de l’équipe Primus de produire un atlas québécois de douleur chronique non cancéreuse à partir de données administratives et d’identifier par géolocalisation les populations les plus vulnérables en ajustant les données avec les indices de défavorisation de Pampalon. L’identification d’inégalités permettra justement de faire un suivi dans ces régions de manière à répondre au point 3 et modifier les issues de traitement soit en éduquant davantage les médecins ou les patients. Enfin, le point 4, mettre l’accent sur la prévention des maladies chroniques, encore faut-il pouvoir les identifier pour agir en conséquence. Dans des provinces qui allouent déjà bientôt la moitié de leur budget de fonctionnement à la santé, mieux vaut optimiser ce qui est déjà disponible, soit l’utilisation des banques de données médicoadministratives. Une étude récente mettait l’accent sur la liaison des données administratives aux données purement cliniques (data linking) (Jutte et al., 2011). Le mot de l’heure dans le domaine. Cela éliminerait de nombreuses limites décrites dans la précédente discussion. Imaginons une liaison des données du Registre Québec Douleur aux données administratives de la RAMQ. Nous aurions accès à des données de questionnaires provenant du registre sur la gravité de la douleur, permettant ainsi d’utiliser les définitions « cliniques » faisant consensus. En même temps, nous éliminerions les biais de rappel des 184 données rapportées par les patients en utilisant les données médicoadministratives. Nous pourrions donc construire de vraies cohortes incidentes de douleur lombaire pour des patients n’ayant véritablement jamais consulté ni en médecine traditionnelle ni en médecine alternative et complémentaire. Bref, la synergie de ces banques améliorerait la validité interne, mais également externe (généralisabilité). En terme de couts, il sera assurément important d’envisager l’inclusion systématique d’un filtre économique dans les profils de conditions de santé présentés aux décideurs, et ce par le truchement des banques administratives. Idéalement le Registre Québec Douleur devrait également implémenter cette composante de manière à pouvoir éventuellement permettre des études de coutefficience ou cout-bénéfice en regard à la gestion spécialisée de la douleur chronique. En bref, encore beaucoup de travail à faire pour améliorer le sort des patients et du système de santé, particulièrement au niveau de la recherche sur la douleur lombaire. Les outils existent, les technologies sont prêtes, les solutions envisageables, il ne manque plus qu’à polariser la volonté politique vers des solutions à long terme afin d’effectuer une veille pour cette condition de santé. 185 REMERCIEMENTS Il n’est pas toujours aisé de sortir de sa zone de confort. Pour réussir ce tour de force, il faut en général qu’un évènement catastrophique survienne ou bénéficier d’un coup de main. Heureusement, j’ai eu droit au coup de main. Un merci tout spécial à ma chérie qui malgré qu’elle en ait eu plein les bras avec sa résidence en médecine, m’ait aidé à faire le premier pas pour reprendre le chemin des études, peu importe ce que ça représentait en termes de temps, de logistique, de stress et de finances. Évidemment, Philippe, toi aussi tu as eu un rôle clé dans cette entreprise. De me conseiller de poursuivre, de me dégager une zone de navigation acceptable entre le travail et les études, de te prêter au jeu du capitaine, puis de me laisser à quai au terme du voyage avec un bon bagage pour que je trouve mon propre port. Alain, je te remercie de m’avoir accepté dans ton équipe, d’avoir pris le risque de prendre un inconnu qui arrivait du monde de la recherche fondamentale avec des idées ambitieuses (trop), et un horaire déjà chargé. Jusqu’à la fin, tu m’auras appris à me calmer le pompon. D’ailleurs Josiane a été une très bonne conseillère tout au long de mon doctorat pour me faire mettre en pratique cet enseignement. Bref, rien ne sert de courir; il faut partir à point. Cette opportunité m’aura permis au final d’atteindre mon but et d’avoir une compréhension véritable du processus de recherche de la cellule à la population. C’était une grosse montagne à gravir, maintenant j’apprécie le paysage. Je termine donc ce passage de ma vie avec des connaissances en plus, des cheveux en moins. Merci à tous mes amis et ma famille d’être restés présents malgré mes absences, de vous être intéressé à mon projet par pur intérêt ou pour me supporter psychologiquement, les deux ont été apprécié! Je tiens à remercier spécialement Yvon, celui qui m’a poussé depuis mon adolescence à réaliser un doctorat et qui m’a fourni un emploi durant toutes ces années pour poursuivre à l’université. Et bien entendu mes parents, qui ont toujours réalisé des sacrifices pour que leurs gars réussissent indépendamment de la voie empruntée. Ce travail n’aurait pas été possible non plus sans le support du Réseau Québécois de Recherche sur la Douleur, du Fonds de Recherche Santé du Québec et des Instituts de Recherche en Santé du Canada qui m’ont permis d’avoir accès à du financement de projet et des bourses de formation doctorale. 186 LISTE DES RÉFÉRENCES Abdulla, A., Adams, N., Bone, M., Elliott, A.M., Gaffin, J., Jones, D., Knaggs, R., Martin, D., Sampson, L., Schofield, P., British Geriatric Society (2013) Guidance on the management of pain in older people. Age Ageing, 42 Suppl 1, i1–i57. Abenhaim, L. & Suissa, S. (1987) Importance and economic burden of occupational back pain: a study of 2,500 cases representative of Quebec. J Occup Med, 29, 670–674. Airaksinen, O., Brox, J.I., Cedraschi, C., Hildebrandt, J., Klaber-Moffett, J., Kovacs, F., Mannion, A.F., Reis, S., Staal, J.B., Ursin, H., Zanoli, G., COST B13 Working Group on Guidelines for Chronic Low Back Pain (2006) Chapter 4. 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EN SANTÉ CHEZ L'HUMAIN Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke Le 10 janvier 2008 Dr Alain Vanasse Groupe PRIMUS CHUS - Fleurimont OBJET: Projet # 07-147 Atlas québécois de la douleur chronique. Dr Vanasse, Le Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain du Centre Hospitalier Universitaire de Sherbrooke a évalué les aspects scientifique et éthique du protocole de recherche cité et, à ce titre, votre projet a été approuvé. À cet effet, veuillez trouver ci-joint le formulaire d'approbation. Espérant le tout à votre convenance, .~J!~) A' __ /~~ . /7~ je vous prie d'agréer mes sentiments distingués . __ -. Jean-Patrice Baillargeon~M.D. Vice-président du comité Téléphone: 819346-1110, postes 12856-13861-13870 Télécopieur: 819820-6498 Courrier électronique: [email protected] Site WEB: www.crc.cnus.qc.ca H6PITAL FLEURI MONT 3001, 12é Avenue Nord Bureau Z5-3031 Fleurimont (Québec) J1 H 5N4 J.\t"t"t'(UtjJ.\ IIUN t: 1 J.\ lit:;:, 1J.\ 1IUN Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke et de l'Université de Sherbrooke du APRIL Marie-Josée, Ph.D. éthicienne, Faculté de Médecine BAILLARGEON, Jean-Patrice, M.D., service d'endocrinologie, CHUS, vice-président BEAUPRÉ, Me Michèle, avocate, extérieur BOLDUC, Brigitte, pharmacienne, CHUS BOURGAULT, Patricia, Ph.D., infirmière, FMSS BRISSON, Sophie, avocate, extérieur CABANA, François, M.D., orthopédiste, CHUS CHIANETTA, Jean-Marc, résident en psychiatrie, CHUS CLOUTIER, Sylvie, pharmacienne, CHUS, vice-présidente CLOUTIER, Yvan, éthicien, extérieur DESROSIERS, Nicole, représentante du public FROST, Eric, Ph.D., département de microbiologie, CHUS GAGNÉ, Ginette, représentante du publique GIRARDIN, Colette, M.D. département de pédiatrie, CHUS LANGEVIN, Chantal, Infirmière, Cil-CHUS LEBLOND, Julie, pharmacienne, CHUS LETELLlER, Marc, Ph.D., département de biochimie, CHUS NORMANDIN, Denyse, M.D., chirurgie cardiovasculaire pédiatrique, CHUS PINEAUL T, Caroline, représentante du public ROBERGE, Jean-Pierre, représentant du public ROUSSEAU, Marie-Pierre, Pharmacienne, CHUS TÉTRAUL T, Jean-Pierre, anesthésiologiste, CHUS, président En raison de son implication dans le projet de recherche, la personne suivante, membre du comité d'éthique, n'a pas participé à son évaluation ou à son approbation s/o Approbation demandée par: Dr Alain Vanasse Pour le projet # 07-147 Atlas québécois de la douleur chronique. Approbation donnée ~ Protocole complet: par la vice-présidence le 10 janvier 2008 pour 12 mois. Version de novembre 2007 o Formulaire de consentement principal: o Autre formulaire de consentement: ~ Questionnaire(s) o Amendement ~ Autre: : "L'ampleur du phénomène #:. de la douleur chronique" Date amendement: Lettre d'invitation aux participants (v. du 9 janvier 2007) Brochure IMonographie reçue pour évaluation: En ce qui concerne l'essai clinique visé, à titre de représentant du Comité d'éthique de la recherche, je certifie que: 1. La composition de ce comité d'éthique satisfait aux exigences pertinentes prévues dans le titre 5 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues. 2. Le comité d'éthique de la recherche exerce ses activités de manière conforme aux bonnes pratiques cliniques, et 3. Ce comité d'éthique a examiné et approuvé le formulaire de consentement et le protocole d'essai clinique qui sera mené par le chercheur susmentionné, au lieu d'essai indiqué. L'approbation et les opinions du présent comité ont été consignées par écrit. 11 janvier 2008 Signé par: Date de la signature APPROBATION Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke Membres du Comité: APRIL Marie-Josée, Ph.D. éthicienne, Faculté de Médecine BEAUPRÉ, Me Michéle, avocate, extérieur BOLDUC, Brigitte, pharmacienne, CHUS BOURGAULT, Patricia, Ph. O., École des sciences infirmiéres, FMSS BRISSON, Sophie, avocate, extérieur CABANA, François, M.D., orthopédiste, CHUS CLICHE, Jocelyne, représentante du public CLOUTIER, Sylvie, pharmacienne, CHUS, vice-présidente CLOUTIER, Yvan, éthicien, extérieur DESROSIERS, Nicole, représentante du public FROST, Eric, Ph.D., département de microbiologie, CHUS GAGNÉ, Ginette, représentante du publique GIRARDIN, Colette, M.D. département de pédiatrie, CHUS LANGEVIN, Chantal, Infirmière, Cil-CHUS LEBLOND, Julie, pharmacienne, CHUS LETELLlER, Marc, Ph.D., département de biochimie, CHUS ROBERGE, Jean-Pierre, représentant du public ROUSSEAU, Marie-Pierre, Pharmacienne, CHUS TÉTRAUL T, Jean-Pierre, anesthésiologiste, CHUS, président En raison de son implication dans le projet de recherche, la personne suivante, membre du comité d'éthique, n'a pas participé à son évaluation ou à son approbation: S/O Approbation demandée par: Dr Alain Vanasse Pour le projet # 07-147-R1 Atlas québécois de la douleur chronique. Approbation donnée par la présidence le 9 janvier 2009 o Protocole complet: Version de novembre 2007 o formulaire de consentement principal: o Autre formulaire de consentement: o Questionnaire(s) : o Amendement # : Date amendement: ~ Autre: Renouvellement pour 12 mois. d'approbation jusqu'au 9 janvier 2010 En ce qui concerne l'essai clinique visé, à titre de représentant du Comité d'éthique de la recherche, je certifie que: 1. La composition de ce comité d'éthique satisfait aux exigences pertinentes prévues dans le titre 5 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues. 2. Le comité d'éthique de la recherche exerce ses activités de manière conforme aux bonnes pratiques cliniques, et 3. Ce comité d'éthique a examiné et approuvé le formulaire de consentement et le protocole d'essai clinique qui sera mené par le chercheur susmentionné, au lieu d'essai indiqué. L'approbation et les opinions du présent comité ont été consignées par écrit. Signé par: 9 janvier 2009 Jean-Pierre Tétrault, M.D. Président du comité Date de signature APPROBATION Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke Membres du Comité: du ALLARD, Jacques, M.D. Médecine de famille APRIL Marie-Josée, Ph.D. éthicienne, Faculté de Médecine, vice-présidente BEAUPRÉ, Me Michèle, avocate, extérieur BOLDUC, Brigitte, pharmacienne, CHUS BRISSON, Sophie, avocate, extérieur BRODEUR, Louise, représentante du public CLICHE, Jocelyne, représentante du public CLOUTIER, Sylvie, pharmacienne, CHUS CLOUTIER, Yvan, éthicien, extérieur CYR, Claude, M.D. pédiatre, CHUS DESROSIERS, Nicole, représentante du public (membre substitut) GAGNÉ, Ginette, représentante du publique GRÉGOIRE, Nathalie, avocate, extérieur* LEBLOND, Julie, pharmacienne, CHUS ROBERGE, Jean-Pierre, représentant du public ROUSSEAU, Marie-Pierre, Pharmacienne, CHUS TÉTRAUL T, Jean-Pierre, anesthésiologiste, CHUS, président En raison de son implication dans le projet de recherche, la personne suivante, membre du comité d'éthique, n'a pas participé à son évaluation ou à son approbation: S/O Approbation demandée par: Dr Alain Vanasse Pour le projet # 07-147-R2 Atlas québécois de la douleur chronique. Approbation D donnée Protocole complet: D formulaire D Autre par la vice-présidence de consentement 2010 pour 12 mois. principal: formulaire de consentement: D Questionnaire(s) : D Amendement # : 181 Autre: le 8 janvier Version de novembre 2007 Renouvellement Date amendement: d'approbation jusqu'au 8 janvier 2011 En ce qui concerne l'essai clinique visé, à titre de représentant du Comité d'éthique de la recherche, je certifie que: 1. La composition de ce comité d'éthique satisfait aux exigences pertinentes prévues dans le titre 5 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues. 2. Le comité d'éthique de la recherche exerce ses activités de manière conforme aux bonnes pratiques cliniques, et 3. Ce comité d'éthique a examiné et approuvé le formulaire de consentement et le protocole d'essai clinique qui sera mené par le chercheur susmentionné, au lieu d'essai indiqué. L'approbation et les opinions du présent comité ont été consignées par écrit. Signé par: ~ ,II ~( lt\t~ LJ) Ph.D. ~ arie-J'osée'April, , . ., Vice-presidente du comite 8 janvier 2010 Date de signature APPROBATION Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke MEMBRES DU COMITÉ: APRIL Marie-Josée, Ph.D. rep. en éthique, FMSS, v.-présidente BERNIER, Louise, avocate, extérieur BOUFFARD, Nicole, représentante scientifique, extérieur BRISSON, Sophie, avocate, extérieur BRODEUR, Louise, représentante du public CHAÂLALA, Chiraz, MD, neurochirurgienne, CHUS CLICHE, Jocelyne, représentante du public CLOUTIER, Sylvie, pharmacienne, CHUS CLOUTIER, Yvan, représentant en éthique, extérieur COTÉ, Anne-Marie, MD, néphrologue, CHUS CYR, Claude, MD, pédiatre, CHUS GAGNÉ, Ginette, représentante du public GRÉGOIRE, Nathalie, avocate, extérieur JETTÉ, Sylvie, Ph.D., infirmière, FMSS LEBLOND, Julie, pharmacienne, CHUS MÉNARD, Julie, Ph.D. représentante scientifique, CRC MONETTE, Marcelle, présidente, PINERO-MEDINA, Francisco Jose, MD, psychiatre, CHUS POIRIER, Marie-Sol, M.Sc (c), représentante en éthique ROBERGE, Jean-Pierre, représentant du public ROUSSEAU, Marie-Pierre, pharmacienne, CHUS SAVARD, Anne-Marie, avocate, extérieur En raison de son implication dans le projet de recherche, la personne suivante, membre du comité d'éthique, n'a pas participé à son évaluation ou à son approbation: 8/0 Approbation demandée par: Dr Alain Vanasse Pour le projet # 07-147-R3 Atlas québécois de la douleur chronique. Approbation donnée par la présidence le 7 janvier 2011 o Protocole complet: Version de novembre 2007 o formulaire de consentement principal: o Autre formulaire de consentement: o Questionnaire(s) : o Amendement # : Date amendement: ~ Autre: 1 Renouvellement pour 12 mois. d'approbation jusqu'au 7 janvier 2012 En ce qui concerne l'essai clinique visé, à titre de représentant du Comité d'éthique de la recherche, je certifie que: 1. La composition de ce comité d'éthique satisfait aux exigences pertinentes prévues dans le titre 5 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues. . .. 2. Le comité d'éthique de la recherche exerce ses activités de manière conforme aux bonnes pratiques cliniques, et 3. Ce comité d'éthique a examiné et approuvé le formulaire de consentement et le protocole d'essai cliniqu~ qui sera mené par le chercheur susmentionné, au lieu d'essai indiqué. L'approbation et les opinions du présent comité ont été consignées par écrit. Signé par: ~(~y cdQg.. ~~(/yv~;a;:.l...I.<::....Marcelle Monette, Ph.D. Présidente du comité _ 7 janvier 2011 Date de signature APPROBATION Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke MEMBRES DU COMITÉ: APRIL Marie-Josée, Ph.D. rep. éthique, FMSS, v.-présidente BERNIER, Louise, LL.D. juriste, professeure, UdeS BOUFFARD, Nicole, infirmière, rep. scientifique, v.-présidente BRISSON, Sophie, LL.M. avocate, extérieur BRODEUR, Louise, B.FA représentante du public CHAÂLALA, Chiraz, M.D. neurochirurgie, CHUS CISSÉ, Aboubacar, D.Sc. professeur, FMSS CLICHE, Jocelyne, LL.M. représentante du public / droit CLOUTIER, Sylvie, M.Sc. pharmacienne, CHUS CLOUTIER, Yvan, Ph.D. représentant en éthique, extérieur COTÉ, Anne-Marie, M.D. néphrologie, CHUS CYR, Claude, M.D. pédiatrie, CHUS DESPATIS, Marc-Antoine, M.D. chirurgie vasculaire, CHUS GRÉGOIRE, Nathalie, LL.M. avocate, extérieur JETTÉ, Sylvie, D. Sc. infirmière, professeure, FMSS LEBLOND, Julie, M. Sc. pharmacienne, CHUS MÉNARD, Julie, D. Sc. représentante scientifique, CRC MaNETTE, Marcelle, Ph ..D. rep. éthique / scientifique, Présidente NAUD, Marie-George, C.Ps. représentante du public POIRIER, Marie-Sol, M.Sc (c), rep. éthique / scientifique ROBERGE, Jean-Pierre, B.E.,représentant du public ROUSSEAU, Marie-Pierre, M. Sc. pharmacienne, CHUS SAVARD, Anne-Marie, LL.D. avocate, professeure, UdeS VIGNEAULT, Raymonde, représentante du public En raison de son implication dans le projet de recherche, la personne suivante, membre du comité d'éthique, n'a pas participé à son évaluation ou à son approbation: S/O Approbation demandée par: Dr Alain Vanasse Pour le projet # 07-147-R4 Atlas québécois de la douleur chronique. Approbation donnée par la présidence D Protocole complet: Version de novembre 2007 D formulaire de consentement D Autre pour 12 mois principal: formulaire de consentement: D Questionnaire(s) : D Amendement # : ~ Autre: le 7 janvier 2012 Renouvellement Date amendement: d'approbation jusqu'au 7 janvier 2013 En ce qui concerne l'essai clinique visé, à titre de représentant du Comité d'éthique de la recherche, je certifie que: 1. La composition de ce comité d'éthique satisfait aux exigences pertinentes prévues dans le titre 5 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues. 2. Le comité d'éthique de la recherche exerce ses activités de manière conforme aux bonnes pratiques cliniques, et 3. Ce comité d'éthique a examiné et approuvé le formulaire de consentement et le protocole d'essai clinique qui sera mené par le chercheur susmentionné, au lieu d'essai indiqué. L'approbation et les opinions du présent comité ont été consignées par écrit. 7 janvier 2012 Signé par: Marcelle Monette, Ph.D. Présidente du comité Date de signature APPROBATION Comité d'éthique de la recherche en santé chez l'humain du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke MEMBRES DU COMITÉ: BEAUCHAMP, René-Paul, M.D. interniste, CHUS BERNIER, Louise, LL.D. juriste, professeure, UdeS BOUFFARD, Nicole, infirmière, rep. scientifique, v.-présidente BRISSON, Sophie, LL.M. avocate, extérieur BRODEUR, Louise, B.FA représentante du public CISSÉ, Aboubacar, D.Sc. professeur, FMSS CLICHE, Jocelyne, LL.M. représentante du public 1 droit CLOUTIER, Sylvie, M.Sc. pharmacienne, CHUS CLOUTIER, Yvan, Ph.D. représentant en éthique, extérieur CÔTÉ, Anne-Marie, M.D. néphrologie, CHUS CUMYN, Annabelle, M.D. interniste, CHUS CYR, Claude, M.D. pédiatrie, CHUS DESPATIS, Marc-Antoine, M.D. chirurgie vasculaire, CHUS ECHAVE, Pablo, M.D. anesthésiste, CHUS FORTIN, Gilberte, Inf. représentante en éthique, extérieur GRÉGOIRE, Nathalie, LL.M. avocate, extérieur JETTÉ, Sylvie, D. Sc. infirmière, professeure, FMSS LAUZIÈRE, Denise, avocate extérieure LEBLOND, Julie, M. Sc. pharmacienne, CHUS MÉNARD, Julie, Ph. D. représentante scientifique, CRC MONETTE, Marcelle, Ph. D. rep. éthique 1 scientifique, Présidente NAUD, Marie-George, C.Ps. représentante du public POIRIER, Marie-Sol, M.Sc (c), rep. éthique 1 scientifique ROBERGE, Jean-Pierre, B.E.,représentant du public ROUSSEAU, Marie-Pierre, M. Sc. pharmacienne, CHUS SAVARD, Anne-Marie, LL.D. avocate, professeure, UdeS VERRET, Pascale, M.D. interniste CHUS VIGNEAULT, Raymonde, représentante du public En raison de son implication dans le projet de recherche, la personne suivante, membre du comité d'éthique, n'a pas participé à son évaluation ou à son approbation: S/O Approbation demandée par: Dr Alain Vanasse Pour le projet # 07-147 Atlas québécois de la douleur chronique. Approbation donnée par la présidence D Protocole complet: Version de novembre 2007 D formulaire de consentement D Autre pour 12 mois principal: formulaire de consentement: D Questionnaire(s) : D Amendement # : ~ Autre: le 7 janvier 2013 Renouvellement Date amendement: d'approbation jusqu'au 7 janvier 2014 En ce qui concerne l'essai clinique visé, à titre de représentant du Comité d'éthique de la recherche, je certifie que: 1. La composition de ce comité d'éthique satisfait aux exigences pertinentes prévues dans le titre 5 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues. 2. Le comité d'éthique de la recherche exerce ses activités de manière conforme aux bonnes pratiques cliniques, et 3. Ce comité d'éthique a examiné et approuvé le formulaire de consentement et le protocole d'essai clinique qui sera mené par le chercheur susmentionné, au lieu d'essai indiqué. L'approbation et les opinions du présent comité ont été consignées par écrit. 7 janvier 2013 Signé par: Marcelle Monette, Ph.D. Présidente du comité Date de signature ANNEXE II. AUTORISATION DE LA COMMISSION D’ACCÈS À L’INFORMATION DU QUÉBEC 204 205 Commission d'accès à l'information du Québec Siège Bureau de Montréal Bureau 1.10 575, rue Saint-Amable Québec (Québec) G1R 2G4 Téléphone: 418528-7741 Télécopieur: 418 529-3102 Bureau 18.200 500, boulevard René-Lévesque Ouest Montréal (Québec) H2Z 1W7 Téléphone: 514873-4196 Télécopieur: 514844-6170 Sans frais: 1888528-7741 1 [email protected] 1 www.cai.gouv.qc.ca Québec, le 27 septembre 2010 Docteur Alain Vanasse Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke Groupe de recherche PRIMUS 3001, 12e Avenue Nord Sherbrooke (Québec) J1H 5N4 N/Réf. : 09 03 Il Docteur, Nous avons bien reçu votre demande d'autorisation afin de recevoir communication de renseignements personnels de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) ainsi que du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec (MSSS), par l'entremise de son mandataire la RAMQ, dans le cadre de votre projet de recherche intitulé: « Atlas québécois de la douleur chronique non cancéreuse (DCNC) ». À cet effet, nous comprenons que votre étude vise à produire un atlas québécois de la douleur chronique chez les sujets âgés de 18 ans et plus afin de pouvoir comparer la prévalence, l'incidence, l'utilisation des services de santé et les mesures de pronostic de quatre entités diagnostiques de DCNC soit la migraine, la fibromyalgie, le mal de dos et la douleur articulaire (polyarthrite rhumatoïde, arthrose ou rhumatisme) chez différents groupes d'individus selon: leur territoire de résidence (les 18 territoires de l'agence de développement des réseaux locaux de services de la santé et de services sociaux et la proximité des milieux de soins spécialisés); leur milieu de vie (rural, semi-urbain ou urbain); les zones de défavorisation matérielle et sociale. Ainsi, pour réaliser cette étude dont le produit final sera la production d'un atlas interactif accessible par le Web via un système d'information spatio-temporel (SIST) sécurisé, vous travaillerez en collaboration avec plusieurs chercheurs avec le support du Programme ACCORD (application concertée des connaissances et ressources en douleur), lequel s'arrime à la création du «Réseau québécois de recherche sur la 2 douleur» ainsi qu'à la récente mise en place du « Programme national d'évaluation, de traitement et de gestion de la douleur» du MSSS. Après étude de cette demande et conformément à l'article 125 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (L.R.Q., c. A-2.I), la Commission vous autorise à recevoir communication des renseignements personnels de la RAMQ et du MSSS, par l'entremise de son mandataire la RAMQ, pour environ 1,6 millions de québécois âgés de 18 ans et plus ayant eu au moins trois diagnostics identiques sur une période de 365 jours pour l'une des quatre entités diagnostiques de DCNC ou ayant eu au moins un séjour hospitalier avec au moins un des quatre diagnostics, entre le I'" janvier 1999 et le 31 décembre 2008, tel que décrit en annexe. Pour ces sujets, la période d'extraction des renseignements s'échelonnera du 1erjanvier 1996 au 31 décembre 2008. Cette autorisation est cependant assortie des conditions suivantes que vous devez respecter: vous devez assurer la confidentialité des renseignements recevrez; personnels que vous vous devez faire signer un engagement à la confidentialité aux membres de l'équipe de recherche qui n'ont pas signé le formulaire de demande d'autorisation et à toute autre personne qui pourrait s'y joindre; vous devez faire signer un engagement à la confidentialité à tous les utilisateurs du SIST et conserver une liste à jour de ces utilisateurs pour consultation par la RAMQ, le MSSS ou la CAl, le cas échéant; vous devez utiliser les renseignements reçus aux seules fins de cette étude; via le SIST ou dans vos rapports et publications, vous ne devez pas publier de renseignement permettant d'identifier une personne physique; vous devez utiliser les renseignements personnels de manière à assurer le respect des sous-populations identifiées; vous ne devez pas communiquer un renseignement reçu à d'autres personnes que celles qui sont autorisées à le recevoir dans le cadre de cette recherche; l'ensemble des renseignements personnels reçus de la RAMQ et du MSSS, via son mandataire la RAMQ, devra être détruit au plus tard le 30 septembre 2015. Outre la présente autorisation ainsi que le soutien que vous avez reçu pour la réalisation de votre recherche de la part du responsable ministériel du dossier de la gestion de la douleur chronique au MSSS, le Dr Louis Dufresne, la Commission vous rappelle que la 3 décision de vous communiquer les renseignements personnels demandés relève de la compétence de la RAMQ et du MSSS qui les détiennent légalement. Veuillez agréer, Docteur, l'expression de nos sentiments les meilleurs. Le secrétaire général, JSD/LRllp c.c. Me André Rochon, RAMQ MmeJoanne Gaumond, RAMQ MmeLatifa Elfassihi, MSSS M. Claude Larnarre, MSSS Me Naomi Ayotte, MSSS MmeLine Jobin, MSSS Dr Louis Dufresne, MSSS Annexe Renseignements demandés à la RAMQ et au MSSS, via son mandataire la RAMQ, pour la réalisation de l'étude du Dr Alain Vanasse (09 03 Il). Les sujets seront sélectionnés selon des critères suivants: sujets québécois âgés de 18 ans et plus au moment du premier service à l'acte ou au moment du départ du séjour hospitalier; personne ayant eu au moins trois diagnostics identiques sur une période de 365 jours pour l'une des quatre entités diagnostiques de DCNC au Québec (migraine, fibromyalgie, mal de dos et douleur articulaire) ou personne ayant eu au moins un séjour hospitalier avec au moins un des quatre diagnostics et une date de départ comprise dans la période à l'étude, soit du t" janvier 1999 et le 31 décembre 2008; possède un numéro d'assurance maladie (NAM) existant et valide; personne toujours vivante au 1erjanvier 1999. Période d'extraction des renseignements: 1er janvier 1996 au 31 décembre 2008. 1- Fichiers de la RAMQ Fichier « Information sur la personne assurée» Numéro banalisé de l'individu Année et mois de naissance (AAAA-MM) Sexe du bénéficiaire Date de décès (AAAA-MM) si comprise dans la période d'extraction des données Fichier « Territoire de CLSC de résidence personne assurée» Numéro banalisé de l'individu Territoire CLSC Code postal à 3 positions Fichier « Aire de diffusion » Numéro banalisé de l'individu Code postal à 3 positions Aire de diffusion 1 1 Le calcul des aires de diffusion sera effectué par la RAMQ à l'aide d'un fichier de conversion des codes postaux fourni par le chercheur. Le fichier du chercheur comprendra les aires de diffusion en fonction des codes postaux à six positions. L'aire de diffusion comprend entre l et 850 codes postaux. ---- - 2 Fichier « Indice de défavorisation - Personne assurée» Numéro banalisé de l'individu Code postal à 3 positions Quintile des composantes matérielle Quintile des composantes sociale Centile des composantes matérielle Centile des composantes sociale Base Groupe Fichier « Périodes d'admissibilité - Assurance médicaments JJ Numéro banalisé de l'individu Code programme médicament Code de plan Date début admissibilité (AAAA-MM) Date fin admissibilité (AAAA-MM) Fichier « Services pharmaceutiques» Numéro banalisé de l'individu Code programme médicament Code de plan Date du service CodeDIN Classe AHF Code de dénomination commune Code de forme Code teneur Code de nature d'expression d'ordonnance Durée du traitement Quantité du médicament Classe du prescripteur Numéro banalisé du prescripteur Fichier des services médicaux Numéro banalisé de l'individu Classe du professionnel Numéro banalisé du professionnel Code d'entente de facturation de la demande de paiement Code d'acte Rôle dans l'exécution de l'acte Date du service (AAAA-MM-JJ) Code de diagnostic Type de l'établissement (codé à 3 positions) 3 Numéro établissement banalisé Région du lieu de dispensation Territoire CLSC du lieu de dispensation Fichier « Information sur les professionnels» Classe du professionnel Numéro banalisé du professionnel Spécialité du professionnel Période d'obtention du diplôme (plages d'années RAMQ) 2- Fichiers du MSSS, via son mandataire la RAMQ Fichier « Séjours hospitaliers» ( Med-Écho) Numéro séquentiel banalisé séjour hospitalier Numéro banalisé de l'individu Numéro banalisé de l'établissement Région socio-sanitaire de l'établissement Date d'admission (AAAA-MM-JJ) Date de départ (AAAA-MM-JJ) Type de soins Type d'admission Numéro banalisé de l'établissement MSSS provenance Type lieu provenance Date arrivée urgence (AAA-MM-JJ) Nombre jours séjour hospitalier Numéro banalisé établissement MSSS destination Type lieu destination Fichier «Séjours hospitaliers - Diagnostics» Numéro séquentiel banalisé séjour hospitalier Numéro banalisé de l'individu Type diagnostic Numéro séquentiel diagnostic Numéro séquentiel du système de classification Code de diagnostic médical clinique Code caractéristique diagnostic déterminée par la