
Correspondances en Onco-Hématologie - Vol. VII - n° 3 - juillet-août-septembre 2012
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Mise en place d’une unité dédiée aux AJA atteints de cancer
de fond, de proposer des solutions alternatives ou de
sevrage (consultation d’addictologie), et de diffuser
des messages de prévention.
Les questions de la fertilité, de la sexualité et des options
de préservation de la fertilité sont centrales (4, 25),
même si elles sont parfois difficiles à aborder (26).
Un recueil de sperme devrait être proposé à tout
jeune homme devant être traité pour un cancer. La
cryo conservation ovarienne doit aussi pouvoir être
proposée aux jeunes femmes lors des traitements
associés à un risque élevé d’insuffisance gonadique.
Une collaboration entre oncologues et médecins de
la reproduction est indispensable.
La prise en charge de la douleur, notamment au
moment des gestes diagnostiques, est fondamen-
tale (4) ; elle requiert une expertise particulière liée à
l’âge et au sexe (27).
Unité dédiée aux AJA atteints d'un cancer :
une réponse à leurs besoins psychosociaux
Les unités AJA ont une fonction psychosociale qui se
décline en de nombreuses tâches.
Par leurs structures, elles créent un environnement
qui permet un fonctionnement psychosocial et déve-
loppemental des AJA se rapprochant de la normale,
favorisant les relations ludiques et éducatives, tout en
respectant leur intimité.
Par les professionnels en place, elles permettent de repé-
rer les forces des AJA pour les consolider et de repérer
leurs difficultés pour répondre à leurs besoins sans
attendre une demande d’aide de leur part, car 30 à 78 %
d’entre eux ne feront pas cette démarche (4). Informer
les AJA sur les aides possibles, et proposer ces aides,
est important, car ils feront d’autant plus facilement
une demande d’aide qu’ils la savent possible (4). C’est le
rôle au quotidien de chaque membre de l’équipe dédiée
aux AJA, renforcé lors des entretiens avec l’infirmier
coordonnateur.
Une unité de lieu rapprochant de la “ normalité”
Une unité de lieu permet de recréer à l’hôpital un envi-
ronnement dans lequel les AJA ont l’habitude d’évoluer,
et peut leur permettre de mieux vivre les séjours hospi-
taliers répétés et de mieux supporter des traitements
désagréables (encadré 1). Plusieurs espaces répondent à
cette fonction. À l’IGR, en 2011, les lieux de rencontre des
AJA étaient la salle de détente, appelée le “Squat” (63 %)
[figure 1, p. 146], la salle à manger (35 %), la chambre
(19 %), l’atelier d’art plastique (9 %) et l’école (3 %).
La salle de détente est considérée comme importante
par la majorité des AJA (85 %), même s’ils l’utilisaient
peu (75 % des patients y allaient au moins 1 fois par
jour, mais pour une durée inférieure à 30 mn par jour
dans 79 % des cas), essentiellement en raison des effets
indésirables des traitements. Sa fonction principale
était de leur permettre de s’évader de l’hôpital (62 %)
[figure 1, p. 146] et de retrouver des comportements
familiers. Ce lieu répondait à leurs souhaits d’avoir des
moments d’isolement : 65 % des jeunes y allaient parfois
juste pour sortir de leur chambre, s’affaler sur le canapé
(30 %) et regarder la télé (55 %) ou utiliser l’ordinateur
(47 %) ; il répondait aussi à leurs besoins de moments
Encadré 1. L’avis des adolescents : témoignages.
“ “
Être adolescent dans un service de pédiatrie
Je m’appelle Manon, j’ai 17 ans et j’ai un cancer. Lorsque j’ai été
malade, la question était: “dans quel service va-t-on m’hospitaliser?”
En effet, il n’existe pas beaucoup de services ados en oncologie.
Mon médecin traitant a donc jugé que c’était beaucoup mieux de
me placer dans un service pédiatrique plutôt que dans un service
pour adultes.
J’ai été dans différents hôpitaux; certains mélangent les jeunes
enfants et les ados, d’autres les séparent. Je me sentais beaucoup
mieux en service séparé car je pouvais parler avec des gens de mon
âge de la maladie, mais pas que; je riais avec eux comme avec mes
amis du lycée, je me sentais moins seule pour combattre ma maladie.
En service mélangé, les petits pleuraient, me réveillaient, jouaient
à des jeux que j’ai laissé tomber depuis longtemps. De plus, la
complicité était inexistante car, souvent, les jeunes enfants n’ont pas
la même perception de la maladie que nous, ados, qui comprenons
mieux ce qui nous arrive.
Manon, 17 ans, juin 2012.
Être adolescent dans un service pour adultes
Je suis âgé de 16 ans, considéré comme “adolescent”à l’IGR mais comme “adulte”
pour mon hôpital de proximité, qui gère mes transfusions de globules rouges ou
de plaquettes après mes séances de chimiothérapie.
À chaque fois que je dois me rendre dans cet hôpital de proximité, j’y vais le cœur
serré! En effet, je suis souvent dans une chambre avec 1 voire 2 personnes âgées
avec qui je n’ai rien à échanger, portant la mort sur elles; là, je me ferme, pour moi
c’est un enfer!
Par contre, lorsque je me rends à l’IGR, même si c’est dur, je sais que je vais y retrouver
mes compagnons de chambre avec lesquels je partage le même combat: vaincre
ce cancer. Nous parlons beaucoup entre nous, partageons nos expériences; nous
nous motivons et avançons ensemble comme sur un champ de bataille. De plus,
nous avons à notre disposition une vraie salle de détente avec canapé, écran plat,
jeux, livres, baby-foot… Un grand merci au passage à l’architecte qui a conçu béné-
volement cet espace, il est génial!
Avoir une unité pour adolescents à l’hôpital est plus que nécessaire! Il y a une vie
à l’hôpital!
Jean-Baptiste, 16 ans, juin 2012.