C ancer de la prostate
Cancer de la prostate
389
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 7 - décembre 2006
Cancer de la prostate
Prostate cancer
#P. Beuzeboc*
P
armi les principaux événements qui ont marqué 2006, il
faut relever :
- les modifications des critères de progression biologique de
l’ASTRO avec les nouvelles recommandations de la conférence
de consensus RTOG-ASTRO de Phoenix 2005 ;
- les bénéfices en survie globale limités actuellement, dans
l’étude EPC (bicalutamide adjuvant), aux seuls patients ayant
une tumeur localement avancée et traités par radiothérapie ;
- les premières données à long terme d’une étude randomisée
chez des patients en récidive comparant un traitement hormonal
intermittent à un traitement continu, et, en phase d’hormono-
résistance après une première ligne de chimiothérapie par
docétaxel, lintérêt potentiel de sa reprise chez les bons répon-
deurs initiaux, ainsi que l’émergence du satraplatine (étude
SPARC).
BIOLOGIE
Les hommes avec des taux bas de sélénium sont-ils à risque ?
Les résultats d’une méta-analyse (1) de 20 études épidémiolo-
giques sélectionnées semblent indiquer une relation inverse
entre les taux de sélénium et le risque de cancer de la prostate,
mais cela nécessite la poursuite des enquêtes.
Forte expression du gène ETZ2
Ce gène, qui fait partie du groupe Polycomb de gènes impliqué
dans la régulation du cycle cellulaire, est corrélé à une augmen-
tation de la prolifération des tumeurs de la prostate, tout comme
dans les tumeurs du sein, de l’endomètre et des mélanomes, ainsi
que l’a montré une étude réalisée sur 700 tumeurs (2).
Cellules souches de cancer de la prostate
Des données récentes, bien qu’elles soient toujours controver-
sées, ont mis en exergue le rôle et la contribution potentielle de
cellules souches de la prostate dans l’initiation et la progression
tumorale. Ces cellules pourraient néanmoins représenter une
cible thérapeutique cruciale, raison pour laquelle une meilleure
connaissance de leur biologie paraît essentielle (3).
Rôle de la famille HER dans les cancers hormonorésistants
Létude écossaise rapportée par J. Edwards et al. (4), analysant
en immunohistochimie (IHC) les expressions d’HER1-HER4,
d’EGFRvIII et d’AKT phosphorylée à la fois dans des cancers
hormonosensibles et hormonorésistants, a montré dans les
cancers hormonosensibles qu’une forte expression d’HER2
était associée de façon très surprenante à une augmentation du
temps jusqu’à progression biochimique (p = 0,0003 ; convertie en
amélioration de la survie, p = 0,0021) de même que l’expression
d’HER4 (p = 0,042), alors que, à l’inverse, celle d’EGFRvIII était
associée à une diminution du temps jusqu’à rechute biologique
(p = 0,015) et que l’augmentation de lexpression d’AKT était
associée à une réduction de la survie (p = 0,0098). Dans les
cancers hormonorésistants, en revanche, l’expression d’HER2
en analyse multivariée était corrélée à une diminution du temps
jusqu’au décès, à partir de l’échappement biologique (p = 0,039)
ainsi que l’expression nucléaire d’EGFRvIII (p = 0,05). Ces résul-
tats laissent supposer que la famille HER a de multiples rôles et
que l’expression des protéines est insuffisante seule pour prédire
la réponse biologique.
Interprétation du taux de Prostate Specic Antigen (PSA)
chez les patients recevant un inhibiteur de la 5α-réductase
L.S. Marks et al. (5) ont revu les effets des inhibiteurs de la
5α-réductase. Les essais cliniques ont montré que le finastéride
et le dutastéride entraînent une diminution du taux de PSA
chez les patients ayant ou non un cancer de la prostate. Pour
compenser cette baisse, la règle de doubler le taux de PSA a été
appliquée dans les essais cliniques et en pratique clinique. Les
auteurs proposent qu’une augmentation de 0,3 ng/ml à partir
du nadir puisse représenter une alternative à cette règle pour
justifier des biopsies (71 % de sensibilité et 60 % de spécificité
avec le dutastéride).
P.C . Wa ls h a fait le point sur les effets à long terme du finasté-
ride sur le PSA dans le Prostate Cancer Prevention Trial (6) et
W.R. Pitts Jr (7) a dirigé son étude sur les effets des inhibiteurs
de la 5α-réductase concernant l’histoire naturelle, la détection
et le grade des cancers de la prostate.
En réduisant la part liée à l’hyperplasie bénigne de la prostate,
le finastéride rend les modifications du taux de PSA plus spéci-
fiques de la présence de cancer. Cet effet pourrait expliquer
l’augmentation de la détection de cancers de haut grade chez
les patients randomisés dans le bras finastéride du Prostate
Cancer Prevention Trial (8).
* Département d’oncologie médicale, institut Curie, Paris.
LK7-1106.indd 389 22/12/06 17:24:13
C ancer de la prostate
Cancer de la prostate
390
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 7 - décembre 2006
Calcul du temps de doublement du PSA : pas aussi facile que
1, 2, 4…
Alors que le temps de doublement (TD) est largement utilisé
pour prédire le pronostic, le temps jusqu’à progression et la
mortalité spécifique, il est essentiel que les cliniciens sachent
comment le calculer. T.J. Daskivich (9) a présenté une revue
critique des différentes méthodes de calcul rapportées dans
la littérature, montrant quelles ne sont pas interchangeables
et qu’elles peuvent conduire à des variations importantes de
résultats. Dans les essais thérapeutiques, dans lesquels le TD
peut servir de critère de sélection des patients, on utilise des
logiciels permettant son calcul automatique à partir d’un
minimum requis de trois dosages.
PET SCAN
Létude de A. Hacker (10), réalisée par comparaison
avec les données d’un curage extensif
Elle a révélé une très mauvaise détection des métastases
ganglionnaires par PET scan à la fluorocholine (18F).
Une étude italienne (11), s’appuyant sur l’utilisation
de PET scan à la choline 11C
Elle a retrouvé une sensibilité importante (83 %) pour la mise
en évidence de nodules intraprostatiques de plus de 5 mm. En
revanche, sa sensibilité est faible comparativement à celle de l’IRM
pour l’extension extraprostatique (22 % versus 63 %, p < 0,001).
FACTEURS DE RISQUE, PRÉVENTION
Sexualité, maladies sexuellement transmissibles, prostatites
et risque de cancer de la prostate chez les Noirs
Les cancers de la prostate chez les Noirs américains se caracté-
risent par une fréquence plus élevée, un stade plus évolué à la
présentation et un pronostic plus sombre en termes de survie
spécifique. Certaines études ont suggéré un lien avec une inflam-
mation chronique de la prostate. A.V. Sarma et al. (12) ont réalisé
une enquête cas/témoins (129 patients/703 contrôles) montrant
que des antécédents de gonococcie et de prostatite augmen-
taient respectivement le risque de 1,78 (IC95 : 1,13-2,79) et de
4,93 (IC95 : 2,79-8,74) de même que le nombre de partenaires
sexuels de 2,8, (IC
95
: 1,29-6,09, pour plus de 25 partenaires par
rapport à ceux avec moins de 5).
Essai de prévention par le torémifène chez les patients avec
une néoplasie intraépithéliale
Price et al. (13) ont rapporté avec le torémifène une diminution
de l’incidence du cancer de la prostate dans une étude randomisée
versus placebo ayant inclus 514 patients (mais 447 seulement
évaluables) porteurs d’une néoplasie intraépithéliale, avec de
nouvelles biopsies à 6 mois et à un an. L’incidence de cancer à
un an a été diminuée de 48,2 % avec le torémifène (20 mg/j) par
rapport au placebo (9,1 % versus 17,4 %, p < 0,05).
Prévalence, traitement et pronostic des formes familiales
Dans la section Rotterdam de l’étude randomisée de dépistage
ERSPC, si les hommes de 55 à 75 ans ayant un père ou un frère
atteint présentent plus de risques de développer un cancer de la
prostate, la présentation clinique, les modalités thérapeutiques
et le pronostic évalué sur la progression biologique ne sont pas
différents de ceux de la population des cas sporadiques (14).
PROSTATECTOMIE
Tout savoir sur la prostatectomie radicale par laparoscopie
R. Tooher et al. (15) ont publié une revue générale systématique
des études comparatives. Sur la totalité des 30 études retrou-
vées, aucune nétait randomisée, 21 comparaient laparoscopie
et chirurgie ouverte (2301 et 1757 patients respectivement),
et 9 analysaient différentes approches laparoscopiques. Même
si les résultats semblent comparables, notamment en matière
de taux de marges positives et de survie sans récidive, les taux
d’impuissance et de continence sont mal rapportés. Les auteurs
ont conclu qu’il serait souhaitable que des études randomisées
soient réalisées pour réellement comparer les données en termes
d’efficacité et de morbidité.
Délai de la prostatectomie radicale et risque de progression
biologique dans les cancers à bas risque
Une augmentation du risque n’apparaît entre les biopsies et la
prostatectomie que pour un délai supérieur à 180 jours dans
l’étude réalisée au Johns Hopkins Hospital sur 895 patients à
bas risque (16).
Taux de récidive biologique en cas de marges positives
Dans la série de M.A. Simon et al. (17) à la University of Miami
School of Medicine, sur 936 patients analysés ayant un suivi
médian de 45 mois, 350 (37 %) présentaient des marges positives,
mais seuls 108 (11,5 %) ont rechuté. Le taux de récidives en cas
de marges positives était de 19 % (67/350) versus 7 % (41/586)
en cas de marges négatives.
Détection de micrométastases ganglionnaires (en IHC)
Cette détection augmente le risque de récidive (RR = 2,27) et
de décès (RR = 2,07) dans les tumeurs pT3 selon V. Paragliarulo
et al. (18). La présence de ces métastases “occultes” s’est révélée
être un facteur indépendant de récidive et de décès en analyse
multivariée dans cette étude californienne de 180 patients N0,
dont 13,3 % (n = 24) présentaient des micrométastases.
Absence d’impact des formes héréditaires et familiales
sur la survie spécifique après prostatectomie radicale
rétropubienne
S.A. Siddiqui et al. (19) ont trouvé, dans une série de la Mayo
Clinic de 3560 patients prostatectomisés entre 1987 et 1997,
865 formes familiales et 133 formes héréditaires. Les formes
familiales étaient définies par la présence d’au moins un cas
familial du premier degré, et les formes héréditaires par trois
LK7-1106.indd 390 22/12/06 17:24:16
C ancer de la prostate
Cancer de la prostate
391
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 7 - décembre 2006
cas dans la famille proche, un cas dans les 3 générations, ou
2 hommes de moins de 55 ans. Les survies sans progression et
spécifiques à 10 ans étaient équivalentes ; seuls les taux préopé-
ratoires de PSA étaient plus élevés dans les formes héréditaires
par rapport aux deux autres groupes (p = 0,04).
Impact de l’âge sur le pronostic après prostatectomie
radicale rétropubienne
S.A. Siddiqui et al. (20) ont également analysé l’impact de l’âge
chez 5509 patients classés par tranches d’âge de 5 ans (< 55 ans,
55-59, 60-64, 65-69, 70 ans et plus). En dépit de taux préopé-
ratoires de PSA, de grades et de stades moins élevés chez les
patients jeunes, les survies sans progression cliniques ou biolo-
giques se sont révélées identiques dans les différents groupes
(seule la survie globale était diminuée pour les âges avancés
évidemment). Il paraît donc important d’avoir une attitude
thérapeutique agressive chez les sujets les plus jeunes.
Tumeurs indiérenciées traitées par prostatectomie. Résul-
tats à long terme et incidence du downstaging histologique
Dans la série de 5 662 prostatectomies réalisées sur une période
de vingt ans au Memorial Sloan Kettering Cancer Center
(MSKCC) de New York, 238 avaient sur les biopsies un score
de Gleason 8 à 10. Trente-neuf pour cent des patients étaient
en rémission à 10 ans, parmi lesquels 45 % présentaient sur la
pièce de prostatectomie un score de Gleason inférieur ou égal
à 7. Les facteurs de downstaging histologique était le stade T1c
et le score de Gleason 8 (21).
Database CaPSURE. Diminution de la proportion des patients
ayant un curage ganglionnaire avec la prostatectomie pour
les formes à bon pronostic et à pronostic intermédiaire
Cette enquête publiée par J. Kawakami et al. (22) a montré
qu’entre 1992 et 2004, le pourcentage des patients ayant un
curage a diminué de 94 % à 80 % (sauf pour les formes classées
à haut risque, où il se maintient au-delà de 90 %). Le nombre
moyen de ganglions prélevés était de 5,7 (nombre médian = 5),
le taux d’envahissement ganglionnaire de 0,87 %, 2 % et 7,1 % pour
les formes à bas risque, à risque intermédiaire et à haut risque.
Reprise d’activité professionnelle après prostatectomie
radicale par voie rétropubienne
Dans une étude réalisée à New York sur 537 patients (23), 50 %
d’entre eux reprenaient une activité professionnelle à mi-temps,
à plein temps et sans restriction dans les 14 jours, les 21 jours
et les 30 jours suivant le retour à domicile. Mais ce sont des
Nord-Américains !
RADIOTHÉRAPIE EXTERNE
Radiothérapie externe dans les cancers localisés
Un cas clinique du New England Journal of Medicine (24) permet
de refaire le point sur les indications, les techniques, les effets
indésirables et les résultats d’une façon très didactique.
Revue systématique de l’eet de la dose de radiothérapie
3D sur le contrôle tumoral et la morbidité
J.J. Van Tol-Geerdink et al. (25) ont réalisé une revue systéma-
tique de la littérature de 1990 à 2003, soit 28 études ayant inclus
plus de 3000 patients. Entre des équivalents doses de 70 Gy et
80 Gy, différents modèles ont estimé une augmentation de la
survie à 5 ans de 10 à 11 %, de la survie sans récidive biologique
à 5 ans pour les patients à bas risque de 5 à 7 %, des taux de
complications gastro-intestinales aiguës et tardives de 12 à 16 %,
de complications gastro-urologiques tardives de 8 à 10 % et de
dysfonctions érectiles de 19 à 24 %.
Résultats à long terme d’une radiothérapie à fortes doses
avec modulation d’intensité
M.J. Zelefsky et al. (26) ont rapporté les résultats et les toxicités à
long terme d’une série de 561 patients présentant un cancer de
la prostate localisé, et traités avec une dose de radiothérapie de
81 Gy. Avec un suivi médian de 7 ans (5-9 ans), selon les critères
de l’ASTRO, le taux de survie sans rechute actuariel à 8 ans des
patients des groupes à bon pronostic, à pronostic intermédiaire
et à pronostic défavorable étaient respectivement de 85 %, 76 %
et 72 % (p < 0,025), et de 89 %, 78 % et 67 % selon la définition de
Houston. Le taux de rectite de grade 2 (rectorragies) était de 2 %,
et seulement de 0,1 % pour celles de grade 3, celui des cystites
de grades 2 et 3 atteignant respectivement 9 % et 3 %. Parmi les
patients sexuellement actifs avant le traitement, des troubles de
l’érection ont été présents dans 49 % des cas. Les survies globales
spécifiques des groupes à bon pronostic, à pronostic intermédiaire
et à mauvais pronostic étaient de 100 %, 96 % et 85 %.
Modications des critères de progression biologique de
l’ASTRO. Recommandations de la conférence de consensus
RTOG-ASTRO de Phoenix 2005 (27)
Depuis le consensus de 1996, l’échec biologique était défini par
l’augmentation de trois dosages de PSA successifs après le nadir,
avec la date fixée au milieu de celle du nadir et celle de la première
augmentation. Mais cette définition s’est montrée peu spécifique et
peu sensible. Elle ne tenait pas compte des possibles bouncings et
était inadaptée pour la curiethérapie ou en cas d’hormonothérapie
adjuvante. Son calcul a posteriori était source de biais dans l’estima-
tion des courbes de Kaplan-Meier de survie sans événement. Cette
seconde conférence de consensus recommande une augmentation
de 2 ng ou plus au-dessus du nadir comme la nouvelle définition
de progression biologique après radiothérapie, qu’elle soit associée
ou non à une hormonothérapie. Le but est de définir l’échec dans
le cadre d’une population et non dans le cadre d’une approche
individuelle afin de permettre de calculer automatiquement la
survie sans progression pour une cohorte de patients et de mieux
comparer les résultats des différentes techniques de traitement.
Bénéces à long terme de la radiothérapie adjuvante pour
les patients avec marges positives et PSA indétectable après
prostatectomie
Des études randomisées, notamment l’étude 22911 de l’EORTC,
ont montré lintérêt d’une radiothérapie postprostatectomie
LK7-1106.indd 391 22/12/06 17:24:20
C ancer de la prostate
Cancer de la prostate
392
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 7 - décembre 2006
chez les patients à risque élevé de récidive, mais les reculs sont
encore limités. Les données de B.S. Teh (28), même si elles sont
non contrôlées et concernent un effectif limité, suggèrent que le
bénéfice se maintient à long terme. Les rémissions biologiques
étaient de 90,9 % à 5 ans et 10 ans pour les 44 patients traités
par radiothérapie (60 Gy sur la loge prostatique sans irradiation
des aires ganglionnaires) versus respectivement 66,4 % et 54,5 %
(p = 0,0012) pour les 189 patients du groupe témoin.
Radiothérapie de rattrapage lors de la progression biologique.
Création d’un système de score pronostique
Léquipe de la Mayo Clinic (29) a développé et testé, à partir d’une
étude multivariée de 368 patients traités par radiothérapie pour
une récidive biologique isolée, un système de score pronostique
fondé sur le stade pathologique ≤ pT3a et pT3b (atteinte des vési-
cules séminales, p = 0,029), le score pathologique de Gleason ≤ 7
ou ≥ 8 (p < 0,001) et le taux de PSA préradiothérapie (p < 0,001).
Ces facteurs étant cotés de 0 à 2 et additionnés, quatre différents
groupes ont été créés, le taux de rémission biologique étant de
69 % pour un score 0, de 53 % pour un score 1, de 26 % pour
un score 3, et de 6 % pour des scores 4-5.
Nomogramme de prédiction du risque de récidive de la radio-
thérapie de rattrapage
La radiothérapie de sauvetage après prostatectomie peut être
curatrice. À partir des données de 1540 patients traités entre
1987 et 2005 (suivi médian de 53 mois) par une radiothérapie de
sauvetage pour progression biologique (PSA > 0,2 ng/ml) après
prostatectomie, sans hormonothérapie associée, A.J. Stephenson
et al. (30) ont validé un nomogramme de prédiction de récidive
(index de concordance = 0,68). Une rechute est survenue dans
866 cas ; les probabilités de non-progression à 5 et 10 ans étaient
respectivement de 38 % (IC95 : 35-40) et de 19 % (IC95 : 15-23).
Les variables significatives du nomogramme étaient : le taux de
PSA préopératoire (p < 0,001), le score de Gleason sur la pièce
de prostatectomie (p < 0,001), une hormonothérapie néoad-
juvante (p < 0,001), des marges négatives (p < 0,04), le taux de
PSA lors de la rechute (p < 0,01), le TD du PSA (p = 0,029) et
l’atteinte ganglionnaire (p = 0,034). Comparé aux autres modèles
rapportés (Freedland, JAMA 2005 ; Pound, JAMA 1999), il offre
les données prédictives les plus robustes. Cest le premier nomo-
gramme développé pour une thérapeutique de rattrapage.
Prostatectomie de rattrapage. Qualité de vie et contrôle à
long terme
K.M. Sanderson et al. (31) ont rapporté l’expérience califor-
nienne de 51 patients traités en 20 ans par prostatectomie de
sauvetage après radiothérapie. À cinq ans, 47 % des patients
étaient non progressifs sans hormonothérapie (100 % des pT2,
35 % des pT3 N0, mais 0 % des pTX N+, p < 0,01). Un taux de
PSA ≤ 5 ng/ml était prédictif d’une tumeur confinée à la prostate
et fortement corrélé à la survie sans progression et à la survie
globale (respectivement p < 0,001 et p < 0,01).
Les auteurs ont conclu qu’une prostatectomie de rattrapage,
à condition d’être réalisée tôt, peut permettre un excellent
contrôle sans nécessité d’hormonothérapie. L’implantation
d’un sphincter artificiel ou d’une prothèse pénienne peut
améliorer la qualité de vie.
Ecacité du tadalal (Cialis
®
) dans le traitement des troubles
érectiles après radiothérapie 3D
Les résultats d’un essai randomisé, en double aveugle versus
placebo, avec cross-over, durant 12 semaines (32) ont été commu-
niqués. On aurait pu s’interroger sur la faisabilité d’une telle étude
et sur l’intérêt des patients à y participer (à moins de penser béné-
ficier gratuitement du produit…). Toujours est-il que ce projet
néerlandais a inclus 60 patients (âge moyen = 69 ans) sur 358 qui
avaient terminé leur radiothérapie depuis au moins un an et qui
avaient été contactés par e-mail… Ils recevaient à discrétion le
tadafénil à la dose de 20 mg ou un placebo, au moins une fois par
semaine et pas plus d’une fois par jour pendant 6 semaines, avec
un cross-over pour les 6 semaines suivantes. Les données collec-
tées utilisant les questionnaires SEP (Sexual Encounter Profile)
et IIEF (International Index of Erectile Function) ont montré une
amélioration de la fonction érectile dans 67 % des cas (20 % pour
le placebo) et des possibilités de pénétration dans 48 % des cas
(9 % avec le placebo) [p < 0,0001] avec une bonne tolérance.
Carcinomes urothéliaux après radiothérapie externe
Les carcinomes urothéliaux survenant après radiothérapie d’un
cancer de la prostate sont souvent de haut grade. La majorité des
patients présente une progression justifiant une cystectomie,
comme l’a confirmé une étude rétrospective californienne (33).
Il faut aussi relever une incidence élevée de tumeurs urothéliales
de type sarcomatoïde.
En 2005, K. Chrouser et al. (34) n’avaient pas retrouvé, dans leur
large étude (1743 patients, 4 cas), d’augmentation évidente du
risque de cancer de la vessie après radiothérapie externe de la
prostate. Néanmoins, D.J. Brenner et E.J. Hall (35) ont critiqué
cette conclusion, arguant de l’absence de puissance statistique
de cette dernière étude pour détecter une augmentation discrète
du risque qui a été montrée dans de grandes études fondées sur
des données de registre (SEER).
CURIETHÉRAPIE
Curiethérapie par implants permanents. Analyse à long terme
de données multi-institutionnelles dans les tumeurs T1 et T2
Afin d’évaluer les résultats à long terme en termes de progres-
sion biologique de la curiethérapie par implants permanents
et d’identifier les facteurs prédictifs de survie sans récidive des
tumeurs T1 et T2, M.J. Zelefsky et al. (36) ont colligé les données
de 2693 patients provenant de 11 institutions (1831 patients, soit
68 %, traités par I-125 avec une dose médiane de 144 Gy ; 862,
soit 32 %, traités par Pd-103 avec une dose médiane de 130 Gy).
Avec un suivi médian de 63 mois, les patients ayant avec l’I-125,
une dose délivrée à 90 % de la prostate (D90) > 130 Gy avaient
une survie sans récidive biologique à 8 ans de 93 %, versus 76 %
pour une D90 inférieure (p < 0,001). Les paramètres pronostiques
LK7-1106.indd 392 22/12/06 17:24:23
C ancer de la prostate
Cancer de la prostate
393
La Lettre du Cancérologue - Vol. XV - n° 7 - décembre 2006
statistiquement significatifs retrouvés en analyse multivariée
étaient le stade (p = 0,0002), le score de Gleason (p < 0,001), le
taux de PSA préthérapeutique (p < 0,001) et l’année de traitement
(p < 0,001). Le type d’isotope ninfluait pas sur les résultats si
l’on tenait compte de la D90. Les survies sans récidive biolo-
gique à 8 ans étaient respectivement de 92 %, 86 %, 79 % et 67 %
pour des nadir de PSA < 0,5, de 0,5-0,99, de 1-2 ou supérieurs à
2 ng/ml (p = 0,001). Les auteurs ont conclu qu’un nadir de PSA
inférieur à 0,5 ng/ml était particulièrement associé à une survie
sans récidive à long terme.
Survie spécique à long terme après curiethérapie
Les données concernant la survie spécifique à long terme
confirment son efficacité. Ainsi, dans la série du Mount Sinai
Hospital (37) totalisant 1561 patients traités entre 1990 et 2004
(634 par curiethérapie seule, 420 par curiethérapie et hormono-
thérapie, 507 par curiethérapie et radiothérapie externe), avec un
recul médian de 3,8 ans, les taux de survie spécifique et globale à
10 ans étaient respectivement de 96 % et 74 %. Le score de Gleason
avait un impact significatif sur la survie avec des taux de survie
spécifique à 10 ans respectivement de 98 %, 91 % et 92 % pour
des scores ≤ 6, 7 et ≥ 8 (p < 0,0001). Pour les patients en rechute
avec un TD ≤ 10 mois, il n’était plus que de 52 %.
Critères d’échec biologique
Parmi les différents critères utilisés dans la série de 2693 patients
T1 T2 du MD Anderson Hospital (38), la définition nadir +
2 ng/ml est apparue comme le critère le plus pertinent pour
définir l’échec biologique (plus que 3 augmentations de PSA).
Pour les patients ayant un suivi prolongé, au moins de 6 ans,
utiliser un taux supérieur à 0,5 ng/ml semble raisonnable.
Qualité de vie après curiethérapie
Une étude italienne (39) a rapporté les données de 147 patients
évalués de façon prospective par un autoquestionnaire validé et
complété avant traitement, au décours du traitement (à un mois)
et à un rythme annuel, se focalisant sur 7 items : le bien-être
physique, l’autonomie physique, le bien-être psychologique, la
vie relationnelle, les fonctions urinaire, rectale et sexuelle. Les
résultats rapportés relèvent surtout une dégradation de la fonc-
tion urinaire après traitement, qui ne revient à l’état antérieur
qu’après 3 ans. Les fonctions rectales et sexuelles sont surtout
altérées au décours de l’implantation.
Facteurs de risque de sténose urétrale après curiethérapie
G.S. Merrick et al. (40) ont étudié les risques de sténose urétrale
dans une série de 1 186 patients T1b-T3 Nx M0 consécutifs
traités par curiethérapie entre 1995 et 2003, avec une radio-
thérapie externe associée dans 52,7 % des cas (n = 625) et une
déprivation hormonale dans 39,2 % des cas (n = 465). Vingt-
neuf patients ont présenté une sténose urétrale secondaire à la
curiethérapie, soit un risque actuariel de 3,6 % à 9 ans, avec un
temps médian de survenue de 2,4 ans. La dose moyenne délivrée
à l’urètre membraneux était significativement supérieure chez
ces patients (p = 0,002). En analyse multivariée, la dose à l’urètre
membraneux et la radiothérapie externe associée représentaient
des facteurs prédictifs de sténose. Les patients ont été traités
par dilatation urétrale ou urétrotomie.
Courbe d’apprentissage et incidence de rétention urinaire
La courbe d’apprentissage diminue l’incidence de rétention
urinaire, comme le montrent les données de M. Keyes (41) sur
805 patients, avec une réduction importante au cours du temps
(de 17 % à 6,3 %).
Combinaison d’une curiethérapie et d’une hormonothéra-
pie courte de rattrapage après radiothérapie externe
Les données rapportées par W.W. Wong et al. (42) sur 17 patients
traités par une hormonothérapie néoadjuvante pour une durée
médiane de 3 mois, puis une implantation de grains d’iode 125
ou de palladium 103 (5 patients ayant également reçu un traite-
ment de leucoprolide d’une durée de 6 mois) ont montré, avec
un suivi médian de 44 mois, un contrôle biochimique à 5 ans
dans 75 % des cas. Un résultat sans doute lié à une “excellente
sélection” des patients… Les toxicités principales ont été les
complications urinaires, de grades 3 et 4 respectivement dans
41 % et 6 % des cas.
Seconds cancers après curiethérapie : incidence des cancers
de la vessie et du côlon
Les données sont encore très limitées, mais l’incidence ne
semble pas significativement différente comparée à la radio-
thérapie externe. Il faut noter que les résultats rapportés par
S.L. Liaw (43) pourraient suggérer une augmentation de l’inci-
dence du cancer de la vessie (RR = 2,34 ; IC95 : 0,96-3,72).
HORMONOTHÉRAPIE
Hormonothérapie adjuvante. Essai EPC (Early Prostate Can-
cer Program) de bicalutamide 150 mg
Résultats de létude nord-américaine avec un suivi médian
de 7,7 ans (44)
Dans l’étude 23 nord-américaine (États-Unis et Canada), ayant
inclus 3292 patients T1b-T4, N0-Nx, M0 traités par chirurgie
ou radiothérapie, il existe peu d’événements cliniques, avec des
taux de progression objective de 15,4 % et 15,3 % et de mortalité
de 12,9 % et 12,3 % respectivement dans les bras bicalutamide et
standard (les deux critères principaux de jugement). En revanche,
le bicalutamide augmente significativement le temps jusqu‘à
progression biologique (HR = 0,8 ; IC95 : 0,72-0,90 ; p < 0,001).
Les auteurs ont conclu que ces données suggèrent qu’une hormo-
nothérapie adjuvante précoce par bicalutamide nentraîne pas
de bénéfice chez les patients à bas risque.
Seuls les patients présentant un cancer localement avancé traité
par radiothérapie ont, avec le bicalutamide et un suivi médian
de 7,2 ans, une amélioration de la survie sans progression, avec
une réduction du risque de 44 % par rapport à la radiothérapie
seule (HR = 0,56 ; IC95 : 0,30-0,55 ; p < 0,001), mais également
de la survie globale, avec une réduction du risque de décès
LK7-1106.indd 393 22/12/06 17:24:27
1 / 10 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !