En 2002, une conférence du NCI a redéfini les critères de
Bethesda (tableau VI) (13). Le but de cette révision est de sim-
plifier les critères afin de les rendre plus facilement applicables
et de les élargir encore, afin de pouvoir déceler, au niveau de la
population générale, un maximum de cas. Cette nouvelle défini-
tion tient compte également de l’éventail de tous les cancers qui
ont été rapportés dans le syndrome HNPCC. Cet élargissement
des critères va forcément conduire à tester davantage de patients.
Leur sensibilité et leur spécificité n’ont pas encore été étudiées,
mais on peut s’attendre à une excellente sensibilité. Le manque
de travaux concernant ces critères explique pourquoi ils n’ont pas
été adoptés dans l’expertise récente conduite par l’INSERM (3).
BRAF : UN COMPLÉMENT À L’ANALYSE
DES MICROSATELLITES ?
Après identification d’une instabilité des microsatellites (MSI-H)
dans la tumeur d’un patient, un screening des gènes MMR est
réalisé. Cependant, en présence d’une extinction à l’immuno-his-
tochimie du gène MLH1, dans près de 80 % des cas, l’instabilité
des microsatellites n’est pas due à une mutation germinale de
MLH1, mais à une hyperméthylation du promoteur de MLH1.
Ces cas seront donc analysés inutilement à la recherche d’une
mutation germinale de MLH1. Un nouveau marqueur a été iden-
tifié récemment et va probablement permettre de résoudre ce pro-
blème de faux positifs (tumeur MSI-H, patient MMR-).
BRAF est un gène qui code pour une protéine kinase dans la voie
de signalisation RAS/RAF/MAPK. Les cancers colo-rectaux
MSI-H d’apparence sporadique, dont l’instabilité des microsa-
tellites est probablement due à une hyperméthylation de MLH1,
présentent fréquemment une mutation V600E sur le gène BRAF.
Une équipe internationale a recherché cette mutation dans le
matériel tumoral de 206 cas de cancers colo-rectaux sporadiques
MSI-H et dans 111 cas de cancers colo-rectaux de patients por-
teurs d’une mutation de MLH1 ou MSH2 (14). Pour les cas spo-
radiques, la mutation V600E du gène BRAF a été identifiée dans
40 % des cas. En revanche, elle n’a jamais été isolée dans les
111 cas de cancers colo-rectaux de patients porteurs d’une muta-
tion de MLH1 ou MSH2. Une analyse de BRAF pourrait donc
permettre d’identifier 40 % des cas MSI-H chez qui un screening
des gènes MMR pourrait être évité.
CONCLUSION
Le syndrome HNPCC reste une pathologie largement sous-
diagnostiquée. L’adoption en pratique clinique des critères de
Bethesda révisés devrait permettre d’identifier un nombre accru
de porteurs d’une mutation d’un gène MMR. Il faudra probable-
ment attendre la publication d’études validant ces nouveaux cri-
tères avant de les voir définitivement adoptés par les différentes
sociétés d’oncogénétique. En complément de la recherche de
l’instabilité des microsatellites, l’analyse de la mutation V600E
du gène BRAF dans le matériel tumoral permettra de mieux sélec-
tionner les patients chez qui une recherche de mutation d’un gène
MMR s’avère nécessaire.
■
R
ÉFÉRENCES
B
IBLIOGRAPHIQUES
1. De la Chapelle A. Inherited human diseases: victories, challenges, disap-
pointments. Am J Hum Genet 2003;72:236-40.
2. Jarvinen HJ, Aarnio M, Mustonen H et al. Controlled 15-year trial on
screening for colorectal cancer in families with hereditary nonpolyposis colo-
rectal cancer. Gastroenterology 2000;118:829-34.
3. Olschwang S, Bonaiti C, Feingold J et al. Identification and management of
HNPCC syndrome (hereditary non polyposis colon cancer), hereditary predis-
position to colorectal and endometrial adenocarcinomas. Bull Cancer 2004;
91:303-15.
4. Vasen HF, Mecklin JP, Khan PM et al. The International Collaborative
Group on Hereditary Non-Polyposis Colorectal Cancer (ICG-HNPCC). Dis
Colon Rectum 1991;34:424-5.
5. Watson P, Lynch HT. Extracolonic cancer in hereditary nonpolyposis colo-
rectal cancer. Cancer 1993;71:677-85.
Tableau VI.
Critères de Bethesda révisés.
✓ Patient avec un cancer colo-rectal avant l’âge de 50 ans
✓ Patient avec deux cancers, synchrones ou métachrones, appartenant
au spectre HNPCC élargi*, indépendamment de l’âge
✓ Patient présentant un cancer colo-rectal avant l’âge de 60 ans avec
une histologie évoquant la présence d’une instabilité des
microsatellites**
✓ Patient présentant un cancer colo-rectal avec au moins un apparenté
du 1er degré présentant un cancer du spectre HNPCC élargi* ; un de
ces cancers diagnostiqué avant l’âge de 50 ans
✓ Patient présentant un cancer colo-rectal avec au moins deux
apparentés du 1er ou du 2edegré présentant un cancer du spectre
HNPCC élargi*, sans limitation d’âge
* Cancer colo-rectal, de l’estomac, du pancréas, de l’intestin grêle, des voies
hépatobiliaires, de l’endomètre, de l’ovaire, des bassinets rénaux ou des uretères,
du système nerveux central (glioblastome dans le syndrome de Turcot), adénome
ou carcinome des glandes sébacées (dans le syndrome de Muir-Torre).
** Tumeur avec soit : une infiltration lymphocytaire, une réaction inflammatoire
de type Crohn, une différenciation mucineuse ou en cellules de type “bague à
chaton”, un aspect de croissance médullaire.
Adapté de Umar et al. (13).
Informations disponibles sur Internet
Numéros d’accès et liens contenus dans cet article :
HNPCC France, www.hnpcc.france.free.fr/
Online Mendelian Inheritance in Man (OMIM), www.ncbi.nlm.nih.gov/
entrez/query.fcgi?db=OMIM
– BRAF : (#164757 V-RAF MURINE SARCOMA VIRAL
ONCOGENE HOMOLOG B1; BRAF)
– HNPCC : (#114500 COLORECTAL CANCER, HEREDITARY
NONPOLYPOSIS; HNPCC)
– MLH1 : (#120436 COLON CANCER, FAMILIAL
NONPOLYPOSIS, TYPE 2, MLH1)
– MSH2 : (#120435 COLON CANCER, FAMILIAL
NONPOLYPOSIS, TYPE 1, MSH2)
– MSH6 : (#600678 COLORECTAL CANCER, HEREDITARY
NONPOLYPOSIS, TYPE 5, MSH6)
LE GÈNE DU MOIS
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 2 - mars-avril 2005