256 Volume 26, Issue 3, summer 2016 • CanadIan onCology nursIng Journal
reVue CanadIenne de soIns InfIrmIers en onCologIe
FEATURES/RUbRiqUES
cHrONique sur le leADersHiP
Erreurs de médication et virage
vers une culture de grande
abilité et de sécurité des patients
par Janice Chobanuk
Les erreurs de médication concer-
nant les antinéoplasiques peuvent
être désastreuses pour les patients
en raison de la grande toxicité de ces
médicaments et des limites de leur
index thérapeutique. Les patients can-
céreux ont souvent besoin de nom-
breuses thérapies complexes (et
souvent toxiques), et leur traitement
nécessite donc une coordination atten-
tive des soins. À l’issue d’une étude de
6607ordonnances d’antinéoplasiques,
les chercheurs ont constaté un taux
d’erreur de 5,2%(449). Il s’agissait sur-
tout d’erreurs de prescription (91 %),
suivies d’erreurs pharmaceu-
tiques(8%) et d’administration(1%).
D’après les chercheurs, environ 13,4%
de ces erreurs auraient causé du tort
au patient, 2,6 % auraient entraîné
un dommage permanent et 2,6 %
auraient eu des conséquences sur le
pronostic du patient cancéreux. Au
chapitre de la chimiothérapie, Gandhi
et collègues (2005) ont observé un
taux d’erreur de 3% sur 3200ordon-
nances de chimiothérapie pour adultes
ou enfants. Dans une étude dont les
sujets étaient des enfants ou des adul-
tes atteints du cancer, les auteurs ont
constaté un taux d’erreurs liées à la chi-
miothérapie allant de 0,3 à 5,8erreurs
pour 100 consultations (Walsh et al.,
2009).
Bon nombre de directeurs des soins
inrmiers de services d’oncologie recon-
naissent l’importance de traiter la chi-
miothérapie comme une activité à
haut risque et militent pour un virage
vers une culture de grande abilité et
de sécurité des patients, souhaitant
ainsi améliorer la sécurité des patients
dans les services d’oncologie (Ranchon
et al., 2012). Ce changement de para-
digme doit être soutenu par un leader-
ship fort, s’appuyer sur des principes de
abilité élevée, privilégier les soins axés
sur le patient et miser sur des projets
d’amélioration constante de la qualité.
Les directeurs doivent donc se pencher
de manière stratégique sur des enjeux
comme les faiblesses inhérentes aux
façons de faire des services de cancérol-
ogie, la conception clinique des édices,
l’eet des programmes informatiques,
la dotation en personnel, l’appareil-
lage et d’autres facteurs qui inuent
sur les conditions de travail dans ce
milieu. Pour mettre l’accent sur la sécu-
rité, les chefs de le en oncologie dev-
ront faire plus que simplement réagir
aux signalements d’erreurs; ils devront
examiner chaque erreur et les compor-
tements individuels l’ayant causée an
d’aboutir à une démarche préventive
et proactive à l’échelle du système. Les
directeurs d’établissements de soins de
santé commencent un peu partout à
tenir compte de l’expertise et des leçons
des secteurs à risque élevé qui mainti-
ennent un faible taux d’échec comme
l’aviation ou les centrales nucléaires,
dans leur stratégie en matière de sécu-
rité(Ranchon etal., 2012). Ces milieux
ont en eet mis au point une gamme
d’outils pour évaluer les facteurs organi-
sationnels qui ont le potentiel de mener
à une erreur ou à un échec. Ces out-
ils s’appliquent à des enjeux comme la
supervision, la planication, la commu-
nication, la formation et l’entretien. Les
chefs de le peuvent ainsi adopter une
culture plus proactive en matière de
sécurité des patients et suivre en per-
manence les tendances en matière de la
sécurité dans leur organisation au lieu
de se contenter d’analyser après coup
les événements problématiques.
La prise en charge de la chimiothéra-
pie est une procédure dicile et dan-
gereuse qui doit être considérée comme
une activité à haut risque par les direc-
teurs des services d’oncologie. Une
erreur peut se produire à tout moment
dans le processus, que ce soit à l’étape
de prescription, de la préparation, de
la distribution ou de l’administration
des médicaments. Le nombre croissant
d’agents chimiothérapeutiques admin-
istrés par voie orale ajoute un nouveau
dé aux services d’oncologie. Shah et
collègues (2016) ont relevé, au cours
d’une période de sept mois, 22 inter-
ventions(35%) ayant été requises pour
prévenir des erreurs potentielles concer-
nant 63 prescriptions de médicaments
administrés par voie orale au cours
d’une période de sept mois. La plupart
de ces erreurs se rapportaient au rajust-
ement de la posologie, à l’identication
de médicaments sujets à des interac-
tions, ainsi qu’à d’autres suivis de la
médication.
Les directeurs des soins inrmiers
des services d’oncologie sont bien placés
pour piloter le virage de culture vers la
sécurité des patients et une plus grande
abilité. Ce changement fait intervenir
des tactiques reposant notamment sur
l’éducation, les comités sur la sécurité,
les protocoles et procédures de sécu-
rité, le recours à la technologie, une
atmosphère non punitive et une aspi-
ration à une absence totale d’erreurs
Au suJet De l’Auteure
Janice Chobanuk, B.Sc.inf., M.Sc.
inf., ICSP(C), CSIO(C), Directrice,
Ambulatory Care and Systemic
Therapy, Community Oncology,
Alberta Health Services,
CancerControl Alberta
Edmonton, Alberta